Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulouse l'annulation de l'arrêté du 25 septembre 2020 par lequel le préfet de la Haute-Garonne a refusé son admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pour une durée de six mois.
Par un jugement n° 2100063 du 9 mars 2022, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 23 mars 2022 et 16 juin 2022, M. B... A..., représenté par Me Dujardin, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 9 mars 2022 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de la Haute-Garonne du 25 septembre 2020 ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Haute-Garonne de lui délivrer un titre de séjour " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen ;
4°) de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros à verser à son avocate sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ou, dans l'hypothèse où il ne serait pas admis à l'aide juridictionnelle, à son profit sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- c'est à tort que le tribunal administratif a écarté les moyens tirés du défaut d'examen particulier de sa situation, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation commises par le préfet de la Haute-Garonne et de l'atteinte excessive portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les stipulations de l'accord franco-algérien ainsi que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle et familiale ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
- elle est privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;
- elle est insuffisamment motivée et est entachée d'un défaut d'examen complet de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
- elle est privée de base légale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- elle est entachée d'un défaut d'examen de sa situation personnelle ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 7 juin 2022, le préfet de la Haute-Garonne conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens invoqués ne sont pas fondés.
Par une ordonnance en date du 5 juillet 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 22 juillet 2022.
Par une décision du 9 novembre 2022, le bureau d'aide juridictionnelle a constaté la caducité de la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. A....
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention d'application de l'Accord de Schengen du 14 juin 1985 ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Après avoir été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Jazeron, premier conseiller.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant algérien, né le 9 février 1985 à Oran (Algérie), a sollicité en dernier lieu le 13 décembre 2019 la délivrance d'un titre de séjour auprès des services de la préfecture de la Haute-Garonne au titre de sa vie privée et familiale. Par un arrêté du 25 septembre 2020, le préfet de la Haute-Garonne a rejeté cette demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi et l'a interdit de retour sur le territoire français pendant une période de six mois. Par la présente requête, M. A... fait appel du jugement du 9 mars 2022 par lequel le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté préfectoral.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. M. A... conteste le bien-fondé du jugement attaqué en soutenant notamment que le tribunal administratif de Toulouse a entaché son jugement d'une erreur de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en écartant les moyens de sa demande tirés de l'absence d'examen particulier de sa situation, de l'erreur de droit et de l'erreur manifeste d'appréciation commises par le préfet de la Haute-Garonne et de l'atteinte excessive portée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, de tels moyens relèvent du contrôle du juge de cassation et non de celui du juge d'appel auquel il appartient seulement, dans le cadre de l'effet dévolutif, de se prononcer sur la légalité de l'arrêté en litige.
En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, l'arrêté du 25 septembre 2020 expose de manière circonstanciée les principaux éléments de la situation personnelle et familiale de M. A.... Il ne ressort ni de la motivation de cet arrêté, ni des autres pièces du dossier, que le préfet de la Haute-Garonne n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation de l'intéressé avant de refuser de l'admettre au séjour en France. Le préfet n'a notamment commis aucune erreur en relevant que le requérant ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français, dès lors qu'il n'avait pas souscrit la déclaration exigée par l'article 22 de la convention d'application de l'accord de Schengen. La décision attaquée n'est donc pas entachée du défaut d'examen invoqué.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. (...) ".
5. Il ressort des pièces du dossier que M. A..., après être entré en France dans le courant de l'année 2015, a bénéficié le 9 octobre 2015 d'un visa de régularisation accordé par les services de la préfecture du Tarn. Il a été titulaire d'une autorisation provisoire de séjour pendant un an à compter du 12 octobre 2015, puis d'une carte de séjour temporaire pour motif médical pendant un an à compter du 12 octobre 2016. Par un arrêté édicté le 23 avril 2018, le préfet du Tarn a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours. Ainsi, à la date de la décision litigieuse, M. A... n'était présent que depuis environ cinq ans sur le territoire français, où il n'a été admis à séjourner que pour la période nécessaire à sa prise en charge médicale et où il s'est maintenu de manière irrégulière depuis la mesure d'éloignement prise à son encontre le 13 avril 2018. Si le requérant se prévaut d'avoir rejoint ses parents et l'un de ses frères, lesquels sont désormais de nationalité française, ainsi qu'un autre de ses frères, bénéficiaire d'un certificat de résidence de longue durée, il est constant qu'il a longtemps vécu séparé d'eux avant d'arriver en France à l'âge de trente ans. Il n'est par ailleurs pas dépourvu d'attaches personnelles en Algérie, où réside au moins un autre de ses frères. L'intéressé ne justifie pas d'une intégration sociale ou professionnelle intense sur le territoire national en se bornant à produire des bulletins de salaire ne couvrant que quinze mois entre 2016 et 2018 et une promesse de recrutement établie en 2019 pour un emploi d'agent polyvalent dans une société de restauration rapide. Enfin, les certificats médicaux des 30 avril 2019 et 19 août 2019 ne remettent pas en cause l'appréciation portée par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration le 5 janvier 2018, selon laquelle M. A... pourrait bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie en cas de retour dans son pays d'origine. Eu égard à l'ensemble de ces éléments, la décision contestée ne méconnaît pas les stipulations de l'accord franco-algérien citées au point précédent.
