Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision de l'autorité régionale de santé n°ARS OC 2018-3363 du 3 octobre 2018 portant modification d'autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale multi-sites exploité par la société d'exercice libéral par actions simplifiées (SELAS) Biomed 34, ensemble la décision rejetant le recours gracieux formé contre cette décision et de mettre à la charge de la société Biomed 34 la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1901599 du 17 novembre 2020, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 janvier 2021 et un mémoire enregistré le 18 juin 2021 sous le n°21MA00224 au greffe de la cour administrative d'appel de Marseille, puis le 11 avril 2022 au greffe de la cour administrative d'appel de Toulouse sous le n°21TL00224, le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens, représenté par Me Aubert, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du 17 novembre 2020 du tribunal administratif de Montpellier ;
2°) d'annuler la décision de l'autorité régionale de santé n°ARS OC 2018-3363 du 3 octobre 2018 portant modification d'autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale multi-sites exploité par la société d'exercice libéral par actions simplifiées (SELAS) Biomed 34, ensemble la décision rejetant le recours gracieux présenté contre cette décision ;
3°) de mettre à la charge de la société Biomed 34 la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé, le tribunal n'a pas répondu au moyen tiré de ce qu'un médecin anatomie et cytologie pathologique (ACP) ne peut pas être désigné comme coresponsable s'il ne dispose pas d'une qualité l'habilitant à représenter légalement le laboratoire alors que l'article L.6213-9 du code de la santé publique l'interdit, ni n'a expliqué les raisons pour lesquelles l'article L.6213-9 du code de la santé publique n'ont pas été méconnues ;
- la décision de l'agence régionale de santé méconnaît les dispositions de l'article L.6213-9 du code de la santé publique ; les personnes désignées comme coresponsables d'un laboratoire de biologie médicale, biologiste médical ou médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologique doivent nécessairement avoir la qualité de représentant légal de ce laboratoire, or le docteur A... médecin spécialiste en anatomie et cytologie pathologique désigné par la société Biomed 34 comme coresponsable, ne dispose pas de qualité pour représenter cette société ;
- en admettant que les médecins anatomie et cytologie pathologique coresponsables ne soient pas représentant légaux alors que les biologistes désignés coresponsables doivent avoir cette qualité, l'agence crée une discrimination ni prévue ni autorisée par la loi ;
- la qualité de responsable visée par l'article L.6213-9 du code de la santé publique est liée au pouvoir de la personne concernée de diriger et représenter le laboratoire et non celui de superviser les actes effectués au sein de ce laboratoire ;
- la décision méconnaît les dispositions de l'article L.6223-6 du code de la santé publique dans la mesure où elle autorise l'exploitation du laboratoire de la société Biomed 34 sur 23 sites alors que cette société ne compte que 22 biologistes médicaux ;
- l'article L.6223-6 du code de la santé publique ne concerne pas la désignation de biologistes responsables de sites contrairement à l'article L.6222-6 qui rattache chaque biologiste à un site défini.
Par un mémoire en défense enregistré le 9 mars 2021, l'agence régionale de santé Occitanie conclut au rejet de la requête.
Elle fait valoir que :
- le jugement a répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.6213-9 du code de la santé publique ;
- si l'article L.6223-5 du code de la santé publique dispose que les médecins anatomie et cytologie pathologique ne peuvent détenir une fraction du capital d'une société exploitant un laboratoire de biologie médicale privé, ils peuvent néanmoins être désignés comme coresponsables d'un laboratoire de biologie privée en application de l'article L.6213-9 du même code ;
- la coresponsabilité et la représentation légale ne sont pas nécessairement liées ;
- le nouveau site de la société Biomed n'est pas ouvert au public, seuls des actes d'examens d'anatomie et cytologie pathologiques y seront réalisés, de sorte que la présence d'un biologiste médial n'est pas impérative et que les dispositions de l'article L.6223-6 du code de la santé publique n'ont pas été méconnues.
