LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Versailles, 4 février 2016), que Mme X... a été engagée en qualité d'analyste le 1er juin 1998 par la société Capgemini France devenue Capgemini technology services ; qu'elle a été licenciée le 18 février 2013 et a saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que la salariée fait grief à l'arrêt de dire le licenciement fondé et de la débouter de ses demandes alors, selon le moyen :
1°/ que les motifs invoqués dans la lettre de licenciement circonscrivent les termes du débat judiciaire ; qu'ayant retenu qu'aux termes de la lettre de licenciement, l'employeur reprochait à la salariée « un manque d'implication et de volonté aussi bien dans le cadre des périodes d'inter-contrats que lors de ses affectations sur missions, - un manque crucial d'autonomie et une insuffisance de résultats, - une non application des instructions du management », la cour d'appel qui, après avoir retenu que l'employeur avait rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et lui avait proposé du travail, retient « le défaut de suivi des formations » au nombre des éléments justifiant le licenciement prononcé, soit un grief qui n'avait pas été invoqué par l'employeur dans la lettre de licenciement, a violé les dispositions de l'article L.1232-6 du code du travail, ensemble l'article L.1232-1 dudit code ;
2°/ que tout jugement doit être motivé ; qu'après avoir retenu que la société employeur avait, d'une part, rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et que, de l'autre, elle lui a proposé du travail, la cour d'appel qui, pour juger que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, se borne à affirmer que l'employeur « établit par ailleurs le manque d'autonomie et le défaut de suivi des formations », sans assortir sa décision d'aucun motif sur ce point, lequel était pourtant expressément contesté par l'exposante, a méconnu les exigences de l'article 455 du code de procédure civile ;
3°/ que tout jugement doit être motivé ; que le juge doit notamment préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'après avoir retenu que la société employeur avait, d'une part, rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée, que, de l'autre, elle lui avait proposé du travail, la cour d'appel qui, pour juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, se borne à affirmer que l'employeur « établit par ailleurs le manque d'autonomie et le défaut de suivi des formations », sans nullement préciser les éléments de preuve sur lesquels elle se serait fondée au soutien de cette affirmation, a violé les dispositions de l'article 455 du code de procédure civile ;
4°/ que l'insuffisance professionnelle ne peut constituer un motif de licenciement que si elle repose sur des éléments objectifs et concrets, matériellement vérifiables et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l'employeur ; qu'après avoir retenu que la société employeur avait, d'une part, rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et que, de l'autre, elle lui a proposé du travail, la cour d'appel qui pour juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, se borne à affirmer « qu'elle établit par ailleurs le manque d'autonomie », sans nullement rechercher ni préciser les éléments objectifs et concrets, étrangers à toute appréciation purement subjective de l'employeur, démontrant et caractérisant le manque d'autonomie de l'exposante, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
5°/ qu'à supposer qu'au soutien du reproche tiré du « manque d'autonomie », la cour d'appel ait retenu, par motifs adoptés des premiers juges, qu'« en l'espèce, la mission qu'elle devait entreprendre chez Elis n'a pu être menée à terme », elle s'est prononcée par un motif totalement inopérant, comme ne caractérisant nullement un quelconque élément objectif et concret propre à démontrer une insuffisance professionnelle de l'exposante et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L. 1235-1 et L. 1232-1 du code du travail ;
Mais attendu qu'appréciant souverainement les éléments de fait et de preuve qui lui étaient soumis, la cour d'appel, constatant, d'une part que la salariée n'avait pu achever la mission qui lui avait été confiée et d'autre part qu'elle avait méconnu les instructions de l'employeur en matière de suivi de formation, a décidé, dans l'exercice du pouvoir qu'elle tient de l'article L. 1235-1 du code du travail, que le licenciement était fondé sur une cause réelle et sérieuse ; que le moyen, qui manque en fait dans sa première branche, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze février deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Bouzidi et Bouhanna, avocat aux Conseils, pour Mme X....
