Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser la somme correspondant à 50 % de 540 691,44 euros en réparation des préjudices que lui a causés l'intervention par ozonothérapie pratiquée le 18 juin 2015, de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse la somme de 8 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les entiers dépens.
Par un jugement n°1802068 du 6 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier universitaire de Toulouse à verser à Mme A... une indemnité de 21 702,85 euros, mis à sa charge le versement à Mme A... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, condamné le centre hospitalier universitaire de Toulouse à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne une indemnité de 91 236,81 euros et la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, mis à sa charge le versement à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, mis à la charge définitive du centre hospitalier les frais d'expertise et rejeté le surplus des conclusions des parties.
Procédures devant la cour :
I. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 27 mars et 19 juin 2020, sous le n°20BX01156 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL21156, Mme A..., représentée par Me Benayoun, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) de réformer le jugement du 6 février 2020 du tribunal administratif de Toulouse en ce qu'il n'a condamné le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser que la somme de 21 702,85 euros ;
2°) de rejeter les demandes du centre hospitalier universitaire de Toulouse ;
3°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme de 567 504,80 euros en réparation des préjudices subis ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse la somme de 7 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative
Elle soutient que :
- le jugement doit être confirmé en ce qu'il retient la responsabilité pour faute du centre hospitalier et son droit à réparation intégrale ; l'existence de la fissure radiaire est établie ainsi que la contre-indication de la thérapie litigieuse en cas de fissure ;
- les honoraires du médecin conseil s'établissent à 6 375 euros alors que le tribunal n'a retenu qu'une somme de 1 375 euros ;
- il convient d'indemniser ses frais de déplacement à hauteur de 2 500 euros alors que le tribunal ne lui a accordé qu'une somme forfaitaire de 600 euros ;
- au titre de l'aide humaine avant consolidation, elle doit se voir allouer une somme de 1 188,80 euros ;
- il lui sera alloué la somme de 14 803 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels, déduction faite des débours présentés par la caisse primaire d'assurance maladie ;
- il lui sera alloué la somme de 465 049,92 euros au titre de la perte de gains professionnels futurs, déduction faite des débours présentés par la caisse ; c'est à tort que le tribunal a estimé son préjudice incertain ; l'expert n'a jamais indiqué que la diminution de ses capacités de travail serait imputable à l'évolution de son état antérieur ;
- au titre de l'incidence professionnelle, une somme de 18 466,85 euros lui sera accordée ;
- une somme de 23 170,05 euros doit être accordée au titre des frais de véhicule adapté ;
- son déficit fonctionnel temporaire s'établit à la somme de 3 335 euros ;
- ses souffrances endurées peuvent être estimées à la somme de 10 000 euros et son préjudice esthétique temporaire à celle de 4 000 euros ;
- son déficit fonctionnel permanent sera évalué à la somme de 11 100 euros ;
- son préjudice d'agrément s'établit à 5 000 euros.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 28 mai et 13 août 2020, le centre hospitalier universitaire de Toulouse, représenté par la SELARL Montazeau et Cara, agissant par Me Cara, conclut, à titre principal, par la voie de l'appel incident, au rejet des requêtes de Mme A... et de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne, des écritures de l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales et à sa mise hors de cause, à titre subsidiaire, à ce que 50% des préjudices retenus soient mis à sa charge, à la modération des prétentions indemnitaires de Mme A... et à la réduction de la créance de la caisse primaire d'assurance maladie par application d'un taux de 50 %.