Par un mémoire en défense, enregistré le 19 janvier 2022, la société Biomed 34, représentée par la SELARL Maillot Avocats et Associés, conclut au rejet de la requête et à la condamnation du Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens à lui verser la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que :
- le jugement a répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article L.6213-9 du code de la santé publique et est ainsi suffisamment motivé ;
- la décision ne méconnaît pas l'article L. 6213-9 du code de la santé publique dès lors que les apports en industrie ne concourent pas à la formation du capital social mais donnent lieu à l'attribution de parts ouvrant droit au partage des bénéfices et de l'actif net, à charge de contribuer aux pertes ; le docteur A..., actionnaire en industrie, peut-être ainsi être désigné coresponsable ;
- les actes d'anatomie et de cytologie pathologiques ne sont pas des actes de biologie médicale, en particulier lorsqu'ils sont réalisés dans des locaux non ouverts au public, de sorte qu'un site sur lequel sont exclusivement réalisés des actes d'anatomie et de cytologie pathologique ne relève pas des dispositions de l'article L.6223-6 du code de la santé publique qui imposent la présence d'un biologiste médical.
Par une ordonnance en date du 11 avril 2022, le président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la cour administrative d'appel de Toulouse le jugement de la requête du Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens
Par une ordonnance du 14 novembre 2022, la clôture de l'instruction a été fixée au 7 décembre 2022 à 12h.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de la santé publique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Céline Arquié, première conseillère,
- et les conclusions de Mme Michèle Torelli, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens relève appel du jugement du 17 novembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande sollicitant l'annulation de la décision du 3 octobre 2018 par laquelle l'agence régionale de santé Occitanie a modifié l'autorisation de fonctionnement du laboratoire de biologie médicale multi-sites exploité par la société d'exercice libéral par actions simplifiées Biomed 34 ainsi que l'annulation de la décision implicite rejetant son recours gracieux.
Sur la régularité du jugement :
2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ".
3. Il résulte des points 3 à 5 du jugement attaqué que les premiers juges ont suffisamment précisé les motifs pour lesquels le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 6213-9 du code de la santé publique devait être écarté. Par suite, le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier faute d'être suffisamment motivé sur ce point.
Sur le bien-fondé du jugement :
4. Aux termes de l'article L.6213-7 du code de la santé publique : " Le laboratoire de biologie médicale est dirigé par un biologiste médical dénommé biologiste-responsable. Le biologiste médical bénéficie des règles d'indépendance professionnelle reconnues au médecin et au pharmacien dans le code de déontologie qui leur est applicable. Le biologiste-responsable exerce la direction du laboratoire dans le respect de ces règles ". Aux termes de l'article L. 6213-9 du même code : " A l'exception des laboratoires à but non lucratif, les laboratoires de biologie médicale privés sont dirigés par un biologiste-responsable qui en est le représentant légal. Lorsque la structure juridique d'un laboratoire de biologie médicale permet l'existence de plusieurs représentants légaux, ces représentants sont dénommés biologistes-coresponsables. Les médecins spécialistes qualifiés en anatomie et cytologie pathologiques peuvent être désignés comme coresponsables. Les biologistes-coresponsables et les médecins spécialistes qualifiés en anatomie et cytologie pathologiques désignés comme coresponsables exercent ensemble les fonctions et les attributions habituellement dévolues au biologiste-responsable ".
5. Il résulte de ces dispositions qu'un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques peut être désigné comme coresponsable d'un laboratoire de biologie médicale privé et que si cette désignation implique l'exercice des fonctions et attributions dévolues au biologiste responsable, elle ne lui confère pas pour autant la qualité de représentant légal du laboratoire, l'absence de cette qualité ne faisant pas obstacle à ce qu'il soit nommé coresponsable.
6. Les dispositions de l'article L.6213-9 du code de la santé publique n'impliquant pas que le médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques nommé coresponsable ait la qualité de représentant légal du laboratoire contrairement au biologiste responsable, le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens ne peut utilement soutenir que l'agence régionale de santé a créé une discrimination entre médecins spécialistes qualifiés en anatomie et cytologie pathologiques et biologistes ni prévue, ni autorisée par la loi. L'agence régionale de santé Occitanie a ainsi pu, sans méconnaître les dispositions de l'article L.6213-9 du code de la santé publique, procéder à la désignation en tant que coresponsable d'un médecin spécialiste qualifié qui ne justifiait pas de la qualité pour représenter légalement le laboratoire de biologie médicale.
