LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
Statuant sur le pourvoi formé par :
- M. Mehdi X...,
contre l'arrêt de la chambre de l'instruction de la cour d'appel d'AIX-EN-PROVENCE, en date du 2 mars 2017, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative d'assassinats en bande organisée, assassinats en bande organisée, association de malfaiteurs, a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention le plaçant en détention provisoire ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, préliminaire, 197, 144, 137, 591 et 593 du code de procédure pénale, des droits de la défense, défaut de motifs et manque de base légale ;
" en ce que l'arrêt attaqué a confirmé l'ordonnance du juge des libertés et de la détention portant placement en détention provisoire du demandeur ;
" aux motifs que sans méconnaître la qualité d'un article de doctrine, mais qui ne représente que l'opinion, si intéressante soit-elle, de son rédacteur, il n'est pas inutile de rappeler que, selon une jurisprudence constante et bien établie, la chambre de l'instruction, lorsqu'elle est saisie de l'unique objet de la détention provisoire, ne saurait, comme l'y invite la défense de l'appelant, se prononcer sur l'existence ni sur la pertinence de " charges " retenues à l'encontre de ce dernier ; que l'appelant ne saurait pas plus former des demandes étrangères à cet unique objet de l'appel ; qu'il peut en tout cas être observé qu'il existe des indices graves rendant vraisemblable la participation de l'appelant aux faits pour lesquels il est mis en examen ; que ces indices résultent des éléments issus de plusieurs témoignages totalement concordants recueillis sous l'anonymat, de la téléphonie permettant de situer M. Mehdi X... en lien avec les autres protagonistes du dossier, contrairement à ses dénégations, d'un alibi donné avec force précisions, mais infirmé avec la même conviction par sa compagne ; que l'information débute dans sa phase contradictoire ; qu'il est indispensable d'éviter tout contact entre les protagonistes, de même que toute pression sur les témoins, notamment ceux qui se sont manifestés nominativement ; que, dans le contexte de règlements de compte croisés dans lequel cette affaire s'inscrit, il est à craindre que M. X... ne soit l'objet de représailles sur sa personne, ce critère n'étant, en l'espèce et au vu du sort réservé à certains (dont Z...Y...) pas une vue de l'esprit ; que le fait qu'il soit détenu pour autre cause ne saurait avoir quelque pertinence, chaque titre de détention étant dans une totale indépendance par rapport aux autres et pouvant être interrompu pour des motifs extérieurs à la présente affaire criminelle ; que les information d'ores et déjà contenues dans la procédure laissent craindre que, remis en liberté, et comme il l'avait indiqué selon des écoutes téléphoniques dont la teneur figure en procédure, il ne commette de nouvelles infractions, poussé par un identique désir de vengeance ou de reconquête territoriale d'un trafic de stupéfiants ; qu'il était sorti de maison d'arrêt le 12 février 2016, soit deux mois avant les faits, pour réintégrer un établissement pénitentiaire le 20 mai de la même année ; que la lecture du bulletin numéro un du casier judiciaire enseigne, d'une part, qu'il n'a pas toujours été présent aux rendez-vous judiciaires, puisque certaines décisions ont été prononcées en son absence et que, d'autre part, les sursis dont il a bénéficié ont fait l'objet de révocations, outre des retraits de crédits de réduction de peine ; que le fait d'être père de famille ne l'a pas dissuadé de se retrouver mis en cause dans plusieurs affaires pénales, dont les faits criminels de la présente procédure, étant observé que, sorti de détention en février 2016, il devait être de nouveau incarcéré trois mois plus tard, ces deux termes entourant la période de commission des faits qui lui sont reprochés ; qu'enfin, les faits continuent de causer un trouble exceptionnel à l'ordre public, s'agissant de l'assaut par un commando lourdement armé et déterminé dans une épicerie de la cité Bassens, à un moment où se trouvaient réunis des adultes et des enfants ; que trois hommes sont morts, trois autres ont été blessés ; que l'effroi suscité dans la population et les traces retrouvées sur place témoignent de la sauvagerie de ce passage à l'acte ; qu'en conséquence, la détention provisoire doit se poursuivre, étant démontré, au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure et ci-dessus exposés, qu'elle constitue l'unique moyen de parvenir à un ou plusieurs des objectifs suivants, qui ne sauraient être atteints en cas de placement sous contrôle judiciaire ou d'assignation à résidence avec surveillance électronique :