Il fait valoir que :
- son appel incident est recevable ;
- sa responsabilité pour faute n'est pas engagée dès lors que l'existence de la fissure radiaire au jour de l'intervention est sujette à caution et que la fissure n'apparaît pas comme une contre-indication à la technique mise en œuvre dans la littérature médicale ;
- sur l'indemnisation des préjudices, une perte de chance de 50% sera retenue ;
- le jugement sera confirmé en ce qu'il a alloué la somme de 50 euros à Mme A... au titre des dépenses de santé actuelles ;
- le poste d'honoraires du médecin conseil sera rejeté en l'absence de preuve du paiement et de preuve de la non prise en charge de ces frais par une assurance de protection juridique ; ce poste doit être apprécié raisonnablement ;
- le jugement contesté sera confirmé en ce qu'il a alloué une somme forfaitaire de 600 euros au titre des frais de déplacement et en ce qu'il a rejeté la demande au titre de l'assistance d'une tierce personne ; à titre subsidiaire, il serait alloué à Mme A... pour ce poste une somme de 194,92 euros ;
- il peut être retenu, après application du taux de perte de chance, la somme de 6 165,60 euros au titre de la perte de gains professionnels actuels ; le jugement sera donc confirmé sur ce point ;
- l'aménagement de poste à temps partiel de Mme A... n'est pas imputable aux séquelles de l'opération subie mais à sa pathologie évolutive, discopathie du territoire L5 S1 ; le poste de préjudice de la perte de gains professionnels futurs ne sera donc pas indemnisé ; le calcul du préjudice échu n'est pas expliqué et en l'état l'indemnisation de ce poste sera rejetée ; la somme globale demandée au titre du préjudice à échoir n'est pas justifiée ; la capitalisation à titre viager doit être rejetée ; ce préjudice pourrait être évalué à 265 240,76 euros dont 50% serait alloué à la requérante ;
- l'indemnisation du poste d'incidence professionnelle sera revue ; l'origine de l'aménagement de poste est la pathologie évolutive de Mme A..., qui limite sa capacité de travail ; une somme de 4 000 euros pourrait être retenue au titre de l'incidence professionnelle dont 50% serait à sa charge ;
- l'indemnisation du poste de frais de véhicule adapté doit être rejetée, en l'absence de justificatifs du prix de vente de l'ancien véhicule ;
- l'indemnisation du déficit fonctionnel temporaire accordée par le tribunal doit être ramenée à la somme de 2 399,40 euros, soit, après application de la perte de chance, à celle de 1 199,70 euros ;
- les souffrances endurées peuvent être évaluées à la somme de 3 700 euros, dont 50% à sa charge ;
- le préjudice esthétique temporaire pourrait être estimé à 1 000 euros dont 50% à sa charge ;
- l'indemnisation du déficit fonctionnel permanent de 6% sera comprise entre 6 000 et 7 000 euros ;
- faute de justificatifs, l'indemnisation du préjudice d'agrément ne sera pas admise ;
- il convient de déduire de la créance de la caisse les sommes correspondant à des frais non imputables et d'appliquer le taux de perte de chance de 50%.
Par un mémoire, enregistré le 18 juin 2020, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne, représentée par la SCP Vinsonneau Palies Noy Gauer et associés, agissant par Me Noy, conclut à l'annulation du jugement du 6 février 2020 du tribunal administratif de Toulouse, à la condamnation du centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme de 150 965,27 euros assortie des intérêts de droit à compter du 18 juin 2020, ainsi qu'une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à sa charge au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que l'indemnité versée au titre de la perte de gains professionnels actuels et futurs a été sous-évaluée par le tribunal ; que sa créance pour la perte de gains professionnels actuels est au moins égale à la somme de 9 015,80 euros ; qu'en réduisant l'indemnité octroyée à ce titre, le tribunal a commis une erreur de fait confinant à l'erreur d'appréciation et méconnu son office ; qu'au titre du poste de perte de gains professionnels futurs, sa créance ressort à une somme de 117 016,58 euros ; qu'en estimant de manière hypothétique et conjecturale que Mme A... sera dans le futur supposément apte à une reprise de son travail à temps plein, le tribunal a commis une erreur d'appréciation ; qu'en réduisant l'indemnité octroyée à ce titre, le tribunal a commis des erreurs de fait et d'appréciation.
