Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
D'une part, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'annuler l'arrêté en date du 8 octobre 2020 par lequel la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime lui a infligé un avertissement et la décision du même jour par laquelle cette même autorité l'a retirée de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école, ensemble la décision du 5 février 2021 de rejet de son recours gracieux à l'encontre de ces mesures et refusant de la réintégrer dans ses fonctions de directrice de l'école élémentaire René Descartes de La Rochelle.
Par un jugement n° 2100995 du 14 mars 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande.
D'autre part, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Poitiers, d'annuler la décision du 16 juillet 2021 par laquelle la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime l'a informée de son refus de l'affecter sur un poste d'enseignante au sein de l'école René Descartes à La Rochelle et les trois arrêtés en date du 7 septembre 2021 par lesquels cette même autorité l'a affectée successivement en tant que titulaire remplaçante au sein de la circonscription académique de La Rochelle-Sud du 1er septembre 2021 au 8 septembre 2021, en tant que titulaire remplaçante, puis titulaire départementale, respectivement du 9 septembre 2021 au 9 juin 2022 et du 10 juin 2022 au 31 août 2022, au sein de l'école Bongraine à La Rochelle.
Par un jugement n° 2102410 du 14 mars 2023, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses demandes.
Procédure devant la cour :
I - Par une requête, enregistrée le 14 mai 2023, sous le n° 23BX01302, Mme A..., représentée par Me Sourzac, demande à la cour :
1°) l'annulation du jugement n° 2100995 du 14 mars 2023 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) l'annulation de la décision du 8 octobre 2020 par laquelle la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime l'a sanctionnée en lui infligeant un avertissement et en prononçant son retrait des listes d'aptitude aux fonctions de directrice d'école ;
3°) à ce qu'il soit enjoint à la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime, sur le fondement de l'article L 911-1 du code de justice administrative, de la réintégrer dans ses fonctions de directrice de l'école élémentaire René Descartes de la Rochelle et de procéder à la reconstitution de sa carrière, sous astreinte en application de l'article L 911-3 du même code ;
5°) la mise à la charge de l'Etat d'une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision du 8 octobre 2020 la sanctionnant est entachée d'un défaut de motivation en l'absence de précision quant aux motifs justifiant l'avertissement et le retrait de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice ;
- la décision du 8 octobre 2020 prononçant à son encontre la sanction disciplinaire d'avertissement, fondée sur une enquête administrative à charge, contredite par de nombreux témoignages est entachée d'erreurs de fait et d'inexactitudes s'agissant des prétendus manquements quant au pilotage pédagogique, de la prétendue gestion trop autonome des relations avec les partenaires de l'école, du prétendu défaut de mise en œuvre institutionnelle de la politique éducative, d'un prétendu défaut de gestion administrative et d'une prétendue transformation de certains dispositifs ainsi que d'une erreur manifeste d'appréciation quant à sa responsabilité dans les dysfonctionnements constatés ;
- la décision du 8 octobre 2020 la retirant de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école a été prise par une autorité incompétente en violation de l'article 11 du décret du 24 février 1989 ;
- la décision du 8 octobre 2020 la retirant de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école est entachée d'un vice de procédure dès lors que l'avis de la commission administrative paritaire départementale unique n'a pas été recueilli au préalable ;
- la décision du 8 octobre 2020 la retirant de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école, quand bien même elle aurait été prise dans l'intérêt du service, constitue une sanction déguisée et devait être motivée en tant que telle ;
- elle a fait l'objet d'une double sanction puisqu'outre un avertissement, elle fait l'objet d'un retrait des listes d'aptitude qui constitue une sanction.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2023, la rectrice de l'académie de Poitiers conclut au rejet de la requête de Mme A....
