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28/11/2023 | FRANCE | N°23NC01212

France | France, Cour administrative d'appel, 4ème chambre, 28 novembre 2023, 23NC01212


Vu les procédures suivantes :



Procédures contentieuses antérieures :



M. B... A... et Mme E... D..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 8 mars 2022, chacun en ce qui le concerne, par lesquels le préfet de la Moselle leur a refusé le séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois.



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ar deux jugements du 26 juillet 2022, n° 2203441 et 2203442, le tribunal administratif de Strasbourg a...

Vu les procédures suivantes :

Procédures contentieuses antérieures :

M. B... A... et Mme E... D..., épouse C..., ont demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler les arrêtés du 8 mars 2022, chacun en ce qui le concerne, par lesquels le préfet de la Moselle leur a refusé le séjour, les a obligés à quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois.

Par deux jugements du 26 juillet 2022, n° 2203441 et 2203442, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande.

Procédures devant la cour :

I. Par une requête enregistrée le 20 avril 2023, sous le n° 23NC01212, Mme C..., représentée par Me Grün, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2203442 du tribunal administratif de Strasbourg du 26 juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2022 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel elle est susceptible d'être éloignée et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet de la Moselle n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

sur la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet a entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car un délai supérieur à 30 jours aurait dû lui être accordé en regard de sa situation personnelle ;

sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée au regard des quatre critères de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de la Moselle a méconnu les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

II. Par une requête enregistrée le 20 avril 2023, sous le n° 23NC01213, M. A..., représenté par Me Grün, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2203441 du tribunal administratif de Strasbourg du 26 juillet 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 8 mars 2022 par lequel le préfet de la Moselle a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il est susceptible d'être éloigné et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de la Moselle de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou une autorisation provisoire de séjour dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre, à titre subsidiaire, au préfet de la Moselle de réexaminer sa situation dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt, sous une astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros en application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

sur la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet de la Moselle n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- l'illégalité du refus de séjour prive de base légale l'obligation de quitter le territoire français ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

sur la décision lui accordant un délai de départ volontaire de trente jours :

- elle est insuffisamment motivée ;

- le préfet a entaché cette décision d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile car un délai supérieur à 30 jours aurait dû lui être accordé en regard de sa situation personnelle ;

sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est insuffisamment motivée ;

- la décision contestée est contraire aux dispositions du dernier alinéa de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

sur la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée au regard des 4 critères de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de la Moselle a méconnu les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision contestée est contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 mai 2023, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... et Mme C... ont été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par deux décisions du 17 mars 2023.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales

- la convention internationale des droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Roussaux, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... et Mme C..., ressortissants russes, nés respectivement le 3 avril 1981 et le 7 juillet 1985 ont déclaré être entrés en France le 11 janvier 2020. Ils ont déposé une demande d'asile qui a fait l'objet d'un rejet tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides que par la Cour nationale du droit d'asile. Ils se sont toutefois maintenus sur le territoire français. Après avoir fait l'objet de plusieurs mesures d'éloignement entre 2012 et 2018, les requérants ont sollicité leur admission au séjour le 3 mars 2021 sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par deux arrêtés du 8 mars 2022, le préfet de la Moselle a refusé de faire droit à leur demande, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé leur pays de destination et a prononcé à leur encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an. Par deux requêtes enregistrées sous les nos 23NC01212 et 23NC01213, qu'il y a lieu de joindre pour statuer par un seul arrêt, M. A... et Mme C... relèvent respectivement appel des deux jugements n° 2203441 et 2203442 par lesquels le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leur demande tendant à l'annulation des deux arrêtés pris à leur encontre.

Sur les conclusions à fin d'annulation des deux arrêtés préfectoraux du 8 mars 2022 :

En ce qui concerne les décisions portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, les décisions contestées comportent les éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Les requérants ne sont donc pas fondés à soutenir qu'elles sont entachées d'un défaut de motivation.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que le préfet de la Moselle a procédé à un examen particulier de la situation des requérants avant de prendre les décisions litigieuses.

4. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République. ".

5. Les requérants reprennent en appel dans des termes identiques les moyens qu'ils avaient invoqués en première instance et tirés de la méconnaissance de dispositions citées au point précédent et de l'erreur manifeste d'appréciation qu'aurait commis le préfet dans l'appréciation des conséquences de ses décisions sur la situation personnelle des requérants. Il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges au point 7 des jugements litigieux.

6. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

7. Il ressort des pièces du dossier que les trois enfants mineurs des requérants, âgés respectivement de 7, 8 et 11 ans à la date des décisions attaquées, sont scolarisés en France. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il ne leur sera pas possible de poursuivre leur scolarité dans le pays d'origine de leurs parents, où ils ont vocation à retourner en compagnie de ceux-ci. Le préfet, qui contrairement à ce que soutient les requérants, a examiné la situation de leurs enfants en tenant compte de leur intérêt supérieur, n'a ainsi pas méconnu les stipulations précitées.

