LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
COMM.
FB
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 4 novembre 2021
Rejet
Mme MOUILLARD, président
Arrêt n° 752 FS-D
Pourvoi n° H 19-21.288
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 4 NOVEMBRE 2021
La commune de Sélestat, agissant en la personne de son maire en exercice, domicilié en cette qualité [Adresse 3], a formé le pourvoi n° H 19-21.288 contre l'arrêt rendu le 6 juin 2019 par la cour d'appel de Versailles (16e chambre), dans le litige l'opposant à la société Dexia crédit local, société anonyme, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Blanc, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la commune de Sélestat, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Dexia crédit local, et l'avis de Mme Guinamant, avocat général référendaire, à la suite duquel le président a demandé aux avocats s'ils souhaitaient présenter des observations complémentaires, après débats en l'audience publique du 14 septembre 2021 où étaient présents Mme Mouillard, président, M. Blanc, conseiller référendaire rapporteur, M. Guérin, conseiller doyen, Mmes Graff-Daudret, Daubigney, M. Ponsot, Mme Fèvre, conseillers, M. Guerlot, Mmes de Cabarrus, Tostain, M. Boutié, conseillers référendaires, Mme Guinamant, avocat général référendaire, et Mme Labat, greffier de chambre,
la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée, en application de l'article R. 431-5 du code de l'organisation judiciaire, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l'arrêt attaqué (Versailles, 6 juin 2019), la société Dexia crédit local (la société Dexia ) a consenti le 22 août 2011 à la commune de Sélestat un prêt n° MPH276089EUR d'un montant de 2 801 842,14 euros et d'une durée de vingt-deux ans, destiné à refinancer un précédent prêt souscrit le 21 août 2008.
2. Le contrat stipulait que, pendant une première phase de deux ans, les intérêts seraient calculés par application du taux fixe de 4,37 % par an, que, pendant une deuxième phase de seize ans, dans l'hypothèse où la différence entre les indices CMS (« Constant Maturity Swap ») EUR 30 ans et CMS EUR 1 an serait supérieure ou égale à 0,30 %, les intérêts seraient calculés par application du taux fixe de 3,55 % par an, tandis que, dans l'hypothèse inverse, les intérêts seraient calculés par application d'un taux égal à 7,65 % par an, moins cinq fois la différence entre les indices CMS EUR 30 ans et CMS EUR 1 an, et que, pendant la dernière phase, les intérêts seraient calculés par application du taux fixe de 3,55 % par an.
3. La commune a assigné la société Dexia aux fins de voir juger que la stipulation du taux de l'intérêt conventionnel ou, à défaut, la clause d'indexation, ainsi que la clause relative à l'indemnité de remboursement anticipé, étaient réputées non écrites et, subsidiairement, de voir le contrat annulé pour défaut de capacité, vice de son consentement ou défaut de cause.
Examen des moyens
Sur les premier et deuxième moyens et les troisième et quatrième moyens, pris en leurs secondes branches, ci-après annexés
4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ces moyens qui ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation.
Sur le troisième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. La commune fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes tendant à voir réputer non écrites, en raison de leur caractère abusif, la stipulation d'intérêts du contrat de prêt ou, à défaut, la clause d'indexation sur le différentiel des indices CMS EUR 30 ans et CMS EUR 1 an, ainsi que la clause relative au calcul de l'indemnité de remboursement anticipé, alors « qu'une commune qui conclut des prêts afin de financer ses investissements n'exerce pas d'activité professionnelle en ce qu'elle agit dans un but d'intérêt général et non à des fins lucratives, et doit dès lors être considérée comme un non-professionnel ; qu'en retenant, pour refuser d'examiner le grief tiré du caractère abusif de la stipulation d'intérêt du contrat de prêt 2011 et de la clause de remboursement anticipé, que la commune ne peut être qualifiée de non-professionnel dès lors que l'emprunt a été contracté pour la réalisation de ses investissements et relève de ses besoins en matière de travaux de fourniture et de services en rapport direct avec son activité, de sorte qu'elle a agi à une fin professionnelle non commerciale, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation. »
Réponse de la Cour
6. Une commune, qui est réputée agir pour régler les affaires de sa compétence, ne peut être qualifiée de non-professionnel au sens de l'article L. 132-1, devenu L. 212-1, du code de la consommation et ne peut donc se prévaloir du caractère abusif d'une clause d'un contrat pour demander que cette clause soit réputée non écrite.
7. Le moyen, qui postule le contraire, n'est donc pas fondé.
Sur le quatrième moyen, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
8. La commune fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande tendant à l'annulation du contrat de prêt, alors « que le contrat de prêt qui incorpore des instruments financiers à terme relève de la catégorie des contrats financiers régis par le code monétaire et financier ; qu'en retenant, pour écarter cette qualification et rejeter la demande de nullité consécutive, que le contrat de prêt litigieux ne constituait ni un contrat spéculatif, ni un produit d'investissement, ni un contrat d'option, sans rechercher, comme elle y était invitée, si le contrat n'incorporait pas une opération à terme dès lors que le calcul des intérêts dépendait de conditions de cours déterminées ab initio, et s'il ne relevait pas en conséquence de la catégorie des contrats financiers à terme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 211-1 et D. 211-1 A du code monétaire et financier. »
Réponse de la Cour
9. Ayant retenu que le prêt, même s'il est assorti d'une clause d'indexation complexe et comporte un aléa, demeure une opération de crédit et ne peut être vu comme un produit d'investissement, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche, inopérante, invoquée par le moyen, dès lors que le seul fait qu'un contrat de prêt stipule un taux d'intérêt variable en fonction de paramètres financiers déterminés ab initio ne peut suffire à établir que ce contrat incorpore un instrument financier à terme, a légalement justifié sa décision.
10. Le moyen n'est donc pas fondé.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la commune de Sélestat aux dépens ;
En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la commune de Sélestat et la condamne à payer à la société Dexia crédit local la somme de 3 000 euros ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du quatre novembre deux mille vingt et un.
