Vu I°) la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société anonyme Bouygues Télécom et la société par actions simplifiée Cellnex ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 13 décembre 2019 par lequel le maire de la commune de Juvignac s'est opposé à la déclaration préalable de travaux en vue de l'implantation d'une station relais de téléphonie mobile sur un terrain situé au lieu-dit " Pioch Charmant ".
Par jugement n° 2000573 du 26 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté et a enjoint au maire de Juvignac de réexaminer la demande et de prendre une nouvelle décision dans un délai d'un mois.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 25 janvier 2021 sous le n° 21MA00389 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille puis sous le n° 21TL00389 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et un mémoire enregistré le 30 avril 2021, la commune de Juvignac, représentée par Me Pilone, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande des sociétés Bouygues Télécom et Cellnex ;
3°) de mettre à leur charge une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la demande de première instance était irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;
- le projet méconnaît l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme en portant atteinte à l'intérêt du paysage environnant et des sites proches ;
- il y a lieu au besoin de substituer à ce motif celui tiré de la méconnaissance de l'article A 6 du plan local d'urbanisme imposant un recul de 100 mètres par rapport à l'axe de la route nationale 109 ;
- ou de substituer le motif tiré de la méconnaissance de l'article A 10 du plan local d'urbanisme prévoyant que la hauteur des constructions ne peut excéder celle des constructions existantes situées sur la même propriété ;
- ou de substituer le motif tiré de la méconnaissance de l'article 13 des dispositions générales du plan local d'urbanisme prévoyant l'obligation d'implanter un arbre par tranche de quatre places de parking.
Par un mémoire enregistré le 24 mars 2021 et un mémoire enregistré le 18 mai 2021, la société Cellnex, représentée par Me Hamri, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la mise à la charge de la commune de Juvignac d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par un mémoire enregistré le 24 mars 2021 et un mémoire enregistré le 18 mai 2021, la société Bouygues Télécom, représentée par Me Hamri, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la mise à la charge de la commune de Juvignac d'une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé.
Par ordonnance du 25 mai 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 25 mai 2021.
Par une ordonnance du 1er mars 2022, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis à la cour administrative d'appel de Toulouse la requête de la commune de Juvignac.
Vu le jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu II°) la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
La société anonyme Bouygues Télécom et la société par actions simplifiée Cellnex ont demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 23 juin 2020 par lequel le maire de la commune de Juvignac s'est opposé à la déclaration préalable de travaux en vue de l'implantation d'une station relais de téléphonie mobile sur un terrain situé au lieu-dit " Pioch Charmant ".
Par jugement n° 2002757 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé cet arrêté et a enjoint au maire de Juvignac de prendre une décision de non-opposition à la déclaration préalable dans un délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 14 mai 2021 sous le n° 21MA01843 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille puis sous le n° 21TL01843 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse, et des mémoires enregistrés le 12 octobre 2021 et le 9 février 2022, la commune de Juvignac, représentée par Me Pilone, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de rejeter la demande des sociétés Bouygues Télécom et Cellnex.
3°) de mettre à leur charge une somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement ne peut être exécuté compte tenu de l'obligation de mettre en compatibilité ses documents d'urbanisme pour intégrer les emplacements réservés dans le cadre du projet de contournement de l'ouest montpelliérain et de l'arrêté de sursis à statuer sur la déclaration de travaux pris par le maire le 21 décembre 2020, le projet de contournement ayant été déclaré d'utilité publique par arrêté interministériel du 2 septembre 2021 portant mise en compatibilité du document d'urbanisme de la commune de Juvignac en classant la parcelle comme inconstructible ;
- la demande de première instance était irrecevable pour défaut d'intérêt à agir ;
- le projet méconnaît l'article A 6 du plan local d'urbanisme imposant un recul de 100 mètres par rapport à l'axe de la route nationale 109 ;
- il y a lieu au besoin de substituer à ce motif celui tiré de la méconnaissance de l'article A 10 du plan local d'urbanisme prévoyant que la hauteur des constructions ne peut excéder celle des constructions existantes situées sur la même propriété ;
- ou de substituer le motif tiré de la méconnaissance de l'article 13 des dispositions générales du plan local d'urbanisme prévoyant l'obligation d'implanter un arbre par tranche de quatre places de parking.
Par un mémoire enregistré le 24 juin 2021 et un mémoire enregistré le 20 décembre 2021, la société Cellnex, représentée par Me Hamri, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la mise à la charge de la commune de Juvignac d'une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé et que le projet de contournement ne fait pas obstacle à la réalisation du projet qui ne se situe pas sur le tracé des futurs ouvrages.
Par un mémoire enregistré le 24 juin 2021 et un mémoire enregistré le 20 décembre 2021, la société Bouygues Télécom, représentée par Me Hamri, conclut :
- au rejet de la requête ;
- à la mise à la charge de la commune de Juvignac d'une somme de 20 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient qu'aucun des moyens n'est fondé et que le projet de contournement ne fait pas obstacle à la réalisation du projet qui ne se situe pas sur le tracé des futurs ouvrages.