7. Aux termes de l'article L.6211-1 du code de la santé publique : " Les analyses de biologie médicale sont les examens biologiques qui concourent au diagnostic, au traitement ou à la prévention des maladies humaines ou qui font apparaître toute autre modification de l'état physiologique, à l'exclusion des actes d'anatomie et de cytologie pathologiques exécutés par les médecins spécialistes de cette discipline. Les analyses ne peuvent être effectuées que dans les laboratoires d'analyses de biologie médicale sous la responsabilité de leurs directeurs et directeurs adjoints ". Aux termes de l'article L.6212-1 du même code : " Un laboratoire de biologie médicale est une structure au sein de laquelle sont effectués les examens de biologie médicale. Sous réserve des règles d'implantation territoriale mentionnées à l'article L. 6222-5, un même laboratoire peut être implanté sur un ou plusieurs sites ". Aux termes de l'article L. 6212-2 du même code : " Un laboratoire de biologie médicale peut également réaliser des activités biologiques d'assistance médicale à la procréation ainsi que des examens d'anatomie et de cytologie pathologiques. (...) Un examen d'anatomie et de cytologie pathologiques effectué dans un laboratoire de biologie médicale est réalisé par un médecin spécialiste qualifié en anatomie et cytologie pathologiques ou, pour certaines phases, sous sa responsabilité, dans les conditions déterminées par voie réglementaire " et aux termes de son article L.6223-6 : " le nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d'un laboratoire de biologie médicale détenant une fraction du capital social et travaillant au moins un mi-temps dans le laboratoire est égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire ".
8. Les dispositions précitées de l'article L.6223-6 du code de la santé publique qui imposent que le nombre de biologistes médicaux en exercice au sein d'un laboratoire de biologie médicale et travaillant au moins à mi-temps dans ce laboratoire soit égal ou supérieur au nombre de sites de ce laboratoire s'appliquent aux sites sur lesquels sont réalisés des examens de biologie médicale ainsi qu'à ceux sur lesquels y sont réalisés conjointement des examens d'anatomie et de cytologie pathologiques. En revanche, elles n'ont pas vocation à s'appliquer aux sites sur lesquels sont réalisés exclusivement des examens d'anatomie et de cytologie pathologiques.
9. Il ressort des pièces du dossier et des mentions de la décision du 3 octobre 2018 de l'agence régionale de santé Occitanie que le fonctionnement du site situé ..., non ouvert au public, a été autorisé pour l'activité d'anatomie et de cytologie pathologiques et non pour une activité d'examen de biologie médicale. L'activité de biologie médicale étant exercée au sein de 22 sites sur les 23 dont le fonctionnement a été autorisé, et le nombre de biologistes médicaux étant égal au nombre de sites au sein desquels est exercée une activité de biologie médicale, le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens n'est pas fondé à soutenir que l'agence régionale de santé a méconnu les dispositions de l'article L.6223-6 du code de la santé publique.
10. Il résulte de ce qui précède que le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la société Biomed 34, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme demandée par le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu dans les circonstances de l'espèce de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge du Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par la société Biomed 34 et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : La requête du Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens est rejetée.
Article 2 : Le Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens versera à la société Biomed 34 une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au Conseil central de la section G de l'Ordre national des pharmaciens, à l'agence régionale de santé Occitanie et à la société d'exercice libéral par actions simplifiées Biomed 34.
Délibéré après l'audience du 21 février 2023 à laquelle siégeaient :
Mme Geslan-Demaret, présidente de chambre,
Mme Blin, présidente assesseure,
Mme Arquié, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 14 mars 2023.
La rapporteure,
C. Arquié
La présidente,
A. Geslan-Demaret
La greffière,
M-M. Maillat
La République mande et ordonne au ministre de la santé et de la prévention en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
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N° 21TL00224