Par un mémoire, enregistré le 1er juillet 2020, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté par la SELARL Birot Ravaut et associés, agissant par Me Ravaut, conclut à la confirmation du jugement entrepris en ce qu'il a jugé la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Toulouse engagée, à sa mise hors de cause et à ce qu'une somme de 2 500 euros soit mise à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que l'appel incident du centre hospitalier universitaire de Toulouse, qui soulève un litige distinct de celui de l'appel principal, n'est pas recevable ; que la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Toulouse, exclusive d'une indemnisation au titre de la solidarité nationale, est engagée en raison d'un défaut d'information, d'un défaut d'indication opératoire et d'un défaut de maîtrise du geste opératoire ; que le lien de causalité est établi entre les manquements du centre hospitalier universitaire et les préjudices de Mme A....
Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de Mme A...
Par une ordonnance du 1er juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 24 juin 2022.
II. Par une requête et un mémoire, enregistrés les 31 mars et 18 juin 2020, sous le n°20BX01192 au greffe de la cour administrative d'appel de Bordeaux, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n° 20TL21192, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne, représentée par la SCP Vinsonneau Palies Noy Gauer et associés, agissant par Me Noy, demande à la cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement du 6 février 2020 du tribunal administratif de Toulouse ;
2°) de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser une somme de 150 965,27 euros assortie des intérêts de droit à compter du 18 juin 2020 ;
3°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue à l'article L. 376-1 du code de sécurité sociale ;
4°) de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'indemnité versée au titre de la perte de gains professionnels actuels et futurs a été sous-évaluée par le tribunal ;
- sa créance pour la perte de gains professionnels actuels est au moins égale à la somme de 9 015,80 euros ; en réduisant l'indemnité octroyée à ce titre, le tribunal a commis une erreur de fait confinant à l'erreur d'appréciation et méconnu son office ;
- au titre du poste de perte de gains professionnels futurs, sa créance ressort à une somme de 117 016,58 euros ; en estimant de manière hypothétique et conjecturale que Mme A... sera dans le futur supposément apte à une reprise de son travail à temps plein, le tribunal a commis une erreur d'appréciation ; en réduisant l'indemnité octroyée à ce titre, le tribunal a commis des erreurs de fait et d'appréciation.
Par deux mémoires en défense, enregistrés les 28 mai et 13 août 2020, le centre hospitalier universitaire de Toulouse, représenté par la SELARL Montazeau et Cara, agissant par Me Cara, conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que dans l'instance n°20TL21156.
Par un mémoire, enregistré le 1er juillet 2020, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales, représenté par la SELARL Birot Ravaut et associés, agissant par Me Ravaut conclut aux mêmes fins par les mêmes moyens que dans l'instance n°20TL21156.
Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête de la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne.
Par une ordonnance du 1er juin 2022, la clôture d'instruction a été fixée au 24 juin 2022.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Thierry Teulière, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique,
- les observations de Me Benayoun, représentant Mme A... et les observations de Me Montazeau, représentant le centre hospitalier universitaire de Toulouse.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A... qui souffrait de lombalgie depuis l'année 2012 en raison d'une discopathie postéro médiane gauche et d'une radiculopathie et qui a subi à l'hôpital Paul Riquet dépendant du centre hospitalier universitaire de Toulouse une intervention par ozonothérapie pratiquée le 18 juin 2015 à l'origine de complications neurologiques, a demandé au tribunal administratif de Toulouse de condamner le centre hospitalier universitaire de Toulouse à lui verser la somme correspondant à 50% de 540 691,44 euros en réparation des préjudices causés par cette intervention. Par un jugement du 6 février 2020, le tribunal administratif de Toulouse a condamné le centre hospitalier universitaire de Toulouse à verser à Mme A... une indemnité de 21 702, 85 euros, mis à sa charge le versement à Mme A... de la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, condamné le centre hospitalier universitaire de Toulouse à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne une indemnité de 91 236, 81 euros et la somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion, mis à sa charge le versement à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne de la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, mis à la charge définitive du centre hospitalier universitaire les frais d'expertise et rejeté le surplus des conclusions des parties. Par les requêtes susvisées, Mme A... et la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne relèvent appel de ce jugement. Ces requêtes dirigées contre le même jugement présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt. Le centre hospitalier universitaire forme, quant à lui, appel incident du même jugement en contestant notamment sa responsabilité.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la responsabilité du centre hospitalier universitaire de Toulouse :
2. Aux termes de l'article L. 1142-1 du code de la santé publique : " I. Hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d'un défaut d'un produit de santé, les professionnels de santé (...), ainsi que tout établissement, service ou organisme dans lesquels sont réalisés des actes individuels de prévention, de diagnostic ou de soins ne sont responsables des conséquences dommageables d'actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu'en cas de faute. (...) ".