Par une ordonnance du 1er mars 2022, la présidente de la cour administrative d'appel de Marseille a transmis à la cour administrative d'appel de Toulouse la requête de la commune de Juvignac.
Par ordonnance du 9 mars 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 mars 2022.
Vu le jugement attaqué.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Fabien, présidente assesseure ;
- les conclusions de Mme Cherrier, rapporteure publique ;
- et les observations de Me Ortial pour la commune de Juvignac.
Considérant ce qui suit :
1. La société Cellnex a déposé le 18 novembre 2019 une déclaration de travaux en vue de l'implantation, sur un terrain situé lieu-dit " Pioch Charmant " à Juvignac, d'une station relais composée d'un pylône tubulaire, de 24 mètres de hauteur et de couleur verte, comportant plusieurs antennes, ainsi que d'armoires techniques, ces installations devant être entourées d'une clôture grillagée. Par jugement n° 2000573 du 26 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 13 décembre 2019 par lequel le maire s'est opposé à cette déclaration de travaux et a enjoint à la commune de réexaminer celle-ci en se prononçant dans le délai d'un mois. Par arrêté du 23 juin 2020, le maire de Juvignac s'est à nouveau opposé à cette déclaration. Par jugement n° 2002757 du 15 avril 2021, le tribunal administratif de Montpellier a annulé ce nouvel arrêté et enjoint à la commune de délivrer une décision de non-opposition dans un délai d'un mois sous astreinte de 200 euros par jour de retard. Par les requêtes n° 21TL00389 et 21TL01843, la commune de Juvignac fait appel de ces deux jugements. Ces deux requêtes présentant des questions semblables à juger, il y a lieu de les joindre pour statuer par un même arrêt.
Sur la recevabilité des demandes de première instance :
2. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du dossier de déclaration préalable de travaux, que celle-ci a été déposée par la société Cellnex, et que le projet a pour objet l'installation d'un relais de téléphonie mobile devant être exploité par la société Bouygues Télécom. Dans ces conditions, la société Cellnex, en sa qualité de pétitionnaire, et la société Bouygues Télécom, en sa qualité d'opérateur de téléphonie mobile, avaient bien intérêt à agir à l'encontre des décisions s'opposant à la réalisation des travaux projetés alors même que la société Bouygues Télécom aurait déjà rempli les obligations lui étant imposées par l'autorité de régulation des communications électroniques et des postes et que le territoire communal serait déjà suffisamment couvert par le réseau radio électrique. Par suite, la commune de Juvignac n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a écarté les fins de non-recevoir tirées du défaut d'intérêt à agir qu'elle a opposées en première instance.
Sur le bien-fondé des jugements :
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme :
3. Aux termes de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales si les constructions, par leur situation, leur architecture, leurs dimensions ou l'aspect extérieur des bâtiments ou ouvrages à édifier ou à modifier, sont de nature à porter atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants, aux sites, aux paysages naturels ou urbains ainsi qu'à la conservation des perspectives monumentales ".
4. Si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut s'opposer à la déclaration préalable ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte au caractère ou à l'intérêt des lieux avoisinants de nature à fonder le refus de l'autorisation sollicitée ou les prescriptions spéciales accompagnant l'absence d'opposition à la déclaration, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
5. Il ressort des pièces du dossier que le terrain d'implantation du projet, cadastré section BH n° 57, est situé en bordure de la route nationale 109 reliant l'agglomération de Montpellier à l'autoroute A 750, au sein d'une petite zone boisée longeant cette voie, à proximité d'un bâtiment, dans un environnement plat, qui, de ce côté de la voie, est à dominante agricole et vinicole, en étant distant de moins de 500 mètres du château de l'Engarran et de son parc, classés monuments historiques, ainsi que du mas vinicole, dénommé château de Fourques. Si le pylône tubulaire de couleur verte de 24 mètres émergera au-dessus des arbres, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des photomontages, que son impact visuel sera de nature à compromettre l'intérêt paysager du secteur ou l'intérêt patrimonial du château de l'Engarran qui est entouré d'un vaste parc ou de l'abbaye de Vignogoul, classée monument historique, qui est située à plus d'un kilomètre. Quant à la circonstance invoquée que des vestiges archéologiques d'habitat du Haut-Empire ont été retrouvés au lieu-dit Pioch Charmant, elle est dépourvue de précision permettant d'établir que le projet serait susceptible de porter atteinte à la conservation de ces vestiges. Par suite, la commune de Juvignac n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Montpellier a estimé que l'arrêté du 13 décembre 2019 était entaché d'erreur d'appréciation en tant qu'il se fonde sur l'application des dispositions de l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.
