Vu la procédure suivante :
Par une requête, enregistrée le 17 mai 2023, la société par actions simplifiée (SAS) Eoliennes des Azalées, représentée par Me Antoine Guiheux, demande à la cour :
1°) d'annuler l'arrêté du 13 février 2023 par lequel le préfet de l'Aisne a rejeté sa demande d'autorisation environnementale et la décision implicite rejetant son recours hiérarchique formé le 17 mars 2023 ;
2°) d'enjoindre au préfet de l'Aisne de reprendre l'instruction de sa demande et de statuer à nouveau sur celle-ci ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'arrêté est insuffisamment motivé ;
- il est entaché de plusieurs erreurs d'appréciation et de droit en ce qu'il se fonde à tort sur les impacts du projet sur les paysages, la faune et la biodiversité du fait des interactions entre deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et un cours d'eau et en ce qu'il considère que le cumul des mesures de bridage et d'arrêt des machines ne permettrait pas d'atteindre le niveau de production d'électricité envisagé.
La requête a été communiquée au ministre de la transition énergétique qui n'a pas produit de mémoire.
La requête a été communiquée au préfet de l'Aisne qui n'a pas produit de mémoire.
Par une ordonnance du 16 septembre 2024, la clôture de l'instruction a été fixée avec effet immédiat en application des articles R. 611-11-1 et R. 613-1 du code de justice administrative.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'environnement ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- les conclusions de M. Stéphane Eustache, rapporteur public,
- et les observations de Me Brice Bonnin, représentant la SAS Eoliennes des Azalées.
Considérant ce qui suit :
1. La société par actions simplifiée (SAS) Eoliennes des Azalées a déposé, le 9 août 2021, une demande d'autorisation environnementale pour un projet de six éoliennes et deux postes de livraison d'une puissance totale installée de 36 mégawatts sur les territoires des communes de Nouvion-et-Catillon, Remies et Monceau-lès-Leups dans le département de l'Aisne. Par un arrêté du 13 février 2023, reçu le 27 février 2023, le préfet de l'Aisne a rejeté sa demande d'autorisation environnementale. Par un courrier du 15 mars 2023, reçu le 17 mars 2023, la société a adressé à la ministre de la transition énergétique un recours hiérarchique visant à obtenir le retrait de l'arrêté du 13 février 2023. Une décision implicite de rejet est née du silence conservé pendant deux mois par la ministre. Par la présente requête, la SAS Eoliennes des Azalées demande à la cour d'annuler l'arrêté du 13 février 2021 et la décision implicite de rejet de son recours hiérarchique.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
En ce qui concerne le défaut de motivation :
2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / 7° Refusent une autorisation, sauf lorsque la communication des motifs pourrait être de nature à porter atteinte à l'un des secrets ou intérêts protégés par les dispositions du a au f du 2° de l'article L. 311-5 ; / (...) ". Aux termes de l'article L.211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".
3. Il résulte de l'instruction que l'arrêté contesté vise l'ensemble des textes dont il fait application, notamment le code de l'environnement, et comporte l'exposé des considérations de droit et de fait sur lesquelles s'est fondé le préfet de l'Aisne pour rejeter la demande d'autorisation de construire et exploiter six éoliennes et deux postes de livraison sur les territoires des communes de Nouvion-et-Catillon, Remies et Monceau-lès-Leups. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation doit être écarté comme manquant en fait.
En ce qui concerne le moyen tiré de l'erreur d'appréciation des motifs de refus :
4. Il résulte de l'instruction que pour refuser de délivrer à la SAS Eoliennes des Azalées l'autorisation de construire et d'exploiter six éoliennes et deux postes de livraison sur les territoires des communes de Nouvion-et-Catillon, Remies et Monceau-lès-Leups, le préfet de l'Aisne s'est fondé, premièrement, sur l'impact du projet sur l'avifaune et l'insuffisance des mesures " éviter, réduire, compenser " (ERC) à cet égard, deuxièmement, sur l'impact du projet sur les paysages et notamment sur la vallée de la Serre et sur la zone de respiration autour de Laon, troisièmement, sur l'impact du projet sur les chiroptères et l'insuffisante communication des données concernant les écoutes en hauteur, quatrièmement, sur le fait que le cumul des mesures de bridage et d'arrêt des machines ne permet pas d'atteindre le niveau de production d'électricité envisagé, cinquièmement, sur la modification des interactions existantes entre la biodiversité et les deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) et le cours d'eau situés à proximité.
S'agissant de l'incomplétude de l'étude d'impact :
5. Pour justifier le refus de délivrer une autorisation environnementale, le préfet a indiqué que l'ensemble des données concernant les écoutes en hauteur pour les chiroptères n'ont pas été communiquées dans le dossier.
