CASSATION sur le pourvoi formé par :
- l'administration des Douanes, partie intervenante,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Metz, chambre correctionnelle, en date du 6 février 1997, qui l'a déboutée de ses demandes après relaxe de Patrick X... et Patrick Y... du chef d'importation illicite de marchandises prohibées.
LA COUR,
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 38-4, 215 bis, 414, 419, 426, alinéa 7, du Code des douanes, 1er et suivants de la loi du 15 juillet 1975 modifiée par la loi du 13 juillet 1992, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs et manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé la relaxe au profit des prévenus du chef d'importation sans justificatifs de déchets industriels banals ;
" aux motifs que les décrets du 23 mars et du 18 août 1992 relatifs à l'importation, l'exportation, au transit de déchets, quelle que soit leur appartenance à l'une des annexes de ces textes réglementaires, s'appliquent exclusivement aux déchets générateurs de nuisances au sens de l'article 2 de la loi du 15 juillet 1975 ; que ce dernier définit le déchet nocif comme étant celui qui porte atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement ; que l'information a établi que les déchets litigieux ne pouvaient être considérés comme nuisibles à la santé de l'homme et à l'environnement puisque les prévenus de ce chef ont bénéficié d'un non-lieu définitif ; que l'administration des Douanes ne démontre ni ne soutient que les déchets sont générateurs de nuisances comme portant atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement ; que, dans ces conditions, l'importation et la détention des déchets en question pour lesquels l'innocuité a été judiciairement reconnue, n'était pas interdite même en l'absence d'autorisation préfectorale ;
" alors que les prévenus qui avaient bénéficié d'un non-lieu partiel du chef du délit d'importation de déchets nuisibles à la santé de l'homme et à l'environnement étaient renvoyés devant le tribunal correctionnel pour avoir importé des " déchets industriels banals " sans avoir obtenu l'autorisation préfectorale exigée ; que le décret du 18 août 1992 a ajouté après l'annexe II du décret du 23 mars 1990 une annexe III visant " les déchets soumis aux dispositions du chapitre II du titre II, les déchets des ménages, les déchets du commerce, de l'artisanat et de l'industrie relevant des mêmes filières que les déchets des ménages " ; que ce texte subordonne l'importation de ces déchets à une autorisation préfectorale ; que, pour infirmer le jugement entrepris et prononcer la relaxe des prévenus, la cour d'appel a relevé que les déchets litigieux n'étaient pas nocifs comme portant atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a ajouté une condition aux textes susvisés qu'elle a violés " ;
Vu les articles 38-4, 414 et 426 du Code des douanes ;
Attendu qu'ont le caractère de marchandises prohibées au sens de l'article 38-4 du Code des douanes les déchets relevant de la loi n° 75-633 du 15 juillet 1975, relative à l'élimination des déchets et à la récupération des matériaux et des décrets des 23 mars 1990 et 18 août 1992 pris pour son application ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il infirme que Patrick X... et Patrick Y... ont importé du Luxembourg des déchets des ménages et des déchets du commerce de l'artisanat et de l'industrie, au sens de l'annexe III du décret du 23 mars 1990 modifié, en vue d'une mise à la décharge dans le département de la Meuse ; qu'ils ont été poursuivis pour avoir introduit en France des produits interdits au regard de l'article 34-1 du décret du 20 mars 1990 précité pris en application de l'article 23-1 de la loi du 15 juillet 1975 et assimilés à des marchandises prohibées par l'article 38-4 du Code des douanes ;
Attendu que, pour les relaxer de ce chef, la cour d'appel énonce que l'importation, l'exportation et le transit des déchets n'est interdit par les décrets des 23 mars 1990 et 18 août 1992, nonobstant leur classification à l'une des annexes prévues par ces textes, que pour autant qu'ils sont générateurs de nuisance au sens de l'article 2 de la loi du 15 juillet 1975 et que les déchets litigieux ne pouvaient être considérés comme portant atteinte à la santé de l'homme et à l'environnement ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, alors qu'aux termes de l'article 34-1 du décret du 23 mars 1990 modifié auquel renvoie l'article 38-4 du Code des douanes, est prohibée l'importation en vue d'une mise à la décharge des déchets relevant de l'annexe III dudit décret, et que n'échappent à cette prohibition que ceux en provenance d'un Etat membre de la Communauté économique européenne dont l'importation est prévue par un plan d'élimination des déchets établi en application de l'article 10 de la loi du 15 juillet 1975 ou par un accord conclu entre la France et l'Etat de provenance, la cour d'appel, qui n'a pas relevé que le transfert en France des déchets incriminés ait eu lieu dans le cadre de cette dérogation, n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Metz en date du 6 février 1997 et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi,
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Colmar.