En ce qui concerne la méconnaissance des articles A 6 et A 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Juvignac :
6. D'une part, l'article A 6 du règlement du plan local d'urbanisme de Juvignac, relatif à l'implantation des constructions par rapport aux emprises publiques, rappelle que, pour les terrains situés en bordure de la route nationale 109 ou de l'autoroute A 750, " en application de l'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme (Amendement Dupont), le recul des constructions doit être de 100 mètres de part et d'autre de l'axe de la voie ". L'article L. 111-1-4 du code de l'urbanisme, désormais codifié aux articles L. 111-6 et L. 111-7 de ce code, dispose que : " en dehors des espaces urbanisés des communes, les constructions ou installations sont interdites dans une bande de cent mètres de part et d'autre de l'axe des autoroutes, des routes express et des déviations au sens du code de la voirie routière (...). Cette interdiction (...) ne s'applique pas (...) aux réseaux d'intérêt public ".
7. D'autre part, aux termes de l'article A 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Juvignac : " la hauteur maximale des constructions ne peut excéder celles des constructions existantes situées sur la même propriété ".
8. Enfin, le règlement du plan local d'urbanisme de Juvignac prévoit, au titre des dispositions applicables aux ouvrages et installations d'intérêt collectif, que : " (...) les équipements d'infrastructures (réseaux) (...) et les ouvrages techniques nécessaires à leur fonctionnement sont autorisés en toutes zones du plan local d'urbanisme. Dans la mesure où leurs caractéristiques techniques l'imposent, (...) ces équipements ne sont pas soumis aux règles d'implantation, de recul, de hauteur et de densité ".
9. Il ressort des dispositions tant du plan local d'urbanisme que du code de l'urbanisme citées aux points 6 et 8, que la station relais projetée, qui constitue un ouvrage technique nécessaire à un réseau d'intérêt public et dont la hauteur est imposée par ses caractéristiques techniques, n'est soumise ni à la règle de recul de 100 mètres par rapport à l'axe de la route nationale 109, ni à celle de l'interdiction de dépassement de la hauteur de la construction déjà présente sur la propriété. Par suite, les dispositions des articles A 6 et A 10 du règlement du plan local d'urbanisme de Juvignac ne sont pas de nature à fonder une décision d'opposition.
En ce qui concerne la méconnaissance de l'article 13 des dispositions générales du plan local d'urbanisme de Juvignac :
10. Il ressort du dossier de demande, notamment de la comparaison des pièces DP2-1 et DP2-2, que le parc de stationnement mentionné sur le plan de masse fait partie de l'existant. La commune de Juvignac n'est donc pas davantage fondée à soutenir que le projet litigieux méconnaît l'article 13 des dispositions générales du règlement du plan local d'urbanisme imposant la plantation d'un arbre par tranche de quatre places de stationnement dès lors que le projet n'emporte pas la création d'une telle aire de stationnement.
En ce qui concerne la demande de substitution de motif tiré du caractère désormais inconstructible de la parcelle :
11. La commune de Juvignac fait enfin valoir que la parcelle cadastrée section BH n° 57 figure désormais au nombre des emplacements réservés à la réalisation du projet de contournement de l'ouest de l'agglomération montpelliéraine déclarée d'utilité publique par arrêté interministériel du 21 septembre 2021, lequel porte également mise en compatibilité des documents d'urbanisme de Juvignac, ce qui a motivé une décision de sursis à statuer prise le 21 décembre 2020 sur la déclaration, ces circonstances, postérieures à la date des arrêtés d'opposition du 13 décembre 2019 et du 23 juin 2020, sont en tout état de cause dépourvues d'incidence sur la légalité de ces arrêtés qui doit être appréciée à la date à laquelle ils ont été pris. Par suite, et à supposer que la commune de Juvignac ait entendu demander à la cour de substituer ces motifs à ceux opposés par ces arrêtés, de tels motifs ne sauraient légalement les fonder.
12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que la commune de Juvignac n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Montpellier a annulé les arrêtés des 13 décembre 2019 et 23 juin 2020.
Sur les frais liés au litige :
13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que demande la commune de Juvignac sur leur fondement soit mise à la charge des sociétés Cellnex et Bouygues Télécom qui ne sont pas parties perdante dans les présentes instances. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, en application des dispositions du même article, de mettre à la charge de la commune de Juvignac le versement à la société Cellnex d'une somme de 1 000 euros au titre des frais exposés à l'occasion du litige et à la société Bouygues Télécom d'une somme de 1 000 euros au même titre.
D E C I D E :
Article 1er : Les requêtes de la commune de Juvignac sont rejetées.
Article 2 : La commune de Juvignac versera une somme de 1 000 euros à la société Cellnex et une somme de 1 000 euros à la société Bouygues Télécom au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Juvignac, à la société Cellnex et à la société Bouygues Télécom.
Délibéré après l'audience du 12 mai 2022, à laquelle siégeaient :
M. Barthez, président de chambre,
Mme Fabien, présidente assesseure,
Mme Restino, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 mai 2022.
La rapporteure,
M. Fabien
Le président,
A. Barthez
Le greffier,
F. Kinach
La République mande et ordonne au préfet de l'Hérault en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 21TL00389 et 21TL01843