Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Sous le n° 1902969, Mme D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 8 avril 2019 par laquelle le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine a retiré son agrément d'assistante maternelle.
Sous le n° 1906357, Mme D... a demandé au tribunal administratif de Rennes d'annuler la décision du 18 octobre 2019 par laquelle le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine rejette son recours gracieux formé contre la décision du 8 avril 2019 lui retirant son agrément d'assistante maternelle ;
Par un jugement n°s 1902969,1906357 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Rennes a rejeté les demandes.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 novembre 2020 et 30 avril 2021, Mme B... D..., représentée par Me Nguyen, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 17 septembre 2020 du tribunal administratif de Rennes ;
2°) d'annuler la décision du 8 avril 2019 par laquelle le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine lui a retiré son agrément d'assistante maternelle ainsi que celle du 18 octobre 2019 par laquelle ce même président rejette son recours gracieux formé contre la décision du 8 avril 2019 ;
3°) d'enjoindre au président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui accorder un agrément limité à l'accueil d'enfants en périscolaire ;
4°) de mettre à la charge du département d'Ille-et-Vilaine la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier ; il est insuffisamment motivé au regard des arguments présentés ; la possibilité d'un renouvellement d'agrément partiel, et le refus de président du conseil départemental d'y recourir, n'ont pas été examinés par les premiers juges ;
- sur la légalité des décisions contestées :
- la décision du 8 avril 2019 est entachée d'incompétence ;
- les décisions contestées sont insuffisamment motivées ;
- le département n'a pas procédé à un examen complet de sa situation en n'envisageant pas même de lui délivrer un agrément limité ;
- elles sont entachées d'erreur de fait, de droit et d'une erreur d'appréciation au regard des faits non établis fondant les décisions contestées.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 31 mars et 8 juin 2021, le département d'Ille-et-Vilaine, représenté par Me Collet, conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de Mme D... une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'action sociale et des familles ;
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Rivas,
- les conclusions de M. Pons, rapporteur public,
- et les observations de Me Marie, représentant le département d'Ille-et-Vilaine.
Considérant ce qui suit :
1. Mme D... a obtenu le 23 mars 1999 un agrément d'assistante maternelle, régulièrement renouvelé ensuite par le département d'Ille-et-Vilaine. Cependant, par un courrier du 8 avril 2019, après consultation de la commission consultative paritaire départementale, le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine a décidé de lui retirer son agrément alors qu'elle avait sollicité, en novembre 2018, un nouveau renouvellement afin d'accueillir trois enfants, dont un d'âge périscolaire. Le 18 octobre 2019, cette même autorité a rejeté le recours gracieux formé par Mme D... contre la décision du 8 avril 2019. Par un jugement du 17 septembre 2020, dont Mme D... relève appel, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes d'annulation de ces deux décisions du président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Mme D... soutient d'une part que le jugement attaqué est insuffisamment motivé en réponse à ses moyens tirés de l'insuffisante motivation, de l'erreur de fait, de l'erreur de droit et de l'erreur d'appréciation entachant les décisions du président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine contestées. Toutefois, en premier lieu, en ses points 8, 11 et 12 le jugement attaqué répond avec la précision nécessaire aux moyens soulevés par Mme D... dès lors que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à l'ensemble de ses arguments. D'autre part, en jugeant que la décision de retrait total d'agrément contestée n'était entachée ni d'erreur de droit, ni d'erreur de fait, ni d'erreur d'appréciation les premiers juges ont nécessairement écarté, pour les motifs exposés aux points 11 et 12 du jugement attaqué, les arguments de Mme D... tendant à pouvoir bénéficier d'un retrait seulement partiel de ce même agrément qui lui avait été refusé par le président du conseil départemental. Par suite, Mme D... n'est pas fondée à soutenir que le jugement attaqué serait irrégulier en raison de la méconnaissance par les premiers juges de leur office ou d'une insuffisante motivation de leur jugement.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, si Mme D... soutient que la décision de refus de renouvellement de son agrément du 8 avril 2019 est entachée d'incompétence de son auteure, celle-ci n'est pas signée de Mme E... dont elle conteste explicitement la compétence. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que Mme C..., directrice adjointe " enfance famille " au département d'Ille-et-Vilaine et signataire de cette décision du 8 avril 2019, disposait d'une délégation à cet effet accordée par un arrêté du président du conseil départemental du 8 février 2018, affiché et publié au recueil des actes administratifs n° 532 du département du 16 mars 2018, et transmis en préfecture. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteure de la décision du 8 avril 2019 manque en fait et doit être écarté.