MOYENS ANNEXES au présent arrêt :
Moyens produits par la SCP Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat aux Conseils, pour la commune de Sélestat, agissant en la personne de son maire en exercice.
PREMIER MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt infirmatif attaqué d'AVOIR rejeté la demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts du contrat de prêt référencé n° MIN261977EUR (contrat de prêt 2008 n°1) ;
AUX MOTIFS QUE le tribunal a fait droit aux demandes de la ville concernant le contrat de prêt 2008 n° 1, qui est un prêt à taux fixe, jugeant que le TEG aurait dû figurer dans le fax du 5 août 2008, au motif que ce document constituait un « écrit constatant un prêt » et qu'en application de l'article L. 313-4 du code monétaire et financier, le TEG devait être mentionné dans ce Fax ; que la SA Dexia demande l'infirmation du jugement sur ce point, faisant valoir : d'une part que la commune est un professionnel et que la réglementation en matière de TEG, telle qu'elle découle du code monétaire et financier et qui impose l'obligation de mention du TEG aux prêts consentis à des professionnels, porte atteinte à la fois à la liberté d'établissement, à la libre prestation de service et à la libre circulation des capitaux, d'autre part que si la formulation de l'article L. 313-2 (ancien) du code de la consommation, reprise à l'article L. 313-4 (ancien) du code monétaire et financier, prévoyait que le TEG devait être mentionné dans tout « écrit constatant un contrat de prêt », le fax de 2008 est un simple acte préparatoire qui ne contient pas les « caractéristiques essentielles du prêt », ne constitue pas un écrit constatant un contrat de prêt, puisqu'il n'en a pas les caractéristiques, les parties n'ayant par ailleurs jamais eu l'intention de lui prêter une telle qualification, enfin que, l'omission du TEG dans le fax de 2008 a fait l'objet d'une confirmation par la signature du contrat de prêt 2008 n° 1 de sorte que le vice de l'absence de TEG dans le fax de 2008 a fait l'objet d'une réfection ; que s'il peut être admis que le contrat était parfait dès l'acceptation de la télécopie, car celle-ci contenait l'ensemble des éléments nécessaires à l'expression de son consentement par la commune, et si le contrat de prêt subséquent ne peut en constituer la confirmation, car les conditions de validité de celle-ci n'étaient pas réunies puisque l'acte confirmatif doit mentionner, au terme de l'article 1338 ancien du code civil, la substance de l'obligation confirmée, la cause de la nullité et l'intention de réparer le vice de l'acte que constitue l'absence de mention du TEG, il n'en demeure pas moins que le contrat de prêt subséquent a sa propre existence juridique, en tant que « réitération » de la télécopie et que, sans remplacer rétroactivement le premier acte nul, il se substitue à celui-ci et produit ses effets notamment en ce qu'il contient de nombreuses stipulations venant compléter les éléments essentiels contenus dans le premier fax ; or, que le contrat de prêt 2008 n° 1, qui a sa propre existence juridique et produit ses effets entre les parties, dans son article 19 « Taux effectif global », fait bien état du TEG ; que ce second acte, qui résulte d'un nouvel échange de consentements des parties faisant suite à un précédent échange de consentements liant les parties par un contrat de nature juridique identique, en ce qu'il contient les mentions légales absentes du premier acte, exclue tout intérêt de la commune emprunteur à agir en nullité du premier acte que constitue la télécopie ; qu'il y a donc lieu, infirmant sur ce point le jugement, d'écarter toute contestation tenant à l'absence du TEG dans le fax de 2008 eu égard à la signature du contrat de prêt 2008 n°1 puis à son exécution par la ville pendant plusieurs années ; que s'agissant de la communication de la durée de période, elle était, à la date des faits en cause, prévue à l'article R. 313-1 (ancien) du code de la consommation dont le 3° d excluait notamment, du champ d'application des dispositions du chapitre concernant les crédits à la consommation : « Ceux qui sont destinés à financer les besoins d'une activité professionnelle, ainsi que les prêts aux personnes morales de droit public » ; qu'étaient donc exclues l'exigence de communication du taux de période, et, a fortiori, de la durée de période ; que le moyen sera écarté.
1°) ALORS QUE la réfection d'un acte nul suppose que soit constatée la volonté des parties de conclure un nouvel acte afin de pallier la cause de nullité qui entachait leur précédente convention ; qu'en retenant, pour refuser de prononcer l'annulation de la stipulation d'intérêts conventionnels en dépit de l'omission du taux effectif global dans la télécopie, que le « contrat de prêt 2008 n° 1 » se substituait, sans le confirmer, à l'accord des parties contenu dans la télécopie et produisait ses effets en ce qu'il faisait état du taux effectif global, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 18, al. 1), si la commune n'avait pas conclu l'acte de prêt subséquent pour la seule raison qu'elle se croyait déjà engagée et sans aucune intention de réparer en connaissance de cause le vice affectant la télécopie, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134, devenu 1103, du code civil ;
2°) ALORS QUE l'article R. 313-1 du code de la consommation, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002 applicable en l'espèce, contient deux phrases distinctes, la première relative au calcul du taux effectif global, pour laquelle une distinction doit être faite entre, d'une part, les opérations de crédit mentionnées au 3° de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2 du même code qui vise les prêts consentis aux personnes morales de droit public, et d'autre part, toutes les autres opérations de crédit, et la seconde qui impose, quelle que soit l'opération, la communication expresse du taux et de la durée de période à tous les emprunteurs ; qu'en retenant que la commune de Sélestat, en tant que personne morale de droit public, ne pouvait se prévaloir du défaut de communication du taux de période, et, a fortiori, de la durée de période, cependant que cette information doit être communiquée à tous les emprunteurs, la cour d'appel a violé l'article R. 313-1 du code de la consommation précité, dans sa rédaction issue du décret n° 2002-927 du 10 juin 2002.
DEUXIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté la commune de Sélestat de sa demande de voir prononcer la nullité du taux d'intérêt stipulé au Contrat Tofixms 2011 n° MPH261958EUR ;
AUX MOTIFS QUE pour ce contrat dit « structuré », la commune invoqué la nullité des taux d'intérêt contractuels du contrat de prêt de 2011 en raison de ce que le TEG n'était pas mentionné dans la télécopie ayant précédé la conclusion de ce contrat, et l'absence de mention du taux et de la durée de période, la SA Dexia, comme l'a fait le tribunal, oppose à cette demande la loi n° 2014-844 , promulguée le 29 juillet 2014, relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public, déclarée conforme à la constitution par la décision du Conseil constitutionnel n° 2014-695 DC du 24 juillet 2014 ; que selon la commune de Sélestat, la cour doit écarter l'application de cette loi dont les articles 1 à 3 sont selon elle contraires aux articles 6-1 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et à l'article 1er du premier Protocole additionnel de la convention ; mais qu'une personne morale de droit public ne pouvant être considérée comme une organisation non gouvernementale au sens de l'article 34 de la CEDH, ne peut saisir cette instance, ni invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention ou du Protocole additionnel et ce quelle que soit la nature du litige, cette dernière ne modifiant en rien sa qualité ; qu'il est rappelé que le Conseil constitutionnel dans sa décision du 24 juillet 2014, a reconnu la conformité de la loi aux exigences constitutionnelles applicables aux lois de validation telles que ces dernières découlent de l'article 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, prenant le soin de vérifier l'existence d'un "motif impérieux d'intérêt général" (dont il n'appartient pas à la juridiction saisie d'apprécier la réalité économique) justifiant l'adoption d'une loi de validation rétroactive ; qu'il s'ensuit que le moyen tiré de l'aide d'Etat illicite que constituerait la loi et de l'incompatibilité avec les articles 6-1 et 14 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier protocole additionnel de la convention est écarté ; qu'en conséquence et du fait de son intervention rétroactive il convient de faire application à l'espèce des dispositions de la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 ; qu'il n'est pas contesté ni contestable, qu'en application de l'article 1er de cette loi, l'absence de mention du TEG n'est pas une cause de nullité de la clause de stipulation d'intérêts figurant dans un contrat de prêt souscrit par une commune ; qu'en conséquence le jugement sera confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts contenue au prêt de 2011 ;
ET QUE la commune conteste la validité du taux stipulé aux contrats à raison de l'erreur commise dans leur calcul ; que la commune agissant cependant en l'espèce dans le cadre de son activité de financement de ses investissements exerce ainsi une activité professionnelle non commerciale et les intérêts conventionnels peuvent donc librement être calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours pour les prêts octroyés aux collectivités locales qui ne sont pas un consommateur ou un emprunteur non professionnel, dès lors que, si le TEG doit être calculé sur la base de l'année civile, rien n'interdit aux parties de convenir d'un taux d'intérêt conventionnel calculé sur une autre base que l'année civile ; qu'en conséquence, doit être rejetée la demande d'annulation de la stipulation conventionnelle d'intérêts fondée sur l'utilisation de l'année de 360 jours dite année lombarde tant pour le prêt de 2008 que pour celui de 2011, le jugement étant confirmé pour ce second contrat ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la commune fait valoir que la télécopie de confirmation dite « fax de topage » que lui a adressée la société Dexia Crédit Local le 1er juillet 2011 ne mentionne ni le TEG, ni le taux de période, ni la durée de celle-ci, de sorte que la clause de stipulation d'intérêt est nulle ; qu'elle se prévaut en outre de la nullité du taux calculé sur la base d'une année bancaire de 360 jours ; qu'elle affirme que la banque ne peut lui opposer la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public ayant pour objet la validation rétroactive des contrats de prêt structurés souscrits par des personnes morales de droit public dans lesquels la mention du TEG, du taux de période et de la durée de période fait défaut ou dans lesquels le TEG est erroné dès lors que cette loi est contraire à la Convention européenne des droits de l'homme et à son Protocole additionnel en ce qu'elle n'est pas justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général ; qu'elle soutient que si elle ne peut être à l'initiative d'une requête devant les organes de la Convention, elle peut néanmoins invoquer les termes de cette Convention dans le cadre d'un litige interne de droit privé l'opposant à une personne privée ; qu'elle ajoute que les juridictions nationales doivent écarter l'application de dispositions législatives non conformes à la Convention ; que la société défenderesse fait valoir que la commune est irrecevable à saisir la Cour européenne des droits de l'homme en application de l'article 34 de la Convention de sorte qu'elle ne peut invoquer les dispositions de cette Convention ni celles de son Protocole additionnel devant le juge national ; qu'elle soutient que la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public est conforme aux principes établis par la Convention dès lors qu'elle est justifiée par d'impérieux motifs d'intérêt général ; qu'elle en déduit que cette loi doit s'appliquer de sorte que la demande de la commune tendant à voir prononcer la nullité de la stipulation d'intérêts du contrat de prêt de 2011 doit être rejetée ; qu'elle conteste enfin l'irrégularité tirée du calcul des intérêts sur la base de 360 jours ; que l'article 34 de la Convention prévoit que « la Cour peut être saisie d'une requête par toute personne physique, toute organisation non gouvernementale ou tout groupe de particuliers qui se prétend victime d'une violation par l'une des Hautes Parties contractantes des droits reconnus dans la Convention ou ses protocoles. Les Hautes Parties contractantes s'engagent à n'entraver par aucune mesure l'exercice efficace de ce droit. » ; qu'une commune n'est pas assimilée à une organisation non gouvernementale au sens de cet article dans la mesure où, s'agissant d'une personne morale de droit public, elle exerce une partie de la puissance publique ; que dès lors, une commune ne peut, ni saisir la Cour européenne des droits de l'Homme, ni invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention ou du Protocole additionnel et ce quelle que soit la nature du litige, cette dernière ne modifiant en rien sa qualité ; qu'en conséquence, il convient de faire application à l'espèce des dispositions de la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 ; que la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 relative à la sécurisation des contrats de prêts structurés souscrits par les personnes morales de droit public valide les stipulations d'intérêt contenues dans certains contrats de prêt structurés conclus avant son entrée en vigueur, dès lors que leur régularité serait remise en cause par des moyens tirés d'un défaut de mention dans le contrat du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de période ou encore de la mention d'un taux effectif global erroné, sous réserve des décisions passés en force de chose jugée ; que les articles 1, 2 et 3 de cette loi disposent : « Article 1 : Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d'intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que