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10/01/2025 | FRANCE | N°22MA01306

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 2ème chambre, 10 janvier 2025, 22MA01306


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



La SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Nice de condamner solidairement l'Etat et le Comité français d'accréditation (COFRAC) à leur payer la somme globale de 2 714 978 euros en réparation des préjudices subis en raison de la décision du 19 novembre 2013 par laquelle le directeur général adjoint de l'agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d'Azur a abrogé l'autorisation de fonct

ionnement délivrée au laboratoire exploité par la SARL.



Par un jugement n° 1801743 du...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et Mme B... A... ont demandé au tribunal administratif de Nice de condamner solidairement l'Etat et le Comité français d'accréditation (COFRAC) à leur payer la somme globale de 2 714 978 euros en réparation des préjudices subis en raison de la décision du 19 novembre 2013 par laquelle le directeur général adjoint de l'agence régionale de santé (ARS) Provence-Alpes-Côte d'Azur a abrogé l'autorisation de fonctionnement délivrée au laboratoire exploité par la SARL.

Par un jugement n° 1801743 du 15 mars 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté leurs demandes.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 mai 2022 et le 12 septembre 2022, la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et Mme A..., représentées par Me Governatori, demandent à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nice du 15 mars 2022 ;

2°) à titre principal, de condamner l'Etat à payer à la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence la somme de 1 494 950 euros en réparation de son préjudice matériel et celle de 480 124 euros en réparation de son préjudice moral et à Mme A... la somme de 259 780 euros en réparation de son préjudice matériel et celle de 480 124 euros en réparation de son préjudice moral ;

3°) à titre subsidiaire, de condamner solidairement l'Etat et le COFRAC à payer les mêmes sommes à la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et à Mme A... ;

4°) en tout état de cause, de mettre à la charge solidaire de l'Etat et du COFRAC la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- la responsabilité de l'Etat est engagée en raison de l'illégalité de la décision du directeur de l'ARS PACA du 19 novembre 2013 en raison d'un vice d'incompétence, d'un vice de procédure tenant à la violation du principe du contradictoire ;

- la responsabilité du COFRAC est engagée en raison d'une carence fautive dans la gestion de la demande d'accréditation, cette attitude étant contraire au principe de loyauté ;

- l'Etat est responsable des défaillances de son délégataire de prérogatives de puissance publique ;

- elles sont fondées à demander l'indemnisation des préjudices subis :

* au titre du préjudice matériel subi par la SARL : 1 494 950 euros ;

* au titre du préjudice moral subi par la SARL : 480 124 euros ;

* au titre du préjudice matériel subi par Mme A... : 259 780 euros ;

* au titre du préjudice moral subi par Mme A... : 480 124 euros.

Par un mémoire, enregistré le 7 juillet 2022, le Comité français d'accréditation (COFRAC), représenté par Me Michel, demande à la cour :

1°) de rejeter comme étant portées devant un ordre de juridiction incompétent les demandes formées par les requérantes à son encontre ;

2°) subsidiairement, de rejeter les demandes formées par les requérantes au fond ;

3°) en toute hypothèse, de mettre à la charge de la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et de Mme A... la somme de 6 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- les demandes des requérantes tendant à mettre en jeu sa responsabilité sont portées devant un ordre de juridiction incompétent pour en connaître ;

- aucun manquement ne peut lui être reproché ;

- aucun lien de causalité n'existe entre le manquement supposé et le préjudice allégué ;

- les préjudices dont se prévalent les requérantes ne sont pas établis ;

- la SARL requérante est à l'origine du préjudice subi.

Par un mémoire, enregistré le 1er décembre 2022, le ministre de la santé conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- le vice d'incompétence entachant la décision du 19 novembre 2013 et celui, allégué, tiré de la violation du principe du contradictoire au regard de l'article L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration, n'est pas de nature à ouvrir droit à indemnisation et n'est pas la cause des préjudices allégués par les requérantes ;

- à supposer que la décision du 19 novembre 2013 soit considérée comme illégale au fond, elle n'est pas la cause directe des préjudices invoqués en raison de la compétence liée dans laquelle se trouvait l'autorité compétente en raison de la décision d'irrecevabilité opposée par le COFRAC le 8 novembre 2013 ;

- les requérantes ont été mises en mesure de présenter des observations avant la décision du 19 novembre 2013 ;

- seule une partie du préjudice matériel des requérantes est établie mais son étendue demeure imprécise ;

- l'insuffisance des diligences accomplies par Mme A... dans le suivi de son dossier auprès du COFRAC est à l'origine des préjudices invoqués.

