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04/09/2024 | FRANCE | N°52400813

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 04 septembre 2024, 52400813


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


SOC.


CZ






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 4 septembre 2024








Cassation partielle




M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président






Arrêt n° 813 F-D


Pourvoi n° Q 23-13.583








R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E


_________________________


AU NOM DU PE

UPLE FRANÇAIS
_________________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 SEPTEMBRE 2024


Mme [M] [Y], domiciliée [Adresse 4], [Localité 3], a formé le pourvoi n° Q 23-13.583 contre l'arrêt rendu le 6 déc...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

SOC.

CZ

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 4 septembre 2024

Cassation partielle

M. FLORES, conseiller le plus ancien
faisant fonction de président

Arrêt n° 813 F-D

Pourvoi n° Q 23-13.583

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, DU 4 SEPTEMBRE 2024

Mme [M] [Y], domiciliée [Adresse 4], [Localité 3], a formé le pourvoi n° Q 23-13.583 contre l'arrêt rendu le 6 décembre 2022 par la cour d'appel de Colmar (chambre sociale, section A), dans le litige l'opposant à la caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) du Bas-Rhin, dont le siège est [Adresse 1], [Localité 2], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, cinq moyens de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme Deltort, conseiller, les observations de la SCP Boucard-Maman, avocat de Mme [Y], de la SCP Foussard et Froger, avocat de la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin, après débats en l'audience publique du 19 juin 2024 où étaient présents M. Flores, conseiller le plus ancien faisant fonction de président, Mme Deltort, conseiller rapporteur, Mme Ala, conseiller référendaire ayant voix délibérative, et Mme Aubac, greffier de chambre,

la chambre sociale de la Cour de cassation, composée en application de l'article L. 431-3, alinéa 2 des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Colmar, 6 décembre 2022), Mme [Y] a été engagée en qualité d'agent administratif par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin à compter du 1er octobre 2015, la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale étant applicable à la relation de travail.

2. Le 10 janvier 2018, la salariée a été licenciée.

3. Le 12 juillet 2018, elle a saisi la juridiction prud'homale de demandes en nullité du licenciement et en réintégration ainsi qu'en paiement de diverses sommes au titre de l'exécution du contrat de travail.

Examen des moyens

Sur le quatrième moyen

4. En application de l'article 1014, alinéa 2, du code de procédure civile, il n'y a pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée sur ce moyen qui n'est manifestement pas de nature à entraîner la cassation.

Mais sur le premier moyen

Enoncé du moyen

5. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de ses demandes en réintégration et en paiement des salaires dus entre son licenciement nul et sa réintégration, de lui allouer une indemnité d'un certain montant, de la débouter de sa demande en paiement des dotations annuelles du comité d'entreprise et tendant au bénéfice de la prévoyance et de la santé, alors « qu'en rejetant la demande de réintégration de Mme [Y] au motif qu'il existait des risques de souffrance au travail liés au management et aux relations avec le public pouvant susciter un comportement agressif de la salariée envers elle-même ou autrui, ce qui ne caractérisait aucune impossibilité pour l'employeur de la réintégrer dans son emploi ou un emploi équivalent, la cour d'appel a violé les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1235-3-1 du code du travail. »

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 1226-9, L. 1226-13 et L. 1235-3-1 du code du travail :

6. Lorsque le licenciement est nul, le salarié doit être, s'il le demande, réintégré dans son emploi ou un emploi équivalent, demande à laquelle l'employeur est tenu de faire droit sauf s'il justifie d'une impossibilité de procéder à cette réintégration.

7. Pour débouter la salariée de sa demande en réintégration et en paiement des salaires dus entre le licenciement et la réintégration, fixer à une certaine somme l'indemnité pour licenciement nul et la débouter de sa demande en paiement des dotations annuelles du comité d'entreprise et à ce que le bénéfice de la prévoyance lui soit accordé, l'arrêt, qui fixe par ailleurs l'indemnisation de la salariée au titre du harcèlement moral, retient que l'employeur justifie l'impossibilité de réintégration en raison de sa politique de recrutement et au regard d'un contexte de souffrance au travail invoqué par la salariée. Après avoir retenu que la politique de recrutement, qui fait suite à des choix personnels de l'employeur, ne peut justifier ladite impossibilité, l'arrêt relève que la salariée a soutenu, en premier ressort, qu'elle était quotidiennement soumise à un stress au travail et que seul un éloignement du service d'origine plutôt qu'un changement de manager serait la solution. L'arrêt ajoute qu'il résulte d'un compte rendu médical établi le 18 août 2017 qu'il existerait des risques psychosociaux au sein du service de la caisse, notamment en termes de management et de relations avec le public. L'arrêt en conclut que les risques de souffrance au travail, vécus par la salariée, demeurent dès lors qu'elle se retrouvera, dans le cadre de ses fonctions, en présence de publics.