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
II - Par une requête, enregistrée le 15 mai 2023, sous le n°23BX01315, Mme A..., représentée par Me Sourzac, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2102410 du 14 mars 2023 du tribunal administratif de Poitiers ;
2°) d'annuler la décision du 16 juillet 2021 par laquelle la directrice des services départementaux de l'éducation nationale de Charente-Maritime l'a informée de son refus de l'affecter sur le poste d'enseignante obtenu à l'issue du mouvement de mutation intra-départemental au sein de l'école René Descartes à La Rochelle, et de sa décision de la réaffecter dans un autre poste d'adjoint rattaché à une autre école ;
3°) d'annuler les trois arrêtés du 7 septembre 2021 par lesquels cette même autorité l'a affectée, du 1er septembre au 8 septembre 2021 en tant que titulaire remplaçante au sein de la circonscription académique La Rochelle-Sud, du 9 septembre 2021 au 9 juin 2022 en tant que titulaire remplaçante, puis en tant que titulaire départementale du 10 juin 2022 au 31 août 2022, au sein de l'école Bongraine à La Rochelle ;
4°) d'enjoindre sur le fondement des articles L 911-1 et L 911-3 du code de justice administrative, à la direction des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime, de la réintégrer sur le poste d'" enseignante classe élémentaire " au sein de l'école élémentaire René Descartes tel qu'obtenu le 10 juin 2021 au titre du mouvement intra-départemental 2021-2022, sous astreinte ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le tribunal a insuffisamment répondu au moyen selon lequel la décision du 16 juillet 2021 constituait une sanction disciplinaire déguisée ;
- la décision du 16 juillet 2021 par laquelle la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale (DASEN) de la Charente-Maritime l'a informée de son refus de l'affecter sur un poste d'enseignante au sein de l'école René Descartes à La Rochelle est insuffisamment motivée en fait, en violation des articles L 211-2 du code des relations entre le public et l'administration et 19 de la loi du 13 juillet 1983, en l'absence de motifs justifiant cette nouvelle sanction ;
- la directrice académique justifie son refus de la voir réintégrer son précédent établissement au regard de faits issus d'une précédente enquête administrative, pour lesquels elle a déjà fait l'objet de sanction, ce qui révèle l'intention disciplinaire de cette décision qui a des conséquences préjudiciables pour elle et alors qu'il est reconnu qu'elle a donné satisfaction durant l'année ;
- cette décision du 16 juillet 2021 et ses arrêtés d'application du 7 septembre 2021 constituent une nouvelle sanction pour des faits identiques, et méconnaissent le principe d'interdiction d'une double sanction pour les mêmes faits, applicable en matière disciplinaire ;
- les trois arrêtés du 7 septembre 2021ne constituent pas des mesures d'ordre intérieur eu égard à leurs effets sur sa situation statutaire et sa rémunération et à leur nature de sanction déguisée ;
- les trois arrêtés attaqués pris le 7 septembre 2021 par la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime sont insuffisamment motivés ;
- les trois arrêtés attaqués pris le 7 septembre 2021 par la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime constituent des sanctions déguisées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 13 juillet 2023, la rectrice de l'académie de Poitiers conclut au rejet de la requête de Mme A....
Elle soutient que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la loi n°83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;
- le décret n°84-961 du 25 octobre 1984 relatif à la procédure disciplinaire concernant les fonctionnaires de l'Etat ;
- le décret n°89-122 du 24 février 1989 relatif aux directeurs d'école ;
- le décret n°90-680 du 1er août 1990 portant statut particulier des professeurs des écoles ;
- le code de l'éducation ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Evelyne Balzamo,
- les conclusions de M. Michaël Kauffmann, rapporteur public,
- et les observations de Me Sourzac, représentant Mme B... A....