4. En deuxième lieu, le moyen tiré de l'insuffisante motivation des décisions attaquées doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 8 du jugement attaqué.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction alors applicable : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil départemental du département où le demandeur réside. / Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. / (...) L'agrément est accordé (...) si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) " et aux termes de l'article L. 421-6 du même code : " (...) Si les conditions de l'agrément cessent d'être remplies, le président du conseil départemental peut, après avis d'une commission consultative paritaire départementale, modifier le contenu de l'agrément ou procéder à son retrait. (...) ". L'article R. 421-3 du même code dispose que : " Pour obtenir l'agrément d'assistant maternel ou d'assistant familial, le candidat doit : / 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif. / (...) 3° Disposer d'un logement dont l'état, les dimensions, les conditions d'accès et l'environnement permettent d'assurer le bien-être et la sécurité des mineurs compte tenu du nombre et, s'agissant d'un candidat à l'agrément d'assistant maternel, de l'âge de ceux pour lesquels l'agrément est demandé. ".
6. Il résulte de ces dispositions qu'il incombe au président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des enfants accueillis et de procéder au retrait de l'agrément si ces conditions ne sont plus remplies. A cette fin, dans l'hypothèse où il est informé de suspicions de comportements susceptibles de compromettre la santé, la sécurité ou l'épanouissement d'un enfant A... la part du bénéficiaire de l'agrément ou de son entourage, il lui appartient de tenir compte de tous les éléments portés à la connaissance des services compétents du département ou recueillis par eux et de déterminer si ces éléments sont suffisamment établis pour lui permettre raisonnablement de penser que l'enfant est victime des comportements en cause ou risque de l'être.
7. Il résulte de la décision du 8 avril 2019 que pour fonder la décision de retrait d'agrément contestée le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine s'est fondé sur le caractère inadapté des pratiques de Mme D... en ce qui concerne les apprentissages, la sécurité et le bien-être des enfants accueillis, l'incapacité de cette dernière à se remettre en question, son absence de volonté réelle de se former et de mettre à jour ses connaissances, et sa contestation des conseils et recommandations des services spécialisés du département. Il mentionne également que son organisation familiale et son manque de positionnement professionnel vont à l'encontre de l'intérêt des enfants accueillis et que sa posture relationnelle révèle un manque de compréhension des enjeux du métier d'assistante maternelle et de l'intervention des services départementaux.