3. Il résulte de l'instruction qu'une discographie effectuée le 11 septembre 2014 a mis en évidence que la discopathie responsable des douleurs de Mme A... se situait à l'étage L4-L5, où était constatée une " fissuration radiaire de l'anneau fibreux ". A l'issue de l'intervention par ozonothérapie du 18 juin 2015, Mme A... a ressenti une vive douleur dans le bas du dos et sa jambe gauche était paralysée. Le scanner, alors pratiqué en urgence, n'a montré aucune lésion anatomique mais a objectivé " l'existence de bulles gazeuses au niveau de la racine L4 ". Il résulte du rapport d'expertise que les complications neurologiques subies par la patiente trouvent leur origine dans " un embole gazeux qui a fusé de la partie centrale du disque par la fissure ". L'expert a également relevé que, contrairement aux commentaires bibliographiques, la technique de l'ozonothérapie mérite d'être effectuée sur un disque non fissuré et que, dans le cas contraire, la probabilité d'une libération gazeuse sous haute pression est suffisamment élevée pour que ce risque ne puisse être écarté. Il a encore indiqué que la littérature médicale ne faisait pas état de cette nouvelle méthode de traitement de manière très explicite. Ainsi, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier universitaire, il doit être considéré que la fissure radiaire existait au jour de l'intervention et il ressort des constats du rapport d'expertise qu'en présence d'une telle fissure, l'ozonothérapie n'était pas une technique indiquée. S'agissant d'une technique nouvelle, la circonstance que l'expert n'ait pas retenu la pertinence de la seule bibliographie qui lui a été présentée par le médecin conseil du centre hospitalier universitaire ne permet pas de remettre en cause ses conclusions. Il s'ensuit que c'est à bon droit que le tribunal a considéré qu'en pratiquant une intervention par cette technique alors que l'état de Mme A... présentait une contre-indication, le centre hospitalier universitaire de Toulouse a commis une faute médicale à l'origine de l'entier dommage de la victime de nature à engager sa responsabilité à son égard. Par voie de conséquence, l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales doit être mis hors de cause.
4. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que les demandes du centre hospitalier universitaire de Toulouse tendant à sa mise hors de cause et à l'application d'un taux de perte de chance de 50% ne peuvent qu'être rejetées.
En ce qui concerne l'évaluation des préjudices de Mme A... :
S'agissant des préjudices patrimoniaux :
Quant aux dépenses de santé :
5. Par le jugement entrepris, le tribunal a retenu que Mme A... était fondée à solliciter le remboursement d'une somme de 50 euros correspondant aux compléments d'honoraires alloués au docteur C... pour pratiquer des infiltrations dont la nécessité était établie. Le jugement n'est pas contesté sur ce point. Par ailleurs, contrairement à ce que fait valoir le centre hospitalier universitaire de Toulouse, la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne justifie, par une attestation du médecin conseil de l'assurance maladie et un relevé de créance définitive, de débours directement imputables à la faute en litige, d'un montant global de 24 932,89 euros, au titre de frais hospitaliers, médicaux, pharmaceutiques, d'appareillage et de transport. Cette somme doit, ainsi que l'a jugé le tribunal, être allouée à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne à ce titre.
