Vu la requête, enregistrée le 24 décembre 2012, présentée pour M. C...A...demeurant..., par Me Gabbay, avocat ; M. A... demande à la Cour :
1° d'annuler le jugement n°1205364 en date du 3 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté en date du 4 juin 2012 du préfet de la Seine-Saint-Denis refusant de lui délivrer un titre de séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination de la mesure d'éloignement ;
2° d'annuler pour excès de pouvoir cet arrêté ;
3° d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer un titre de séjour à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4° de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français sont insuffisamment motivées ;
- la décision de refus de séjour ne révèle aucun examen de sa situation personnelle ;
- la décision de refus de séjour est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation tant personnelle que professionnelle ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la Direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE) a, à tort, considéré que la demande de renouvellement de titre de séjour était fondée sur l'accord bilatéral franco-tunisien relatif aux échanges de jeunes professionnels ; qu'elle n'a pas procédé à un examen attentif de sa situation ;
- à l'appui de sa demande d'autorisation de travail, il a produit un contrat à durée indéterminée en qualité d'employé polyvalent de restauration qui relève de la liste des métiers ouverts aux ressortissants tunisiens ;
- il remplissait les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-10 alinéas 1 et 3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- il est parfaitement intégré en France ;
- il avait bien introduit une demande de titre de séjour en qualité de salarié ;
- le domaine dans lequel il postule manque de main d'oeuvre ;
- l'obligation de quitter le territoire français attaquée est entachée d'un défaut de base légale ;
- il était en droit de bénéficier d'un titre de séjour ; qu'ainsi aucune mesure d'éloignement ne pouvait être prise à son encontre ;
- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité par voie de conséquence de la décision de refus de séjour qui la fonde ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
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Vu les autres pièces du dossier ;
Vu la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
Vu l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 en matière de séjour et de travail ;
Vu le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
Vu le code de justice administrative ;
Vu la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public ;
Vu le décret n° 2004-579 du 17 juin 2004 portant publication de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne relatif aux échanges de jeunes professionnels, signé à Tunis le 4 décembre 2003 ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 13 juin 2013 :
- le rapport de Mme Lepetit-Collin, premier conseiller,
- les conclusions de M. Soyez, rapporteur public,
- et les observations de MeB..., substituant Me Gabbay, pour M. A...;
1. Considérant que M.A..., ressortissant tunisien né le 26 février 1986, relève régulièrement appel du jugement n° 1205364 en date du 3 décembre 2012 par lequel le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 juin 2012 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a refusé de lui délivrer un titre de séjour en qualité de salarié et l'a obligé à quitter le territoire à destination de son pays d'origine ;
Sur la décision portant refus de titre de séjour :
2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 susvisée : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : - restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ; " ; qu'aux termes de l'article 3 de cette même loi : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. " ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision attaquée comporte l'exposé des motifs de fait et de droit sur lesquels elle se fonde sans que les motifs de fait ne soient, par ailleurs, rédigés en référence à des formules stéréotypées ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;
3. Considérant, en deuxième lieu, que le requérant soutient que sa requête aurait fait l'objet d'un examen insuffisant de sa situation personnelle dans la mesure où le préfet a noté que " l'intéressé ne justifiait pas en France d'une situation personnelle et familiale à laquelle la présente décision porterait une atteinte disproportionnée au regard du but poursuivi " ; que toutefois, il est constant que le requérant a présenté sa demande de titre de séjour en qualité de salarié ; que ce n'est qu'à titre subsidiaire, et alors qu'il n'y était pas tenu, que le préfet a examiné l'atteinte susceptible d'être portée par la décision attaquée à la situation personnelle et familiale du requérant ; que, par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant ;
4. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 1er de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République tunisienne relatif aux échanges de jeunes professionnels, signé à Tunis le 4 décembre 2003 : " Les dispositions du présent Accord sont applicables à des ressortissants français ou tunisiens entrant dans la vie active ou ayant une expérience professionnelle et qui se rendent dans l'autre Etat pour approfondir leur connaissance et leur compréhension de l'Etat d'accueil et de sa langue, ainsi que pour améliorer leurs perspectives de carrière, grâce à une expérience de travail salarié dans un établissement à caractère sanitaire ou social, une entreprise agricole, artisanale, industrielle ou commerciale dudit Etat. / Ces ressortissants, ci-après dénommés " jeunes professionnels ", sont autorisés à occuper un emploi dans les conditions fixées au présent Accord, sans que la situation du marché du travail de l'Etat d'accueil, dans la profession dont il s'agit, puisse être prise en considération. Dans le cas de professions dont l'accès est soumis à une réglementation particulière, les jeunes professionnels n'en sont pas dispensés. " ; qu'aux termes de l'article 3 du même accord : " La durée autorisée de l'emploi peut varier de trois à douze mois et faire éventuellement l'objet d'une prolongation de six mois. / Avant de quitter leur pays, les jeunes professionnels français et tunisiens doivent s'engager à ne pas poursuivre leur séjour dans l'Etat d'accueil à l'expiration de la période autorisée, ni à prendre un emploi autre que celui prévu aux termes des conditions de leur entrée dans l'Etat d'accueil. / Les Parties contractantes adoptent séparément ou conjointement toute mesure visant à assurer l'effectivité du retour du jeune professionnel dans son pays. " ;
