LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 26 mars 2010), que M. X..., titulaire auprès de la Banque nationale de Paris devenue société BNP Paribas (la banque), d'un compte ouvert en 1983 que celle-ci avait clôturé le 4 octobre 1996 en raison de l'importance du solde débiteur, l'a assignée en déchéance des intérêts en invoquant l'absence d'offre préalable assortissant l'ouverture de crédit consentie; que, par arrêt du 25 juin 2002 ultérieurement rectifié le 8 avril 2003, la cour d'appel a condamné M. X... à payer à la banque le montant du solde débiteur du compte, diminué, dans la limite du délai de prescription de droit commun de dix ans, des intérêts moratoires indûment retenus par la banque; que le pourvoi formé par M. X... contre cet arrêt a été rejeté le 12 avril 2005 ; que, le 3 octobre 2006, M. X... a assigné la banque en paiement par compensation d'une certaine somme et a demandé la condamnation de la banque à produire sous astreinte certaines pièces ;
Sur le premier moyen :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir jugé irrecevable sa demande tendant à la condamnation de la banque à lui payer une certaine somme sur le fondement de la forclusion encourue par la banque à se prévaloir du solde débiteur du compte de dépôt en raison d'un incident de paiement intervenu le 15 mars 1990 non régularisé, alors, selon le moyen :
1°/ que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet du jugement et a été tranché dans son dispositif ; que l'arrêt du 25 juin 2002 s'était borné à statuer sur la demande de M. X... faisant valoir que la banque était déchue de son droit aux intérêts pour le condamner au paiement d'une somme correspondant à celle réclamée par la banque diminuée du montant des intérêts indûment retenus sur le compte ; d'où il résulte que la cour d'appel ne pouvait opposer l'autorité de la chose précédemment jugée à la demande nouvelle formée par M. X... de condamnation de la banque sur le fondement de la forclusion encourue par application des dispositions de l'article L 311-37 du code de la consommation qui n'avait pas le même objet et n'avait pas été tranchée dans le dispositif sans violer l'article 1351 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
2°/ que, dans ses conclusions d'appel, M. X..., pour répondre à la banque qui lui reprochait de ne pas avoir précédemment opposé la forclusion intervenue en 1992, rappelait qu'il avait lors de l'instance précédente expressément invoqué la forclusion et que si la cour d'appel dans son arrêt du 25 juin 2002 avait dans sa motivation relevé que la banque était forclose pour la période du 20 juin 1989 au 20 juin 1990 elle n'en avait tiré aucune conséquence dans le dispositif qui était ainsi entaché d'une omission de statuer que la cour d'appel était habilitée à réparer selon le droit commun, ainsi que l'avait jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 25 juin 1997 rapporté au Bulletin ; qu'en s'abstenant de toute explication sur ces conclusions de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
Mais attendu, d'une part, que c'est par une exacte application de l'article 1351 du code civil relatif à l'autorité de la chose jugée, que la cour d'appel, a retenu que la forclusion invoquée sur le fondement de l'article L. 311-37 du code de la consommation constitue non pas une demande mais un moyen qu'il appartenait à M. X... d'opposer à la demande de la banque lors de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 25 juin 2002 ;
Attendu, d'autre part, qu'après avoir relevé que M. X... prétendait que le 15 mars 1990 s'était produit un incident de paiement dans le fonctionnement du compte, au sens de l'article L 311-37 du code de la consommation et que cette date était le point de départ du délai biennal de forclusion opposable selon lui à la banque, l'arrêt retient, par motifs adoptés, d'abord, que l'arrêt du 25 juin 2002 a dit que la banque renonçait à toute demande relative à la période d'un an (1989-1990) pendant laquelle une convention de découvert existait et relevé que de toutes façons elle était forclose, ensuite, que M. X... ne peut réclamer le paiement d'intérêts sur la base de l'article L 311-33 du code de la consommation, les dispositions de droit commun étant applicables, enfin, que l'arrêt du 25 juin 2002 a définitivement fixé la créance de la banque, de sorte que la réclamation de M. X... est irrecevable s'agissant du solde débiteur