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07/02/2025 | FRANCE | N°487919

France | France, Conseil d'État, 2ème chambre, 07 février 2025, 487919


Vu la procédure suivante :



M. A... C... B... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 6 octobre 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.



Par une décision n° 22061161 du 4 juillet 2023, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et reconnu à M. B... la q

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Vu la procédure suivante :

M. A... C... B... a demandé à la Cour nationale du droit d'asile d'annuler la décision du 6 octobre 2022 par laquelle le directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande d'asile et de lui reconnaître la qualité de réfugié ou, à défaut, de lui accorder le bénéfice de la protection subsidiaire.

Par une décision n° 22061161 du 4 juillet 2023, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision de l'OFPRA et reconnu à M. B... la qualité de réfugié.

Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 4 septembre et 5 décembre 2023 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, l'OFPRA demande au Conseil d'Etat :

1°) d'annuler cette décision ;

2°) de renvoyer l'affaire, en vue de son règlement, devant la Cour nationale du droit d'asile.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatifs au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Après avoir entendu en séance publique :

- le rapport de Mme Sophie-Caroline de Margerie, conseillère d'Etat,

- les conclusions de Mme Dorothée Pradines, rapporteure publique ;

La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Foussard, Froger, avocat de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

Considérant ce qui suit :

1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B..., de nationalité afghane, a formé une demande d'asile auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) en faisant valoir qu'il craignait d'être exposé, en cas de retour dans son pays d'origine, à des persécutions de la part des autorités talibanes en raison des activités professionnelles de son père au sein des forces de police afghanes et de ses frères, procureur et ingénieurs en génie civil, et de manière générale en tant que membre d'une famille instruite ayant travaillé pour le Gouvernement. Par une décision du 6 octobre 2022, le directeur général de l'OFPRA a rejeté sa demande au motif que la réalité de ses craintes d'être perçu comme hostile aux talibans ne pouvait être établie. Par une décision du 4 juillet 2023, contre laquelle l'OFPRA se pourvoit en cassation, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision du directeur général de l'OFPRA et reconnu la qualité de réfugié à M. B....

2. D'une part, l'article L. 531-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose : " Il appartient au demandeur de présenter, aussi rapidement que possible, tous les éléments nécessaires pour étayer sa demande d'asile. Ces éléments sont constitués par ses déclarations et par tous les documents dont il dispose concernant son âge, son histoire personnelle, y compris celle de sa famille, son identité, sa ou ses nationalités, ses titres de voyage, les pays ainsi que les lieux où il a résidé auparavant, ses demandes d'asile antérieures, son itinéraire ainsi que les raisons justifiant sa demande. / Il appartient à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides d'évaluer, en coopération avec le demandeur, les éléments pertinents de la demande. " L'article L. 531-7 du même code dispose : " (...) / Lorsqu'une partie de ses déclarations n'est pas étayée par des éléments de preuve, il n'est pas exigé du demandeur d'autres éléments de justification s'il s'est conformé aux exigences prévues au premier alinéa de l'article L. 531-5 et si ses déclarations sont considérées comme cohérentes et crédibles et ne sont pas contredites par des informations dont dispose l'Office français de protection des réfugiés et apatrides. "

3. D'autre part, selon l'article R. 532-42 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la formation de jugement de la Cour nationale du droit d'asile peut poser aux parties toute question propre à l'éclairer et les parties peuvent présenter oralement toute observation utile propre à éclairer leurs écritures. En outre, l'article R. 532-43 du même code précise que " La partie qui, moins de sept jours francs avant la clôture de l'instruction écrite, a reçu communication soit d'un mémoire ou de pièces, soit de l'une des informations prévues par l'article R. 532-26, peut présenter à l'audience toute observation orale qu'elle estime utile pour répondre à ce mémoire ou à cette information. ". Aux termes de l'article R. 532-50 de ce code, " La formation de jugement se prononce sur le recours, en fonction des pièces du dossier et des observations présentées oralement par les parties, dans les conditions prévues par les articles R. 532-42 et R. 532-43. / (...) " et l'article R. 532-52 du même code ajoute que " Les observations orales des parties sont mentionnées dans la mesure où elles ont apporté des compléments par rapport à leurs écritures. / (...) ". Enfin, aux termes de l'article R. 532-51 du même code : " Lorsque le président de la formation de jugement décide d'ordonner un supplément d'instruction, les parties sont invitées à présenter un mémoire ou des pièces complémentaires pour les seuls besoins de ce supplément d'instruction. La même formation de jugement délibère, à l'expiration du délai imparti aux parties pour produire ces éléments ou, le cas échéant, y répliquer. Ce délai ne peut excéder une durée d'un mois à compter de la date de l'audience. / Les parties ne sont convoquées à une nouvelle audience que si le président de la formation de jugement estime nécessaire de les entendre présenter des observations orales sur les seuls éléments nouveaux qui auraient été produits. "

4. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que M. B... s'est borné dans ses écritures devant la Cour jusqu'au jour de l'audience à nier avoir bénéficié de l'intervention d'un taliban pour quitter Kaboul. Pour lui reconnaître la qualité de réfugié, la Cour s'est fondée sur les seules déclarations orales de l'intéressé à l'audience, dont il résultait des indications " circonstanciées et cohérentes ". En se bornant à renvoyer aux seules déclarations orales inédites de l'intéressé à l'audience, sans préciser ni les circonstances révélées par l'intéressé, ni celles qui permettaient de d'estimer qu'il serait regardé comme hostile aux autorités talibanes en cas de retour en Afghanistan, la Cour nationale du droit d'asile a insuffisamment motivé sa décision.

5. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens du pourvoi, l'OFPRA est fondé à demander l'annulation de la décision qu'il attaque.

D E C I D E :

--------------

Article 1er : La décision de la Cour nationale du droit d'asile du 6 octobre 2022 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée à la Cour nationale du droit d'asile.

Article 3 : La présente décision sera notifiée à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et à M. A... C... B....


Synthèse
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 487919
Date de la décision : 07/02/2025
Type de recours : Plein contentieux

Publications
Proposition de citation : CE, 07 fév. 2025, n° 487919
Composition du Tribunal
Rapporteur ?: Mme Sophie-Caroline de Margerie
Rapporteur public ?: Mme Dorothée Pradines
Avocat(s) : SCP FOUSSARD, FROGER

Origine de la décision
Date de l'import : 09/02/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CE:2025:487919.20250207
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