5. Considérant que M.A..., qui excipe de l'illégalité de la décision refusant de lui accorder une autorisation de travail, soutient que la DIRECCTE lui aurait, à tort, opposé la circonstance que sa demande d'autorisation de travail était fondée sur l'accord bilatéral franco-tunisien du 4 décembre 2003 relatif aux échanges de jeunes professionnels alors qu'il avait entendu demander un titre de séjour salarié ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier qu'après avoir rappelé que M. A...avait, effectivement, bénéficié d'une autorisation de travail sur le fondement de l'accord relatif aux échanges de jeunes professionnels et obtenu, sur ce fondement également, un titre de séjour en qualité de " travailleur temporaire ", la DIRECCTE lui a opposé la circonstance qu'à l'issue de cette autorisation de séjour, il n'était pas autorisé à changer de statut en France et donc à demander un nouveau titre de séjour en qualité de salarié ; qu'elle a également précisé, à titre subsidiaire, que M. A...n'avait pas produit d'autre contrat de travail en qualité de jeune professionnel qui aurait pu justifier le renouvellement de son titre de séjour, non pas donc en qualité de salarié, mais en qualité de travailleur temporaire ; que, par suite, contrairement à ce que soutient le requérant, la DIRECCTE d'Ile-de-France, qui a justement opposé au requérant la circonstance qu'il ne pouvait, en application des stipulations de l'article 3 de l'accord précité, changer de statut à l'issue de son droit au séjour à titre de jeune travailleur, a bien analysé la demande d'autorisation de travail en qualité de salarié ; que, par suite, le moyen tiré de ce que la DIRECCTE ne se serait pas livrée à un examen approfondi et personnalisé de la situation de M. A...doit être écarté comme manquant en fait ; que, de même, si le requérant soutient également que la DIRECCTE aurait dû noter que le métier pour lequel il postulait relevait de la liste annexée au décret n° 2009-905 du 24 juillet 2009, cette circonstance est, en tout état de cause, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée, dès lors que la DIRECCTE a opposé à l'intéressé l'impossibilité pour lui de changer de statut ;
6. Considérant, en quatrième lieu, que M. A...ne peut par ailleurs utilement se prévaloir de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-10 alinéas 1 et 3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que ces dispositions ne sont pas applicables aux ressortissants tunisiens pour lesquels la délivrance d'un titre de séjour salarié est régie par les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ; que ces stipulations font dès lors obstacle à l'application, aux ressortissants tunisiens qui demandent leur admission au séjour au titre d'une activité salariée, des dispositions de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
7. Considérant, en cinquième lieu, que si M. A...soutient que le préfet aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 et qu'il était en droit de bénéficier d'un titre de séjour sur leur fondement, ainsi qu'il a été dit ci-dessus les stipulations précitées de l'accord franco-tunisien du 4 décembre 2003 modifié faisaient obstacle à ce que l'intéressé, qui a bénéficié dans ce cadre d'une carte de séjour portant la mention " travailleur temporaire " obtienne le changement de statut sollicité ;
8. Considérant, en sixième lieu, que si M. A...soutient qu'il avait demandé un titre de séjour en qualité de salarié, cette circonstance n'est pas contestée et fonde justement le refus de séjour opposé par le préfet de la Seine-Saint-Denis ; que, par suite, le moyen doit être écarté comme inopérant ;
9. Considérant, en septième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que M. A...est entré en France en 2010, soit depuis deux années à la date de la décision attaquée, à l'âge de 24 ans après avoir toujours vécu dans son pays d'origine ; qu'il est célibataire et sans charge de famille sur le territoire national et ne conteste pas avoir conservé des attaches familiales dans son pays d'origine ; qu'il ne justifie pas des liens tant personnels et professionnels qu'il dit avoir noué sur le territoire national depuis son arrivée, récente, ainsi qu'il a été dit ; que, dès lors, dans ces circonstances, la décision attaquée ne peut être regardée comme portant au droit de l'intéressé de mener une vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;
10. Considérant, en huitième lieu, que le requérant qui ne fait état d'aucune circonstance justifiant que, dans le cadre de son pouvoir de régularisation, le préfet de la Seine-Saint-Denis lui accorde le bénéfice d'un droit au séjour, n'établit pas que ce dernier aurait commis une erreur manifeste d'appréciation dans l'exercice de son pouvoir de régularisation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire français :
11. Considérant qu'aux termes des dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour dans les cas prévus aux 3° et 5° du présent I, sans préjudice, le cas échéant, de l'indication des motifs pour lesquels il est fait application des II et III. (...) " ; qu'ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision de refus de séjour comporte l'exposé des motifs de fait et de droit qui la fondent ; que le moyen peut donc être écarté ;
12. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que le requérant n'établit pas qu'il était en droit de bénéficier d'un titre de séjour et qu'ainsi aucune mesure d'éloignement ne pouvait être prise à son encontre ;
13 Considérant, en deuxième lieu, que, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, en rejetant la demande de titre de séjour formée par M.A..., le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a commis aucune illégalité ; que, par suite, le moyen tiré de l'exception d'illégalité du rejet de cette demande pour contester la légalité de la décision d'éloignement doit être écarté ;
14. Considérant, en troisième lieu, que les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation, qui reprennent les éléments précédemment exposés à l'appui des conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de titre de séjour, doivent être écartés pour les mêmes motifs ;
15. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande ; que, par suite, les conclusions à fins d'injonction et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.
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N°12VE04216 2