En ce qui concerne les décisions portant obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, les moyens dirigés contre les décisions portant refus de séjour ayant été écartés, le moyen tiré par la voie de l'exception de l'illégalité de ces décisions, dirigé contre les décisions obligeant M. A... et Mme C... à quitter le territoire français, ne peut qu'être écarté.

9. En deuxième lieu, lorsqu'un refus de titre de séjour est assorti d'une obligation de quitter le territoire français, la motivation de cette dernière se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, par conséquent, dès lors que ce refus est lui-même motivé, de motivation spécifique.

10. En l'espèce, ainsi qu'il a été dit au point 2, les décisions portant refus de titre de séjour comportent l'énoncé des éléments de fait et de droit sur lesquels le préfet s'est fondé. Par conséquent, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

11. En troisième lieu, il y a lieu d'adopter les motifs retenus par les premiers juges aux points 7 et 8 des jugements contestés pour écarter les moyens, repris en appel dans des termes similaires, tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale, de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant et de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur leurs situations personnelles.

En ce qui concerne les décisions fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

12. Une décision fixant le délai de départ volontaire de trente jours n'a pas à faire l'objet d'une motivation spécifique, à moins que l'étranger ait expressément demandé le bénéfice d'une prolongation ou justifie d'éléments suffisamment précis sur sa situation personnelle susceptibles de rendre nécessaire une telle prolongation.

13. Les requérants ne font pas valoir qu'ils ont sollicité une prolongation du délai de départ volontaire, ni informé préalablement le préfet de circonstances susceptibles de justifier son octroi. Ainsi, le préfet de la Moselle n'avait pas à motiver ces décisions et le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de ces décisions doit être écarté.

14. En second lieu, les requérants reprennent en appel le moyen tiré de ce que ces décisions sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation au regard de leur situation personnelle. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges au point 10 des jugements contestés.

En ce qui concerne les décisions fixant le pays de renvoi :

15. Les arrêtés attaqués rappellent que M. A... et Mme C... sont de nationalité russe et qu'ils n'ont pas justifié être exposés à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans leur pays. Les arrêtés sont par conséquent suffisamment motivés en tant qu'ils fixent le pays de destination des requérants.

16. En second lieu, aux termes de l'article L. 721-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950. ". Aux termes de ces stipulations : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

17. S'ils soutiennent qu'ils sont menacés en cas de retour dans leur pays d'origine, les requérants n'apportent aucune précision ni document de nature à établir le bien-fondé de leurs affirmations. Par ailleurs, leur demande d'asile a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et par la Cour nationale du droit d'asile, Ainsi, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions et stipulations précitées ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne les décisions portant interdiction de retour sur le territoire français :

18. Aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français. Les effets de cette interdiction cessent à l'expiration d'une durée, fixée par l'autorité administrative, qui ne peut excéder deux ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français. ". Aux termes de l'article L. 612-10 du même code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. ".

19. En application des dispositions de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet peut, dans le respect des principes constitutionnels et conventionnels et des principes généraux du droit, assortir une obligation de quitter le territoire français pour l'exécution de laquelle l'intéressé dispose d'un délai de départ volontaire, d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée maximale de deux ans, en se fondant pour en justifier tant le principe que la durée, sur la durée de sa présence en France, sur la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, sur la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et sur la menace à l'ordre public que représenterait sa présence en France. Si, après prise en compte de ce dernier critère relatif à l'ordre public, le préfet ne retient pas cette circonstance au nombre des motifs de sa décision, il n'est pas tenu, à peine d'irrégularité, de le préciser expressément.

20. Il ressort des termes des décisions attaquées que le préfet de la Moselle a procédé à un examen de la situation du couple en prenant en compte les précédentes mesures d'éloignement prises à leur encontre, la durée de leur présence en France depuis douze ans et la circonstance qu'ils n'établissent pas avoir tissé des liens stables et intenses en France. En outre, M. A... et Mme C... ne font valoir aucune circonstance humanitaire de nature à empêcher l'édiction d'une telle décision à leur encontre. Par suite et alors même qu'ils ne présentent pas une menace pour l'ordre public, il ne ressort pas des pièces du dossier que les interdictions de retour d'un an prononcées à leur encontre seraient insuffisamment motivées, ni qu'elles auraient méconnu les dispositions de l'article L. 612-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

21. Enfin, les requérants reprennent dans des termes similaires le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus, à juste titre, par le tribunal administratif au point 14 des jugements contestés.

22. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, les conclusions des requêtes aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent également être rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : Les requêtes de M. A... et Mme C... sont rejetées.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Mme E... D..., épouse A..., au ministre de l'intérieur et des outre-mer et à Me Grün.

Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.

Délibéré après l'audience du 7 novembre 2023, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente de chambre,

- Mme Samson-Dye, présidente assesseure,

- Mme Roussaux, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 28 novembre 2023.

La rapporteure,

Signé : S. RoussauxLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : N. Basso

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

N. Basso

2

N° 23NC01212, 23NC01213


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC01212
Date de la décision : 28/11/2023
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: Mme Sophie ROUSSAUX
Rapporteur public ?: M. MICHEL
Avocat(s) : GRÜN

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-11-28;23nc01212 ?
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