6. En troisième lieu, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent de manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent séjourner en France et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés. Si un ressortissant algérien ne peut dès lors utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, désormais reprises à l'article L. 435-1 du même code, s'agissant des étrangers dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels, il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de vérifier que le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation portée sur la situation personnelle de l'intéressé.
7. En l'espèce, pour les mêmes motifs que ceux développés au point 5 ci-dessus, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en refusant l'admission au séjour de M. A..., le préfet de la Haute-Garonne aurait commis une erreur manifeste dans l'exercice de son pouvoir de régularisation et notamment dans l'appréciation de la situation de l'intéressé.
8. En quatrième lieu, selon les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
9. Pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 5 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en ne faisant pas droit à sa demande de titre au séjour, le préfet de la Haute-Garonne aurait porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et qu'il aurait ainsi méconnu les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales citées ci-dessus.
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
10. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'illégalité de la décision portant refus de séjour n'est pas établie. Dès lors, l'appelant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait dépourvue de base légale.
11. En deuxième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur, lesquelles sont désormais reprises à l'article L. 611-1 du même code : " I. ' L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : / (...) / 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré ; / (...) / La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. / (...) ".
12. L'arrêté contesté vise le 3° précité de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et comporte l'énoncé des considérations de fait sur lesquelles le préfet de la Haute-Garonne s'est fondé pour rejeter la demande de titre de séjour de M. A.... Par suite et en application des dispositions citées au point précédent, la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être considérée comme suffisamment motivée. Par ailleurs, il ne ressort ni de cette motivation, ni des autres pièces du dossier que l'autorité préfectorale n'aurait pas procédé à un examen complet de la situation particulière de l'appelant avant de prononcer la mesure d'éloignement litigieuse à son encontre.
13. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, désormais reprises à l'article L. 611-3 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; (...) ".
14. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessus, les certificats médicaux les plus récents produits par le requérant ne sont pas de nature à établir que, contrairement à ce qu'a retenu le collège médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à l'occasion de l'examen de la demande de renouvellement de son titre de séjour pour soins, M. A... ne pourrait pas bénéficier d'une prise ne charge adaptée à son état de santé en cas de retour dans son pays d'origine. Par conséquent, les dispositions précitées n'ont pas été méconnues.
15. En quatrième lieu, pour les mêmes motifs que ceux mentionnés au point 5 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de la Haute-Garonne aurait violé l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales rappelé au point 8.
En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :
16. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français n'est pas établie. Par voie de conséquence, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination serait dépourvue de base légale.
17. En deuxième lieu, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que le préfet n'aurait pas procédé à un examen suffisant de la situation de M. A... avant de déterminer le pays vers lequel l'intéressé pourrait être renvoyé. L'appelant n'a présenté aucune demande d'asile depuis son arrivée en France et ne soutient notamment pas qu'il pourrait être exposé à des risques de traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas d'éloignement vers son pays d'origine.
18. En troisième lieu, compte tenu de l'ensemble des éléments exposés aux points précédents, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'en fixant l'Algérie comme pays de renvoi, le préfet de la Haute-Garonne aurait méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales rappelé au point 8.
19. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulouse a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
20. Le présent arrêt rejette les conclusions à fin d'annulation et n'implique aucune mesure d'exécution particulière au sens des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative. Par suite, les conclusions à fin d'injonction doivent être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
21. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme réclamée par l'appelant au titre des frais non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me Claire Dujardin et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Haute-Garonne.
Délibéré après l'audience du 17 mai 2023, à laquelle siégeaient :
M. Chabert, président,
M. Haïli, président assesseur,
M. Jazeron, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er juin 2023.
Le rapporteur,
F. JazeronLe président,
D. Chabert
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
2
N° 22TL20830