Des mémoires, enregistrés les 13, 14 et 18 décembre 2024, après la clôture de l'instruction, ont été présentés pour la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et Mme A..., représentées par Me Grech, et n'ont pas été communiqués.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 ;

- le décret n° 2008-1401 du 19 décembre 2008 ;

- l'ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale ;

- l'arrêté du 17 octobre 2012 définissant les conditions justificatives de l'entrée effective d'un laboratoire de biologie médicale dans une démarche d'accréditation ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Rigaud ;

- les conclusions de M. Gautron, rapporteur public ;

- et les observations de Me Grech, représentant la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 19 novembre 2013, le directeur général adjoint de l'Agence régionale de santé de Provence-Alpes-Côte d'Azur (ARS PACA) a abrogé l'autorisation de fonctionnement délivrée au laboratoire exploité par la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence. Par un arrêt n° 16MA01521 du 11 janvier 2018, la cour administrative d'appel de Marseille a annulé la décision du 19 novembre 2013 au motif qu'elle avait été prise par une autorité incompétente. Par un jugement du 15 mars 2022, le tribunal administratif de Nice a rejeté les demandes de la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et de Mme A... tendant à la condamnation de l'Etat et du COFRAC à réparer leurs préjudices. La SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et Mme A... interjettent appel de ce jugement.

Sur la compétence de la juridiction administrative :

2. D'une part, aux termes de l'article L. 6221-1 du code de la santé publique : " Un laboratoire de biologie médicale ne peut réaliser d'examen de biologie médicale sans accréditation. / L'accréditation porte sur les trois phases, définies à l'article L. 6211-2, de l'ensemble des examens de biologie médicale réalisés par le laboratoire. / L'accréditation porte également, lorsque le laboratoire réalise ces activités ou examens : 1° Sur les activités biologiques d'assistance médicale à la procréation ; 2° Sur les examens d'anatomie et de cytologie pathologiques figurant soit à la nomenclature des actes de biologie médicale, soit à la nomenclature générale des actes professionnels. ". Aux termes de l'article L. 6221-2 de ce code : " I. - L'accréditation du laboratoire de biologie médicale est délivrée, à sa demande, par l'instance nationale d'accréditation prévue au I de l'article 137 de la loi n° 2008-776 du 4 août 2008 de modernisation de l'économie, lorsqu'il satisfait aux critères définis par les normes harmonisées en vigueur applicables aux laboratoires de biologie médicale, dont les références sont fixées par un arrêté des ministres chargés de la santé et de l'industrie, pris après avis de la Haute Autorité de santé. II. - Avant l'ouverture d'un nouveau laboratoire de biologie médicale, l'instance nationale d'accréditation lui délivre, à sa demande, une attestation provisoire établissant qu'il satisfait aux critères d'accréditation susceptibles d'être vérifiés avant son ouverture. Elle prend, après l'ouverture du laboratoire et dans un délai fixé par voie réglementaire, la décision d'accréditation relative aux examens ou activités que le laboratoire réalise conformément aux critères mentionnés au I. III. - L'instance nationale d'accréditation suspend ou retire l'accréditation du laboratoire, pour une partie ou pour la totalité de son activité, lorsqu'il ne satisfait plus aux critères mentionnés au I. ". Aux termes de l'article L. 6222-1 de ce code : " L'ouverture d'un laboratoire de biologie médicale, public ou privé, est subordonnée au dépôt préalable, par son représentant légal, d'une déclaration auprès de l'agence régionale de santé, dans un délai fixé par voie réglementaire. Le contenu de cette déclaration est également fixé par voie réglementaire. (...) / Avant l'ouverture du laboratoire, son représentant légal communique à l'agence régionale de santé l'attestation provisoire délivrée par l'instance nationale d'accréditation en application du II de l'article L. 6221-2. (...) ".

3. D'autre part, aux termes du I de l'article 137 de la loi du 4 août 2008 : " L'accréditation est l'attestation de la compétence des organismes qui effectuent des activités d'évaluation de la conformité. Afin de garantir l'impartialité de l'accréditation, il est créé une instance nationale d'accréditation, seule habilitée à délivrer les certificats d'accréditation en France. Un décret en Conseil d'Etat désigne cette instance et fixe ses missions. ". Le décret du 19 décembre 2008, en son article 1er, a désigné le Comité français d'accréditation (COFRAC), association régie par les dispositions de la loi du 5 juillet 1901, comme l'instance nationale d'accréditation. L'article 5 du même décret dispose que le délégué interministériel aux normes exerce les fonctions de commissaire du Gouvernement auprès de cette instance, en lui confiant le pouvoir de s'opposer aux décisions du comité qu'il estimerait contraires à des dispositions législatives ou réglementaires ou à l'intérêt général. Et, en vertu de l'article 6 du même décret, le COFRAC est soumis au contrôle économique et financier de l'Etat.

4. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions que le COFRAC assure, sous le contrôle de l'Etat, une mission d'intérêt général d'attestation de la capacité des laboratoires de biologie médicale à réaliser des examens dans de bonnes conditions, pour l'exécution de laquelle il a été habilité à délivrer, suspendre ou retirer l'accréditation conditionnant la possibilité, pour un laboratoire de biologie médicale, d'exercer son activité. Dans ces conditions, cette ordonnance a pour effet de charger le COFRAC de l'exécution d'une mission de service public administratif.

5. Contrairement à ce que fait valoir le COFRAC à l'appui de l'exception d'incompétence qu'il oppose, les requérantes entendent engager sa responsabilité sur le fondement de carences fautives dans l'exercice de ses missions de service public dont relève la procédure d'accréditation. C'est donc à bon droit que les premiers juges ont écarté l'exception d'incompétence opposée par le COFRAC, la juridiction administrative étant compétente pour connaître des conclusions des requérantes dirigées contre lui.

Sur le bienfondé du jugement :

6. Aux termes de l'article 8 de l'ordonnance du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " (...) V- Aucun laboratoire de biologie médicale non accrédité au sens de l'article L. 6221-1 du code de la santé publique ne peut fonctionner après le 1er novembre 2013 sans respecter les conditions définies par arrêté du ministre chargé de la santé justifiant son entrée effective dans une démarche d'accréditation (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 17 octobre 2012 modifié, définissant les conditions justificatives de l'entrée effective d'un laboratoire de biologie médicale dans une démarche d'accréditation : " Pour justifier son entrée effective dans une démarche d'accréditation en application du V de l'article 8 de l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale, le laboratoire de biologie médicale procède, à son choix, selon l'une des deux options suivantes : / 1. Option A / A. - 1. Au plus tard le 31 mai 2013, le laboratoire de biologie médicale adresse au Comité français d'accréditation, par voie électronique ou postale avec accusé de réception, une demande d'accréditation partielle portant sur un ou plusieurs examens de biologie médicale, de la phase préanalytique à la phase postanalytique réalisés sur au moins un site du laboratoire. L'un, au moins, de ces examens ne relève pas de l'article L. 6211-18 du code de la santé publique. / A cette demande d'accréditation partielle est joint un dossier relatif aux examens réalisés par le laboratoire en dehors de la portée d'accréditation partielle demandée. La preuve d'entrée effective du laboratoire dans la démarche d'accréditation est déterminée sur la base de l'ensemble de ces documents dont les éléments matériels sont les suivants : 1° Pour les documents relatifs à la demande d'accréditation partielle afin de permettre au COFRAC de valider la recevabilité administrative de la demande d'accréditation partielle : - le questionnaire de renseignements (SH FORM 05) et ses annexes dont, notamment, le questionnaire d'autoévaluation (SH FORM 03). Le questionnaire de renseignements (SH FORM 05) et le questionnaire d'autoévaluation (SH FORM 03) sont disponibles sur le site internet du Comité français d'accréditation ; / - un dossier de vérification de méthode portant sur une méthode quantitative ou sur une méthode qualitative. Celle-ci est incluse dans la portée de la demande d'accréditation partielle. Les formulaires de vérification de méthode à utiliser (SH FORM 43 et SH FORM 44) sont disponibles sur le site internet du Comité français d'accréditation ; / 2° Pour les documents relatifs aux examens de biologie médicale réalisés en dehors de la portée d'accréditation partielle demandée : / - une description de l'activité du laboratoire qui n'entre pas dans sa portée d'accréditation partielle. Cette description est faite au moyen des mêmes documents de demande d'accréditation également disponibles sur le site internet du Comité français d'accréditation ; / - la preuve de l'abonnement à au moins un programme d'évaluation externe de la qualité auprès d'organismes d'évaluation externe de la qualité, par famille d'examens de biologie médicale que le laboratoire réalise ne figurant pas dans sa portée d'accréditation partielle. Les familles d'examens sont répertoriées en annexe I ; / - le manuel d'assurance qualité du laboratoire de biologie médicale et le manuel de prélèvement qui doivent être mis en application dans au moins deux sites du laboratoire de biologie médicale si le laboratoire est multisite ; / - un calendrier prévisionnel conduisant à une accréditation sur la totalité de son activité avant la date mentionnée au IV de l'article 7 de l'ordonnance n° 2010-49 du 13 janvier 2010 relative à la biologie médicale. / Le Comité français d'accréditation notifie avec accusé de réception au laboratoire de biologie médicale, dans les trois mois qui suivent la réception du dossier de preuve d'entrée effective dans la démarche d'accréditation et à la condition que ce dossier soit complet, la décision relative à la recevabilité administrative de la demande. / Si le dossier n'est pas complet, le Comité français d'accréditation notifie au demandeur la liste des pièces manquantes ou incomplètes dans le délai prévu à l'alinéa précédent. Dans les quinze jours suivant cette notification, le laboratoire adresse au Comité français d'accréditation les pièces manquantes ou incomplètes, par voie électronique ou postale, avec accusé de réception. Au plus tard le 31 octobre 2013, le Comité français d'accréditation notifie la décision relative à la recevabilité administrative de la demande (...) 2. Option B - Au plus tard le 31 mai 2013, le laboratoire de biologie médicale adresse au Comité français d'accréditation, par voie électronique ou postale avec accusé de réception, une demande de vérification d'entrée effective dans la démarche d'accréditation (...) ".