la validité de cette stipulation serait contestée par le moyen tiré du défaut de mention, prescrite en application de l'article L. 313-2 du code de la consommation, du taux effectif global, du taux de période ou de la durée de période, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe : 1° Le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ; 2° La périodicité de ces échéances ; 3° Le nombre de ces échéances ou la durée du prêt. Article 2 : Sous réserve des décisions de justice passées en force de chose jugée, est validée la stipulation d'intérêts prévue par tout écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant conclu antérieurement à l'entrée en vigueur de la présente loi entre un établissement de crédit et une personne morale de droit public, en tant que la validité de cette stipulation serait contestée par le moyen tiré de la mention d'un taux effectif global, d'un taux de période ou d'une durée de période qui ne sont pas déterminés conformément à l'article L. 313-1 du code de la consommation, dès lors que cet écrit constatant un contrat de prêt ou un avenant indique de façon conjointe : 1° Le montant ou le mode de détermination des échéances de remboursement du prêt en principal et intérêts ; 2° La périodicité de ces échéances ; 3° Le nombre de ces échéances ou la durée du prêt. Lorsqu'un écrit tel que celui mentionné au premier alinéa mentionne un taux effectif global inférieur au taux effectif global déterminé conformément au même article L. 313-1, l'emprunteur a droit au versement par le prêteur de la différence entre ces deux taux appliquée au capital restant dû à chaque échéance. Article 3 : Sont exclus du champ de la présente loi les écrits constatant un contrat de prêt ou un avenant comportant un taux d'intérêt fixe ou un taux d'intérêt variable défini comme l'addition d'un indice et d'une marge fixe exprimée en points de pourcentage. » ; qu'il n'est pas contesté par la commune que le contrat litigieux entre dans le champ d'application de cette loi et que les conditions d'application des articles 1 et 2 sont remplies ; qu'il y a donc lieu de rejeter la demande de nullité de la stipulation d'intérêt figurant au contrat de prêt, fondée sur l'absence de mention du TEG ou sur son caractère erroné et sur l'absence de mention du taux de période et de la durée de celle-ci ;
ET QUE s'agissant du moyen d'annulation soulevé par la commune, tiré de l'utilisation de l'année de 360 jours ou année lombarde, force est de constater qu'il met en cause, sans toutefois être étayé, le mode de calcul de l'intérêt conventionnel et non celui du taux effectif global ; que la loi de validation ne trouvant ainsi pas à s'appliquer, le tribunal rappellera que la liberté contractuelle laisse en principe aux parties le choix de la base de calcul des intérêts, l'année conventionnelle pouvant être de n'importe quelle durée ; que l'article R. 313-1 du code de la consommation prévoit certes que « Sauf pour les opérations de crédit mentionnées au 3° de l'article L. 311-3 et à l'article L. 312-2 du présent code pour lesquelles le taux effectif global est un taux annuel, proportionnel au taux de période, à terme échu et exprimé pour cent unités monétaires, le taux effectif global d'un prêt est un taux annuel, à terme échu, exprimé pour cent unités monétaires et calculé selon la méthode d'équivalence définie par la formule figurant en annexe au présent code. Le taux de période et la durée de la période doivent être expressément communiqués à l'emprunteur. » ; qu'il se déduit de la formule visée par cet article que le taux effectif global doit être calculé sur la base de l'année civile ; mais que le 3° de l'article L. 311-3 du même code, qui définit les opérations exclues du champ d'application du régime relatif au crédit à la consommation, vise les crédits « qui sont destinés à financer les besoins d'une activité professionnelle, ainsi que les prêts aux personnes morales de droit public » ; qu'il en résulte que les prêts aux personnes morales de droit public sont exclues du champ d'application du régime relatif au crédit à la consommation et que le taux effectif global mentionné par les prêts aux personnes morales de droit public ne doit pas nécessairement être calculé suivant la formule figurant en annexe de l'article R. 313-1 ; or, qu'en application combinée des articles 1907 du code civil ensemble les articles L. 313-1, L. 313-2 et R. 313-1 du code de la consommation, l'exigence selon laquelle le taux de l'intérêt conventionnel mentionné par écrit dans un acte de prêt doit, comme le taux effectif global, être calculé sur la base de l'année civile, ne s'applique qu'aux crédits à la consommation consentis à un non-professionnel ou à un consommateur ; qu'en sa qualité de personne morale de droit public, la commune est donc exclue du champ d'application de ces dispositions et elle ne peut faire utilement valoir que le taux d'intérêt conventionnel mentionné dans le contrat litigieux n'aurait pas dû être calculé sur la base de l'année lombarde de 360 jours ; que le moyen de nullité manque donc à nouveau de pertinence et sera rejeté ;
1°) ALORS QUE si elles ne peuvent saisir la Cour européenne des droits de l'homme, les collectivités territoriales peuvent néanmoins, comme tout sujet de droit, invoquer, dans l'ordre interne, une méconnaissance des droits garantis par la Convention de sauvegarde des droits de l'homme dans les litiges relatifs à des droits et obligations à caractère civil ; qu'en retenant néanmoins, pour refuser d'examiner les moyens tirés de l'inconventionnalité de la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014, qu'une personne morale de droit public ne peut être considérée comme une organisation non gouvernementale au sens de l'article 34 de la Convention de sauvegarde, pour en déduire qu'elle ne peut saisir cette instance, ni invoquer utilement devant les juridictions nationales les stipulations de la Convention ou du Protocole additionnel et ce quelle que soit la nature du litige, cette dernière ne modifiant en rien sa qualité, la cour d'appel a violé les articles 6 § 1 et 14 de la Convention de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales et l'article 1er du premier Protocole additionnel de la Convention ;
2°) ALORS QUE dans ses conclusions d'appel, la commune de Sélestat soutenait que la loi n° 2014-844 du 29 juillet 2014 constituait une aide d'État devant être considérée comme illicite à défaut d'avoir été préalablement notifiée à la Commission européenne ; qu'en se bornant à retenir que le Conseil constitutionnel, dans sa décision du 24 juillet 2014, avait reconnu la conformité de la loi aux exigences constitutionnelles applicables aux lois de validation, sans répondre à ce moyen, la cour d'appel a violé l'article 455 du code de procédure civile ;
3°) ALORS QU'une commune qui conclut des prêts afin de financer ses investissements n'exerce pas d'activité professionnelle en ce qu'elle agit dans un but d'intérêt général et non à des fins lucratives, et doit dès lors être considérée comme un non-professionnel ; qu'en jugeant néanmoins, pour retenir que les intérêts conventionnels pouvaient librement être calculés sur la base d'une année bancaire de 360 jours, qu'une commune qui agit dans le cadre de son activité de financement de ses investissements exerce une activité professionnelle non commerciale et ne peut dès lors être considérée comme un consommateur ou un emprunteur non professionnel, la cour d'appel a violé les articles 1907 du code civil, L. 313-1 et R. 313-1 du code de la consommation, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l'ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016, ensemble l'article liminaire du code de la consommation.
TROISIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt attaqué d'AVOIR débouté la commune de Sélestat de sa demande tendant à voir réputer non écrite la stipulation d'intérêts du contrat Tofixms 2011 n° MPH261958EUR à raison de son caractère abusif, ou, à défaut, de réputer non écrite l'indexation sur le différentiel des taux CMS € 30 ans et CMS € 1 an du taux du Contrat Tofixms 2011 n° MPH261958EUR, ainsi que de l'avoir déboutée de sa demande tendant à voir réputer non écrite la clause se rapportant au calcul de l'indemnité de remboursement anticipé du Contrat Tofixms 2011 n° MPH261958EUR, à raison de son caractère abusif ;
AUX MOTIFS QUE la commune soutient que le tribunal aurait dû relever d'office le prétendu caractère abusif de la stipulation d'intérêt du Contrat de Prêt 2011 et de la clause de remboursement anticipé, afin de les déclarer « non écrites », en application des articles L. 132-1 et L. 212-1 du code de la consommation ; que l'intimé répond que cette demande est irrecevable en ce qu'elle est présentée pour la première fois en cause d'appel et se heurte au délai de prescription de cinq ans, et en tout état de cause non fondée ; que selon l'article L. 132-1 ancien al. 1 du code de la consommation, « dans les contrats conclus entre professionnels et non-professionnels ou consommateurs, sont abusives les clauses qui ont pour objet ou pour effet de créer au détriment du non-professionnel ou du consommateur un déséquilibre significatif entre les droits et obligations des parties au contrat » ; que le juge ayant obligation de relever d'office le caractère abusif d'une clause, le moyen d'irrecevabilité tiré de l'article 564 du code de procédure civile doit être écarté ; que par ailleurs, la demande tendant à voir réputer non écrites les clauses litigieuses ne s'analyse pas en une demande en nullité, de sorte qu'elle n'est pas soumise à la prescription quinquennale ; que la demande est donc recevable ; que cependant, les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation ne s'appliquent que dans les rapports entre les professionnels et non professionnels ou consommateurs ; qu'en en l'espèce, la qualité de consommateur ne peut être reconnue à la commune qui est une personne morale ; que ne peut non plus lui être reconnue la qualité de non professionnel – qui se distingue du caractère « averti » s'opposant aux obligations précontractuelles de la banque puisque l'emprunt a été contracté pour la réalisation de ses investissements et relève de ses besoins en matière de travaux de fourniture et de services en rapport direct avec son activité, de sorte que bien que ne recherchant pas le profit, la commune a agi à une fin professionnelle non commerciale, en dépit de la Charte Gissler qui concerne l'hypothèse où la collectivité conclut des instruments financiers à terme et dont les termes ne peuvent être étendus aux opérations de crédit ; que les dispositions de l'article L. 132-1 du code de la consommation doivent donc être en l'espèce écartées ; que s'agissant de l'argument de l'appelante selon laquelle la stipulation d'intérêt exclut la réciprocité de la variation du taux, il convient d'observer qu'il existe en réalité une condition suspensive qui peut se réaliser comme retomber de sorte qu'il est inexact de conclure que la stipulation d'intérêts ne peut varier qu'à la hausse ; qu'en effet, la formule prévoit un taux fixe de base (3,55 %) applicable à défaut de déclenchement de la condition suspensive ; qu'en cas de déclenchement de cette condition, l'indexation se trouve activée et elle s'applique à la hausse comme à la baisse du taux, tant que la condition suspensive reste déclenchée, c'est-à-dire quand et aussi longtemps que la différence arithmétique entre le CMS EUR 30 ans et le CMS EUR 1 an devient inférieure à 0,30 % ; que dans une telle hypothèse, le montant du taux dépendra du montant de l'écart négatif (ou inférieur à 0,30 %) entre les deux taux ; que cet écart varie bien dans les deux sens, ce qui entraîne une hausse ou une baisse du taux d'intérêt ; que si, à l'inverse, la différence entre le CMS EUR 30 ans et le CMS EUR 1 an redevient supérieure à 0,30 %, alors l'indexation cesse d'être activée et le taux fixe de base (3,55 %) s'applique à nouveau ; qu'il incombe donc de rejeter la demande tendant à voir déclarées non écrites la stipulation d'intérêts du contrat et la clause se rapportant au calcul de l'indemnité de remboursement anticipé du contrat ;
1°) ALORS QU'une commune qui conclut des prêts afin de financer ses investissements n'exerce pas d'activité professionnelle en ce qu'elle agit dans un but d'intérêt général et non à des fins lucratives, et doit dès lors être considérée comme un non-professionnel ; qu'en retenant, pour refuser d'examiner le grief tiré du caractère abusif de la stipulation d'intérêt du contrat de prêt 2011 et de la clause de remboursement anticipé, que la commune ne peut être qualifiée de non-professionnel dès lors que l'emprunt a été contracté pour la réalisation de ses investissements et relève de ses besoins en matière de travaux de fourniture et de services en rapport direct avec son activité, de sorte qu'elle a agi à une fin professionnelle non commerciale, la cour d'appel a violé l'article L. 132-1 du code de la consommation ;
2°) ALORS QU'est nulle une clause d'indexation qui exclut la réciprocité de la variation ; qu'en retenant, pour juger non abusif l'indexation sur le différentiel des taux CMS € 30 ans et CMS € 1 an du taux, « qu'il existe en réalité une condition suspensive qui peut se réaliser comme retomber de sorte qu'il est inexact de conclure que la stipulation d'intérêts ne peut varier qu'à la hausse » (arrêt, p. 19, al. 2), sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 41 et 43), si la société Dexia ne pouvait pas bénéficier sans limite de la hausse du taux d'intérêt, contrairement à la commune qui devait payer un taux d'intérêt fixe de base en cas de baisse importante du taux d'intérêt indexé sur le différentiel des taux CMS € 30 ans et CMS € 1 an, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 112-1 du code monétaire et financier.
