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21/12/2023 | FRANCE | N°22NC00467

France | France, Cour administrative d'appel, 1ère chambre, 21 décembre 2023, 22NC00467


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'enjoindre au centre hospitalier de Verdun-Saint-Mihiel, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de procéder à l'exécution intégrale des jugements n° 1702182 du 14 février 2019 et 2001003 du 15 juillet 2020, de justifier des mesures prises, soit de lui verser la somme de 235 047,22 euros à parfaire au jour de son règlement effectif, eu égard aux intérêts au taux légal dus

et au montant de l'astreinte.



Par un jugement n° 2001003 du 23 décembre 2021, ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Nancy d'enjoindre au centre hospitalier de Verdun-Saint-Mihiel, dans un délai de huit jours et sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de procéder à l'exécution intégrale des jugements n° 1702182 du 14 février 2019 et 2001003 du 15 juillet 2020, de justifier des mesures prises, soit de lui verser la somme de 235 047,22 euros à parfaire au jour de son règlement effectif, eu égard aux intérêts au taux légal dus et au montant de l'astreinte.

Par un jugement n° 2001003 du 23 décembre 2021, le tribunal administratif de Nancy a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 22 février 2022, Mme A... B..., représentée par Me Conti, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nancy du 23 décembre 2021 ;

2°) de condamner le centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel à lui verser une somme de 254 328,91 euros, montant à parfaire au jour du règlement effectif total, en réparation du préjudice financier subi, assortie des intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2017, ainsi qu'à l'astreinte prononcée par jugement du 15 juillet 2020, sommes également à actualiser au jour du règlement effectif total de l'indemnité due ;

3°) d'enjoindre au centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel, sous astreinte de 1 000 euros par jour de retard, de procéder au versement de cette somme, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de communiquer à la cour l'intégralité des documents justifiant des mesures prises.

Elle soutient que :

- le jugement du 14 février 2019 méconnaît l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors que les premiers juges ont laissé le soin à une des parties de déterminer le montant de l'indemnité qu'elle devait lui verser ;

- les premiers juges n'ont pas correctement appliqué le jugement du 14 février 2019 car le centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel n'a pas pris son attache pour déterminer le montant de l'indemnité due ;

- le montant de l'indemnité qui lui a été versée est erronée car celle-ci doit nécessairement être au moins équivalente aux sommes qui auraient dû être versées à titre de rente d'invalidité depuis la date de mise à la retraite d'office pour invalidité le 8 décembre 1993 ; le montant de l'indemnité correspondant au montant de cette rente, aurait dû être calculé en prenant le 8 décembre 1993 comme point de départ, date de sa mise à la retraite d'office pour invalidité

- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que la somme de 14 611,59 euros correspondant aux intérêts de la somme de 113 551,59 euros serait exacte.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 novembre 2022, le centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel, représenté par Me Antoniazzi-Schoen, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de Mme B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Conti, pour Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... B..., qui exerçait la profession d'infirmière au centre hospitalier de Verdun-Saint-Mihiel (ci-après " le centre hospitalier ") a développé une sclérose en plaques avec forme évolutive secondairement progressive. Le 19 septembre 2005, le directeur du centre hospitalier a reconnu l'imputabilité au service de l'accident vaccinatoire dont elle a été victime consécutivement aux vaccinations obligatoires contre l'hépatite B intervenues au sein de l'établissement au cours de l'année 1989. Un jugement du tribunal administratif de Nancy du 8 février 2005, devenu définitif, a rejeté la demande indemnitaire de l'intéressée dirigée contre le centre hospitalier, au motif qu'il n'appartient pas aux établissements hospitaliers de réparer les préjudices résultant des vaccinations obligatoires. Ce même jugement a également écarté la responsabilité de l'Etat au motif que la maladie développée par Mme B... n'était pas imputable à la vaccination contre l'hépatite B réalisée en 1989, dès lors que ses premiers symptômes s'étaient manifestés dès 1984. Par un jugement n° 1702182 du 14 février 2019, le tribunal administratif de Nancy a estimé que le centre hospitalier a commis une faute de nature à engager sa responsabilité en décidant ainsi de ne pas mettre en œuvre les droits ainsi créés au profit de Mme B... par la décision du 19 septembre 2005 reconnaissant l'imputabilité au service. Les premiers juges ont condamné le centre hospitalier à verser à Mme B... une somme de 5 000 euros en réparation de son préjudice moral, augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2017. Les premiers juges ont également estimé que Mme B... avait subi un préjudice financier. Ce dernier est constitué par les sommes non perçues au titre de la rente viagère d'invalidité cumulable avec sa pension de retraite. Mme B... a saisi le tribunal administratif de Nancy d'une demande d'exécution. Par un premier jugement en exécution n° 2001003 du 15 juillet 2020, le tribunal administratif de Nancy a enjoint le centre hospitalier de liquider et ordonnancer dans un délai de deux mois les intérêts de retard assortissant la somme de 5 000 euros et d'autre part le montant des arrérages évoqués précédemment. Mme B... a formé deux nouvelles demandes en exécution enregistrées les 18 juin et 24 septembre 2021. Elle soutient que le centre hospitalier n'a que partiellement exécuté les jugements n° 1702182 du 14 février 2019 et n° 2001003 du 15 juillet 2020 car seule la somme de 133 063,18 euros lui a été versée le 11 mars 2021 et qu'elle doit être complétée de celle de 235 047,22 euros à parfaire. Par un second jugement portant le n° 2001003 mais daté cette fois-ci du 23 décembre 2021 et dont Mme B... interjette appel, le tribunal administratif de Nancy a rejeté la demande en exécution.