LE POURVOI REPROCHE A L'ARRÊT CONFIRMATIF ATTAQUÉ D'AVOIR jugé que le licenciement de l'exposante était fondé et de l'avoir déboutée de toutes ses demandes ;
AUX MOTIFS QUE la lettre de licenciement fixe les limites du litige ; qu'en l'espèce, la société Capgemini Technology Services reproche à sa salariée : - un manque d'implication et de volonté aussi bien dans le cadre des périodes d'inter-contrat que lors de ses affectations sur mission, - un manque crucial d'autonomie et une insuffisance de résultat, - une non application des instructions du management ; que, sur le bien-fondé du licenciement, si la charge de la preuve du caractère réel et sérieux du licenciement n'appartient spécialement à aucune des parties, le juge formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties et au besoin après toute mesure d'instruction qu'il juge utile, il appartient néanmoins à l'employeur de fournir au juge des éléments lui permettant de constater la réalité et le sérieux du motif invoqué ; que l'insuffisance professionnelle constitue un motif de licenciement dès lors qu'elle repose sur des éléments objectifs matériellement vérifiables au regard des responsabilités du salarié ; que l'insuffisance de résultats ne constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement que si elle procède, soit d'une insuffisance professionnelle, soit d'une faute imputable au salarié ; qu'en l'espèce, les pièces versées aux débats par l'employeur établissent que, contrairement à ce que conclut la salariée, une formation adaptée lui a été proposée et même dispensée lors de son intégration à la mission Elis ; que, par ailleurs, il résulte des propres mails échangés par la salariée avec l'employeur que, d'une part, des formations étaient à disposition et qu'elle en a suivi plusieurs ; que, de l'autre, certaines n'ont pas été suivies jusqu'à leur terme ou que la salariée a échoué à l'examen ; que, notamment, au paragraphe "commentaires du collaborateur" de l'entretien annuel de 2012 qu'elle a certes refusé de signer, il est noté : "Le bilan de cette année a été positif dans le sens où j'ai enrichi mes connaissances fonctionnelles et techniques sur le projet Elis (environnement Unix, langage C, Sybase, SQL)" sans qu'elle remette en cause ses propos, les modifications demandées relatives à cet entretien par mail du 1er octobre 2012 ne visant pas cet élément ; que, par ailleurs, l'entretien de développement professionnel effectué le 11 octobre 2011 qui est un entretien individuel centré sur la carrière qui se tient entre le collaborateur et son responsable de développement professionnel mentionne au § Bilan par rapport au plan d'action défini au dernier entretien ou CED "Les opportunités identifiées n 'ont pas débouchées sur l'affectation de Fatima sur une nouvelle mission." ; qu'au § Bilan de la formation sur la période écoulée, il est indiqué "pas de formation suivie en 2011"; qu'enfin la synthèse de l'entretien est la suivante : "Fatima n'a pas été affectée sur nos opérations en 2011. Fatima doit mettre à profit sa période d'inter-contrat pour renforcer et faire évoluer ses compétences professionnelles en utilisant les moyens mis à sa disposition : e-Learning, books 24x7, CFP. Il est dommage que Fatima n'ai pas persévéré pour obtenir sa certification ITIL, élément pouvant donner de la valeur à son CV. Fatima doit saisir toutes les opportunités de mission, se montrer volontaire et persévérante, faire preuve d'inititative. Fatima doit être l'acteur principal de sa carrière et également acteur dans la recherche de mission." ; que par mail du 30 mars 2012, Christophe Z..., son responsable de développement professionnel, informe Madame X... qu'il a besoin d'un développeur C sur Elis et qu'elle est inscrite à la prochaine session de formation pour le développement en C qui débute le 16 avril et qu'à l'issue de cette formation, elle intégrera l'équipe Elis sur les activités de développement ; que, par mail du 25 avril 2012, la salariée écrit : " Bonjour Christophe, Je te remercie d'avoir pensé à moi pour cette mission. La formation sur le langage C c'est bien passée, la semaine dernière. J'ai intégré l'équipe Elis ce matin. Je ferai mon possible pour être à la hauteur " ; que, par mail du 13 septembre 2012 adressé à Christophe Z..., Fatima X... écrit : "Bonjour, J'ai appris lors de l'entretien de fin d'année que l'équipe Elis ne peut s'investir pour m'accompagner dans l'intégration, ceci est dû au contexte actuel du projet (implémentation d'un nouveau S.I induisant des flux de développement très tendu). Néanmoins, je continue ma prise de connaissance sur l'environnement technique et fonctionnel d'Elis ainsi qu'Unix et le langage C dans une future opportunité." ; que, par mail en réponse du 14 septembre 2012, Christophe Z... écrit : "Bonjour Fatima, Je n'ai pas la même lecture que toi de la situation. Je vais faire le point avec Grégory. Nous échangerons sur ce sujet lors de ton entretien d'évaluation des performances dans les jours à venir." ; que la société a d'une part rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et que de l'autre, elle lui a proposé du travail ; qu'elle établit par ailleurs le manque d'autonomie et le défaut de suivi des formations ; qu'en conséquence, ces seuls éléments justifient la confirmation de la décision, sans qu'il soit nécessaire d'examiner plus avant les autres reproches et étant observé qu'il n'est pas établi la volonté de la société de se débarrasser d'une salariée âgée ni un contexte économique difficile ;
ET AUX MOTIFS EVENTUELLEMENT ADOPTES DES PREMIERS JUGES QU'il est reproché à Madame X... un manque crucial d'autonomie et une insuffisance de résultats ; qu'en l'espèce la mission qu'elle devait entreprendre chez Elis n'a pu être menée à terme ; qu'en conséquence, ce grief est lui aussi établi ;
ALORS D'UNE PART QUE les motifs invoqués dans la lettre de licenciement circonscrivent les termes du débat judiciaire ; qu'ayant retenu qu'aux termes de la lettre de licenciement, l'employeur reprochait à la salariée « un manque d'implication et de volonté aussi bien dans le cadre des périodes d'intercontrats que lors de ses affectations sur missions, - un manque crucial d'autonomie et une insuffisance de résultats, - une non application des instructions du management », la Cour d'appel qui, après avoir retenu que l'employeur avait rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et lui avait proposé du travail, retient « le défaut de suivi des formations » au nombre des éléments justifiant le licenciement prononcé, soit un grief qui n'avait pas été invoqué par l'employeur dans la lettre de licenciement, a violé les dispositions de l'article L.1232-6 du Code du travail, ensemble l'article L.1232-1 dudit Code ;
ALORS D'AUTRE PART QUE tout jugement doit être motivé ; qu'après avoir retenu que la société employeur avait, d'une part, rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et que, de l'autre, elle lui a proposé du travail, la Cour d'appel qui, pour juger que le licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse, se borne à affirmer que l'employeur « établit par ailleurs le manque d'autonomie et le défaut de suivi des formations », sans assortir sa décision d'aucun motif sur ce point, lequel était pourtant expressément contesté par l'exposante, a méconnu les exigences de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS DE TROISIEME PART QUE tout jugement doit être motivé ; que le juge doit notamment préciser les éléments de preuve sur lesquels il se fonde ; qu'après avoir retenu que la société employeur avait, d'une part, rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée, que, de l'autre, elle lui avait proposé du travail, la Cour d'appel qui, pour juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, se borne à affirmer que l'employeur « établit par ailleurs le manque d'autonomie et le défaut de suivi des formations », sans nullement préciser les éléments de preuve sur lesquels elle se serait fondée au soutien de cette affirmation, a violé les dispositions de l'article 455 du Code de procédure civile ;
ALORS DE QUATRIEME PART QUE l'insuffisance professionnelle ne peut constituer un motif de licenciement que si elle repose sur des éléments objectifs et concrets, matériellement vérifiables et ne peut être fondée sur une appréciation purement subjective de l'employeur ; qu'après avoir retenu que la société employeur avait, d'une part, rempli son obligation de formation et d'adaptabilité de sa salariée et que, de l'autre, elle lui a proposé du travail, la Cour d'appel qui pour juger que le licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse, se borne à affirmer « qu'elle établit par ailleurs le manque d'autonomie », sans nullement rechercher ni préciser les éléments objectifs et concrets, étrangers à toute appréciation purement subjective de l'employeur, démontrant et caractérisant le manque d'autonomie de l'exposante, la Cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1235-1 et L.1232-1 du Code du travail ;
ALORS ENFIN QU' à supposer qu'au soutien du reproche tiré du « manque d'autonomie », la Cour d'appel ait retenu, par motifs adoptés des premiers juges, qu'« en l'espèce, la mission qu'elle devait entreprendre chez Elis n'a pu être menée à terme », elle s'est prononcée par un motif totalement inopérant, comme ne caractérisant nullement un quelconque élément objectif et concret propre à démontrer une insuffisance professionnelle de l'exposante et n'a pas légalement justifié sa décision au regard des articles L.1235-1 et L .1232-1 du Code du travail ;