LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société de Fourvoirie, la société Entreprise Botta, M. X..., en qualité de commissaire à l'exécution du plan de la société Entreprise Botta et M. Y..., en qualité de représentant des créanciers de la même société, que sur les pourvois incidents relevés par la société AGF et par la société Engrenages et réducteurs Citroën Messian Durand ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur renvoi après cassation (Com., 29 avril 2003, pourvois n° 01-00.585 et n° 01-00.522), que la société Citroën Messian Durand engrenages et réducteurs (société CMD) a vendu à la société Botta entreprise des turbines destinées à une centrale hydroélectrique ; que la société de Fourvoirie qui exploite cette centrale, s'étant plainte de la défectuosité des turbines, a assigné la société CMD en résolution de la vente ; que la société CMD a appelé en garantie son assureur, la société AGF ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident formé par la société CMD, qui est préalable :
Attendu que ce moyen ne serait pas de nature à permettre l'admission du pourvoi ;
Et sur le premier moyen du pourvoi incident formé par la société AGF, qui est recevable :
Attendu que la société AGF fait grief à l'arrêt de l'avoir dit tenue à garantir son assurée des condamnations prononcées contre celle-ci au titre du préjudice immatériel subi par la société de Fourvoirie et d'avoir accueilli la société de Fourvoirie en son action directe à son encontre et de l'avoir condamnée in solidum avec la société CMD à payer à la société de Fourvoirie la somme de 512 394,10 euros au titre de la perte de chiffre d'affaires, alors, selon le moyen, qu'en présence d'une clause de la police aux termes de laquelle est exclu de la garantie le préjudice autre que corporel et immatériel consécutif que subit l'utilisateur par suite d'un manque de rendement des biens objet des prestations de l'assuré, qui ne serait pas la conséquence d'un vice de matière ou de fabrication ou d'une erreur ou malfaçon commise dans le montage, la cour d'appel ne pouvait en écarter l'application au seul motif que la société CMD. et la société de Fourvoirie invoquent un préjudice immatériel sans rechercher, comme elle y était invitée quelle était l'origine de ce préjudice immatériel et si celui-ci n'était pas exclu de la garantie du seul fait qu'il n'était pas la conséquence d'un vice de matière ou de fabrication ou d'une erreur ou malfaçon commise dans le montage mais résultait de la méconnaissance par l'acheteur de son obligation de délivrance ; qu'en se fondant uniquement sur la nature du préjudice invoqué et non sur l'origine de celui-ci pourtant précisée par la clause d'exclusion, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de base légale au regard de l'article 1134 du code civil ;
Mais attendu que l'arrêt retient dans l'exercice de son pouvoir souverain d‘appréciation que le contrat excluait de la garantie le préjudice autre que corporel ou matériel et que le préjudice dont la garantie était réclamée était relatif à des pertes de chiffres d'affaires et constituait un préjudice immatériel ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à la recherche prétendument omise, a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le moyen unique du pourvoi principal :
Vu les articles 1610 et 1611 du code civil ;
Attendu que pour condamner la société de Fourvoirie à payer à la société CMD la somme de 158 090 euros au titre du solde du prix de vente, l'arrêt, après avoir relevé que la société de Fourvoirie demandait qu'il soit opéré une réfaction du prix de vente compte tenu de la défaillance de la société CMD et que cette réfaction soit fixée à la somme de 130 801 euros tenant compte des factures de remise en état des turbines qu'elle a dû régler et des nombreuses interventions de son gérant sur le site, retient que la société de Fourvoirie est redevable du solde du prix des turbines, que par le fait des indemnités qui ont été allouées elle a été remise dans la situation qui aurait été la sienne si le matériel n'avait présenté aucune défaillance ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la réfaction du prix a un objet distinct de celui des dommages-intérêts réparant les conséquences dommageables de la non-conformité de la chose vendue, la cour d'appel, qui n'a alloué par ailleurs à la société de Fourvoirie que des dommages-intérêts pour perte de chiffres d'affaires, a violé les textes susvisés ;
Et sur le second moyen du pourvoi incident formé par la société AGF :
Vu l'article 4 du nouveau code de procédure civile ;
Attendu que pour condamner la société AGF à garantir la société CMD des condamnations prononcées à son encontre au titre du préjudice immatériel de la société de Fourvoirie et la condamner à indemniser le tiers lésé, la société de Fourvoirie, au titre de la perte de son chiffre d'affaires pour plusieurs périodes, l'arrêt retient que les AGF n'ont ni répondu à la demande de la société de Fourvoirie concernant la perte du chiffre d'affaires pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1995 ni répliqué à la demande portant sur le chiffre d'affaires du 1er janvier au 31 décembre 1996 ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la société AGF avait fait valoir que sa condamnation ne pourrait intervenir que dans les termes et limites de la police souscrite à savoir notamment l'application de la franchise contractuelle égale à 10 % du montant du sinistre avec un minimum de 200 000 francs et un maximum de 500 000 francs, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné in solidum avec la société Engrenages et réducteurs Citroën Messian Durand la société AGF à payer à la société de Fourvoirie au titre de la perte de chiffre d'affaires les sommes de 384 859,30 euros pour la période du 1er janvier 1990 au 31 décembre 1995, 110 390 euros pour la période du 1er janvier 1996 au 31 décembre 1996 et de 17 144,80 euros pour la période du 1er janvier 1997 au 2 avril 1997, condamné la SNC de Fourvoirie à payer à la société Engrenages et réducteurs Citroën Messian Durand la somme de 158 090 euros au titre du solde du prix de vente avec intérêts au taux légal à compter du 15 décembre 1998 et débouté la société de Fourvoirie du surplus de ses demandes, l'arrêt rendu le 19 septembre 2006, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, sur ces points, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Paris, autrement composée ;
Condamne la société Engrenages et réducteurs Citroën Messian Durand aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, rejette les demandes ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-deux janvier deux mille huit.