LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Lyon, 6 septembre 2012), que M. X... a, par acte notarié du 3 juillet 2007, contracté auprès de la Banque populaire Loire et Lyonnais (la banque) un emprunt afin de financer un projet de construction immobilière ; qu'après avoir débloqué la deuxième tranche de ce prêt, la banque a contre-passé l'écriture correspondant à ce versement sans en informer au préalable M. X... ; que celui-ci n'ayant pas, ultérieurement, respecté le calendrier de remboursement du prêt, la banque a prononcé la déchéance du terme ; que M. X... a recherché la responsabilité de la banque ;
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt d'avoir limité son indemnisation à la somme de 30 000 euros, correspondant aux dommages-intérêts dus par la banque pour le préjudice moral causé, alors, selon le moyen, que la cour d'appel a admis que la banque avait commis une faute en contre-passant l'écriture correspondant au déblocage de la deuxième fraction du prêt, et constaté que M. X... avait, dans le cadre de l'opération immobilière financée, émis des chèques dans l'ignorance de l'annulation du déblocage des fonds par la banque ; que les juges d'appel ne pouvaient pas, dans ces conditions, rejeter la demande de dommages-intérêts fondée sur l'échec de l'opération, au motif que le lien de causalité entre ce préjudice et la faute de la banque n'était pas établi ; qu'en statuant pourtant en ce sens, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où résultait l'existence d'un préjudice nécessairement subi par M. X..., et violé de ce fait le principe de réparation intégrale et l'article 1147 du code civil ;
Mais attendu qu'ayant relevé que les fautes commises par la banque en annulant le versement de la deuxième tranche du prêt sans en informer M. X... au préalable sont à l'origine d'une grande désorganisation de l'opération de construction, dont les travaux ont été de ce fait suspendus pendant plus de six mois, et ont causé à M. X... un préjudice moral évalué à 30 000 euros, l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, qu'à compter du mois d'avril 2008, celui-ci s'est abstenu de rembourser le prêt aux échéances prévues et que cette défaillance, qui est à l'origine de l'arrêt du financement et de la résiliation du contrat de prêt, a aggravé dans des proportions insupportables le retard pris dans l'exécution du chantier et déclenché les difficultés dont il se plaint à présent ; qu'ayant ainsi fait ressortir qu'en l'absence de relation de causalité directe et certaine entre les fautes de la banque et l'échec de l'opération immobilière, l'une des conditions de la mise en oeuvre de la responsabilité contractuelle n'était pas remplie, la cour d'appel n'a pas méconnu le principe de la réparation intégrale du préjudice ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-huit janvier deux mille quatorze.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par Me Delamarre, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen reproche à l'arrêt partiellement infirmatif attaqué d'avoir limité l'indemnisation accordée à Monsieur X... à la somme de 30.000 euros, correspondant aux dommages et intérêts dus par la SA BANQUE POPULAIRE LOIRE ET LYONNAIS pour le préjudice moral causé ;
AUX MOTIFS QUE
S'agissant des préjudices, M. X... répondait à l'administrateur judiciaire, par courrier du 9 septembre 2008, qu'il confirmait avoir appréhendé la somme de 259 133 euros pour le second acompte de la Banque populaire, "objet du litige" et qu'en fonction de la décision de la cour d'appel (qui allait intervenir le 14 octobre), il prendrait sa décision définitive pour l'intégration de ce chantier dans ESI.
Il résulte du courrier précité de cet administrateur et de cette lettre du 9 septembre que, contrairement à ce qu'a retenu le tribunal, l'opération de Geans était bien essentielle pour le groupe ESI, dont l'activité ne supposait pas nécessairement une diversité d'opération propre à le soustraire aux aléas d'une seule d'entre elles et que c'est bien l'abstention de M. X..., auquel il revenait, en tant que maître de l'ouvrage, de régler les sommes permettant aux sociétés dont il était par ailleurs actionnaire de poursuivre ce chantier essentiel pour leur équilibre financier, qui a aggravé le retard dans des proportions insupportables et déclenché les difficultés dont il se plaint à présent.
En conséquence, le retard pris par la banque à débloquer l'acompte prévu est fautif, mais ne peut être mis en relation certaine et directe avec l'échec de l'opération de Genas, ni avec la perte des revenus personnellement escomptés, moins encore avec la déconfiture des entreprises ESI et l'appel par les divers créanciers de ces dernières des cautionnements consentis par M. X....
Outre que la perte de valeur des parts sociales consécutive à l'amoindrissement du patrimoine social ne constitue pas pour les associés un préjudice personnel réparable, les réclamations indemnitaires concernant les préjudices financiers ne sont pas fondées.
Il reste, comme l'ont retenu les premiers juges, que les fautes de la banque ont désorganisé la réalisation de l'opération, retardé le projet de six mois environ, ce qui n'a cependant pu porter préjudice qu'à l'entreprise chargée des travaux, mais aussi entraîné pour M. X..., personnellement, des préjudices résultant notamment du rejet des chèques émis dans l'ignorance de l'annulation du déblocage des fonds
Sa réclamation au titre du préjudice moral est fondée à hauteur de sa demande »,
ALORS QUE
La cour d'appel a admis que la banque avait commis une faute en contre-passant l'écriture correspondant au déblocage de la deuxième fraction du prêt, et constaté que Monsieur X... avait, dans le cadre de l'opération de GENAS, émis des chèques dans l'ignorance de l'annulation du déblocage des fonds par la banque ; que les juges d'appel ne pouvaient pas, dans ces conditions, rejeter la demande de dommages-intérêts fondée sur l'échec de l'opération de GENAS, au motif que le lien de causalité entre ce préjudice et la faute de la banque ne serait pas établi ; qu'en statuant pourtant en ce sens, la Cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations d'où résultait l'existence d'un préjudice nécessairement subi par Monsieur X..., et violé de ce fait le principe de réparation intégrale et l'article 1147 du Code civil.