Quant aux frais divers :
6. D'une part, si Mme A..., qui sollicite le remboursement des frais engagés pour l'assistance d'un médecin conseil, produit trois notes d'honoraires de celui-ci pour un montant total de 6 375 euros, elle ne justifie de leur paiement qu'à hauteur de 1 375 euros. Par suite, elle ne peut prétendre à ce titre à une indemnisation supérieure à celle que lui a accordée le tribunal.
7. D'autre part, il sera fait une juste appréciation des frais de déplacement exposés par Mme A... pour consulter son médecin conseil ou se rendre aux réunions d'expertise, en portant à 1 400 euros la somme allouée à ce titre par les premiers juges.
Quant à l'assistance par tierce personne :
8. Si l'expert retient un besoin d'assistance à raison d'une heure par jour en période d'hospitalisation du 1er au 24 juillet 2015 et à raison de quatre heures par semaine du 25 juillet au 24 septembre 2015, Mme A... ne justifie pas qu'une aide lui a été effectivement apportée sur ces périodes, en particulier lorsqu'elle était prise en charge en centre de rééducation fonctionnelle. Par suite, elle ne peut prétendre à se voir allouer une somme de 1 188,80 euros sur ce poste de préjudice.
Quant aux pertes de gains professionnels actuels :
9. Il résulte de l'instruction que Mme A..., qui exerçait des fonctions de conseillère clientèle au sein de la Caisse d'Épargne depuis l'année 2007, a été placée, consécutivement à l'intervention du 18 juin 2015, en arrêt de travail du 1er juillet 2015 au 2 janvier 2017 et que son état de santé a été consolidé le 3 janvier 2017. Il résulte de son avis d'imposition 2015 que ses salaires pour l'année 2014, qu'il y a lieu de prendre pour référence, se sont établis à la somme de 21 586 euros. Ses salaires pour les années 2015 et 2016 se sont respectivement élevés à 20 891 euros et 7 478 euros. Il s'ensuit que, sur la période du 1er juillet 2015 au 2 janvier 2017, la perte de salaires subie par Mme A... à la suite de l'intervention du 18 juin 2015, peut être évaluée à la somme de 14 803 euros. Il résulte également de l'instruction que la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne a versé à Mme A... des indemnités journalières d'un montant de 9 015,80 euros du 1er juillet 2015 au 29 février 2016. Par suite, les pertes de gains professionnels actuels de Mme A... résultant de l'intervention du 18 juin 2015 s'établissent, après déduction du montant des indemnités journalières, à la somme de 5 787,20 euros. Il en résulte qu'il y a lieu de porter à 5 787,20 euros la somme que le centre hospitalier universitaire de Toulouse a été condamné, par le jugement attaqué, à verser à Mme A... et à 9 015,80 euros la somme qu'il a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne.
Quant aux pertes de gains professionnels futurs :
10. Il résulte de l'instruction qu'à la suite de l'intervention en litige, Mme A... a été placée, ainsi qu'il a été dit, en arrêt de travail du 1er juillet 2015 au 2 janvier 2017 et qu'elle a repris son activité professionnelle à compter de cette dernière date sur un poste aménagé, à raison de 14 heures par semaine. Ce temps partiel a ensuite été maintenu, sur avis médical, à la même quotité. Eu égard à ce maintien à temps partiel pour une durée indéterminée, les pertes de revenus futurs dont Mme A... sollicite l'indemnisation revêtent un caractère certain. Par suite, c'est à tort que le tribunal a estimé que ces pertes ne revêtaient pas un tel caractère eu égard à la possibilité pour la requérante d'accroître son temps de travail jusqu'à un temps complet, sur la base d'un avis médical du médecin de travail du 3 janvier 2017 mentionnant seulement une possibilité d'augmentation progressive du temps de travail, qui ne s'est, par la suite, pas concrétisée. Par ailleurs, contrairement à ce que fait valoir le centre hospitalier universitaire, l'aménagement du poste de Mme A... résulte des séquelles de l'intervention fautive et non de sa discopathie évolutive en territoire L5 S1, par ailleurs, relevée par l'expertise.
