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29/08/2024 | FRANCE | N°23DA01792

France | France, Cour administrative d'appel de DOUAI, 1ère chambre, 29 août 2024, 23DA01792


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. et Mme B... et C... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 22 septembre 2022 par laquelle le président de la métropole européenne de Lille (MEL) a rejeté leur demande tendant à l'abrogation de la délibération du 12 décembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) en tant qu'il classe en zone agricole les parcelles cadastrées BC 53, 54, 64 et 65 situées sur le territoire de la commune de Roncq.



Par un jugement n° 2208817 du 20 juillet 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme B... et C... A... ont demandé au tribunal administratif de Lille d'annuler la décision du 22 septembre 2022 par laquelle le président de la métropole européenne de Lille (MEL) a rejeté leur demande tendant à l'abrogation de la délibération du 12 décembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) en tant qu'il classe en zone agricole les parcelles cadastrées BC 53, 54, 64 et 65 situées sur le territoire de la commune de Roncq.

Par un jugement n° 2208817 du 20 juillet 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 19 septembre 2023, M. et Mme A..., représentés par Me Paul-Guillaume Balaÿ et par Me Justine Roels, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler la décision du 22 septembre 2022 du président de la métropole européenne de Lille ;

3°) d'enjoindre au président de la métropole européenne de Lille de convoquer le conseil et d'inscrire l'abrogation du plan local d'urbanisme intercommunal en tant qu'il classe en zone A les parcelles cadastrées BC 53, 54, 64 et 65 situées Croix blanche à Roncq à l'ordre du jour d'une prochaine réunion du conseil métropolitain, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de la métropole européenne de Lille, la somme de 5 000 euros, à leur verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que le classement en zone agricole des parcelles leur appartenant est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 février 2024, la métropole européenne de Lille, représentée par Me Guillaume Chaineau, conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de M. et Mme A... de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que le moyen de la requête n'est pas fondé.

Par une ordonnance du 23 mai 2024, la clôture d'instruction a été prononcée avec effet immédiat en application des article R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Denis Perrin, premier conseiller,

- les conclusions de M. Aurélien Gloux-Saliou, rapporteur public,

- et les observations de Me Justine Roels, représentant M. et Mme A..., et de D..., représentant la métropole européenne de Lille.

Considérant ce qui suit :

Sur l'objet et l'étendue du litige :

1. M. et Mme A... sont propriétaires des parcelles BC53, 54, 64 et 65 situées Croix blanche sur le territoire de la commune de Roncq qui est couvert par le plan local d'urbanisme intercommunal que le conseil de la métropole européenne de Lille a approuvé par une délibération du 12 décembre 2019. Ils ont demandé par courrier du 1er août 2022 au président de la métropole d'abroger cette délibération en tant qu'elle a classé ces parcelles en zone agricole. Leur demande ayant été rejetée par une décision du 22 septembre 2022, ils ont saisi le tribunal administratif de Lille. Ils relèvent appel du jugement du 20 juillet 2023 qui a rejeté leurs conclusions d'annulation de cette décision.

Sur la légalité du classement en zone agricole :

2. L'effet utile de l'annulation pour excès de pouvoir du refus d'abroger un acte réglementaire illégal réside dans l'obligation, que le juge peut prescrire d'office en vertu des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative (CJA), pour l'autorité compétente, de procéder à l'abrogation de cet acte afin que cessent les atteintes illégales que son maintien en vigueur porte à l'ordre juridique. Il s'ensuit que, dans l'hypothèse où un changement de circonstances a fait cesser l'illégalité de l'acte réglementaire litigieux à la date à laquelle il statue, le juge de l'excès de pouvoir ne saurait annuler le refus de l'abroger. A l'inverse, si, à la date à laquelle il statue, l'acte réglementaire est devenu illégal en raison d'un changement de circonstances, il appartient au juge d'annuler ce refus d'abroger pour contraindre l'autorité compétente de procéder à son abrogation. Lorsqu'il est saisi de conclusions aux fins d'annulation du refus d'abroger un acte réglementaire, le juge de l'excès de pouvoir est conduit à apprécier la légalité de l'acte réglementaire dont l'abrogation a été demandée au regard des règles applicables à la date de sa décision.

3. Aux termes de l'article L. 151-9 du code de l'urbanisme relatif à l'affectation des sols dans les plans locaux d'urbanisme : " Le règlement délimite les zones urbaines ou à urbaniser et les zones naturelles ou agricoles et forestières à protéger. (...) ". Aux termes de l'article R. 151-18 du même code : " Peuvent être classés en zone urbaine, les secteurs déjà urbanisés et les secteurs où les équipements publics existants ou en cours de réalisation ont une capacité suffisante pour desservir les constructions à implanter ". Aux termes de l'article R. 151 22 de ce code : " Les zones agricoles sont dites "zones A". Peuvent être classés en zone agricole les secteurs de la commune, équipés ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles. ". Il appartient aux auteurs d'un plan local d'urbanisme de déterminer le parti d'aménagement à retenir pour le territoire concerné par le plan, en tenant compte de la situation existante et des perspectives d'avenir, et de fixer en conséquence le zonage et les possibilités de construction. Leur appréciation sur ces différents points ne peut être censurée par le juge administratif qu'au cas où elle serait entachée d'une erreur manifeste ou fondée sur des faits matériellement inexacts.

