Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 août 2020 par lequel le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a décidé de l'affecter en administration centrale, d'enjoindre à ce ministre de lui présenter une liste de postes en adéquation avec ses compétences pour lui permettre de formuler des vœux d'affectation, de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 90 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2017264/5-4 du 24 février 2023, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à M. A... une indemnité de 7 000 euros, a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et a rejeté le surplus des conclusions de la demande de M. A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 22 avril 2023 et 21 mai 2024, M. A..., représenté par Me Egea, demande à la Cour :
1°) d'annuler l'article 3 de ce jugement du 24 février 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du ministre de l'Europe et des affaires étrangères du 20 août 2020 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser une indemnité de 90 000 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis ;
4°) d'enjoindre au ministre de l'Europe et des affaires étrangères de lui présenter une liste de postes en adéquation avec ses compétences pour lui permettre de formuler des vœux d'affectation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- sa requête est recevable ;
- l'arrêté attaqué a été signé par une autorité incompétente ;
- il n'est pas motivé ;
- il a été pris en méconnaissance des dispositions de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 ;
- il est entaché d'un détournement de pouvoir ;
- il a été victime de plusieurs agissements constitutifs de harcèlement moral ;
- l'administration a manqué à son obligation de prévention ;
- il a subi un préjudice moral en raison des faits de harcèlement moral dont il a été victime qui doit être évalué à hauteur de 10 000 euros ;
- il a subi un préjudice lié à la perte de chance d'obtenir un poste à l'étranger nécessitant des compétences en matière de visas qui doit être évalué à 80 000 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2024, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères demande à la Cour :
1°) de rejeter la requête ;
2°) par la voie de l'appel incident, d'annuler les articles 1er et 2 du jugement attaqué ou, à tout le moins, de réformer ce jugement en tant qu'il a considéré que la responsabilité de l'Etat était engagée au-delà du mois de septembre 2019.
Il soutient que :
- la requête est irrecevable en ce qu'elle reproduit intégralement et exclusivement le texte de la demande de première instance ;
- les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés ;
- les motifs retenus par les premiers juges pour condamner l'Etat à verser à M. A... une indemnité de 7 000 euros ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Desvigne-Repusseau,
- et les conclusions de Mme Jurin, rapporteure publique.
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du ministre de l'Europe et des affaires étrangères en date du 22 mai 2017, M. A..., adjoint administratif principal de chancellerie de 2ème classe, a été nommé à l'ambassade de France à Rome afin d'y exercer, notamment, des fonctions d'agent consulaire au service de l'état-civil à compter du 1er septembre 2017. Par un arrêté du même ministre en date du 20 août 2020, l'intéressé a été affecté à l'administration centrale du ministère des affaires étrangères pour exercer des fonctions d'assistant ressources à la sous-direction des privilèges et immunités diplomatiques à partir du 1er septembre 2020. Le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a implicitement rejeté la demande indemnitaire formée par M. A... le 20 octobre 2020. M. A... fait appel du jugement du 24 février 2023 en tant que le Tribunal administratif de Paris n'a pas fait entièrement droit à sa demande, le ministre de l'Europe et des affaires étrangères faisant appel du même jugement en tant que celui-ci a condamné l'Etat à verser à l'intéressé une indemnité de 7 000 euros.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, M. A... reprend en appel le moyen invoqué en première instance et tiré de ce que l'arrêté du 20 août 2020 par lequel le ministre de l'Europe et des affaires étrangères a décidé de l'affecter à l'administration centrale du ministère des affaires étrangères, a été signé par une autorité incompétente, sans apporter aucun élément de fait ou de droit nouveau. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 quinquies de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires : " Aucun fonctionnaire ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d'altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel / Aucune mesure concernant notamment (...) l'affectation et la mutation ne peut être prise à l'égard d'un fonctionnaire en prenant en considération : / 1° Le fait qu'il ait subi ou refusé de subir les agissements de harcèlement moral visés au premier alinéa / 2° Le fait qu'il ait exercé un recours auprès d'un supérieur hiérarchique ou engagé une action en justice visant à faire cesser ces agissements / 3° Ou bien le fait qu'il ait témoigné de tels agissements ou qu'il les ait relatés / (...) ".