6. Cependant, en se bornant à relever l'incomplétude du volet chiroptérologique de l'étude d'impact, le préfet ne démontre pas en quoi cette lacune est de nature à caractériser une insuffisance de l'étude d'impact.
7. En tout état de cause, il ressort du volet écologique de l'étude d'impact que si les données d'activité chiroptérologique recueillies entre le 15 juin et le 23 juillet 2020 n'ont pas été communiquées, c'est en raison d'un acte de vandalisme perpétré le 15 juin 2020 sur le mât de mesure dont les câbles de maintien ont été sectionnés, justifiant un dépôt de plainte en gendarmerie le lendemain par la société H2Air dont la société pétitionnaire est la filiale à 100 %. Il ressort également de l'étude d'impact qu'un nouveau mât de mesure a été installé le 23 juillet 2020 et est demeuré opérationnel jusqu'au 23 juillet 2021 afin de récupérer les données d'activité chiroptérologique manquantes sur la période du 15 juin au 23 juillet. Il résulte donc de cette étude que l'incidence du projet sur les chiroptères a été mesurée sur le cycle biologique complet et que l'absence de communication des données entre le 15 juin et le 23 juillet 2020 a été palliée par la communication des données collectées entre le 15 juin et le 23 juillet 2021.
8. Par suite, le moyen tiré de l'incomplétude du volet chiroptérologique de l'étude d'impact doit être écarté comme manquant en fait.
S'agissant de l'atteinte aux intérêts protégés par l'article L.511-1 du code de l'environnement :
9. Aux termes du I de l'article L. 181-3 du code de l'environnement dans sa rédaction alors applicable : " L'autorisation environnementale ne peut être accordée que si les mesures qu'elle comporte assurent la prévention des dangers ou inconvénients pour les intérêts mentionnés aux articles L. 211-1 et L. 511-1 du code de l'environnement (...). ". L'article L. 511-1 dispose que : " Sont soumis aux dispositions du présent titre (...) les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l'agriculture, soit pour la protection de la nature, de l'environnement et des paysages, soit pour l'utilisation économe des sols naturels, agricoles ou forestiers, soit pour l'utilisation rationnelle de l'énergie, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique. ".
Quant à l'impact sur les paysages :
10. Pour justifier le refus de délivrer une autorisation environnementale, le préfet a indiqué que " les deux éoliennes au nord du projet se situent dans un paysage sensible à petite échelle constitué par la vallée de la Serre " et que " les quatre éoliennes au sud du projet sont situées à 1,2 kilomètres de la zone de respiration autour de Laon ".
11. Il résulte des dispositions de l'article L.511-1 du code de l'urbanisme que, si les constructions projetées portent atteinte aux paysages naturels avoisinants, l'autorité administrative compétente peut refuser de délivrer l'autorisation sollicitée ou l'assortir de prescriptions spéciales. Pour rechercher l'existence d'une atteinte à un paysage naturel de nature à fonder le refus d'autorisation ou les prescriptions spéciales accompagnant la délivrance de cette autorisation, il lui appartient d'apprécier, dans un premier temps, la qualité du site naturel sur lequel la construction est projetée et d'évaluer, dans un second temps, l'impact que cette construction, compte tenu de sa nature et de ses effets, pourrait avoir sur le site.
12. En premier lieu, le paysage dans lequel s'insère le projet, s'il n'est pas dénué de tout intérêt, ne revêt pas de caractère remarquable. En particulier, la vallée de la Serre, qui fait certes partie des paysages emblématiques de la Picardie, ne bénéficie d'aucune protection liée à son aspect pittoresque. Il résulte de l'instruction que le projet doit être implanté sur des terres agricoles cultivées, que la zone d'implantation potentielle est traversée par l'autoroute A 26 et que l'" aire d'étude rapprochée " comporte déjà quatorze parcs éoliens construits, accordés ou en cours d'instruction. Elle fait valoir, enfin, que les principaux éléments patrimoniaux se situent dans l'" aire d'étude éloignée ", à plus de 22 kilomètres du projet, et que ceux situés à Laon, dans l'" aire d'étude rapprochée ", sont à une distance égale à supérieure à 12 kilomètres, et n'auront guère de vue sur le projet en raison de l'éloignement et de la présence de nombreux coteaux, buttes et bois faisant écran.
13. En deuxième lieu, l'administration ne caractérise nullement l'atteinte excessive aux paysages de la vallée de la Serre en se bornant à relever que deux éoliennes au nord du projet y sont implantées. Au demeurant, il ne ressort pas de l'étude paysagère que les deux éoliennes au nord du projet engendreraient un impact significatif sur la vallée de la Serre, alors que l'analyse de l'état initial conclut que " la vallée de la Serre présentera des enjeux globalement modérés, compte tenu de l'éloignement des points d'observation et de la végétation qui filtrera les vues ", ainsi que cela ressort des photomontages réalisés depuis les bourgs de la vallée de la Serre ou du photomontage n°59 réalisé depuis la route départementale n° 642 et le circuit de randonnée locale, qui montre un motif éolien non dominant dans le paysage au regard de son éloignement et des arbres présents.