11. Dans les conditions rappelées au point précédent, Mme A... a droit à l'indemnisation de ses pertes de gains professionnels entre le 3 janvier 2017, date de consolidation, jusqu'à la date à laquelle elle peut être admise à faire valoir ses droits à la retraite, à l'âge de 62 ans. Le barème de capitalisation publié le 28 novembre 2017 à la Gazette du Palais prévoit pour une femme de 42 ans à la date du présent arrêt et de 62 ans à la date du dernier arrérage, l'application d'un coefficient de 18,597. Sur la base d'un salaire annuel de 21 586 euros l'année précédant l'opération et du salaire de l'année 2017 qui se déduit de sa feuille de paye de décembre 2017, le préjudice de Mme A... au titre des arrérages échus, soit du 3 janvier 2017 au 30 décembre 2022, date du présent arrêt, peut être estimé à la somme de 77 243,39 euros. Au titre de la période postérieure, le préjudice de Mme A... peut être évalué, sur la base d'une perte annuelle de salaire de 13 011,24 euros et du coefficient précité de 18,597, à la somme de 241 970,03 euros. Il convient de retrancher de cette somme les arrérages échus ainsi que le capital correspondant à la pension d'invalidité servis à la requérante par la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne pour un montant global de 117 016,58 euros. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... aurait perçu d'autres revenus qu'il conviendrait de déduire. Ainsi, il sera alloué à Mme A... une somme de 202 196,84 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne la somme de 117 016,58 euros.
Quant à l'incidence professionnelle :
12. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 10, l'aménagement du poste à temps partiel de Mme A... résulte des séquelles de l'intervention fautive et non de sa discopathie évolutive. D'autre part, le tribunal qui a relevé à juste titre que la faute commise par le centre hospitalier universitaire de Toulouse a eu pour conséquence une dévaluation de l'intéressée sur le marché du travail et une augmentation significative de la pénibilité au travail de Mme A..., imposant à cette dernière une reprise à temps partiel et un aménagement de son poste et de ses conditions de travail, a fait une exacte appréciation de l'incidence professionnelle de l'accident médical de la requérante en l'évaluant à la somme de 15 000 euros.
Quant aux frais de véhicule adapté :
13. L'expert a estimé que les frais de véhicule adapté devaient être pris en considération. Toutefois, Mme A... est seulement fondée à être indemnisée des frais liés au surcoût d'acquisition d'un véhicule adapté et non du coût total d'acquisition d'un tel véhicule. Si elle sollicite le remboursement de la somme de 6 600 euros, soit de la différence entre le prix d'achat du véhicule adapté et le prix de cession, au demeurant non justifié, de son ancien véhicule, elle ne produit ni la carte grise du nouveau véhicule, ni la déclaration de cession de l'ancien. Par suite, faute de justificatifs suffisants permettant de chiffrer le surcoût induit par le changement de type de véhicule, cette demande de remboursement de la somme de 6 600 euros ne peut être admise. Par ailleurs, en considération du surcoût moyen du recours à une boîte automatique qui peut être évalué à 1 500 euros, d'un renouvellement de cet équipement tous les 7 ans, de l'âge de la requérante lors du premier renouvellement et sur la base d'un taux de rente viagère de 36,999 par référence au barème de capitalisation des rentes des victimes publié le 28 novembre 2017 à la Gazette du Palais, le capital représentatif des frais de renouvellement de cet aménagement peut être fixé à une somme de 7 928 euros.
S'agissant des préjudices personnels :
14. Il résulte de l'instruction, et notamment du rapport d'expertise que Mme A... a subi un déficit fonctionnel temporaire total du 1er au 24 juillet 2015, un déficit fonctionnel temporaire de 50 % du 25 juillet au 24 septembre 2015, un déficit fonctionnel temporaire de 30 % du 25 septembre 2015 au 1er mars 2016 et un déficit fonctionnel temporaire de 10 % du 2 mars 2016 au 2 janvier 2017, veille de la date de consolidation de son état de santé. Le tribunal n'a pas fait une inexacte appréciation de ce préjudice en l'évaluant à la somme de 2 500 euros.