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... A..., professeure des écoles hors classe, occupait depuis le 1er septembre 2016 le poste de directrice de l'école élémentaire René Descartes située à la Rochelle. A compter de décembre 2019, elle a fait l'objet de signalements par sa hiérarchie relatifs à sa manière de servir, puis a été suspendue de ses fonctions le 4 juin 2020, et une enquête administrative a été diligentée les 19 et 23 juin 2020. Par arrêté du 3 septembre 2020, la directrice des services départementaux de l'éducation nationale a affecté Mme A... pour l'année scolaire 2020-2021 en qualité de titulaire remplaçante sur la zone de La Rochelle et l'a rattachée à l'école Condorcet. Par un arrêté en date du 8 octobre 2020, la directrice des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime lui a infligé un avertissement, et, par décision du même jour, a prononcé son retrait de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école. En avril 2021, Mme A... a participé au mouvement de mutation intra-départemental et a obtenu une affectation dans son ancien établissement, l'école Descartes, en tant qu'enseignante en classe élémentaire à compter de septembre 2021. Toutefois, le 16 juillet 2021, la directrice des services départementaux de l'éducation nationale s'est opposée à cette mutation et le 7 septembre 2021 cette même autorité a pris trois arrêtés affectant Mme A... du 1er septembre au 8 septembre 2021 en tant que titulaire remplaçante au sein de la circonscription académique La Rochelle-Sud, du 9 septembre 2021 au 9 juin 2022 en tant que titulaire remplaçante puis en tant que titulaire départementale du 10 juin 2022 au 31 août 2022, au sein de l'école Bongraine à La Rochelle. Le recours gracieux que Mme A... a formé à l'encontre des deux décisions du 8 octobre 2020 a été rejeté par la directrice académique des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime le 5 février 2021. Mme A... relève appel du jugement n° 2100995 du 14 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Poitiers a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces deux décisions du 8 octobre 2020, ensemble la décision du 5 février 2021 portant rejet du recours gracieux qu'elle a formé à leur encontre. Elle relève également appel du jugement n° 2102410 du 14 mars 2023 par lequel le même tribunal a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 16 juillet 2021 et 7 septembre 2021 de la directrice des services départementaux de l'éducation nationale.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 2301302 et n°2301315 sont relatives à la situation d'une même fonctionnaire et présentent à juger les mêmes questions. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
S'agissant de l'arrêté du 8 octobre 2020 infligeant un avertissement à Mme A... :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 19 de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, alors en vigueur : " Le pouvoir disciplinaire appartient à l'autorité investie du pouvoir de nomination. (...) Le fonctionnaire à l'encontre duquel une procédure disciplinaire est engagée a droit à la communication de l'intégralité de son dossier individuel et de tous les documents annexes et à l'assistance de défenseurs de son choix. L'administration doit informer le fonctionnaire de son droit à communication du dossier. Aucune sanction disciplinaire autre que celles classées dans le premier groupe par les dispositions statutaires relatives aux fonctions publiques de l'Etat, territoriale et hospitalière ne peut être prononcée sans consultation préalable d'un organisme siégeant en conseil de discipline dans lequel le personnel est représenté. L'avis de cet organisme de même que la décision prononçant une sanction disciplinaire doivent être motivés. ".
4. En l'espèce, l'arrêté du 8 octobre 2020, après avoir cité les textes applicables, énonce que sont reprochés à Mme A..., " les manques et dysfonctionnements relevés dans le pilotage pédagogique de l'école, dans la mise en œuvre des règles de sécurité, dans la relation professionnelle avec les personnels du réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED) et avec certains enseignants de l'école élémentaire René Descartes, ainsi que les manquements de l'intéressée envers ses obligations d'enseignante en général, et envers ses obligations de directrice en particulier ". Si certains des motifs de cette décision, tels les manquements dans le pilotage pédagogique de l'école ainsi qu'aux obligations d'enseignante en général et de directrice en particulier, sont imprécis et insuffisamment circonstanciés, les autres motifs relatifs aux manques dans la mise en œuvre des règles de sécurité et aux dysfonctionnements dans la relation professionnelle avec les personnels du réseau d'aide spécialisées aux élèves en difficulté et avec certains enseignants sont suffisamment précis pour permettre à l'intéressée de les contester utilement. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation doit être écarté.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983, alors en vigueur : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale (...) ". Aux termes de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. / Premier groupe : - l'avertissement ; - le blâme. / Deuxième groupe : - la radiation du tableau d'avancement ; - l'abaissement d'échelon ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; - le déplacement d'office. / Troisième groupe : - la rétrogradation ; - l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans. / Quatrième groupe : - la mise à la retraite d'office ; - la révocation (...) ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