du compte au 15 mars 1992; que par ces constatations, appréciations et énonciations faisant ressortir qu'à l'exception de la période contractuelle d'un an susvisée, les dispositions en cause du code de la consommation n'étaient pas applicables au découvert litigieux, la cour d'appel a répondu aux conclusions prétendument omises ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté ses demandes tendant à voir ordonner à la banque de communiquer la convention régissant le compte n° 04 32 84 21 suivi de 57 prétendument ouvert en 2003 ou, à défaut, "ceux" du compte ouvert en 1983 pour la période postérieure au 19 juillet 2000, ainsi que tous les relevés périodiques de ce compte depuis son ouverture jusqu'à la date de l'arrêt, alors, selon le moyen :
1°/ que M. X... réclamait subsidiairement qu'il soit enjoint à la banque de communiquer la convention régissant le compte prétendument ouvert en 2003 ou à défaut celle du compte ouvert en 1983 «pour la période postérieure au 19 juillet 2000» ainsi que tous les relevés périodiques de ce compte depuis son ouverture «jusqu'à la date de l'arrêt» ; qu'en retenant que M. X... demandait subsidiairement d'enjoindre à la banque de communiquer la convention régissant le compte ouvert prétendument en 2003 ainsi que tous les relevés périodiques depuis son ouverture «jusqu'à l'arrêt du 25 juin 2002», lorsqu'il réclamait ces documents jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir dans la présente instance, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions d'appel en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2°/ qu'aux termes de l'article L 312-1-1 du code monétaire et financier dans sa rédaction applicable, la banque avait l'obligation de faire signer à M. X... une convention de compte de dépôt pour les comptes ouverts à compter du 28 février 2003 et pour les comptes ouverts antérieurement de lui fournir à sa demande un projet de convention ; qu'à défaut de convention de compte de dépôt, la banque avait l'obligation d'informer une fois par an jusqu'au 31 décembre 2009 M. X... de la possibilité d'en signer une; et sauf si la convention de compte en disposait autrement, toutes les opérations en crédit et en débit devaient être portées à sa connaissance à intervalle régulier n'excédant pas un mois ; d'où il résulte que la cour d'appel ne pouvait rejeter les demandes de M. X... qui n'avait pu obtenir de la banque qu'elle se conforme à ses obligations légales sans violer le texte susvisé ;
Mais attendu, d'une part, que dans ses conclusions d'appel, M. X... demandait qu'il soit ordonné à la banque de communiquer "la convention régissant le compte n° 04328421 suivi de 57" ainsi que les relevés périodiques de ce compte "depuis son ouverture jusqu'à la date de l'arrêt"; que c'est par une interprétation souveraine que les termes ambigus de ces écritures rendaient nécessaire, que les juges du fond ont estimé qu'il s'agissait de l'arrêt du 25 juin 2002 ;
Attendu, d'autre part, que l'arrêt retient souverainement que rien ne permet de supposer qu'il y ait eu d'autres relevés que ceux figurant dans les dernières écritures de M. X... déposées le 4 janvier 2010 ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir condamné à payer une certaine somme à la banque à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, qu'en se bornant à constater la confusion des demandes présentées lors d'une instance précédente et le peu de clarté de celles nouvelles formées plus de 4 ans après l'arrêt rendu précédemment, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser l'abus commis par M. X... de son droit d'agir en justice ; qu'elle a ainsi violé l'article 32-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 1382 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant retenu, par motifs adoptés, la confusion des demandes de M. X... et l'engagement par lui d'une nouvelle procédure, plus de quatre ans après l'arrêt de la cour d'appel ayant autorité de chose jugée, la cour d'appel a pu décider que M. X... avait fait dégénérer en abus son droit d'agir en justice; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu les articles 700 du code de procédure civile et 37 de la loi du 10 juillet 1991, rejette la demande ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq juin deux mille douze.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Ancel, Couturier-Heller et Meier-Bourdeau, avocat aux Conseils pour M. X...
