Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société anonyme C... Holding a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, à concurrence de la somme de 999 974 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2014 et 2015.
Par un jugement n° 1910336 du 11 mai 2023, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 18 juillet, 8 novembre et 15 décembre 2023, la société C... Holding, représentée par Me Sebbag, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de prononcer la décharge, à hauteur de la somme de 999 974 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des retenues à la source mises à sa charge au titre des années 2014 et 2015 ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- les Iles Vierges Britanniques n'étaient pas un état non coopératif à la date d'émission de l'emprunt obligataire souscrit par la société Tergale Holding, si bien que la charge de la preuve issue du dernier alinéa de l'article 238 A ne lui est pas applicable ; en outre, la charge de la preuve incombe à l'administration en vertu de l'article L. 192 du livre des procédures fiscales dès lors que la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires a rendu un avis qui lui est favorable ;
- le taux d'intérêt de l'emprunt obligatoire souscrit par la société Tergale Holding n'était pas anormal ; l'objet de l'emprunt obligataire était de financer sa filiale industrielle " Les Fromentiers de France " ; le taux déductible des comptes courants d'associés défini au 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts retenu par l'administration fiscale dans sa proposition de rectification ne lui est pas applicable dès lors que la société C... est indépendante de la société Tergale qui a souscrit l'emprunt obligataire ; l'administration ne peut lui opposer au contentieux le " taux moyen de rendement des obligations/TMO " qui n'est pas un taux d'intérêt mais un taux de rendement rémunérant la performance des obligations ;
- dès lors que M. A... est un résident belge, l'article 18 de la convention franco-belge trouve à s'appliquer et les revenus réputés distribués en droit interne français en vertu du c de l'article 111 du code général des impôts, ne peuvent donner lieu à l'application de la retenue à la source prévue par l'article 119 bis du code général des impôts ;
- de manière subsidiaire, à supposer qu'il faille considérer que M. A... est un résident italien, il faudrait alors appliquer l'article 10 paragraphe 9 de la convention franco-italienne, lequel prévoit un taux de retenue à la source de 15 % ;
- le tribunal a omis de statuer sur sa demande de décharge de la pénalité de 80 % infligée sur le fondement du c) de l'article 1729 du code général des impôts ;
- la pénalité pour manœuvres frauduleuses de 80 % n'est pas justifiée ; la comptabilisation d'un prix de cession net dans la comptabilité sociale est conforme à ce que prévoit la doctrine et jurisprudence, notamment la décision du 12 octobre 2018 n° 419221 ; à supposer qu'elle ait commis une erreur comptable, il ne s'agit pas d'une manœuvre délibérée.
Par deux mémoires en défense enregistrés les 10 octobre et 1er décembre 2023, le ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique conclut au rejet de la requête en soutenant qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Par lettre du 14 mars 2025, la Cour a informé les parties, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de ce qu'il appartient au juge, alors même que l'administration ne le saisirait pas d'une demande en ce sens, de rechercher si les éléments qui étaient invoqués par l'administration pour justifier des pénalités pour manœuvres frauduleuses permettent, à défaut d'établir ces dernières, de caractériser la mauvaise foi du contribuable et de substituer, au besoin d'office, à la majoration de 80 % appliquée par l'administration la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention signée le 10 mars 1964 entre la France et la Belgique, tendant à éviter les doubles impositions et à établir les règles d'assistance administrative et juridique réciproque en matière d'impôts sur les revenus ;
- la convention signée le 5 octobre 1989 entre la France et l'Italie en vue d'éviter les doubles impositions en matière d'impôts sur le revenu et sur la fortune et de prévenir l'évasion et la fraude fiscales ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 3 avril 2025 :
- le rapport de M. Dubois ;
- les conclusions de Mme de Phily, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Lopez, représentant la société C... Holding.
Une note en délibéré a été enregistrée le 3 avril 2025, présentée pour la société C... Holding.