7. Il résulte de ces dispositions que, pour justifier l'entrée effective dans une démarche d'accréditation, le laboratoire de biologie médicale devait, le 31 mai 2013 au plus tard, adresser au COFRAC soit une demande d'accréditation partielle portant sur un ou plusieurs examens de biologie médicale à laquelle devaient être jointes un dossier et les pièces énumérées par ces dispositions, soit une demande de vérification d'entrée effective dans la démarche d'accréditation incluant plusieurs éléments documentaires. Dans l'hypothèse où le dossier est complet, le COFRAC notifie la décision relative à la recevabilité administrative de la demande. Dans l'hypothèse où le dossier n'est pas complet, le COFRAC notifie la liste des pièces manquantes et il appartient au laboratoire, dans un délai de quinze jours, de compléter le dossier. Dans tous les cas, le COFRAC se prononce sur la recevabilité administrative de la demande avant le 31 octobre 2013.

En ce qui concerne la responsabilité de l'Etat :

8. Si l'intervention d'une décision illégale peut constituer une faute susceptible d'engager la responsabilité de l'Etat, elle ne saurait donner lieu à réparation si, dans le cas d'une procédure régulière, la même décision aurait pu légalement être prise.

9. Il résulte de l'instruction que par un courrier du 27 mai 2013, réceptionné le 30 mai suivant, et mentionnant pour objet " accréditation partielle ", Mme A..., en sa qualité de gérante de la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence, s'est bornée à informer le COFRAC qu'elle était " en négociation pour céder (son) laboratoire ", que " plusieurs plateaux techniques (étaient) intéressés " et qu'elle ne manquerait pas de tenir le COFRAC informé de cette négociation. Aucun des documents joints à ce courrier n'étaient au nombre de ceux mentionnés à l'article 1er précité de l'arrêté du 17 octobre 2012 définissant les conditions justificatives de l'entrée effective d'un laboratoire de biologie médicale dans une démarche d'accréditation. Une telle demande, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, malgré l'objet qu'il contient en entête qui ne correspond pas à son contenu, ne s'analyse pas comme une demande d'entrée dans la démarche d'accréditation. Il résulte par ailleurs de l'instruction que ce n'est que par un courrier du 29 octobre 2013, réceptionné par le COFRAC le 4 novembre suivant, que Mme A... a déposé une demande d'accréditation partielle, le dossier joint à cette demande étant, au demeurant, incomplet, comme le lui a fait savoir le COFRAC par un courrier en réponse du 8 novembre 2013. Par ce courrier du 8 novembre 2013, le COFRAC a informé Mme A... de l'irrecevabilité de sa demande en raison de l'absence d'un certain nombre de documents dont les annexes E et G du questionnaire, le pourcentage d'examen pour lesquels le laboratoire transmet des échantillons biologiques à d'autres laboratoires et les preuves d'abonnement à au moins un programme d'évaluation externe de la qualité. Ainsi, à la date de la décision de retrait d'autorisation de fonctionnement du 19 novembre 2013, la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence n'avait pas, à la date du 31 octobre 2013, justifié de son entrée effective dans une démarche d'accréditation en application de l'ordonnance du 13 janvier 2010.