4. M. A... soutient que son affectation en administration centrale a été décidée en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 dès lors qu'elle n'est nullement justifiée par l'intérêt du service mais qu'elle s'inscrit dans une démarche de harcèlement moral à son égard et qu'elle est constitutive d'une sanction disciplinaire déguisée. Tout d'abord, si, pour justifier que le refus de le maintenir dans son poste pour une quatrième année était infondé, le requérant s'appuie sur une note diplomatique du 22 mars 2019 qui fixe des critères d'examen des demandes de maintien pour les agents affectés en 2017 et souhaitant se maintenir une quatrième année sur leur poste actuel, et selon laquelle " la durée d'affectation dans un poste à l'étranger est de 3 ou 4 ans ", ainsi que sur des éléments statistiques faisant apparaître qu'en 2023 et 2024, le refus de maintenir un agent à l'étranger demeure l'exception, ces éléments sont toutefois sans incidence sur la légalité de l'arrêté attaqué dès lors que la note diplomatique du 22 mars 2019 n'indique nullement qu'un agent affecté à l'étranger dispose par principe d'un droit au maintien dans son poste durant quatre ans et que les éléments statistiques concernent en tout état de cause des situations postérieures à l'intervention de l'arrêté attaqué. Ensuite, si le supérieur hiérarchique de M. A... a émis un avis défavorable à son maintien en poste pour une quatrième année, il ressort des pièces du dossier que cet avis est motivé par la seule nécessité d'assurer un échelonnement des départs au sein du service de l'état-civil qui ne compte que trois agents, M. A... et sa binôme étant arrivés respectivement en 2017 et 2018 et le troisième agent étant un agent de droit local proche de la retraite, étant par ailleurs observé qu'au titre de l'appréciation sur la manière de servir de l'agent, la note diplomatique du 22 mars 2019 invite les chefs de poste à " prendre en compte le calendrier des départs qui peut conduire à échelonner les relèves au sein d'un même service ". Si l'avis du supérieur hiérarchique ne fait aucunement référence à la situation familiale du requérant, il ressort des termes mêmes de la note diplomatique du 22 mars 2019 que, contrairement à ce que soutient l'intéressé, la situation de l'agent n'est prise en considération qu'après examen du critère de l'intérêt du service. En outre, si M. A... établit qu'il a conclu en France un pacte civil de solidarité avec une ressortissante française le 4 mai 2017 et qu'ils ont vécu ensemble durant son affectation à Rome, cette circonstance se saurait justifier à elle seule son maintien en poste pour une quatrième année, alors que la note diplomatique du 22 mars 2019 indique que la situation de l'agent est prise en compte " dans toute la mesure du possible au regard notamment des nécessités du service " et que " les contraintes strictement personnelles ne peuvent suffire à elles seules à motiver un maintien ". Enfin, si M. A... fait valoir que l'administration ne disposait d'aucune information certaine s'agissant d'un éventuel départ de sa binôme en 2021, cette circonstance ne saurait traduire par elle-même que le refus de l'administration de maintenir le requérant dans son poste pour une quatrième année serait constitutif d'un harcèlement moral ou d'une sanction disciplinaire déguisée. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que l'arrêté attaqué aurait été pris en méconnaissance des dispositions précitées de l'article 6 quinquies de la loi du 13 juillet 1983 doit être écarté.
5. En troisième lieu, le détournement de pouvoir allégué n'est pas établi.
6. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques (...) ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / (...) / 2° Infligent une sanction / (...) / 4° Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits / (...) / 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir / (...) ".
7. M. A... soutient que l'arrêté attaqué n'est pas motivé en droit et en fait, alors que son changement d'affectation en administration centrale a eu une incidence financière qui lui est défavorable. Si le changement d'affectation du requérant a eu pour effet de le priver du bénéfice de l'indemnité de résidence à l'étranger qu'il recevait antérieurement à raison de ses fonctions à l'ambassade de France à Rome, cette décision n'est toutefois pas au nombre des décisions qui doivent être motivées en application des dispositions précitées de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration, dès lors que, d'une part, M. A... n'a aucun droit, en tant que fonctionnaire, à son maintien dans le poste qu'il occupait à l'ambassade de France à Rome ni, par suite, au maintien de l'indemnité de résidence s'y rapportant, et que, d'autre part, comme il vient d'être dit, il ne ressort pas des pièces du dossier que la nouvelle affectation de l'intéressé en administration centrale constitue une sanction disciplinaire déguisée ou procède d'un harcèlement moral. Par suite, le moyen tiré du défaut de motivation doit être écarté comme inopérant.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
8. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation présentées par M. A..., n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a lieu par suite de rejeter les conclusions à fin d'injonction présentées par celui-ci.