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir jugé M. X... irrecevable en sa demande tendant à la condamnation de la BNP PARIBAS au paiement d'une somme de 108 118,08 € avec intérêts légaux à compter du 15 mars 1992 sur le fondement de la forclusion encourue par la banque à se prévaloir du solde débiteur du compte de dépôt en raison d'un incident de paiement intervenu le 15 mars 1990 non régularisé ;
Aux motifs que «par arrêt du 25 juin 2002, cette cour a condamné M. X... à payer à la société BNP PARIBAS la somme de 230 625,47 Frs soit 35 158,62 € outre intérêts au taux légal à compter du 4 octobre 1996 ;
Que M. X... prétend que le 15 mars 1990 il y a eu un incident de paiement dans le fonctionnement du compte n° 043284 21 qu'il avait ouvert auprès de la société BNP devenue BNP PARIBAS au sens de l'article L 311-37 du code de la consommation, cette date étant le point de départ du délai biennal de forclusion opposable à la banque ;
Que la forclusion qui est une fin de non-recevoir constitue non pas une demande mais un moyen qu'il appartenait à M. X... d'opposer à la demande de la société BNP lors de l'instance ayant abouti à l'arrêt du 25 juin 2002, que cet arrêt ayant définitivement fixé la créance de la BNP PARIBAS à son égard, l'autorité de chose jugée qui s'attache à cette décision s'oppose à ce qu'il puisse remettre en question les condamnations dont il a fait l'objet en invoquant la forclusion de l'article L 311-37 du code de la consommation ;
Que dans ces conditions c'est à bon droit que le tribunal par des motifs pertinents que la cour adopte a estimé que la contestation de M. X... sur ce point était irrecevable s'agissant du solde débiteur du compte au 15 mars 1992» ;
Alors que l'autorité de la chose jugée n'a lieu qu'à l'égard de ce qui fait l'objet du jugement et a été tranché dans son dispositif ;
Que l'arrêt du 25 juin 2002 s'était borné à statuer sur la demande de M. X... faisant valoir que la banque était déchue de son droit aux intérêts pour le condamner au paiement d'une somme correspondant à celle réclamée par la banque diminuée du montant des intérêts indûment retenus sur le compte ;
D'où il résulte que la cour d'appel ne pouvait opposer l'autorité de la chose précédemment jugée à la demande nouvelle formée par M. X... de condamnation de la banque sur le fondement de la forclusion encourue par application des dispositions de l'article L 311-37 du code de la consommation qui n'avait pas le même objet et n'avait pas été tranchée dans le dispositif sans violer l'article 1351 du code civil, ensemble l'article 480 du code de procédure civile ;
Alors en tout état que dans ses conclusions d'appel (p. 14), M. X..., pour répondre à la banque qui lui reprochait de ne pas avoir précédemment opposé la forclusion intervenue en 1992, rappelait qu'il avait lors de l'instance précédente expressément invoqué la forclusion et que si la cour d'appel dans son arrêt du 25 juin 2002 avait dans sa motivation relevé que la banque était forclose pour la période du 20 juin 1989 au 20 juin 1990 elle n'en avait tiré aucune conséquence dans le dispositif qui était ainsi entaché d'une omission de statuer que la cour d'appel était habilitée à réparer selon le droit commun, ainsi que l'avait jugé la Cour de cassation dans un arrêt du 25 juin 1997 rapporté au Bulletin ;
Qu'en s'abstenant de toute explication sur ces conclusions de M. X..., la cour d'appel a violé l'article 455 du CPC ;
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir débouté M. X... de ses demandes tendant à voir ordonner à la BNP PARIBAS de communiquer la convention régissant le compte «n° 04 32 84 21 suivi de 57» prétendument ouvert en 2003 ou, à défaut, ceux du compte ouvert en 1983 pour la période postérieure au 19 juillet 2000, ainsi que tous les relevés périodiques de ce compte depuis son ouverture jusqu'à la date de l'arrêt ;
Aux motifs que «M. X... fait état d'un certain nombre d'extraits de compte édités par la société BNP PARIBAS après le 4 octobre 1996, et demande l'organisation d'une expertise pour vérifier notamment si les prélèvements effectués sont conformes aux stipulations contractuelles, et subsidiairement d'enjoindre à la société BNP PARIBAS de communiquer la convention régissant le compte n° 04328421 57 ai nsi que tous les relevés périodiques de ce compte depuis son ouverture jusqu'à l'arrêt du 25 juin 2002 ;
