Vu la procédure suivante :
Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil d'annuler l'article 4 de l'arrêté du 21 avril 2017 pris pour l'application de l'article 109 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 ainsi que la décision du 23 décembre 2020 par laquelle le directeur de la direction nationale d'enquêtes fiscales a rejeté sa demande d'indemnisation présentée sur le fondement de l'article L. 10-0 AC du livre des procédures fiscales et d'enjoindre à l'Etat de l'indemniser à raison de son rôle d'aviseur fiscal à hauteur de 3,5 millions d'euros. Par un jugement n° 2101809 du 7 juillet 2022, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 23 décembre 2020 du directeur de la direction nationale d'enquêtes fiscales, enjoint au directeur général des finances publiques de réexaminer la demande de Mme A... dans un délai de trois mois à compter de la notification de son jugement et rejeté le surplus de sa demande.
Par un arrêt n° 22PA04079 du 27 septembre 2023, la cour administrative d'appel de Paris, statuant sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, a annulé les articles 1er à 3 de ce jugement et rejeté les demandes de Mme A....
Par un pourvoi sommaire et un mémoire complémentaire, enregistrés les 8 avril et 6 juin 2024 au secrétariat du contentieux du Conseil d'Etat, Mme A... demande au Conseil d'Etat :
1°) d'annuler cet arrêt ;
2°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à la SCP Melka-Prigent-Drusch, son avocat, d'une somme de 4 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 ;
- la loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018 ;
- le décret n° 2017-601 du 21 avril 2017 ;
- le décret n° 2019-459 du 15 mai 2019 ;
- l'arrêté du 21 avril 2017 pris pour l'application de l'article 109 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 ;
- le code de justice administrative ;
Après avoir entendu en séance publique :
- le rapport de M. Benjamin Duca-Deneuve, auditeur,
- les conclusions de Mme Karin Ciavaldini, rapporteure publique ;
La parole ayant été donnée, après les conclusions, à la SCP Melka-Prigent-Drusch, avocat de Mme A... ;
Considérant ce qui suit :
1. Il ressort des pièces du dossier soumis aux juges du fond que Mme B... A... a, par un courrier du 30 novembre 2020 adressé à la direction nationale des enquêtes fiscales, formé une demande d'indemnisation à hauteur d'au moins 3,5 millions d'euros sur le fondement de l'article L. 10-0 AC du livre des procédures fiscales. Par un jugement du 7 juillet 2022, le tribunal administratif de Montreuil a annulé la décision du 23 décembre 2020 rejetant cette demande et enjoint au directeur général des finances publiques de réexaminer la demande de Mme A... dans un délai de trois mois à compter de sa notification. Mme A... se pourvoit en cassation contre l'arrêt du 27 septembre 2023 par lequel la cour administrative d'appel de Paris a, sur appel du ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, annulé ce jugement et rejeté la demande qu'elle avait présentée devant le tribunal administratif de Montreuil.
2. Aux termes du premier et du quatrième alinéas de l'article L. 10-0 AC du livre des procédures fiscales, dans leur rédaction en vigueur jusqu'au 31 décembre 2022, laquelle résulte, sous réserve du seul ajout des manquements aux règles en matière de taxe sur la valeur ajoutée, de la codification à droit constant du premier et du troisième alinéas du I de l'article 109 de la loi du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 dans leur version applicable à compter du 1er janvier 2019, issue de l'article 21 de la loi du 23 octobre 2018 relative à la lutte contre la fraude : " Le Gouvernement peut autoriser l'administration fiscale à indemniser toute personne étrangère aux administrations publiques, dès lors que cette personne lui a fourni des renseignements ayant amené à la découverte d'un manquement aux règles fixées à l'article 4 B, au 2 bis de l'article 39 ou aux articles 57, 123 bis, 155 A, 209, 209 B, 238 A ou au chapitre Ier du titre II de la première partie du livre Ier du code général des impôts ou d'un manquement aux obligations déclaratives prévues au deuxième alinéa de l'article 1649 A ou aux articles 1649 AA ou 1649 AB du même code. (...) / Les conditions et modalités de l'indemnisation sont déterminées par arrêté du ministre chargé du budget ". Aux termes de l'article 1er du décret du 21 avril 2017 pris pour l'application de l'article 109 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017, dans sa rédaction, applicable au litige, résultant du décret modificatif du 15 mai 2019 : " La direction générale des finances publiques peut indemniser toute personne étrangère aux administrations publiques qui lui a fourni des renseignements ayant conduit à la découverte d'un manquement mentionné au premier alinéa du I de l'article 109 de la loi du 29 décembre 2016 susvisée ". Aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 21 avril 2017 pris pour l'application de l'article 109 de la loi n° 2016-1917 du 29 décembre 2016 de finances pour 2017 : " Seuls les renseignements fournis à l'administration postérieurement à l'entrée en vigueur de l'article 109 de la loi du 29 décembre 2016 susvisée peuvent donner lieu à indemnisation ". La date d'entrée en vigueur de l'article 109 de la loi de finances pour 2017 est fixée par le II de cet article au 1er janvier 2017.
3. En se bornant à prévoir la possibilité pour le pouvoir réglementaire d'autoriser l'administration fiscale à indemniser les personnes, couramment dénommées " aviseurs fiscaux ", lui ayant fourni des renseignements ayant conduit à la découverte de certains manquements à la loi fiscale et en renvoyant à un arrêté du ministre chargé du budget la détermination des conditions et modalités d'une telle indemnisation, le législateur ne saurait être regardé comme ayant entendu exclure que l'indemnisation puisse être subordonnée à une condition tenant à la date à laquelle les renseignements ont été portés à la connaissance de l'administration. Par suite, en jugeant que l'arrêté du 21 avril 2017 n'avait pas méconnu les dispositions de l'article L. 10-0 AC du livre des procédures fiscales en limitant la possibilité pour l'administration fiscale d'indemniser les aviseurs fiscaux aux seuls cas dans lesquels les renseignements fournis l'avaient été postérieurement au 1er janvier 2017, la cour n'a pas entaché son arrêt d'erreur de droit.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêt qu'elle attaque.
5. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance.
D E C I D E :
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Article 1er : Le pourvoi de Mme A... est rejeté.
Article 2 : La présente décision sera notifiée à Mme B... A... et au ministre de l'économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.
Délibéré à l'issue de la séance du 29 janvier 2025 où siégeaient : M. Pierre Collin, président adjoint de la section du contentieux, présidant ; M. Stéphane Verclytte, M. Thomas Andrieu, présidents de chambre ; Mme Emilie Bokdam-Tognetti, Mme Sylvie Pellissier, Mme Catherine Fischer-Hirtz, conseillères d'Etat, M. Jonathan Bosredon, M. Philippe Ranquet, conseillers d'Etat et M. Benjamin Duca-Deneuve, auditeur-rapporteur.
Rendu le 18 février 2025.
Le président :
Signé : M. Pierre Collin
Le rapporteur :
Signé : M. Benjamin Duca-Deneuve
La secrétaire :
Signé : Mme Magali Méaulle