4. Il résulte des dispositions citées au point 3 qu'une zone agricole a vocation à couvrir, en cohérence avec les orientations générales et les objectifs du projet d'aménagement et de développement durables, un secteur, équipé ou non, à protéger en raison du potentiel agronomique, biologique ou économique des terres agricoles.

5. Le projet d'aménagement et de développement durables de la métropole européenne de Lille s'est fixé pour objectifs de limiter l'étalement urbain, de favoriser la préservation des espaces agricoles et de " développer de nouvelles activités agricoles dans la tâche urbaine existante, sur des terrains actuellement artificialisés ou pas ". Il a retenu à ce titre un objectif que 50 % des surfaces soient classées en zones naturelles ou agricoles. Il a entendu également " préserver la cohérence des plaines agricoles en évitant leur morcellement et maintenir les coupures urbaines dans le développement périphérique des communes ", ces espaces non bâtis qui séparent les villes et les villages constituant " une respiration nécessaire pour préserver la plaine agricole ".

6. Les propriétés des appelants, si elles se situent au sud et à l'est en bordure de la zone urbaine, font partie au nord et à l'ouest d'un vaste compartiment de grandes cultures agricoles entre Linselles et Roncq, se prolongeant en direction d'Halluin et de Bousbecque. En particulier la parcelle BC 53 est exclusivement entourée de parcelles agricoles. Si la parcelle BC 65 en front à rue fait face à un lotissement, elle permet d'avoir depuis la voie publique une fenêtre sur la plaine agricole et ainsi de préserver la respiration constituée par la coupure constituée par la zone agricole. Si deux de ces parcelles supportent l'habitation des appelants, le reste des parcelles est non bâti. Par ailleurs les appelants n'établissent pas que leurs terrains seraient dépourvus de tout potentiel agrologique, biologique ou économique. S'ils soutiennent que le classement en zone agricole ne leur permet pas de rénover leur maison, le règlement du plan local d'urbanisme intercommunal permet en zone agricole, l'extension ou la réalisation d'annexes aux bâtiments d'habitation existants " dès lors que ces extensions ou annexes ne compromettent pas l'activité agricole ou la qualité paysagère du site ". Enfin, les propriétés des appelants ne constituent pas une dent creuse dès lors qu'elles ne sont pas bordées d'unités foncières bâties en limite séparative avec elle notamment au nord-ouest et qu'elles ne sont pas dépourvues de toutes constructions, ce qui constitue une des conditions listées par le glossaire annexé au règlement du plan local d'urbanisme intercommunal pour définir une dent creuse.

7. Dans ces conditions, en classant en zone agricole les parcelles en cause, les auteurs du plan local d'urbanisme intercommunal n'ont pas commis, compte tenu des orientations du projet d'aménagement et de développement durables, une erreur manifeste d'appréciation, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges. A la date à laquelle la cour statue, aucun changement de circonstances de fait ou de droit n'a rendu ce classement manifestement illégal. La métropole européenne de Lille n'était donc pas tenue d'abroger le plan local d'urbanisme intercommunal en tant qu'il classe en zone agricole la propriété des appelants.

8. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par son jugement du 20 juillet 2023, le tribunal administratif de Lille a rejeté leur demande tendant à l'annulation de la décision du 22 septembre 2022 rejetant leur demande d'abrogation de la délibération du conseil de la métropole européenne de Lille du 12 décembre 2019 approuvant le plan local d'urbanisme intercommunal, en tant que ce dernier a classé leurs parcelles en zone agricole. Par suite, leurs conclusions à fins d'injonction doivent être rejetées.

Sur les frais exposés et non compris dans les dépens :

9. La métropole européenne de Lille n'étant pas la partie perdante à la présente instance, la demande présentée par M. et Mme A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doit être rejetée. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. et Mme A... une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par la métropole européenne de Lille et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.

Article 2 : M. et Mme A... verseront à la métropole européenne de Lille une somme globale de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme B... et C... A... et à la métropole européenne de Lille.

Délibéré après l'audience publique du 4 juillet 2024 à laquelle siégeaient :

- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,

- Mme Isabelle Legrand, présidente assesseure,

- M. Denis Perrin, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 29 août 2024.

Le rapporteur,

Signé : D. Perrin

La présidente de la 1ère chambre,

Signé : G. Borot

La greffière,

Signé : N. Roméro

La République mande et ordonne au préfet du Nord en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.

Pour expédition conforme,

La greffière en chef,

Par délégation,

La greffière,

Nathalie Roméro

N°23DA01792 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de DOUAI
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23DA01792
Date de la décision : 29/08/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme Borot
Rapporteur ?: M. Denis Perrin
Rapporteur public ?: M. Gloux-Saliou
Avocat(s) : SELARLU GUILLAUME CHAINEAU AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 18/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-08-29;23da01792 ?
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