Sur les conclusions indemnitaires et l'appel incident :
En ce qui concerne le harcèlement moral :
9. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
S'agissant du refus des supérieurs hiérarchiques de M. A... de reconnaître officiellement les fonctions qu'il a exercées au sein du service des visas :
10. Il résulte de l'instruction, et notamment des mentions mêmes de l'arrêté du 1er août 2017, que M. A... a été affecté à l'ambassade de France à Rome afin d'y exercer, à titre principal, des fonctions d'agent consulaire au sein du service de l'état-civil à compter du 1er septembre 2017. Si sa supérieure hiérarchique directe lui a assigné, au titre des années 2018 et 2019, notamment l'objectif de travailler en binôme avec un agent du service des visas, il résulte de l'instruction que cet objectif visait seulement à renforcer le service des visas pendant la période estivale ou en cas de pic d'activité et que la supérieure hiérarchique directe de M. A... a salué le travail réalisé par celui-ci dans le cadre du renfort apporté au service des visas. S'il est constant que l'intéressé n'a pas bénéficié de la rémunération plus avantageuse des agents travaillant au sein du service des visas, cette circonstance ne saurait pas par elle-même traduire l'existence d'un fait de harcèlement moral dès lors qu'il n'est pas établi que les fonctions exercées au sein du service des visas auraient pris, au cours de la période en litige, une part prépondérante par rapport à celles exercées au sein du service de l'état-civil, étant par ailleurs observé que sa hiérarchie a accepté, sur sa demande, qu'il n'assure plus des fonctions de renfort auprès du service des visas à partir de l'année 2020.
S'agissant de la surcharge de travail et du climat de souffrance au travail :
11. S'il est constant que le fait de travailler à la fois pour le service de l'état-civil et celui des visas a pu engendrer un surcroît de travail important pour M. A..., le ministre établit cependant, en s'appuyant notamment sur les comptes rendus d'entretien professionnel établis au titre des années 2019 et 2020, que la hiérarchie du requérant a bien pris en compte ses observations sur les conditions d'exercice de son travail, notamment celles exprimées dans un courriel du 18 septembre 2018 adressé à sa supérieure hiérarchique directe, dès lors que l'intéressé a lui-même reconnu avoir trouvé un bon équilibre dans la réalisation des tâches qui lui sont confiées grâce aux arbitrages rendus par sa supérieure hiérarchique directe, qu'il a bénéficié d'une formation pratique et théorique pour assurer ses fonctions au service des visas, que l'organisation et les conditions de travail se sont améliorées en 2019, un nouvel agent arrivé en septembre 2019 ayant accepté de remplacer M. A... dans ses fonctions de renfort au service des visas qu'il a cessé progressivement d'exercer jusqu'en décembre 2019, et que sa hiérarchie a accepté qu'il n'assure plus des fonctions de renfort auprès du service des visas à partir de l'année 2020. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'au cas présent, sa hiérarchie n'aurait engagé aucune action de nature à améliorer ses conditions de travail.
S'agissant du refus de maintenir M. A... à son poste pour une quatrième année :
12. Compte tenu de ce qui est jugé aux points 2 à 7, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le refus de le maintenir à son poste pour une quatrième année serait constitutif d'un fait de harcèlement moral.
S'agissant des accusations de harcèlement sexuel dont M. A... a été l'objet :
13. Il résulte de l'instruction que M. A... a eu le 4 mars 2019 un entretien avec sa hiérarchie au cours duquel il a été informé qu'une collègue lui reprochait d'avoir eu à son encontre un comportement inapproprié constitutif, selon elle, de harcèlement sexuel et que, par un courrier du 11 mars 2019, la hiérarchie de M. A... a été informée de ce que cette procédure était classée au motif que les faits relatés n'étaient pas suffisamment caractérisés à ce stade en l'absence notamment de témoignages de tiers. Si le ministre ne conteste pas que l'abandon des poursuites n'a pas été porté à la connaissance du requérant, comme celui-ci le soutient, cette circonstance, aussi regrettable soit-elle, n'est toutefois pas de nature à caractériser l'existence d'un harcèlement moral, dès lors que le ministre établit que les faits reprochés à M. A... ne lui ont pas été opposés dans le cadre du déroulement de sa carrière et qu'au surplus, aucun texte ni aucun principe n'impose à l'administration d'informer son agent des suites réservées au signalement dont il fait l'objet.
S'agissant de la mise à l'écart de M. A... :
14. Si M. A..., qui a été placé en arrêt de travail du 12 au 24 février 2020, soutient que les usagers du service de l'état-civil ont été informés, durant son absence, qu'il avait définitivement quitté son poste, ce qui n'était pas le cas, le courriel du 25 février 2020 dont il se prévaut et par lequel un usager indique qu'ayant reçu aucune réponse écrite de M. A... à son courriel tendant à connaître l'état d'avancement de son dossier suivi par le requérant, " un Monsieur [lui a] dit sèchement [au téléphone] que M. A... n'était plus au Consulat ", n'est pas suffisant en l'espèce pour caractériser l'existence d'un fait de harcèlement moral.