QUATRIÈ
ME MOYEN DE CASSATION :
(SUBSIDIAIRE)IL EST FAIT GRIEF à l'arrêt confirmatif attaqué d'AVOIR débouté la commune de Sélestat de sa demande tendant à l'annulation du contrat Tofixms 2011 n° MPH261958EUR ;
AUX MOTIFS QUE la commune de Sélestat affirme que le contrat contient des options incorporées et est une opération à terme, et subsidiairement, que l'emprunt en cause est un instrument hybride, composé d'un contrat hôte, le contrat de prêt, et de produits dérivés incorporés de nature optionnelle ; que la SA Dexia soutient, au contraire, que les prêts litigieux ne sont ni des instruments financiers ni des contrats spéculatifs ; qu'en effet, selon elle, seuls les produits ou contrats figurant à l'article L. 321-1 du code monétaire et financier peuvent recevoir la qualification d'instruments financiers et que les contrats de prêts dits "structurés" n'en font pas partie ; qu'elle ajoute que les contrats de prêts ne comportent pas de vente d'option et que l'élément conditionnel figurant dans la formule du taux d'intérêt de la deuxième phase du prêt n'est que l'expression mathématique des conditions de variation du taux d'intérêt et soutiennent en conséquence que les contrats ne confèrent nullement au prêteur le droit potestatif d'exercer ou non son option à terme ; que chacune des parties aux contrats de prêt est définitivement engagée dès la conclusion du contrat et ce sans qu'aucune manifestation de volonté soit requise de leur part ; qu'elle affirme que les modalités d'indexation des crédits à taux variable relèvent de la liberté contractuelle et n'affectent pas la nature des prêts litigieux ; qu'elle soutient encore que les contrats de prêts ne sont pas des contrats spéculatifs dans la mesure où la ville n'a jamais cherché un gain déconnecté d'un financement mais qu'elle a simplement souhaité refinancer des dépenses d'investissement par recours à l'emprunt en cherchant à optimiser son taux d'intérêt et que l'aléa inhérent à un taux variable d'emprunt ne confère pas un caractère spéculatif à l'opération ; que les contrats de prêt octroyés par un établissement bancaire appartiennent à la famille des opérations de crédit, régies par les articles L. 313-1 et suivants du code monétaire et financier ; que les instruments financiers sont visés aux articles L. 211-1 et D. 211-1 A du code monétaire et financier et relèvent des services d'investissement limitativement énumérés à l'article L. 321-1 dudit code ; qu'alors que la spéculation est la situation dans laquelle une personne met ses ressources en péril dans l'unique dessein de s'enrichir, la conclusion des contrats litigieux avait au contraire pour finalité de procurer à la Ville des ressources, non pas dans un but d'enrichissement, mais pour financer ou refinancer ses investissements par recours à l'emprunt de la manière qu'il jugeait optimale en termes de taux d'intérêt ; que les contrats de prêt dits « structurés » appellent l'utilisation de mécanismes destinés à fixer, en fonction des conditions de marché, le taux d'intérêt applicable, mais demeurent néanmoins destinés à offrir une solution de financement à un client emprunteur dont l'obligation essentielle demeure celle de restituer les fonds prêtés, et en cela, contrairement à ce qu'affirme la Ville les contrats de prêt litigieux traduisent une opération économique unique ; que le prêt, même assorti d'une clause d'indexation complexe, qui relève de la liberté contractuelle, demeure une opération de crédit et ne peut être vu comme un "produit d'investissement", peu important que cette clause soit liée à l'évolution du change ; que si le contrat de prêt litigieux comporte un aléa, il ne constitue pas pour autant un contrat spéculatif, ni un produit d'investissement ; qu'enfin, le contrat de prêt litigieux ne présente aucun caractère optionnel dans la mesure où les conditions dans lesquelles sont engagées les parties sont définitivement fixées lors de la conclusion des contrats et ne requièrent aucune manifestation de volonté de la part des parties. Ainsi, si le taux d'intérêt de la deuxième phase de remboursement n'est pas fixé au moment de la signature du contrat, le mode de calcul de ce taux variable est très précisément défini et ne comporte aucune option possible ; que la présence d'une condition déterminant le calcul du taux dans la phase structurée, matérialisée par la locution « si », ne caractérise aucunement l'existence, dans le contrat de prêt, d'une option de vente, mais fixe simplement un seuil au-delà duquel le taux d'intérêt applicable à la phase en question ne sera pas le taux fixe de référence mais la formule prévue au contrat et pose une condition, liée à la survenance d'un événement futur, incertain et extérieur à la volonté des parties ; que la demande de nullité du contrat pour son prétendu caractère illicite sera donc rejetée, le jugement étant confirmé sur ce point ;
ET QUE la commune affirme que le maire n'avait pas compétence pour signer les prêts litigieux, la délégation qui lui a été consentie par le conseil municipal ne pouvant lui conférer la possibilité de signer des emprunts structurés de nature spéculative et donc illicite ; qu'elle se prévaut de la circulaire du 4 avril 2003 relative aux régimes des délégations de compétences en matière d'emprunt, de trésorerie et d'instruments financiers selon laquelle les délégations trop larges qui ne fixent pas de limites au champ des pouvoirs délégués peuvent être sanctionnées par le juge administratif et fait valoir qu'en l'espèce, la délibération du 5 juillet 2012 portant délégation de compétence au Maire ne reprend pas toutes les caractéristiques prévues à la circulaire du 4 avril 2003 puisque ne sont pas indiqués : le montant de l'emprunt,- le taux effectif global, la durée maximale de l'emprunt, le type d'amortissement et la possibilité de procéder à un différé d'amortissement, les