Considérant ce qui suit :
1. La société C... Holding, qui a pour activité la gestion de participations, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015, étendue en matière de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) jusqu'au 31 décembre 2016. Par une proposition de rectification, émise selon la procédure contradictoire de l'article L. 55 du livre des procédures fiscales, du 23 novembre 2017, l'administration fiscale lui a notifié notamment des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source. Les rectifications ont été mises en recouvrement le 15 janvier 2019 pour un montant de 1 032 134 euros, après qu'ont été rejetés le recours hiérarchique de la société ainsi que le recours formé devant l'interlocuteur départemental. La réclamation de la société a été rejetée par décision du 27 septembre 2019. La société relève appel du jugement n° 1910336 du 11 mai 2023 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande de décharge, à hauteur de la somme de 999 974 euros, des impositions supplémentaires ainsi mises à sa charge.
Sur la régularité du jugement :
2. Il ressort des écritures de première instance de la société C... Holding que celle-ci avait sollicité devant le tribunal administratif de Melun la décharge de la pénalité pour manœuvres frauduleuses qui lui a été infligée sur le fondement de l'article 1729 du code général des impôts au motif qu'aucune manœuvre frauduleuse n'était établie. Si le tribunal a visé ces conclusions et ce moyen, il a toutefois omis d'y répondre. La société requérante est ainsi fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'un défaut de réponse à un moyen qui n'est pas inopérant en ce qui concerne la demande de décharge des pénalités pour manœuvres frauduleuses et doit, pour ce motif, être annulé dans cette mesure.
3. Par suite, il y a lieu pour la Cour d'évoquer dans cette seule mesure l'affaire, et de se prononcer, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, sur le reste du litige qui lui est soumis.
Sur le taux d'intérêt rémunérant l'emprunt obligataire émis par la société C... Holding :
4. Aux termes de l'article 238 A du code général des impôts, applicable au présent litige : " Les intérêts, arrérages et autres produits des obligations, créances, dépôts et cautionnements, les redevances de cession ou concession de licences d'exploitation, de brevets d'invention, de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication et autres droits analogues ou les rémunérations de services, payés ou dus par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat étranger ou un territoire situé hors de France et y sont soumises à un régime fiscal privilégié, ne sont admis comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt que si le débiteur apporte la preuve que les dépenses correspondent à des opérations réelles et qu'elles ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré. / Pour l'application du premier alinéa, les personnes sont regardées comme soumises à un régime fiscal privilégié dans l'Etat ou le territoire considéré si elles n'y sont pas imposables ou si elles y sont assujetties à des impôts sur les bénéfices ou les revenus dont le montant est inférieur de plus de la moitié à celui de l'impôt sur les bénéfices ou sur les revenus dont elles auraient été redevables dans les conditions de droit commun en France, si elles y avaient été domiciliées ou établies. / Toutefois, les intérêts, arrérages et autres produits des obligations, créances, dépôts et cautionnements, à l'exception de ceux dus au titre d'emprunts conclus avant le 1er mars 2010 ou conclus à compter de cette date mais assimilables à ces derniers, ainsi que les redevances de cession ou concession de licences d'exploitation, de brevets d'invention, de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication et autres droits analogues ou les rémunérations de services, payés ou dus par une personne physique ou morale domiciliée ou établie en France à des personnes physiques ou morales qui sont domiciliées ou établies dans un Etat ou territoire non coopératif au sens de l'article 238-0 A, ne sont pas admis comme charges déductibles pour l'établissement de l'impôt, sauf si le débiteur apporte la preuve mentionnée au premier alinéa et démontre que les opérations auxquelles correspondent les dépenses ont principalement un objet et un effet autres que de permettre la localisation de ces dépenses dans un Etat ou territoire non coopératif. / Les premier et troisième alinéas s'appliquent également à tout versement effectué sur un compte tenu dans un organisme financier établi dans un des Etats ou territoires visés, respectivement, aux premier et troisième alinéas ". En vertu de ces dispositions, il appartient au contribuable, dans tous les cas, que la commission des impôts directs et des taxes sur les chiffres d'affaires ait été saisie ou non, de justifier du principe de la déductibilité des charges comme de la réalité de la prestation.