S'agissant de l'affectation tardive de M. A... à un nouveau poste :
15. S'il résulte de l'instruction que la décision d'affecter M. A... en administration centrale n'est intervenue que le 20 août 2020 alors qu'il avait formulé des vœux d'affectation dès le mois de juillet 2019 dans le cadre de la " transparence initiale " pour l'année 2020, le temps mis par l'administration pour prononcer l'affectation du requérant n'est pas, contrairement à ce que soutient l'intéressé, constitutif d'un fait de harcèlement moral dès lors que le ministre établit que les différents vœux formulés par M. A... pour occuper un poste à l'étranger ont été examinés par l'administration, et notamment celui d'exercer des fonctions d'assistant ressources à l'ambassade de France à Dublin, que les raisons pour lesquelles ces vœux n'ont pu être satisfaits, y compris dans le cadre de la " transparence complémentaire ", sont justifiées par des considérations étrangères à tout harcèlement et qu'enfin, alors que les affectations à l'étranger étaient closes et que M. A... n'avait formulé aucun vœu de candidature en administration centrale, l'administration a accompli toutes les diligences nécessaires en lui présentant les 21 juillet 2020, 5 août 2020 et 10 août 2020 une liste des postes encore vacants en administration centrale pour une prise de fonction au 1er septembre 2020.
S'agissant des autres faits de harcèlement moral :
16. Si M. A... soutient qu'il a été victime d'autres agissements constitutifs de harcèlement moral dès lors que plusieurs délégations de signature ont été supprimées sans raison, que les dossiers qu'il a traités ont été systématiquement réexaminés créant une pression permanente et qu'il a fait l'objet de " démarches complémentaires sollicitées de façon régulière et non nécessaire en dépit de sa surcharge de travail ", il n'apporte toutefois aucun élément de preuve à l'appui de ses allégations.
En ce qui concerne le manquement à l'obligation de prévention incombant à l'Etat :
17. M. A... soutient que l'administration n'a pris aucune mesure adéquate pour prévenir les faits de harcèlement moral dont il a été victime. Toutefois, le courrier du 10 juillet 2020 dont le requérant se prévaut et par lequel un syndicat a alerté la direction des ressources humaines du ministère de l'Europe et des affaires étrangères sur le harcèlement moral ne fait aucunement état de sa situation particulière. Par ailleurs, si, par un courriel du 18 septembre 2018, M. A... s'est plaint auprès de sa supérieure hiérarchique directe de ses conditions de travail, il résulte de l'instruction, outre qu'il a été dit aux points 10 à 16 que les faits dont le requérant se prévaut ne sont pas constitutifs de harcèlement moral, que les faits relevés par l'intéressé traduisent davantage un mal-être au travail et qu'en tout état de cause, la hiérarchie de M. A... a tenu compte de ses observations dès lors que le ministre établit, en s'appuyant notamment sur les comptes rendus d'entretien professionnel établis au titre des années 2019 et 2020, que l'intéressé a lui-même reconnu avoir trouvé un bon équilibre dans la réalisation des tâches qui lui ont été confiées grâce aux arbitrages rendus par sa supérieure hiérarchique directe, qu'il a bénéficié d'une formation pratique et théorique pour assurer ses fonctions au service des visas, que l'organisation et les conditions de travail se sont améliorées en 2019 et que sa hiérarchie a accepté qu'il n'assure plus des fonctions de renfort auprès du service des visas à partir de l'année 2020, même s'il est constant que M. A... a dû, durant la période exceptionnelle liée à la crise de la Covid, venir au soutien du service des visas. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que son administration aurait manqué à son obligation de prévention.
18. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir opposée par le ministre, que M. A... n'est pas fondé à soutenir, compte tenu de ce qui est jugé aux points 2 à 7, 10, 12 et 14 à 16, que c'est à tort que, par l'article 3 du jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sur le surplus des conclusions de sa demande. En revanche, le ministre est fondé à soutenir, compte tenu de ce qui est jugé aux points 11, 13 et 17, que c'est à tort que, par les articles 1er et 2 du même jugement, les premiers juges ont condamné l'Etat à verser à M. A... une indemnité de 7 000 euros ainsi qu'une somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur les frais liés au litige :
19. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. A... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.
D E C I D E :
Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement n° 2017264/5-4 du 24 février 2023 du Tribunal administratif de Paris sont annulés.
Article 2 : Les conclusions de la demande présentée par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris en tant que ce tribunal y a fait droit par les articles 1er et 2 du jugement n° 2017264/5-4 du 24 février 2023, ainsi que ses conclusions d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre de l'Europe et des affaires étrangères.
Délibéré après l'audience du 19 novembre 2024, à laquelle siégeaient :
- M. Auvray, président de chambre,
- Mme Hamon, présidente-assesseure,
- M. Desvigne-Repusseau, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 décembre 2024.
Le rapporteur,
M. DESVIGNE-REPUSSEAULe président,
B. AUVRAY
La greffière,
C. BUOT
La République mande et ordonne au ministre de l'Europe et des affaires étrangères en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 23PA01718