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18/09/2024 | FRANCE | N°42400486

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 18 septembre 2024, 42400486


LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :


COMM.


MB






COUR DE CASSATION
______________________




Audience publique du 18 septembre 2024








Cassation partielle




M. VIGNEAU, président






Arrêt n° 486 F-D


Pourvoi n° K 23-13.510










R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E




_________________________


AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
________

_________________




ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 SEPTEMBRE 2024


1°/ M. [W] [D], domicilié [Adresse 1],


2°/ la société 95, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1],...

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

COMM.

MB

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 18 septembre 2024

Cassation partielle

M. VIGNEAU, président

Arrêt n° 486 F-D

Pourvoi n° K 23-13.510

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIÈRE ET ÉCONOMIQUE, DU 18 SEPTEMBRE 2024

1°/ M. [W] [D], domicilié [Adresse 1],

2°/ la société 95, société civile immobilière, dont le siège est [Adresse 1],

3°/ M. [B] [D], domicilié [Adresse 3],

4°/ M. [P] [D], domicilié [Adresse 2],

5°/ M. [Y] [D], domicilié [Adresse 5],

ont formé le pourvoi n° K 23-13.510 contre l'arrêt rendu le 18 janvier 2023 par la cour d'appel de Lyon (8e chambre), dans le litige les opposant :

1°/ à M. [N] [T], domicilié [Adresse 4],

2°/ à M. [H] [G], domicilié [Adresse 6],

défendeurs à la cassation.

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de Mme de Lacaussade, conseiller, les observations de la SCP Doumic-Seiller, avocat de M. [W] [D], de la société 95, de MM. [B], [P] et [Y] [D], de la SARL Le Prado - Gilbert, avocat de MM. [T] et [G], après débats en l'audience publique du 18 juin 2024 où étaient présents M. Vigneau, président, Mme de Lacaussade, conseiller rapporteur, M. Ponsot, conseiller doyen, et Mme Layemar, greffier de chambre,

la chambre commerciale, financière et économique de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l'arrêt attaqué (Lyon, 18 janvier 2023) et les productions, MM. [T] et [G], alléguant d'un désaccord avec MM. [B] [D], [W] [D], [P] [D] et [Y] [D] (les consorts [D]), leurs co-associés dans la société civile SCI 95 (la société), sur la valorisation de leurs parts sociales, qu'ils entendaient céder, ont assigné ces derniers, selon la procédure accélérée au fond devant le président d'un tribunal judiciaire pour obtenir, sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, la désignation d'un expert aux fins de fixation de la valeur de leurs droits sociaux.

2. Le président du tribunal a ordonné une expertise.

3. M. [B] [D] a interjeté appel de cette décision.

Recevabilité du pourvoi contestée par la défense

4. Il résulte de l'article 1843-4 du code civil que la décision par laquelle le président du tribunal procède à la désignation d'un expert chargé de déterminer la valeur de droits sociaux est sans recours possible. Cette disposition s'applique, par sa généralité, au pourvoi en cassation comme à toute autre voie de recours. Il n'y est dérogé qu'en cas d'excès de pouvoir.

5. Les consorts [D] et la société se sont pourvus en cassation contre un arrêt ayant déclaré irrecevables leurs appels-nullité formés contre la décision du président du tribunal ayant accueilli la demande d'expertise.

6. Le pourvoi n'est donc recevable que si un excès de pouvoir est caractérisé, question sur laquelle il sera ci-après statué.

Examen du moyen

Enoncé du moyen

7. Le moyen fait grief à l'arrêt de déclarer irrecevables les appels-nullité formés à l'encontre du jugement, alors « que le juge saisi sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil statue selon une procédure accélérée au fond et non en tant que juge des référés au visa de l'article 145 du code de procédure civile ; que, statuant sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil, le juge saisi ne peut impartir à l'expert désigné de statuer conformément aux articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile et de respecter certaines règles pour accomplir sa mission ; qu'en l'espèce, le juge saisi d'une requête formulée sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil a déclaré, d'office, statuer en application de l'article 145 du code de procédure civile, a considéré qu'il existait un motif légitime et a décidé que l'expert désigné devrait respecter les articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile ; qu'en déclarant cependant l'appel-nullité des consorts [D] et de la SCI 95 irrecevable motif pris, notamment, de ce que le fait d'avoir visé l'article 145 du code de procédure civile constituait une erreur de droit mais pas un excès de pouvoir et qu'il n'était pas établi que l'expert désigné aurait agi au visa du code de procédure civile ni qu'il n'aurait pas été indépendant procéduralement dans le cadre de sa mission, la cour d'appel a méconnu l'étendue de ses pouvoirs au regard de l'article 1843-4 du code civil. »

Réponse de la Cour

8. Vu l'article 1843-4 du code civil :

9. Il résulte de ce texte que le président d'un tribunal saisi sur son fondement statue selon la procédure accélérée au fond.

10. Pour déclarer irrecevables les appels-nullité dirigés contre la décision rendue le 24 août 2020, l'arrêt retient que le président du tribunal judiciaire est bien l'autorité judiciaire compétente mentionnée à l'article 1843-4 du code civil et que tout président de tribunal judiciaire a le pouvoir de statuer au visa de l'article 145 du code de procédure civile, de sorte que, ce faisant, il n'a pas empiété sur le pouvoir juridictionnel d'une autre juridiction, voire d'un autre ordre de juridiction. Il ajoute que le relevé d'office erroné de cet article aux côtés de l'article 1843-5 du code civil et de l'article 11 des statuts de la SCI 95, sans le soumettre à la contradiction des parties, ne caractérise pas un excès de pouvoir mais constitue une irrégularité procédurale dont il n'est résulté aucun grief. Il retient enfin que le juge n'a pas imposé de méthode de calcul à l'expert désigné et que le visa des articles du code de procédure civile relatifs à l'expertise judiciaire ne caractérise pas un excès de pouvoir juridictionnel mais une erreur de droit qui, entraînant la confusion des régimes juridiques régissant l'expertise, s'est propagée à l'ensemble du dispositif de la décision attaquée.

11. En statuant ainsi, alors qu'elle constatait que, saisi selon la procédure accélérée au fond, le président du tribunal avait ordonné une mesure d'expertise en donnant mission à l'expert de se conformer aux dispositions des articles 232 à 248 et 263 à 284 du code de procédure civile, ordonnant au surplus l'évaluation d'un immeuble, et non pas désigné un expert pour évaluer la valeur des parts de la SCI, la cour d'appel, qui a consacré un excès de pouvoir, a violé le texte susvisé.

Portée et conséquences de la cassation

12. Après avis donné aux parties, conformément à l'article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l'organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

13. L'intérêt d'une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.

14. La désignation d'un expert sur le fondement de l'article 1843-4 du code civil devant être ordonnée par le président du tribunal statuant selon la procédure accélérée au fond, il s'ensuit que la désignation à laquelle a procédé le président du tribunal judiciaire de Lyon, statuant en référé, doit être annulée.

15. L'affaire est renvoyée devant le président du tribunal judiciaire de Lyon, statuant selon la procédure accélérée au fond, compétent pour en connaître.

PAR CES MOTIFS, la Cour :

DECLARE RECEVABLE le pourvoi ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il déclare irrecevables les appels-nullité formés à titre principal par M. [B] [D] et à titre incident par MM. [P], [W] et [Y] [D] ainsi que par la SCI 95 à l'encontre du jugement du 24 août 2020 du président du tribunal judiciaire de Lyon et en ce qu'il statue sur les dépens et l'application de l'article 700 du code de procédure civile, l'arrêt rendu le 18 janvier 2023, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ;

DIT n'y avoir lieu à renvoi ;

Statuant à nouveau,

Annule la décision rendue le 24 août 2020 par le président du tribunal judiciaire de Lyon, statuant en référé ;

Renvoie l'affaire devant le président du tribunal judiciaire de Lyon, statuant selon la procédure accélérée au fond ;

Condamne MM. [T] et [G] aux dépens, en ce compris ceux exposés devant la cour d'appel de Lyon ;

En application de l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-huit septembre deux mille vingt-quatre.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 42400486
Date de la décision : 18/09/2024
Sens de l'arrêt : Cassation partielle

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Lyon, 18 janvier 2023


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 18 sep. 2024, pourvoi n°42400486


Composition du Tribunal
Président : M. Vigneau (président)
Avocat(s) : SARL Le Prado - Gilbert, SCP Doumic-Seiller

Origine de la décision
Date de l'import : 01/10/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2024:42400486
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