5. Pour l'application de ces dispositions, la charge de la preuve de ce que le bénéficiaire des rémunérations en cause est soumis à un régime fiscal privilégié incombe à l'administration. Il lui appartient à cet égard d'apporter tous éléments circonstanciés non seulement sur le taux d'imposition, mais sur l'ensemble des modalités selon lesquelles des activités du type de celles qu'exerce ce bénéficiaire sont imposées dans le pays où il est domicilié ou établi. Le contribuable peut, de son côté, faire valoir, en réponse à l'administration, tous éléments propres à la situation du bénéficiaire en cause. Dans le cas où l'administration doit être regardée, au vu de l'ensemble des éléments ainsi produits par les parties, comme ayant établi que le bénéficiaire n'est pas imposable ou est assujetti à des impôts sur les bénéfices ou les revenus dont le montant est inférieur de plus de la moitié à celui de l'impôt sur les bénéfices ou sur les revenus dont il aurait été redevable dans les conditions de droit commun en France, il appartient au contribuable d'apporter la preuve que les dépenses en cause correspondent à des opérations réelles et ne présentent pas un caractère anormal ou exagéré.
6. Il résulte de l'instruction que la société C... Holding a émis en janvier 2013 un emprunt obligataire pour un montant de 20 000 000 euros souscrit par la société Tergale Holding, fiscalement domiciliée dans les Iles Vierges Britanniques. L'emprunt obligataire prévoyait un taux d'intérêt annuel fixe de 5 %, ramené à 3,5 % par décision rétroactive du 23 novembre 2013. L'emprunt a été remboursé par anticipation le 15 octobre 2015, les intérêts afférents aux obligations ayant été versés sur un compte bancaire domicilié en Suisse. L'administration fiscale a remis en cause les intérêts servis à la société Tergale Holding sur le fondement des dispositions précitées du premier alinéa de l'article 238 A du code général des impôts, au motif que la société Tergale Holding était soumise aux Iles Vierges Britanniques à un régime fiscal privilégié et que la société C... Holding ne rapportait pas la preuve de ce que le taux d'intérêt de l'emprunt obligataire émis en 2013 était un taux de marché et ne revêtait pas un caractère anormal ou exagéré.
7. La société C... Holding ne conteste pas la qualification portée par le service sur le régime fiscal privilégié dont bénéficie la société Tergale Holding aux Iles Vierges Britanniques. Si elle fait valoir que les Iles Vierges Britanniques n'étaient pas, à la date de l'émission de l'emprunt obligataire en litige, un Etat non coopératif, cette circonstance est inopérante sur le régime de preuve applicable, dès lors que les réintégrations auxquelles a procédé l'administration n'ont pas été fondées sur le troisième alinéa de l'article 238 A précité du code général des impôts mais uniquement sur le régime fiscal privilégié dont bénéficiait la société Tergale Holding. Par ailleurs, la circonstance que la commission des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ait rendu un avis favorable à la société relativement à la déductibilité des intérêts consentis est sans incidence sur le régime de charge de la preuve résultant des dispositions de l'article 238 A du code général des impôts. En vertu des principes posés au point 5, il appartient dès lors à la société C... Holding d'apporter la preuve que les dépenses liées à l'émission d'un emprunt obligataire correspondent à des opérations réelles et que le taux d'intérêt de cet emprunt ne présente pas un caractère anormal ou exagéré.