7. D'une part, si Mme A... soutient avoir respecté la mise en œuvre des règles de sécurité au sein de l'école Descartes, il ressort des pièces du dossier que, malgré les demandes qui lui avaient été faites par les services administratifs, le plan particulier de mise en sécurité (PPMS) de l'école Descartes n'avait pas été mis à jour en 2019 et en 2020, qu'au cours de l'année scolaire 2019-2020, un seul " exercice incendie " a été réalisé au sein de l'établissement et que l'exercice de confinement-risques majeurs du 31 janvier 2019 ne s'est pas déroulé correctement. D'autre part, il ressort des pièces du dossier, notamment du témoignage d'un membre du RASED, de la note du 10 décembre 2019 de l'inspectrice de l'éducation nationale et du relevé de conclusions de la rencontre du 8 octobre 2019 avec sa hiérarchie, que Mme A... entretenait des relations très conflictuelles qu'elle n'a pas cherché à améliorer, malgré les interventions de l'administration, avec le réseau d'aides spécialisées aux élèves en difficulté (RASED), dont elle contestait les modalités d'intervention et de fonctionnement et qu'en conséquence les membres de ce réseau n'intervenaient plus qu'avec réticence et de manière très limitée à l'école Descartes, située pourtant au sein d'un quartier concerné par la " politique de la ville ", malgré les demandes des parents et les besoins de certains élèves.
8. Les faits ainsi reprochés à Mme A..., qui sont établis par les pièces produites, sont constitutifs de fautes de nature à justifier une sanction. L'avertissement prononcé à l'encontre de Mme A..., sanction la plus basse du premier groupe en vertu de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 alors en vigueur, n'est pas disproportionné à la gravité des fautes ainsi commises par l'intéressée. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif n'a pas fait droit à sa demande d'annulation de l'arrêté du 8 octobre 2020 lui infligeant un avertissement.
S'agissant de la décision du 8 octobre 2020 portant retrait de Mme A... de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école et des décisions des 16 juillet 2021 et 7 septembre 2021 s'opposant à sa mutation et l'affectant pour l'année scolaire 2021-2022 à l'école Bongraine de La Rochelle :
9. Une décision revêt le caractère d'une mesure disciplinaire déguisée lorsque, tout à la fois, il en résulte une dégradation de la situation professionnelle de l'agent concerné et que la nature des faits qui ont justifié la mesure et l'intention poursuivie par l'administration révèlent une volonté de sanctionner cet agent.
10. Il ressort des pièces du dossier que la décision prise le 8 octobre 2020 par la directrice des services départementaux de l'éducation nationale de Charente-Maritime, de retirer Mme A... de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école, est intervenue à raison des faits qui lui étaient reprochés dans l'exercice de ses fonctions de directrice de l'école Descartes, énoncés notamment dans les conclusions de l'enquête administrative menée en juin 2020, mettant en cause tant ses qualités professionnelles, notamment dans le pilotage pédagogique et la gestion administrative de l'école, et la mise en œuvre institutionnelle de la politique éducative, que son comportement jugé trop autonome voire déloyal ainsi que la conduite de ses relations vis-à-vis de sa hiérarchie, des usagers, de ses collègues et interlocuteurs. Par suite, eu égard à la nature des faits reprochés, qui avaient d'ailleurs donné lieu à une mesure de suspension le 4 juin 2020, et aux conséquences que le retrait de la liste d'aptitude contesté a eu sur la carrière de l'intéressée, alors même que cette décision aurait été prise également dans l'intérêt du service, elle n'en a pas moins revêtu à l'égard de Mme A... un caractère disciplinaire. Il en va de même de la décision de la directrice des services départementaux du 7 juillet 2021 de s'opposer à la mutation obtenue par Mme A... en juin 2021, à l'issue du mouvement intradépartemental, sur un poste d'enseignante en classe élémentaire à l'école Descartes et des arrêtés du 7 septembre 2021 l'affectant en tant qu'enseignante titulaire remplaçante puis titulaire à l'école Bongraine de La Rochelle, mesures qui sont également fondées sur le même rapport d'enquête administrative et motivées par les mêmes faits reprochés à Mme A... dans ses fonctions de directrice d'école, quand bien même serait également invoqué l'intérêt du service.
