Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. M'Hamed A... a demandé au tribunal administratif de Cergy-Pontoise d'annuler l'arrêté du 28 février 2019 par lequel le préfet de police de Paris a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai.
Par un jugement n° 2000005 du 12 novembre 2020, le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés le 20 octobre 2021 et le 28 novembre 2022, M. A..., représenté par Me Boiardi, avocat, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 12 novembre 2020 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 28 février 2019 du préfet de police de Paris ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de Paris de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait de nouveau statué sur sa demande ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à Me Boiardi en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sous réserve de sa renonciation au bénéfice de l'aide juridictionnelle.
Il soutient que :
Sur le refus de titre de séjour :
- la décision est insuffisamment motivée et entachée d'un défaut d'examen sérieux ;
- elle méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme, et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du pouvoir discrétionnaire du préfet ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- elle est illégale par voie d'exception ;
- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne des droits de l'homme et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
- elle est illégale par voie d'exception.
Par un mémoire en défense enregistré le 22 juin 2022, le préfet de police de Paris conclut au rejet de la requête.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 30 juin 2021 du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal judiciaire de Versailles.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 en matière de séjour et d'emploi ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. M'Hamed A..., ressortissant marocain né le 28 novembre 1966, entré en France le 12 février 2004 selon ses déclarations, s'est vu délivrer un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, valable du 21 juillet 2016 au 20 juillet 2017. Le 17 décembre 2018, il a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement de ces dispositions et sur celles du 7° de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du même code. Par un arrêté du 28 février 2019, le préfet de police de Paris a rejeté sa demande, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office à l'expiration de ce délai. M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté.
Sur le refus de titre de séjour :
2. En premier lieu, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour vise notamment le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et mentionne que M. A... est entré en France en 2004 selon ses déclarations, que le collège de médecins de l'OFII a considéré que si son état de santé nécessitait une prise en charge médicale, il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, qu'il n'était pas en mesure d'attester de façon probante d'une ancienneté de résidence de plus de dix ans, qu'il ne justifie pas de considérations humanitaires pour des motifs exceptionnels pour justifier son admission au séjour au titre de la vie privée et familiale ou en tant que salarié, qu'il est célibataire et sans charge de famille, qu'il ne justifie pas être démuni d'attaches dans son pays d'origine. Elle est ainsi suffisamment motivée, contrairement à ce que soutient le requérant et il ne ressort pas de ses termes que le préfet de police de Paris n'aurait pas procédé à un examen sérieux de la situation de l'intéressé.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...). ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11, alors en vigueur, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et repris à l'article L.423-23 de ce code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit (...) : 7° À l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. (...). ".
4. M. A... soutient qu'il est entré en France en 2004, que son père, titulaire d'une carte de résident, et ses deux frères, de nationalité française, y résident, qu'il n'a plus aucune attache familiale au Maroc, que le centre de ses intérêts privés et familiaux se situe sur le territoire français où il a travaillé quand il a été régularisé, et qu'il souffre d'une affection particulièrement grave qui doit être soignée en France. Toutefois, le requérant ne justifie pas de la continuité de son séjour en France depuis 2004. En outre, M. A..., âgé de cinquante-trois ans à la date de la décision en litige, est célibataire et sans enfant et ne fournit aucun élément précis sur les liens de toute nature qu'il aurait noués en France, n'établit, ni n'allègue d'ailleurs, que sa présence auprès des membres de sa famille y séjournant revêtirait pour lui un caractère indispensable. Il ne justifie pas davantage de circonstances particulières faisant obstacle à ce qu'il poursuive sa vie à l'étranger et, en particulier, dans son pays d'origine où il n'établit pas être dépourvu de toute attache personnelle ou familiale. Enfin, il n'apporte pas d'élément de nature à remettre en cause l'appréciation du préfet de police sur la possibilité de bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Dans ces conditions, la décision attaquée ne peut être regardée, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions du séjour en France de l'intéressé, comme ayant porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations et des dispositions précitées, ainsi que de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 9 de l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. (...) " L'article 3 du même accord stipule que : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent accord, reçoivent après contrôle médical et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention ''salarié'' (...). " Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile alors en vigueur et repris à l'article L. 435-1 de ce code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. / (...). ".
6. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaires prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 alors en vigueur n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte, mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France, soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant marocain souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987, au sens de l'article 9 de cet accord. Toutefois, les stipulations de cet accord n'interdisent pas au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation à un ressortissant marocain qui ne remplirait pas les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit d'un titre de séjour en qualité de salarié.
7. M. A... ne démontre pas, en ayant travaillé en tant qu'agent vacataire pour la mairie de Paris entre les mois d'avril 2017 et août 2018 pour une durée hebdomadaire d'environ 13 heures et en tant qu'agent régulateur pour la Régie autonome des transports parisiens entre le 1er juillet 2018 et le 21 mars 2019 pour une durée mensuelle de 87 heures, une insertion sociale ou professionnelle stable et ancienne sur le territoire. Ainsi, l'intéressé ne justifie pas de l'existence de motifs exceptionnels de nature à justifier la mise en œuvre par le préfet de son pouvoir discrétionnaire de régularisation. Par ailleurs, ainsi qu'il a été dit au point 4, M. A... ne justifie pas davantage de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels pour une admission exceptionnelle au titre de la vie privée et familiale. Par suite, le préfet de police de Paris n'a pas commis d'erreur manifeste dans son appréciation de cette situation au regard des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur l'obligation de quitter le territoire :
8. En premier lieu, la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté.
9. En second lieu, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 4.
Sur la décision fixant le pays de renvoi :
10. La décision obligeant M. A... à quitter le territoire n'étant pas illégale, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision doit être écarté.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué le tribunal administratif de Cergy-Pontoise a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent par conséquent être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressé au préfet de police de Paris.
Délibéré après l'audience du 1er décembre 2022, à laquelle siégeaient :
M. Brotons, président,
Mme Le Gars, présidente assesseure,
Mme Bonfils, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 16 décembre 2022.
La rapporteure,
A-C. B...Le président,
S. BROTONS
La greffière,
V. MALAGOLI
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme
La greffière,
N° 21VE02846 2