15. Les souffrances endurées par Mme A... jusqu'à la date de la consolidation ont été estimées par l'expert à 3,5 sur une échelle de 7. Le préjudice subi à ce titre peut être évalué à la somme de 5 500 euros. Le préjudice esthétique temporaire de Mme A..., qui a été estimé par l'expert à 3 sur une échelle de 7, peut être évalué à la somme de 3 000 euros. Enfin, le préjudice d'agrément subi par l'intéressée, retenu par l'expert comme modéré qui a relevé qu'elle subissait une fatigabilité à la marche et une restriction de l'ensemble de ses activités de loisirs, peut être évalué à la somme de 1 500 euros. Par suite, le tribunal n'a pas inexactement évalué ces préjudices en allouant à ce titre une somme de 10 000 euros à Mme A....
16. Mme A... souffre, après consolidation, d'un déficit fonctionnel permanent de 6 %. Le préjudice subi à ce titre peut être évalué, compte tenu de son âge à la date de consolidation, à la somme de 6 000 euros. Ainsi, en allouant cette dernière somme à la requérante, le tribunal n'a pas insuffisamment évalué ce chef de préjudice.
17. Enfin, Mme A..., dont il est constant qu'elle n'a pas été informée des risques de la méthode utilisée, ne se prévaut pas, à ce titre, de préjudices distincts.
18. Il résulte de tout ce qui précède que l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales doit être mis hors de cause et que Mme A... et la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne sont fondées à demander que les indemnités que le centre hospitalier universitaire de Toulouse a été condamné à leur verser soient respectivement portées à 252 237,04 euros et à 150 965,27 euros.
En ce qui concerne les intérêts :
19. La caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne a droit, ainsi qu'elle le demande, aux intérêts au taux légal sur la somme qui lui est accordée à compter du 18 juin 2020.
En ce qui concerne l'indemnité forfaitaire de gestion :
20. Le jugement contesté a accordé à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne une somme de 1 091 euros au titre de l'indemnité prévue à l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. Dans la mesure où ses conclusions tendant à la majoration des sommes qui lui sont dues au titre des prestations versées sont accueillies, la caisse peut prétendre à une augmentation du montant de cette indemnité. Par suite, en application de l'arrêté du 14 décembre 2021 relatif au montant minimal et maximal de ladite indemnité, il y a lieu de porter à 1 114 euros, le montant accordé à la caisse à ce titre.
Sur les frais liés au litige :
21. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge du centre hospitalier universitaire de Toulouse le versement à Mme A... de la somme de 1 500 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne celui de la somme de 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il n'y a pas lieu en revanche de faire droit aux conclusions présentées sur ce même fondement par l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
D E C I D E :
Article 1er : L'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales est mis hors de cause.
Article 2 : L'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Toulouse a été condamné à verser à Mme A... est portée à 252 237,04 euros.
Article 3 : L'indemnité que le centre hospitalier universitaire de Toulouse a été condamné à verser à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne est portée à 150 965,27 euros, avec intérêts au taux légal à compter du 18 juin 2020.
Article 4 : Le centre hospitalier universitaire de Toulouse versera à Mme A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le centre hospitalier universitaire versera à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne les sommes de 1 114 euros au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion et de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le jugement n°1802068 du 6 février 2020 du tribunal administratif de Toulouse est réformé en ce qu'il a de contraire aux articles 2, 3 et 5 du présent arrêt.
Article 7 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A..., au centre hospitalier universitaire de Toulouse, à la caisse primaire d'assurance maladie de la Haute-Garonne et à l'Office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales.
Délibéré après l'audience du 13 décembre 2022 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
M. Teulière, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 décembre 2022.
Le rapporteur,
T. Teulière
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N°s 20TL21156-20TL21192