8. Au soutien de son affirmation selon laquelle le taux d'intérêt de 3,5 % rémunérant les obligations souscrites par la société Tergale Holding correspond au taux du marché, la société requérante fait état de onze opérations d'émission d'emprunts obligataires menées par des sociétés intervenant dans divers secteurs d'activités entre 2012 et 2014. A cet égard, la société requérante fait valoir que les sociétés figurant dans ce panel étaient de taille supérieure à la sienne et qu'un certain nombre d'entre elles présentaient un risque inférieur au sien, alors pourtant que les taux que ces sociétés ont accordés, fixés entre 4,21 % et 6,5 %, étaient supérieurs à celui rémunérant les obligations qu'elle a émises en janvier 2013. Cette argumentation n'est pas sérieusement contestée par l'administration fiscale qui s'est bornée dans la proposition de rectification à faire référence au taux de rémunération des comptes courants d'associés visé au 3° du 1 de l'article 39 du code général des impôts, lui-même constitué de la moyenne annuelle des taux effectifs moyens pratiqués par les établissements de crédit pour des prêts à taux variable aux entreprises d'une durée initiale supérieure à deux ans, alors que cette rémunération ne peut être comparée au taux versé dans le cadre d'un emprunt obligataire. L'administration se réfère également, pour la première fois dans son mémoire en réplique en appel, au taux moyen des obligations alors applicable à la date d'émission de l'emprunt obligataire en litige. Toutefois, un tel taux de rendement ne tient pas compte du profil de risque qu'elle présentait et qui a justifié le taux de 3,5 % en litige. Dans ces conditions, la société requérante doit être regardée comme rapportant la preuve de ce que le taux de 3,5 % rémunérant l'emprunt obligataire souscrit par la société Tergale Holding n'est pas anormal ou exagéré.
Sur la commission d'intermédiation versée à M. A... :
9. Aux termes de l'article 111 du code général des impôts : " Sont notamment considérés comme revenus distribués : / (...) c. Les rémunérations et avantages occultes ; (...) ". Aux termes de l'article 119 bis du même code : " (...) 2. Les produits visés aux articles 108 à 117 bis donnent lieu à l'application d'une retenue à la source dont le taux est fixé par l'article 187 lorsqu'ils bénéficient à des personnes qui n'ont pas leur domicile fiscal ou leur siège en France (...) ".
10. Il résulte de l'instruction que la société C... Holding a vendu le 14 octobre 2015 à la société COPAGEF 234 060 actions de la société SOMDIAA. Dans le cadre de cette opération de cession de titres de participation, la société C... Holding avait conclu le 10 avril 2015 une convention avec M. A... par laquelle celui-ci s'engageait, en contrepartie du versement d'une somme de 1 500 000 euros d'honoraires sur un compte bancaire en Italie, à assister la société cessionnaire de la manière la plus large en vue du bon déroulement de l'opération. En dépit de demandes de l'administration fiscale, la société C... Holding n'a pas apporté de précisions sur les prestations d'assistance qui auraient été réalisées. Le service a exercé son droit de communication auprès de la société COPAGEF aux fins de communication d'un pacte d'actionnaires et d'un protocole de partenariat, documents desquels il est ressorti, d'une part, que la société C... Holding avait déjà cédé à la société COPAGEF la majorité des titres de la société SOMDIAA et, d'autre part, que les parties peuvent librement céder d'autres titres avec en outre un droit de préemption sur ces titres en cas de vente. Le service a encore relevé que M. Alexandre Vilgrain, président directeur général de la société requérante, est également président directeur général de la société SOMDIAA, dont l'actionnaire majoritaire est la société COPAGEF. Compte tenu de ces éléments, l'administration a estimé que la société COPAGEF apparaissait comme " l'acquéreur naturel " pour la participation minoritaire que détient la société C... Holding dans la société SOMDIAA et qu'ainsi, le versement à M. B... la commission en cause n'apparaissait pas indispensable à la réalisation de la cession. En conséquence, la somme de 1 500 000 euros a été réintégrée dans les résultats de la société et regardée comme un revenu distribué sur le fondement du c de l'article 111 du code général des impôts. A été appliquée à cette somme la retenue à la source prévue à l'article 119 bis du même code.
11. La société C... Holding, qui ne conteste pas le principe de la réintégration opérée par l'administration fiscale sur le fondement de l'acte anormal de gestion, fait néanmoins valoir que M. A... est un résident fiscal belge et se prévaut de l'article 18 de la convention fiscale franco-belge, laquelle ferait obstacle à l'application de la retenue à la source sur le fondement de l'article 119 bis du code général des impôts. Elle soutient également, de manière subsidiaire, que M. A... est résident fiscal italien et que le taux de la retenue à la source doit être réduit à 15 %, au lieu du taux de 30 % qui a été appliqué sur le fondement du I de l'article 187 du code général des impôts.
