LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le moyen unique ci-après annexé :
Attendu que la cour d'appel ayant relevé, sans dénaturation, que la démission avait été donnée dans un écrit non motivé du 25 août 2009, que le seul grief invoqué de manière contemporaine à la démission par le salarié a été définitivement jugé non établi, l'arrêt n'encourt pas les griefs du moyen ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six septembre deux mille dix-huit.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt :
Moyen produit par la SCP Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat aux Conseils, pour M. X...
Le moyen fait grief à l'arrêt attaqué d'AVOIR dit que la rupture du contrat de travail survenue le 25 août 2009 est imputable au salarié, auteur d'une démission claire et non équivoque, et de l'AVOIR débouté en conséquence de ses demandes d'indemnité légale de licenciement, de dommages-intérêts pour rupture imputable à l'employeur équivalente en ses effets à un licenciement sans cause réelle et sérieuse, et de sa demande tendant à la condamnation de la société à lui délivrer, sous astreinte, une attestation Pôle emploi mentionnant comme motif de la rupture : « prise d'acte de la rupture du contrat de travail à l'initiative du salarié requalifiée judiciairement en licenciement » ;
AUX MOTIFS QUE il est de droit que la démission est un acte unilatéral par lequel le salarié manifeste de façon claire et non équivoque sa volonté de mettre fin au contrat de travail ; que lorsque le salarié, sans invoquer un vice du consentement de nature à entraîner l'annulation de sa démission, remet en cause celle-ci en raison de faits ou manquements imputables à son employeur et lorsqu'il résulte de circonstances antérieures ou contemporaines de la démission qu'à la date à laquelle elle a été donnée, celle-ci était équivoque, le juge doit l'analyser en une prise d'acte qui produit les effets d'un licenciement sans cause réelle et sérieuse si les faits invoqués la justifiaient ou dans le cas contraire d'une démission ; que M. X... a donné sa démission oralement le 19 ou le 20 août 2009, selon les indications respectives, confirmant celle-ci par un écrit non motivé du 25 août 2009 demandant à être dispensé d'exécuter son préavis ; que par son courrier du 13 septembre 2009, après avoir rappelé qu'il avait assumé la fonction de responsable du service informatique, il se plaignait de la dégradation des conditions du travail et faisait état du harcèlement, du rabaissement et du mépris quotidien pour expliquer sa décision de quitter l'entreprise le 18 septembre 2009 ; que l'employeur le dispensait finalement de l'exécution de son préavis avec effet au 22 septembre 2009 ; qu'il saisissait le conseil de prud'hommes d'Aix en Provence le 30 décembre 2009 d'une demande de rappel de salaire et de dommages et intérêts pour harcèlement moral ; qu'à longueur de procédure devant la juridiction de première instance - saisine de la formation de référé le 15 septembre 2009 en demandant qu'il soit "constaté la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur en raison d'une situation représentant un danger imminent et immédiat tant pour sa santé que pour son devenir professionnel" ; conclusions responsives déposées devant la formation de fond pour l'audience du 20 septembre 2011, dans un paragraphe intitulé "sur le harcèlement moral ayant conduit monsieur X... à démissionner de ses fonctions" en écrivant que "contrairement à ce qui est affirmé par l'employeur, le harcèlement dont a été victime le concluant est la seule cause de la rupture du contrat de travail en droit d'alerte de Monsieur X..."-, puis devant la cour d'appel d'Aix en Provence - conclusions rectificatives en écrivant "En l'espèce, la rupture du contrat de travail est intervenue à l'évidence à raison du harcèlement dont s‘est rendu coupable le représentant légal de la société intimée. Ces agissements, à l'origine exclusive de la rupture du contrat de travail..." - M. X... a toujours imputé au harcèlement qu'il alléguait la cause exclusive de sa démission ; qu'il est aujourd'hui définitivement jugé l'inexistence de tout harcèlement moral ; que dès lors, au fil de l'évolution du contentieux dans une approche opportuniste, M. X... ne saurait aujourd'hui prétendre à l'équivoque de sa démission alors que les circonstances antérieures ou contemporaines de celle-ci ne mettent en exergue que la situation de harcèlement moral qu'il invoquait, accessoirement et sans en tirer la conséquence qu'il souhaite aujourd'hui lui voir donner, la problématique de sa reclassification, celle de sa demande de rappel de salaire en considération des minima conventionnels n'étant apparue que bien postérieurement ; que de telle sorte, c'est bien une démission claire et non équivoque qui a été officialisée le 25 août 2009 ; qu'elle l'est d'autant plus qu'en demandant à être dispensé de son préavis, M. X... cherchait à rejoindre au plus vite son nouvel employeur, ce que les échanges épistolaires ultérieurs confirment ; que M. X... sera débouté de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail ;