index pouvant être retenus comme référence de taux d'intérêt et d'une manière générale les conditions de taux, la possibilité de recourir à des opérations particulières, comme des emprunts obligataires ou des emprunts en devises, la faculté de procéder à des tirages échelonnés dans le temps, à des remboursements anticipés et/ou consolidation ; qu'elle se prévaut également de l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales selon lesquelles les délégations données par le conseil municipal au maire de la commune doivent, selon elle, être strictement délimitées et suffisamment précises, notamment en reprenant les conditions financières du prêt en faisant valoir que, agissant par délégation, le maire peut, dans le cadre des pouvoirs qui lui sont reconnus, recourir à des emprunts, réaliser des opérations de couverture des risques de taux et de change, mais n'a aucune faculté pour conclure sur délégation des emprunts structurés de nature spéculative ; qu'elle se prévaut enfin de la circulaire du 15 septembre 1992 relative aux instruments de couverture du risque de taux d'intérêt offerts aux collectivités locales et aux établissements publics locaux qui restreindrait, selon elle, la faculté pour une collectivité de choisir une formule de taux dite "structurée" ; que la SA Dexia répond que le contrat n'est pas une opération spéculative, qu'il a été conclu dans le cadre de la politique de gestion de dette de la Ville afin de refinancer des contrats de prêt antérieurs, plus particulièrement le Contrat de Prêt 2008 n° 1, et de financer de nouveaux investissements, ce qui répond à un objectif d'intérêt général, et que le contrat de prêt 2011 a été valablement signé par l'adjoint au Maire chargé des finances et des affaires locatives, M. [U] [G], qui disposait des pouvoirs lui permettant de représenter et d'engager valablement la Ville lors de la conclusion du Contrat de Prêt 2011 ; que la circulaire du 15 septembre 1992, qui rappelle que les collectivités et établissements publics locaux doivent rechercher l'intérêt général et non la réalisation d'opérations à caractère spéculatif, ne pose pas le principe de l'interdiction de conclure des contrats présentant un caractère spéculatif, ceux-ci pouvant être librement conclus à la condition qu'ils ne le soient pas dans un but spéculatif mais dans l'intérêt général de la collectivité et une circulaire administrative n'a en tout état de cause aucune valeur normative devant les juridictions de l'ordre judiciaire ; que cette circulaire, qui n'est qu'une simple interprétation de la loi du 2 mars 1982 ne vise d'ailleurs que les instruments financiers de couverture souscrits par les collectivités et non les emprunts dits "structurés" ; qu'en l'espèce, le Contrat Tofixms 2011 a été conclu par le Maire de la Ville en application d'une délégation accordée par une délibération du conseil municipal du 23 avril 2009 ; que cette délibération donne délégation au Maire de [Localité 5] pour procéder à la réalisation des emprunts et aux opérations financières utiles à leur gestion y compris les opérations de couverture de risques de taux et de change et de passer à cet effet les actes nécessaires ; qu'elle précise que les contrats de prêt peuvent comporter un ou plusieurs des caractéristiques ci-après : - la faculté d'opter parmi plusieurs taux d'intérêt différents et de modifier le choix initial pendant la période d'amortissement ; - la possibilité de modifier la périodicité, le profil de remboursement et la durée du prêt, de procéder à des remboursements anticipés à des différés d'amortissement ; - la faculté de procéder à des tirages échelonnées dans le temps avec possibilité de remboursement anticipé et /ou de consolidation ; - de conclure tout avenant destiné à introduire dans le contrat initial une ou plusieurs caractéristiques énoncées ci-dessus ; qu'en application de la délibération n° 153/2009 du 23 avril 2009, le maire de la Ville a, le 29 juin 2011, pris une décision n° 26/11 qui : - rappelle les dispositions du code général des collectivités territoriales, la délibération du conseil municipal n° 153/2009 du 23 avril 2009 et le capital du prêt réaménagé ; - indique le taux d'intérêt applicable à la prochaine échéance prévue, ainsi que le montant des indemnités de remboursement anticipé ; - détaille les principales caractéristiques de la proposition de refinancement (montant, durée, périodicité, date d'effet, remboursement anticipé, taux d'intérêt, ...) ; - délègue à M. [U] [G], adjoint en charge des finances, en application de l'article L. 2122-23 du CGCT précité, le pouvoir de traiter par téléphone avec la salle des marchés de Dexia Crédit Local, de signer le fax de confirmation et de signer le contrat de prêt ; puis, que conformément à l'article L. 2122-23 du code général des collectivités territoriales, le maire de la Ville a informé le conseil municipal de sa décision 26/11 lors de la réunion du conseil municipal du 28 juillet 2011 ; qu'il a été démontré ci-dessus que le contrat n'avait pas un caractère spéculatif et le jugement sera donc confirmé en ce qu'il a rejeté cette demande ;