Que rien ne permet de supposer qu'il y a eu d'autres relevés que ceux figurant dans ses dernières écritures déposées le 4 janvier 2010, qu'il appartenait à M. X... de les exploiter, qu'il n'incombe pas à la cour de pallier sa carence en organisant une expertise ; que ses demandes seront rejetées» ;
Et aux motifs adoptés que «sur la demande de production de relevés de compte»
«la cour d'appel d'Aix en Provence avait déjà refusé cette production page 7 de son arrêt, considérant que les précédents relevés produits devant le conseiller de la mise en état n'apportaient rien aux débats ;
Outre cet élément de droit, il résulte des documents produits par M. Pierre X... lui-même que le compte associé à son compte-titres et pour lequel il reçoit des avis destinés aux services fiscaux ne porte plus depuis 2003 le numéro du compte de dépôt initial comme numéro de compte de référence mais le n° 04 32 84 21 suivi de 57 ;
Non seulement, M. Pierre X... ne démontre pas avoir réclamé par écrit de façon amiable les relevés de ce compte précis mais en outre il ne peut ignorer qu'un compte titres a besoin d'un compte de transit pour les opérations d'achat et de vente d'actions ou d'obligations ;
Dès lors que M. Pierre X... a entendu continuer des relations contractuelles avec la SA BNP PARIBAS, il lui appartient de s'adresser directement à sa banque pour obtenir les pièces réclamées sans donner un aspect contentieux systématique, le litige sur le découvert étant ancien et définitivement jugé» ;
Alors que M. X... réclamait subsidiairement qu'il soit enjoint à la banque de communiquer la convention régissant le compte prétendument ouvert en 2003 ou à défaut celle du compte ouvert en 1983 «pour la période postérieure au 19 juillet 2000» ainsi que tous les relevés périodiques de ce compte depuis son ouverture «jusqu'à la date de l'arrêt» ;
Qu'en retenant que M. X... demandait subsidiairement d'enjoindre à la banque de communiquer la convention régissant le compte ouvert prétendument en 2003 ainsi que tous les relevés périodiques depuis son ouverture «jusqu'à l'arrêt du 25 juin 2002», lorsqu'il réclamait ces documents jusqu'à la date de l'arrêt à intervenir dans la présente instance, la cour d'appel a dénaturé ses conclusions d'appel en violation de l'article 4 du CPC ;
Alors en tout état que aux termes de l'article L 312-1-1 du code monétaire et financier dans sa rédaction applicable, la banque avait l'obligation de faire signer à M. X... une convention de compte de dépôt pour les comptes ouverts à compter du 28 février 2003 et pour les comptes ouverts antérieurement de lui fournir à sa demande un projet de convention ; qu'à défaut de convention de compte de dépôt, la banque avait l'obligation d'informer une fois par an jusqu'au 31 décembre 2009 M. X... de la possibilité d'en signer une ; et sauf si la convention de compte en disposait autrement, toutes les opérations en crédit et en débit devaient être portées à sa connaissance à intervalle régulier n'excédant pas un mois ;
D'où il résulte que la cour d'appel ne pouvait rejeter les demandes de M. X... qui n'avait pu obtenir de la banque qu'elle se conforme à ses obligations légales sans violer le texte susvisé ;
TROISIEME MOYEN DE CASSATION :
Le moyen reproche à l'arrêt confirmatif attaqué d'avoir condamné M. X... à payer à la Sa BNP PARIBAS la somme de 2 000 € à titre de dommages intérêts sur la base de l'article 32-1 du CPC ;
Aux motifs propres que «c'est à bon droit par des motifs que la cour fait siens que le tribunal a retenu le caractère abusif de la procédure engagée par M. X... et a condamné ce dernier à payer à la société BNP PARIBAS la somme de 1 000 € à titre de dommages-intérêts» ;
Et aux motifs adoptés que «la cour d'appel d'Aix en Provence avait déjà relevé la confusion des demandes émanant de M. Pierre X... et eu égard au peu de clarté de celles présentées devant la présente juridiction, plus de 4 ans après l'arrêt de la Cour, ayant l'autorité de la chose jugée, il y a lieu de considérer l'attitude de M. Pierre X... abusive et de sanctionner celle-ci par l'allocation de la somme de 2 000 € à titre de dommages-intérêts» ;
Alors qu'en se bornant à constater la confusion des demandes présentées lors d'une instance précédente et le peu de clarté de celles nouvelles formées plus de 4 ans après l'arrêt rendu précédemment, la cour d'appel a statué par des motifs impropres à caractériser l'abus commis par M. X... de son droit d'agir en justice ; qu'elle a ainsi violé l'article 32-1 du code de procédure civile, ensemble l'article 1382 du code civil ;