10. La décision du 19 novembre 2013 a été annulée par un arrêt de la cour du 11 janvier 2018 devenu définitif au motif qu'elle a été prise par une autorité incompétente, la compétence pour retirer ou abroger l'autorisation prévue par l'article L. 6211-2 du code de la santé publique en vigueur avant le 1er juin 2013 appartenant au préfet et non au directeur de l'ARS. Il résulte de ce qui est exposé au point précédent que la même décision aurait pu légalement être prise par l'autorité compétente, bien qu'elle ne soit pas en situation de compétence liée, et que le vice dont est entachée la décision du 19 novembre 2013 ne peut être regardé, dans les circonstances de l'espèce, comme étant à l'origine des préjudices dont les requérantes demandent réparation.

11. Les requérantes se prévalent de ce que la décision du 19 novembre 2013 a été prise au terme d'une procédure irrégulière dès lors que Mme A... n'a pas été mise à même de présenter ses observations conformément aux dispositions de l'article 24 de la loi du 12 avril 2000. Il ne résulte pas de l'instruction que Mme A... aurait été mise à même de présenter des observations écrites et le cas échéant orales préalablement à la décision du 19 novembre 2013, en méconnaissance de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration. Toutefois, contrairement à ce que soutiennent les requérantes, il ne résulte pas de l'instruction, compte tenu de ce qui a été exposé au point 9 du présent arrêt, que les éventuelles observations de Mme A... auraient pu conduire l'autorité compétente à ne pas décider d'abroger l'autorisation de fonctionnement du laboratoire d'analyses de biologie médicale de la gare de Provence. Le vice tiré de l'irrégularité de la procédure précédant la décision du 19 novembre 2013 n'ouvre donc pas droit à réparation.

En ce qui concerne la responsabilité du COFRAC :

12. Mme A... et la SARL requérante entendent engager la responsabilité du COFRAC en raison d'une carence fautive dans la gestion de la demande d'accréditation du laboratoire et de la violation du principe de loyauté.

13. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 du présent arrêt qu'il appartenait aux laboratoires de biologie médicale d'entrer effectivement dans une démarche d'accréditation avant le 31 mai 2013 et d'adresser au COFRAC un dossier avant le 31 octobre 2013. Comme exposé précédemment au point 9, la demande adressée par Mme A... le 29 mai 2013 n'était pas une demande d'accréditation partielle du laboratoire et ce n'est que par courrier du 29 octobre 2013, soit près de cinq mois après la date limite de dépôt, que Mme A... a engagé une démarche d'accréditation partielle en adressant sa demande au COFRAC. Ce dernier a informé la requérante de l'incomplétude de son dossier et l'a invitée à adresser les pièces manquantes nécessaires à l'instruction. Il ne résulte pas de l'instruction que le COFRAC aurait été l'auteur d'une défaillance ou d'une carence dans la gestion de la demande d'accréditation partielle formée par Mme A... et qu'il aurait manqué au principe de loyauté. La responsabilité du COFRAC comme celle de l'Etat à ce titre, ne peuvent dès lors être engagées en l'absence de faute.

14. Il résulte de tout ce qui précède que les requérantes ne sont pas fondées à se plaindre de ce que les premiers juges ont, par le jugement attaqué, rejeté leurs demandes tendant à engager la responsabilité de l'Etat et du COFRAC et à condamner ces derniers à les indemniser de leurs préjudices.

Sur les frais d'instance :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat et du COFRAC, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que demandent les requérantes au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en application de ces mêmes dispositions, de mettre à la charge de la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence et de Mme A... la somme de 2 000 euros à verser au COFRAC.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... et de la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence est rejetée.

Article 2 : Mme A... et la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence verseront au COFRAC la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié Mme B... A..., à la SARL Laboratoire d'analyses médicales de la gare de Provence, à la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles et au comité français d'accréditation.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme C. Fedi, présidente de chambre,

- Mme L. Rigaud, présidente assesseure,

- M. N. Danveau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2025.

2

N° 22MA01306


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 22MA01306
Date de la décision : 10/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme FEDI
Rapporteur ?: Mme Lison RIGAUD
Rapporteur public ?: M. GAUTRON
Avocat(s) : ASEVEN

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-10;22ma01306 ?
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