8. Il ressort des pièces du dossier que, lors de la visite effectuée le 29 janvier 2019 au domicile de Mme D... par une assistante de service social, divers manquements de la requérante au regard des obligations lui incombant en qualité d'assistante maternelle ont été relevés. Il ressort du compte-rendu de cette évaluation établi par une professionnelle de la petite enfance, ponctué de nombreuses citations précises des dires de Mme D..., que celle-ci a une pratique professionnelle inadaptée au regard de la sécurité et de l'épanouissement des enfants confiés. L'entretien a ainsi révélé des pratiques en matière d'apprentissage de la propreté et de la motricité qui n'ont plus cours. En matière d'alimentation des nourrissons le discours de l'intéressée est apparu général avec une pratique inadaptée aux besoins de l'enfant. S'agissant du respect du sommeil de l'enfant, Mme D... a fait état de pratiques de réveil qui, alors même qu'elles seraient faites à la demande des parents, sont contraires à l'intérêt de l'enfant. Plus généralement ce compte-rendu révèle l'absence de discussion par Mme D... des demandes des parents des enfants accueillis, alors même que celles-ci lui paraissent contraires aux bonnes pratiques professionnelles, uniquement afin de préserver de bonnes relations et au motif qu'en sa qualité d' " employée " il ne lui appartient pas de s'en mêler. De même, l'intéressée expose faire prévaloir l'intérêt de ses propres enfants sur ses obligations professionnelles, notamment au regard du nécessaire respect du sommeil des enfants accueillis. Des risques pour les enfants susceptibles d'être accueillis ont également été observés avec l'utilisation d'un lit parapluie qui ne répond plus aux normes requises, faute de matelas pouvant être fixé, et l'absence de fixation d'une barrière devant un poêle. De plus, elle n'avait suivi aucune formation récente à la date de cet entretien, Mme D... faisant alors valoir qu'elle souhaitait des formations assurées dans sa commune et relevant qu'elles n'étaient pas rémunérées. Plus largement ce compte-rendu témoigne d'une difficulté de l'intéressée à permettre des échanges sereins et constructifs avec les professionnels des services de l'enfance du département perçus, à tort au vu des pièces du dossier, comme inquisiteurs. Une telle situation est confirmée sur la durée puisque le renouvellement de son agrément décidé en 2014 est intervenu après que l'assistante de service social l'ayant rencontrée à son domicile se soit interrogée sur l'opportunité d'un tel renouvellement compte tenu des conditions d'accueil des enfants et de l'attitude de la requérante à son égard, non coopérative et parfois irrespectueuse dans ses propos. Enfin si Mme D... conteste les appréciations portées par l'autorité chargée de contrôler son agrément sur son comportement personnel et professionnel ainsi que sur ses pratiques, les explications données et les documents présentés sont insuffisants pour contredire les éléments étayés présentés, émanant de professionnels de la petite enfance, qui résultent d'une procédure menée contradictoirement. Ces éléments retenus par la décision contestée de retrait d'agrément, qui ne sont pas entachées d'inexactitude matérielle, sont ainsi suffisants pour la fonder légalement. Il en résulte qu'au regard de l'obligation du président du conseil départemental de s'assurer que les conditions d'accueil par l'assistante maternelle qu'il agréée garantissent notamment la sécurité et l'épanouissement des mineurs confiés, et alors même que Mme D... établit que les parents de deux enfants qu'elle a accueillis ont été satisfaits de ses services, la décision contestée du 8 avril 2019, ainsi que celle du 18 octobre 2019 rejetant son recours gracieux, ne sont pas entachées des erreurs d'appréciation alléguées.
9. En quatrième lieu, il ressort de ce qui a été exposé précédemment que la décision contestée portant retrait de l'agrément dont bénéficiait jusque-là Mme D... est fondée en droit comme en fait. Par suite, la requérante ne peut être fondée à soutenir que le président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation en décidant de refuser de renouveler son agrément au lieu de lui attribuer un agrément plus restreint que celui dont elle bénéficiait avant la décision de retrait contestée.
10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Rennes a rejeté ses demandes d'annulation des décisions du président du conseil départemental d'Ille-et-Vilaine du 8 avril 2019 refusant de renouveler son agrément d'assistante maternelle et du 18 octobre 2019 rejetant son recours gracieux formé contre cette décision. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées.
Sur les frais d'instance :
11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à l'octroi d'une somme au titre des frais exposés et non compris dans les dépens à la partie perdante. Il y a lieu, dès lors, de rejeter les conclusions présentées à ce titre par Mme D.... Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de cette dernière, sur le fondement des mêmes dispositions, la somme demandée au titre des frais exposés par le département d'Ille-et-Vilaine.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.
Article 2 : Les conclusions du département d'Ille-et-Vilaine tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... D... et au département d'Ille-et-Vilaine.
Délibéré après l'audience du 12 octobre 2021, à laquelle siégeaient :
- M. Lainé, président de chambre,
- M. Rivas, président assesseur,
- Mme Béria-Guillaumie, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 octobre 2021.
Le rapporteur,
C. Rivas
Le président,
L. Lainé
La greffière,
V. Desbouillons
La République mande et ordonne au préfet d'Ille-et-Vilaine en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20NT03569