1° ALORS QUE les juges ne peuvent dénaturer les conclusions des parties ; qu'en affirmant qu'« à longueur de procédure devant la juridiction de première instance [
] puis devant la cour d'appel d'Aix-en-Provence [
], M. X... a toujours imputé au harcèlement qu'il alléguait la cause exclusive de sa démission », quand les conclusions du salarié mentionnaient, au titre de l'imputabilité de la rupture du contrat de travail, tant le harcèlement moral que l'absence de reconnaissance de son statut de « responsable du service informatique », la cour d'appel a dénaturé ces conclusions en violation de l'article 4 du code de procédure civile ;
2° ALORS QUE la démission est équivoque et doit s'analyser en une prise d'acte dès lors que, dans un temps proche de celle-ci, le salarié a émis des griefs à l'encontre de son employeur ; que si le caractère injustifié de l'un d'eux est établi, le juge doit malgré tout considérer, au regard des autres griefs, que la démission est équivoque, peu important que le salarié n'ait pas alors précisément imputé à ces autres griefs la cause de sa démission ; qu'en l'espèce, il est constant et constaté que dans un temps proche de sa démission, le salarié avait dénoncé et une situation de harcèlement moral et l'absence de reconnaissance de son statut de responsable du service informatique ; qu'en retenant cependant que « c'est bien une démission claire et non équivoque qui a été officialisée le 25 août 2009 », aux motifs que les circonstances antérieures ou contemporaines de celle-ci mettaient principalement en exergue la situation de harcèlement moral, dont l'inexistence est « aujourd'hui définitivement jugée », et « accessoirement » la problématique de sa reclassification, mais « sans en tirer la conséquence qu'il souhaite aujourd'hui lui voir donner », la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1235-1, L. 1237-1 et L. 1237-2 du code du travail ;
3° ALORS en tout cas QU' il est indifférent, pour que la démission soit considérée comme équivoque, que les griefs formulés par le salarié soient établis et justifient la rupture ; qu'il faut, et il suffit, que le salarié rapporte la preuve qu'un différend antérieur ou contemporain de celle-ci l'opposait à son employeur ; que ce n'est qu'une fois la démission requalifiée en prise d'acte que le juge doit vérifier que les faits invoqués par le salarié étaient établis et justifiaient la rupture ; qu'en l'espèce, il est constant et constaté que dans un temps proche de sa démission, le salarié avait dénoncé et une situation de harcèlement moral et l'absence de reconnaissance de son statut de responsable du service informatique ; que la cour d'appel a néanmoins considéré que « c'est bien une démission claire et non équivoque qui a été officialisée le 25 août 2009 », aux motifs que les circonstances antérieures ou contemporaines de celle-ci mettaient principalement en exergue la situation de harcèlement moral, dont l'inexistence est « aujourd'hui définitivement jugée », et « accessoirement » la problématique de sa reclassification, mais « sans en tirer la conséquence qu'il souhaite aujourd'hui lui voir donner » ; qu'en statuant ainsi, quand le seul constat d'un différend contemporain de la démission suffisait à rendre équivoque la démission, peu important que les griefs formulés par le salarié à l'encontre de son employeur étaient établis et justifiaient la rupture, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1235-1, L. 1237-1 et L. 1237-2 du code du travail ;
4° ET ALORS QUE la démission est équivoque et doit s'analyser en une prise d'acte dès lors que, dans un temps proche de celle-ci, le salarié a émis des griefs à l'encontre de son employeur ; que l'engagement au service d'un autre employeur ne peut donc caractériser une volonté claire et non équivoque de démissionner qu'en l'absence de tout différend entre le salarié et son employeur au moment où la démission a été donnée ; que pour débouter le salarié de ses demandes liées à la rupture du contrat de travail, l'arrêt retient également qu'« en demandant à être dispensé de son préavis, M. X... cherchait à rejoindre au plus vite son nouvel employeur » ; qu'en se déterminant ainsi, quand il résultait de ses constatations que dans un temps proche de sa démission, le salarié avait dénoncé et une situation de harcèlement moral et l'absence de reconnaissance de son statut de responsable du service informatique, la cour d'appel a violé les articles L. 1221-1, L. 1231-1, L. 1235-1, L. 1237-1 et L. 1237-2 du code du travail.