Sur la demande de Mme B... :

2. Aux termes du paragraphe premier de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit à ce que sa cause soit entendue équitablement, publiquement et dans un délai raisonnable, par un tribunal indépendant et impartial, établi par la loi, qui décidera, soit des contestations sur ses droits et obligations de caractère civil, soit du bien-fondé de toute accusation en matière pénale dirigée contre elle. Le jugement doit être rendu publiquement, mais l'accès de la salle d'audience peut être interdit à la presse et au public pendant la totalité ou une partie du procès dans l'intérêt de la moralité, de l'ordre public ou de la sécurité nationale dans une société démocratique, lorsque les intérêts des mineurs ou la protection de la vie privée des parties au procès l'exigent, ou dans la mesure jugée strictement nécessaire par le tribunal, lorsque dans des circonstances spéciales la publicité serait de nature à porter atteinte aux intérêts de la justice. ". Aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement ou d'un arrêt, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif ou à la cour administrative d'appel qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. (...) Elle peut fixer un délai d'exécution et prononcer une astreinte ". Aux termes de l'article R. 921-6 du même code : " Dans le cas où le président estime nécessaire de prescrire des mesures d'exécution par voie juridictionnelle, et notamment de prononcer une astreinte, ou lorsque le demandeur le sollicite dans le mois qui suit la notification du classement (...), le président de la cour ou du tribunal ouvre par ordonnance une procédure juridictionnelle (...). L'affaire est instruite et jugée d'urgence. Lorsqu'elle prononce une astreinte, la formation de jugement en fixe la date d'effet ".

3. En premier lieu, Mme B... ne peut utilement se prévaloir à l'appui d'une requête présentée sur le fondement de l'article L. 911-4 du code de justice administrative à fin d'exécution du jugement du 14 février 2019 d'une méconnaissance des stipulations précitées dès lors que ce jugement est devenu définitif, faute pour l'intéressée d'en avoir interjeté appel. De surcroît, l'appelante contrairement à ce qu'elle soutient a pu contester devant un tribunal de pleine juridiction au sens de l'article 6 le montant de la somme que le centre hospitalier a estimé lui devoir. Par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que l'article 6 précité aurait été violé.

4. En deuxième lieu, l'article 2 du jugement du 14 février 2019 condamne le centre hospitalier à verser à Mme B..., en réparation de son préjudice financier, une somme représentative des arrérages échus entre le 8 décembre 1993, date de sa mise à la retraite d'office, et la date de lecture de ce même jugement, de la minoration de sa pension de retraite et de la rente viagère d'invalidité, calculée suivant les modalités indiquées aux articles 34, 36 et 37 du décret du 26 décembre 2003. Ce jugement précise que cette somme sera augmentée des intérêts au taux légal à compter du 6 mai 2017. Ce jugement étant devenu définitif, faute d'avoir fait l'objet d'un appel, Mme B... ne peut pas utilement soutenir que l'exécution de ce jugement implique que lui soit versée une somme représentative des arrérages échus à compter non du 8 décembre 1993 mais du 9 avril 1990.

5. En troisième lieu, la requérante n'établit pas, par les seules pièces versées au dossier, que les modalités de calcul des intérêts versés par le centre hospitalier en exécution des jugements en cause seraient erronées.

6. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par son jugement du 23 décembre 2021 le tribunal administratif de Nancy a rejeté son recours.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui rejette la requête de Mme B... n'appelle aucune mesure d'exécution. Par suite, doivent être rejetées les conclusions de l'intéressée tendant à ce qu'il soit enjoint sous astreinte au centre hospitalier de procéder au versement de la somme qu'elle demande, dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de communiquer à la cour l'intégralité des documents justifiant des mesures prises.

Sur les frais d'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge du centre hospitalier, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par Mme B..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. En revanche il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de Mme B... la somme demandée par le centre hospitalier, au même titre.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier de Verdun Saint-Mihiel présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre hospitalier de Verdun-Saint-Mihiel.

Copie en sera adressée au préfet de la Meuse.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2023, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 21 décembre 2023.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne au préfet de la Meuse, en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 22NC00467


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00467
Date de la décision : 21/12/2023
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : CONTI

Origine de la décision
Date de l'import : 12/01/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2023-12-21;22nc00467 ?
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