- empêcher une concertation frauduleuse de la personne mise en examen avec ses coauteurs ou complices,
- préserver la poursuite de l'information de tous risques de pression sur les témoins,
- protéger la personne mise en examen,
- prévenir le renouvellement de l'infraction,
- garantir la représentation en justice de l'intéressé,
- mettre fin au trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité des faits, les circonstances de leur commission ou l'importance du préjudice causé ;
" alors que la formalité imposée par l'article 197 du code de procédure pénale du dépôt du dossier au greffe de la chambre de l'instruction et de sa mise à disposition des avocats antérieurement à l'audience est essentielle au droit des parties et doit être observée à peine de nullité de l'arrêt à intervenir ; qu'au nom du respect des droits de la défense, cette mise à disposition porte sur l'entier dossier ; que le demandeur avait fait valoir que le dossier de la procédure mis à la disposition de son avocat était incomplet en l'absence des fadets des lignes téléphoniques présentées comme étant celles du demandeur et ayant été exploitées par les enquêteurs ; qu'en se bornant à retenir, de manière inopérante, que, saisie de l'unique objet de la détention provisoire, elle ne saurait se prononcer sur l'existence ni sur la pertinence de charges retenues à l'encontre du demandeur, que ce dernier ne saurait pas plus former des demandes étrangères à cet unique objet d'appel et qu'il existe en tout cas des indices graves rendant vraisemblable sa participation aux faits pour lesquels il est mis en examen, la chambre de l'instruction qui n'a ainsi nullement statué sur le moyen dont elle était saisie tiré du caractère incomplet du dossier de la procédure mis à la disposition des avocats préalablement à l'audience, en méconnaissance de l'article 197 du code de procédure pénale, a violé les textes susvisés " ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que M. X... a été mis en examen des chefs précités pour avoir participé, ce qu'il conteste, en compagnie d'autres personnes à une attaque par armes à feu, ayant provoqué la mort de trois personnes et causé des blessures à trois autres ; que, par ordonnance du 9 février 2017, M. X... a été placé en détention provisoire ; qu'il a relevé appel de cette décision ;
Attendu que, pour confirmer l'ordonnance entreprise, après avoir relevé que les faits reprochés s'inscrivent dans un contexte de règlement de comptes nécessitant d'éviter les risques de représailles, de pressions sur les témoins ou de renouvellement d'infraction et avoir précisé, en réponse aux termes du mémoire déposé par l'avocat du mis en examen, qui faisait valoir que le dossier soumis à l'examen de la juridiction d'appel était incomplet par l'absence des facturations détaillées du téléphone utilisé par celui-ci, l'arrêt énonce que le contenu des écoutes téléphoniques concernant l'appelant figure bien au dossier et qu'au regard des éléments précis et circonstanciés résultant de la procédure d'information, la détention provisoire du mis en examen constitue l'unique moyen de parvenir aux objectifs ainsi évoqués ;
Attendu qu'en statuant ainsi, et, dès lors qu'il n'était pas allégué que manquaient au dossier mis à la disposition de l'avocat en vue de l'audience de la chambre de l'instruction des pièces figurant dans celui qu'il avait pu consulter au cabinet du juge d'instruction et préalablement au débat contradictoire tenu par le juge des libertés et de la détention, la chambre de l'instruction a justifié sa décision au regard des exigences de l'article 197 du code de procédure pénale ;
Qu'ainsi le moyen ne saurait être accueilli ;
Et attendu que l'arrêt est régulier, tant en la forme qu'au regard des dispositions des articles 137-3 et 143-1 et suivants du code de procédure pénale ;
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi jugé et prononcé par la Cour de cassation, chambre criminelle, en son audience publique, les jour, mois et an que dessus ;
Etaient présents aux débats et au délibéré : M. Guérin, président, M. Larmanjat, conseiller rapporteur, M. Straehli, Mme Durin-Karsenty, MM. Ricard, Parlos, Bonnal, Mme Ménotti, conseillers de la chambre, MM. Barbier, Talabardon, Ascensi, conseillers référendaires ;
Avocat général : M. Lemoine ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
En foi de quoi le présent arrêt a été signé par le président, le rapporteur et le greffier de chambre.