ET AUX MOTIFS ADOPTÉS QUE la commune affirme que le contrat de prêt de 2011 présente un caractère spéculatif en raison du caractère très volatil de la formule d'indexation retenue et qu'il est donc illicite en application des circulaires des 15 septembre 1992 et 25 juin 2010 ; que la commune prétend en outre qu'elle ignorait, au jour de la signature du contrat, son caractère spéculatif ; que la société Dexia Crédit Local soutient au contraire que le contrat de prêt litigieux ne présente pas de caractère spéculatif dès lors que la commune n'a jamais cherché un gain déconnecté d'un financement mais qu'elle a simplement souhaité refinancer des dépenses d'investissement par recours à l'emprunt en cherchant à optimiser son taux d'intérêt ; qu'elle ajoute que l'aléa inhérent à un taux variable d'emprunt ne confère pas un caractère spéculatif à l'opération ; qu'elle précise enfin qu'il n'existait, lors de la conclusion de ce contrat, aucun texte ayant force obligatoire ni aucune décision de justice interdisant aux collectivités territoriales de conclure des crédits dits «structurés» ni ne limitait les conditions dans lesquelles ceux-ci pouvaient être conclus ; que si le contrat de prêt litigieux comporte un aléa, à savoir l'application, pour la seconde phase de remboursement, d'un taux variable calculé en fonction de la différence entre le CMS EUR 30 ans et le CMS EUR 1 an, il ne présente pas pour autant de caractère spéculatif dès lors qu'en souscrivant ce contrat, la commune n'a pas cherché à s'enrichir mais seulement, comme mentionné à l'article 1 du prêt, à refinancer des investissements réalisés dans l'intérêt général à des conditions de taux d'intérêt les plus avantageuses possibles ; que la clause d'indexation figurant au contrat litigieux est complexe et comporte un risque financier manifeste dans la mesure où le taux d'intérêt n'est pas plafonné et se trouve, compte tenu des indices retenus, soumis aux incertitudes de la conjoncture économique internationale ; que pour autant, cette clause ne modifie ni l'objet ni la nature du contrat consistant essentiellement en la mise à disposition de fonds en échange de l'engagement de la commune de rembourser les échéances dues, échéances dont le montant est fonction d'un mode de calcul précisément défini et ne comportant aucune option possible ; qu'au surplus, il n'existait, lors de la conclusion du contrat de prêt litigieux, aucune disposition législative ou réglementaire limitant la liberté contractuelle des collectivités locales à conclure des contrats de prêts, les circulaires des 15 septembre 1992 et 25 juin 2010, relative aux contrats de couverture du risque de taux d'intérêt offerts aux collectivités locales et aux établissements publics locaux, n'ayant aucune valeur normative devant les juridictions de l'ordre judiciaire ; qu'il y a donc lieu de rejeter la demande de nullité du contrat de prêt de 2011 fondée sur son caractère illicite ;
ET QUE la commune soutient que le maire de la commune a outrepassé ses pouvoirs en signant le contrat de prêt de 2011 dès lors que l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales lui interdit de conclure des emprunts de nature spéculative ; qu'en réplique, la société Dexia Crédit Local fait valoir que dès lors qu'il est établi que le contrat de prêt litigieux ne présente pas de caractère spéculatif, le maire avait le pouvoir de le conclure ; que l'article L. 2121-29 du code général des collectivités territoriales prévoit que : « Le conseil municipal règle par ses délibérations les affaires de la commune. Il donne son avis toutes les fois que cet avis est requis par les lois et règlements, ou qu'il est demandé par le représentant de l'Etat dans le département. Lorsque le conseil municipal, à ce régulièrement requis et convoqué, refuse ou néglige de donner avis, il peut être passé outre. Le conseil municipal émet des voeux sur tous les objets d'intérêt local. » ; que l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales énonce quant à lui que « le maire peut, en outre, par délégation du conseil municipal, être chargé, en tout ou partie, et pour la durée de son mandat : (...) 3° De procéder, dans les limites fixées par le conseil municipal, à la réalisation des emprunts destinés au financement des investissements prévus par le budget, et aux opérations utiles à la gestion des emprunts, y compris les opérations de couvertures des risques de taux et de change ainsi que de prendre les décisions mentionnées au III de l'article L. 1618-2 et au a de l'article L.2221-5-1, sous réserve des dispositions du c de ce même article, et de passer à cet effet les actes nécessaires. » ; qu'il a été démontré que le contrat de prêt de 2011 ne présente pas de caractère spéculatif ; qu'il y a donc lieu en application de ce dernier article de rejeter la demande de nullité de ce contrat fondée sur le défaut de capacité de son signataire ;
1°) ALORS QUE le contrat de prêt qui incorpore des instruments financiers à terme relève de la catégorie des contrats financiers régis par le code monétaire et financier ; qu'en retenant, pour écarter cette qualification et rejeter la demande de nullité consécutive, que le contrat de prêt litigieux ne constituait ni un contrat spéculatif, ni un produit d'investissement, ni un contrat d'option, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 47 à 49), si le contrat n'incorporait pas une opération à terme dès lors que le calcul des intérêts dépendait de conditions de cours déterminées ab initio, et s'il ne relevait pas en conséquence de la catégorie des contrats financiers à terme, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 211-1 et D. 211-1 A du code monétaire et financier ;
2°) ALORS QUE la délégation accordée au maire par le conseil municipal en vue de la conclusion d'emprunt doit être précise et circonstanciée ; qu'en retenant que le conseil municipal avait valablement donné délégation au maire de conclure des emprunts, sans rechercher, comme elle y était invitée (conclusions, p. 61), si cette délibération formulée en des termes généraux et qui ne précisait pas les caractéristiques principales des contrats de prêts susceptibles d'être souscrits et notamment leur durée maximale, le taux et le profil d'amortissement, ne laissait pas toute latitude au pouvoir exécutif pour déterminer les conditions financières du prêt, de sorte qu'en ne fixant ainsi aucune limite à la compétence accordée au maire de la ville, elle était irrégulière, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 2121-29 et L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales.