LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, a rendu l'arrêt suivant :
N° R 23-83.895 F-D
N° 01528
SL2
17 DÉCEMBRE 2024
REJET
M. BONNAL président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE,
DU 17 DÉCEMBRE 2024
La société [1], partie intervenante, a formé un pourvoi contre l'arrêt de la cour d'appel de Colmar, chambre correctionnelle, en date du 9 juin 2023, qui, dans la procédure suivie contre M. [U] [G] [S] du chef d'homicide involontaire aggravé, a prononcé sur les intérêts civils.
Des mémoires ont été produits, en demande et en défense.
Sur le rapport de Mme Hairon, conseiller, les observations de la SARL Le Prado-Gilbert, avocat de la société [1], les observations de la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy, avocat de Mme [F] [Z], M. [N] [C] et de la société [C] [Z], et les conclusions de M. Aubert, avocat général référendaire, après débats en l'audience publique du 19 novembre 2024 où étaient présents M. Bonnal, président, Mme Hairon, conseiller rapporteur, M. Sottet, conseiller de la chambre, et Mme Lavaud, greffier de chambre,
la chambre criminelle de la Cour de cassation, composée en application de l'article 567-1-1 du code de procédure pénale, des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de procédure ce qui suit.
2. M. [U] [G] [S] a été condamné du chef d'homicide involontaire aggravé par conducteur de véhicule terrestre à moteur sur la personne de [M] [C].
3. Statuant sur l'action civile, le tribunal a, notamment, condamné M. [G] [S] à payer à Mme [F] [Z], épouse [C], conjoint survivant, la somme de 439 294,29 euros en réparation de son préjudice économique.
4. Les parties civiles et la société [1], assureur de M. [G] [S] ont relevé appel de cette décision.
Examen du moyen
Enoncé du moyen
5. Le moyen critique l'arrêt attaqué en ce qu'il a condamné M. [G] [S] à payer à Mme [Z] la somme de 439 294,29 euros, au titre de son préjudice économique personnel, alors « que la réparation du dommage doit être intégrale, sans perte ni profit pour aucune des parties ; que l'évaluation du préjudice économique de la victime indirecte doit prendre en compte la date prévisible d'accession à la retraite du défunt afin d'intégrer dans son calcul la baisse de revenus correspondante ; qu'à cette opération ne saurait se substituer la simple application de la valeur du point de rente qui se borne à actualiser une rente prédéfinie au regard de taux d'intérêt et du taux de mortalité ; qu'en évaluant comme elle l'a fait le préjudice économique subi par Mme [Z] [C], victime indirecte, en appliquant un point de rente viager (Gazette du Palais 2020 ; arrêt attaqué, p. 8 et p. 9, § 4), la cour d'appel, qui a refusé de prendre en considération, comme cela lui était pourtant demandé (conclusions d'appel de l'exposante, pp. 7 et 8), l'incidence du départ en retraite de [M] [C], victime directe décédée, lequel était parfaitement prévisible, a violé le principe susvisé, ensemble l'article 1240 du code civil. »
Réponse de la Cour
6. Pour fixer le préjudice économique de Mme [Z] à la somme de 439 294,29 euros, l'arrêt attaqué énonce que la perte annuelle de revenu du foyer consécutive au décès de son époux s'élève, après déduction de la part de consommation personnelle du défunt et des revenus de sa veuve, à 16 330,40 euros.
7. Le juge procède ensuite à la capitalisation de ce montant, en recourant au prix de l'euro de rente viagère correspondant à l'âge et au sexe de celui des deux époux ayant l'espérance de vie la plus faible, puis déduit de la somme obtenue le préjudice économique de l'enfant.
8. En statuant ainsi, la cour d'appel, qui, par des motifs relevant de son appréciation souveraine, a évalué au jour de sa décision le préjudice économique de la veuve de la victime directe du fait du décès de celle-ci, en tenant compte des seuls éléments connus à cette date, sur la base d'une perte de revenus certaine et quantifiable, n'a pas méconnu le texte visé au moyen.
9. Dès lors, le moyen doit être écarté.
10. Par ailleurs, l'arrêt est régulier en la forme.
PAR CES MOTIFS, la Cour :
REJETTE le pourvoi ;
FIXE à 2 500 euros la somme globale que la société [1] devra payer aux parties représentées par la SARL Thouvenin, Coudray et Grévy en application de l'article 618-1 du code de procédure pénale ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, chambre criminelle, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept décembre deux mille vingt-quatre.