8. L'arrêt relève enfin que l'employeur, tenu d'assurer la sécurité et la santé de ses salariés, se trouve donc dans l'impossibilité matérielle de réintégrer la salariée, cette dernière pouvant se résoudre à un passage à l'acte hétéro ou auto agressif pouvant aller jusqu'au suicide, selon certificat médical du 21 juin 2017.

9. En statuant ainsi, par des motifs impropres à caractériser, au jour où elle a statué, une impossibilité de réintégration, alors qu'elle avait retenu l'existence d'un manquement de l'employeur à son obligation de sécurité en raison d'une situation de harcèlement moral, la cour d'appel a violé les textes susvisés.

Et sur le cinquième moyen, pris en sa première branche

Enoncé du moyen

10. La salariée fait grief à l'arrêt de la débouter de sa demande en paiement d'un rappel de salaire, alors « que les salariés ont droit à une prime de 6 % du coefficient de qualification lorsque les permanences d'accueil physique individuel s'effectuent sur le site géographique habituel de travail du salarié en vertu de l'article 23 de la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale dans sa rédaction issue du protocole d'accord du 29 mars 2016, applicable en l'espèce puisque Mme [Y] travaillait au sein de la CPAM du Bas-Rhin en 2016 et 2017 ; que la cour d'appel a violé ce texte en jugeant que la prime était de 4 %, ce chiffre étant fixé par l'article 23 en sa rédaction issue de l'article 4 de l'annexe II du protocole d'accord du 30 novembre 2004. »

Réponse de la Cour

Vu l'article 23 de la convention collective nationale de travail du personnel des organismes de sécurité sociale dans sa rédaction issue du protocole d'accord du 29 mars 2016 :

11. Selon ce texte, une prime de fonction est attribuée, dans les conditions posées par le présent article, aux salariés qui assurent des permanences d'accueil ou des permanences téléphoniques.
a) Permanences d'accueil physique
Bénéficient de la prime au titre des permanences d'accueil physique les salariés qui exercent l'un des emplois visés au d) du présent article lorsqu'ils assurent des permanences d'accueil ayant pour objet de répondre aux questions relatives à un dossier de prestation de sécurité sociale ou de recouvrement de cotisations, entraînant un contact physique individuel avec des assurés sociaux, des allocataires ou des cotisants.
Cette prime est également attribuée, dans les mêmes conditions, aux salariés exerçant un emploi autre que ceux visés au premier alinéa lorsqu'ils assurent de manière ponctuelle des permanences d'accueil en renfort, ou en remplacement, des salariés visés au premier alinéa.
Cette prime est également attribuée, dans les mêmes conditions, aux salariés exerçant l'emploi de conseiller assurance maladie.
Le montant mensuel de la prime attribuée au titre des permanences d'accueil physique telles que définies ci-dessus est fixé à :
- 6 % du coefficient de qualification lorsque les permanences d'accueil physique individuel s'effectuent sur le site géographique habituel de travail du salarié ;
- 15 % du coefficient de qualification lorsque les permanences d'accueil physique individuel s'effectuent de façon itinérante, c'est-à-dire hors du site géographique habituel de travail du salarié, que ce soit à l'intérieur ou à l'extérieur de l'organisme.
Pour l'application de cette dernière condition, le lieu d'exercice du télétravail, pour le salarié qui en bénéficie, n'est pas considéré comme un lieu de travail distinct du lieu habituel de travail.

12. Pour rejeter la demande de la salariée en paiement d'un rappel de salaire, l'arrêt énonce qu'elle sollicite au visa de l'article 23 de la convention collective, une prime de guichet de 6 % mais que la convention collective ne prévoit que 4 %, ce qui a été effectivement appliqué par l'employeur.

13. En statuant ainsi, la cour d'appel a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

14. La cassation prononcée n'emporte pas cassation des chefs de dispositif de l'arrêt condamnant l'employeur aux dépens ainsi qu'au paiement d'une indemnité au titre de l'article 700 du code de procédure civile, justifiés par d'autres condamnations prononcées à l'encontre de celui-ci et non remises en cause.

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il rejette les demandes de Mme [Y] en réintégration, en paiement d'une indemnité d'éviction égale aux salaires dus entre son licenciement et sa réintégration, des dotations annuelles du comité d'entreprise, de rappel de salaire au titre des primes de guichet et d'itinérance et tendant au bénéfice de la prévoyance et de la santé, l'arrêt rendu le 6 décembre 2022, entre les parties, par la cour d'appel de Colmar ;

Remet, sur ces points, l'affaire et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d'appel de Metz ;

Condamne la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin aux dépens ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette la demande formée par la caisse primaire d'assurance maladie du Bas-Rhin et la condamne à payer à Mme [Y] la somme de 3 000 euros ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatre septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 52400813
Date de la décision : 04/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Colmar, 06 décembre 2022


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 04 sep. 2024, pourvoi n°52400813


Composition du Tribunal
Président : M. Flores (conseiller doyen faisant fonction de président)
Avocat(s) : SCP Boucard-Maman, SCP Foussard et Froger

Origine de la décision
Date de l'import : 10/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:52400813
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