12. D'une part, aux termes du 2 de l'article 1er de la convention fiscale franco-belge : " Une personne physique est réputée résident de l'Etat contractant où elle dispose d'un foyer permanent d'habitation. / a) Lorsqu'elle dispose d'un foyer permanent d'habitation dans chacun des Etats contractants, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits, c'est-à-dire de l'Etat contractant où elle a le centre de ses intérêts vitaux ; / b) Si l'Etat contractant où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut être déterminé, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant où elle séjourne de façon habituelle ; / c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans chacun des Etats contractants ou qu'elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, elle est considérée comme un résident de l'Etat contractant dont elle possède la nationalité ; / d) Si cette personne possède la nationalité de chacun des Etats contractants ou qu'elle ne possède la nationalité d'aucun d'eux, les autorités compétentes des Etats contractants tranchent la question d'un commun accord ". Aux termes de l'article 18 de la même convention : " Dans la mesure où les articles précédents de la présente Convention n'en disposent pas autrement, les revenus des résidents de l'un des Etats contractants ne sont imposables que dans cet Etat ".
13. D'autre part, aux termes de l'article 10 de la convention franco-italienne : " 1. Les dividendes payés par une société qui est un résident d'un Etat à un résident de l'autre Etat sont imposables dans cet autre Etat. / 2. Toutefois, ces dividendes sont aussi imposables dans l'Etat dont la société qui paie les dividendes est un résident, et selon la législation de cet Etat, mais si la personne qui reçoit les dividendes en est le bénéficiaire effectif, l'impôt ainsi établi ne peut excéder : a) 5 p. cent du montant brut des dividendes si le bénéficiaire effectif est une société passible de l'impôt sur les sociétés qui a détenu directement ou indirectement, pendant une période d'au moins 12 mois précédant la date de la décision de distribution des dividendes, au moins 10 p. cent du capital de la société qui paie les dividendes ; / b) 15 p. cent du montant brut des dividendes dans tous les autres cas ".
14. Au soutien de son moyen tiré de ce que M. A... serait un résident belge, la société requérante produit d'abord une attestation de résidence en Belgique émise par l'intéressé et se prévaut de la réponse des autorités fiscales belges à la demande formée par la France dans le cadre de l'assistance administrative internationale qui fait état d'une résidence fiscale en Belgique. Toutefois, la réponse des autorités belges mentionne que l'adresse belge déclarée par M. A..., de nationalité française, est celle de sa mère, que " à première vue, il n'y a pas d'autres liens avec la Belgique sauf le lien familial et son inscription comme résident de la Belgique ", qu'il " possède des comptes bancaires en Italie, Suisse et les Etats-Unis ", qu'il ne déclare pas d'autres revenus que ceux en provenance de l'étranger et qu'il " n'a jamais été enregistré par nos services à des fins fiscales ". Il ne résulte ainsi pas de l'instruction que M. A... aurait en Belgique son foyer permanent d'habitation au sens et pour l'application des stipulations précitées de l'article 18 de la convention franco-belge. Elle ne peut ainsi se prévaloir de l'exemption de retenue à la source prévue par ces stipulations.
15. Par ailleurs, si la société C... Holding fait valoir, en réponse aux écritures en défense de l'administration faisant état de l'adresse en Italie déclarée par M. A..., que celui-ci devrait alors être déclaré résident fiscal italien, il ne résulte pas de l'instruction que celui-ci serait assujetti à l'impôt en Italie en raison de son domicile, de sa résidence, ou de tout autre critère de nature analogue, ainsi que le prévoient les stipulations du 1 de l'article 4 de la convention bilatérale franco-italienne. La société requérante n'est ainsi pas fondée à se prévaloir du taux réduit de retenue à la source prévu par les stipulations citées au point 13 du présent arrêt.
Sur les pénalités du c) de l'article 1729 du code général des impôts :
16. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; / (...) / c. 80 % en cas de manœuvres frauduleuses ou de dissimulation d'une partie du prix stipulé dans un contrat ou en cas d'application de l'article 792 bis ".
17. Pour appliquer une pénalité de 80 % sur le fondement des dispositions précitées, l'administration fiscale s'est fondée sur la circonstance que la société C... Holding a délibérément tenté de dissimuler dans sa comptabilité la commission d'intermédiation versée à M. A..., aucun compte de charge n'ayant été utilisé pour comptabiliser cette commission en déduction des résultats imposables, la société ayant enregistré uniquement un produit net de cession dans ses comptes en imputant directement le coût de la commission, et M. A... n'apparaissant pas dans la " comptabilité auxiliaire fournisseur " de la société. Toutefois, et ainsi que le fait valoir la société C... Holding, cette commission d'intermédiation relève de la catégorie des frais inhérents à la cession venant en déduction de la plus-value de cession réalisée et non de celle des frais généraux déductibles de son résultat imposable. L'absence de comptabilisation en charges déductibles du résultat n'est ainsi pas constitutive de manœuvre frauduleuse ou d'une dissimulation de prix.
18. Il appartient toutefois au juge, dans une telle hypothèse, alors même que l'administration ne le saisirait pas d'une demande en ce sens, de rechercher si les éléments qui étaient invoqués par l'administration pour justifier des pénalités pour manœuvres frauduleuses permettent, à défaut d'établir ces dernières, de caractériser la mauvaise foi du contribuable et de substituer, au besoin d'office, à la majoration de 80 % appliquée par l'administration la majoration de 40 % pour manquement délibéré prévue par l'article 1729 du code général des impôts.
19. En l'espèce, compte tenu des circonstances qui ont justifié les rectifications litigieuses, et notamment le fait que la commission versée à M. A... ne présente pas de justifications et n'a pas été engagée dans l'intérêt de la société, l'administration justifie de manquements délibérés de la part de la société C... Holding. Il y a lieu, par suite, de substituer d'office à la majoration de 80 %, la majoration prévue en cas de manquement délibéré par l'article 1729 du code général des impôts.
20. Il résulte de tout ce qui précède que la société C... Holding est seulement fondée, en premier lieu, à demander, d'une part, ainsi qu'il a été dit au point 2, l'annulation partielle du jugement du tribunal administratif de Melun en tant qu'il a statué sur les pénalités pour manœuvres frauduleuses et, d'autre part, la réduction des pénalités à raison de la substitution de la majoration de 40 % prévue en cas de manquement délibéré à celle de 80 % prévue en cas de manœuvres frauduleuses et, en second lieu, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande à fin de décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source fondées sur la remise en cause des intérêts d'emprunt obligataire servis à la société Tergale Holding.
Sur les frais d'instance :
21. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par la société C... Holding au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D E C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Melun n° 1910336 du 11 mai 2023 est annulé en tant qu'il a statué sur les pénalités pour manœuvres frauduleuses.
Article 2 : La société C... Holding est déchargée des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source auxquelles elle a été assujettie à concurrence de la substitution de la pénalité de 40 % pour manquement délibéré prévue au a) de l'article 1729 du code général des impôts à la pénalité au taux de 80 % pour manœuvres frauduleuses.
Article 3 : La société C... Holding est déchargée des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et de retenue à la source fondées sur la remise en cause des intérêts d'emprunt obligataire servis à la société Tergale Holding.
Article 4 : Le jugement du tribunal administratif de Melun n° 1910336 du 11 mai 2023 est réformé en ce qu'il est contraire à l'article 3 du présent arrêt.
Article 5 : Le surplus de la demande de la société C... Holding présentée devant le tribunal administratif de Melun et le surplus des conclusions de la requête de la société C... Holding sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la société C... Holding et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Copie en sera adressé à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.
Délibéré après l'audience du 3 avril 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barthez, président de chambre,
- Mme Milon, présidente assesseure,
- M. Dubois, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe de la cour le 30 avril 2025.
Le rapporteur,
J. DUBOIS
Le président de chambre,
A. BARTHEZ
La greffière,
C. DABERT
La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA03179