11. Or, ainsi qu'il a été dit précédemment et comme le soutient Mme A..., de telles sanctions déguisées ont été prises à son encontre alors qu'elle avait déjà fait l'objet, pour les mêmes faits, d'une sanction disciplinaire d'avertissement le 8 octobre 2020. Par suite, Mme A... est fondée à soutenir que les mesures ainsi contestées ont été prises en méconnaissance du principe " non bis in idem " s'opposant à ce que les mêmes fautes fassent l'objet de plusieurs sanctions disciplinaires.
12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements du 14 mars 2003, le tribunal administratif de Poitiers a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 8 octobre 2020 par laquelle la directrice des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime l'a retirée de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école, ensemble la décision du 5 février 2021 par laquelle cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé par la requérante, ainsi que des décisions du 16 juillet 2021 et des arrêtés du 7 septembre 2021 par lesquels la même autorité a affecté Mme A... du 1er septembre au 8 septembre 2021 en tant que titulaire remplaçante au sein de la circonscription académique La Rochelle-Sud, du 9 septembre 2021 au 9 juin 2022 en tant que titulaire remplaçante puis en tant que titulaire départementale du 10 juin 2022 au 31 août 2022, au sein de l'école Bongraine à La Rochelle.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
13. L'annulation de la décision du 8 octobre 2020 retirant Mme A... de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école, ensemble la décision du 5 février 2021 de rejet de son recours gracieux, ainsi que des décisions du 16 juillet 2021 et des arrêtés du 7 septembre 2021 affectant Mme A... en tant que titulaire remplaçante au sein de la circonscription académique La Rochelle-Sud, du 9 septembre 2021 au 9 juin 2022 en tant que titulaire remplaçante puis en tant que titulaire départementale du 10 juin 2022 au 31 août 2022, au sein de l'école Bongraine à La Rochelle, n'implique pas nécessairement que Mme A... soit réintégrée dans l'emploi de directrice ni dans celui d'enseignante de classe élémentaire au sein de l'école élémentaire René Descartes comme elle le demande. En revanche, cette annulation implique nécessairement la reconstitution de sa carrière.
Sur les frais liés au litige :
14. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Mme A... de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2102410 du 14 mars 2023 du tribunal administratif de Poitiers est annulé.
Article 2 : La décision du 8 octobre 2020 par laquelle la directrice des services départementaux de l'éducation nationale de la Charente-Maritime a retiré Mme A... de la liste d'aptitude aux fonctions de directrice d'école, ensemble la décision du 5 février 2021 par laquelle cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé par la requérante, ainsi que les décisions du 16 juillet 2021 et les arrêtés du 7 septembre 2021 par lesquels la même autorité a affecté Mme A... du 1er septembre au 8 septembre 2021 en tant que titulaire remplaçante au sein de la circonscription académique La Rochelle-Sud, du 9 septembre 2021 au 9 juin 2022 en tant que titulaire remplaçante puis en tant que titulaire départementale du 10 juin 2022 au 31 août 2022, au sein de l'école Bongraine à La Rochelle, sont annulées.
Article 3 : Il est enjoint à l'Etat de reconstituer la carrière de Mme A....
Article 4 : Le jugement n° 2100995 du 14 mars 2023 du tribunal administratif de Poitiers est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 5 : L'Etat versera une somme de 1 500 euros à Mme A... sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.
Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... ainsi qu'à la ministre de l'éducation nationale.
Copie en sera transmise à la rectrice de l'académie de Poitiers.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Evelyne Balzamo, présidente,
Mme Béatrice Molina-Andréo, présidente-assesseure,
Mme Héloïse Pruche-Maurin, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 avril 2025.
La présidente-assesseure,
Béatrice Molina-AndréoLa présidente, rapporteure,
Evelyne Balzamo
La greffière,
Sylvie Hayet
La République mande et ordonne à la ministre de l'éducation nationale en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
N° 23BX01302, 23BX01315 2