14. En troisième lieu, si le préfet fait valoir la proximité de quatre éoliennes au sud du projet à 1,2 kilomètres de la " zone de respiration autour de Laon ", d'une part, aucun texte n'institue des espaces sans éoliennes qui seraient opposables à l'administration et aux pétitionnaires, même si le juge est amené à les prendre, le cas échéant, en compte pour apprécier le risque d'atteinte aux paysages. D'autre part, l'administration ne caractérise aucun impact significatif sur la ville de Laon, alors que le projet est situé à plus de 15 kilomètres, en dehors de la " zone de respiration " évoquée et que le photomontage n°27, pris depuis le belvédère des remparts, atteste que le projet s'intègre à une ligne de parcs éoliens existants très peu visibles à l'horizon. Au demeurant, l'étude paysagère a considéré la sensibilité du patrimoine de Laon comme globalement modérée et a relevé l'impact faible à nul du projet sur les monuments donnant directement sur la promenade nord de la ville et la cathédrale ainsi que l'absence d'aggravation du projet sur l'occupation de l'horizon depuis la vieille ville de Laon, du fait qu'il " s'implante dans des angles déjà occupés par l'éolien ".
15. Dans ces conditions, ainsi que le soutient à raison la société requérante, le préfet de l'Aisne, qui, comme le ministre de la transition écologique, n'a pas présenté d'écritures en défense, n'était pas fondé à refuser le projet en litige au motif de l'atteinte portée aux sites, monuments et paysages.
Quant à l'impact sur l'avifaune :
16. Pour justifier le refus de délivrer une autorisation environnementale, le préfet a relevé, d'une part, que onze espèces de rapaces diurnes, dont neuf patrimoniales et six inscrites à l'annexe I de la directive Oiseaux, avaient été relevées par l'étude d'impact dans la zone d'étude, que deux rapaces nocturnes étaient susceptibles d'utiliser la zone d'implantation du projet (ZIP) pour la prospection alimentaire, que neuf espèces nicheuses inscrites sur la liste de l'annexe I de la directive Oiseaux avaient été identifiées dans la ZIP, que leurs habitats seraient modifiés par la proximité des éoliennes, que les cycles de reproduction des espèces seraient perturbés par les opérations de maintenance, que la ZIP est une zone privilégiée pour les rapaces des milieux ouverts et semi-ouverts pour la recherche alimentaire, que la très grand majorité des effectifs nicheurs est observée à une altitude comprise entre 20 et 40 mètres, que les sessions de suivi de la migration postnuptiale mettent en évidence des effectifs migrateurs importants ainsi qu'une diversité des espèces observées et que l'implantation des éoliennes est perpendiculaire aux couloirs de migration identifiés dans l'étude d'impact.
17. Il a relevé, d'autre part, que la démarche " éviter, réduire, compenser " ne permettait pas d'aboutir à des effets " résiduels " sur l'avifaune au vu du nombre d'espèces identifiées, de leur sensibilité à la collision en période de migration, de leur sensibilité au dérangement en période de nidification en phase chantier, de l'implantation retenue par rapport aux couloirs de migration et de la hauteur des machines correspondant à la hauteur de vol de plusieurs espèces.
18. Il résulte de l'étude d'impact, dont la qualité n'a pas été remise en cause par le préfet, qu'à la suite des prospections, les enjeux sur la ZIP ont été qualifiés de " faibles " en période de migration pré-nuptiale, au regard des effectifs peu nombreux de migrateurs et de l'absence de fréquentation des zones de cultures et labours par l'avifaune migratrice, " forts " en période de nidification du fait de l'œdicnème criard, qui est une espèce nicheuse probable sur la ZIP, du busard Saint-Martin et du busard des roseaux, qui sont des nicheurs possibles sur la ZIP, et du busard cendré, qui est une espèce nicheuse potentielle sur la ZIP, " modérés " en période de migration post-nuptiale et " modérés " en période d'hivernage, la ZIP étant globalement peu fréquentée, sauf par la grande aigrette.
19. Dans le cadre de cette étude, la société pétitionnaire a retenu la variante d'implantation impliquant la suppression de trois éoliennes, de façon à réduire les impacts sur l'avifaune. Toutefois, l'impact demeurant " modéré " sur les axes migratoires et d'échanges locaux et " fort " sur l'œdicnème criard, des mesures d'évitement et de réduction ont été prévues. Au titre des mesures d'évitement, le calendrier des travaux a été adapté pour qu'ils se déroulent en dehors de la période de nidification allant d'avril à fin juillet. Au titre des mesures de réduction ont été envisagés, d'une part, un éclairage adapté en phase de chantier et d'exploitation afin d'éviter d'attirer des oiseaux diurnes en phase de migration nocturne, d'autre part, l'absence d'enherbement des plateformes au pied des éoliennes pour ne pas attirer la faune et limiter les risques de collision avec les rapaces. Après l'application de ces mesures d'évitement et de réduction, il ressort de l'étude que le projet aura des impacts résiduels allant de " nuls " à " faibles " pour l'avifaune.
20. Compte tenu des conclusions de l'étude d'impact, de l'absence d'avis de la mission régionale de l'autorité environnementale et de toute contre-expertise de l'administration, le risque pour l'avifaune n'apparaît pas significatif. Le préfet de l'Aisne, qui, comme le ministre de la transition écologique, n'a pas présenté d'écritures en défense, n'était donc pas fondé à rejeter pour ce motif, dès la phase d'examen, la demande de la SAS Eoliennes des Azalées.
Quant à l'impact sur les chiroptères :
21. Pour justifier le refus de délivrer une autorisation environnementale, le préfet a indiqué qu'au moins onze espèces de chiroptères, qui font partie de la liste des mammifères protégés, ont été identifiées de manière certaine.
22. En se bornant à relever que les inventaires ont permis d'identifier onze espèces de chiroptères, le préfet ne démontre pas en quoi le projet leur porterait une atteinte caractérisée, alors que toutes les espèces ne présentent pas le même enjeu de sensibilité ni le même degré de protection.
23. En tout état de cause, il ressort du volet écologique de l'étude d'impact qu'aucun gîte ou structure favorable à l'accueil des chiroptères, notamment un boisement, n'a été identifié dans la ZIP, qu'aucune zone de survol des éoliennes ne recoupe un axe de transit local ou une zone de chasse avérée et que toutes les éoliennes du projet se situent à plus de 200 mètres des lisières, haies bosquets suivant les recommandations du groupe de travail de l'accord européen dit " A... ". Toutefois, cette même étude relève, d'une part, que les éoliennes E1 et E2 se situent entre un axe de transit local et un couloir migratoire et qu'il existe des risques de collision, notamment en période de migration post-nuptiale, justifiant de reconnaître les impacts " modérés de ces deux éoliennes, contrairement aux éoliennes E3 à E6 dont les impacts sont qualifiés de " faibles ". Au vu de cette étude, la société pétitionnaire a mis en place, à titre de mesure de réduction, un plan de bridage préventif sur l'ensemble des éoliennes, l'absence d'enherbement des plateformes et des espaces connexes et la réalisation des travaux de terrassement en dehors de la période de nidification. Après l'application de ces mesures d'évitement et de réduction, il ressort de l'étude que le projet aura des impacts résiduels allant de " nuls " à " faibles " pour les chiroptères aux différentes périodes de vol et " nuls " pour les gîtes.
24. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, le risque pour les chiroptères n'apparaît pas significatif. Le préfet de l'Aisne, qui, comme le ministre de la transition écologique, n'a pas présenté d'observations en défense, n'était donc pas fondé à rejeter pour ce motif, dès la phase d'examen, la demande de la SAS Eoliennes des Azalées.
Quant à l'impact du projet sur la biodiversité :
25. Pour justifier le refus de délivrer une autorisation environnementale, le préfet a souligné que le projet de parc éolien entraînerait, en phases chantier et exploitation, des modifications notables sur les interactions existantes entre la biodiversité et, d'une part, deux zones naturelles d'intérêt écologique, faunistique et floristique (ZNIEFF) " Confluence de la Serre et du ruisseau de Saint-Lambert " et " Bois de la queue, Bois des longues tailles et Bois l'allemand " situées respectivement à 3 kilomètres à l'ouest de l'éolienne la plus proche et à un kilomètre au sud de l'éolienne la plus proche, d'autre part, le cours d'eau La Serre, à 900 mètres de l'éolienne la plus proche, et son affluent Le Broyon, à 500 mètres de l'éolienne la plus proche.
26. En se bornant à relever la distance séparant les ZNIEFF et les cours d'eau des éoliennes les plus proches, le préfet ne démontre pas en quoi le projet porterait atteinte à l'interaction de la biodiversité avec ces milieux, alors qu'il ne prend pas en compte les mesures ERC adoptées.
27. En tout état de cause, il ressort de l'étude écologique, d'une part, qu'aucun cours d'eau ne traverse la ZIP, qui n'est pas inscrite dans un réservoir biologique et ne contient pas de corridor écologique, d'autre part, que les ZNIEFF se situent en dehors de la ZIP, que les éoliennes seront implantées à plus d'un kilomètre de la ZNIEFF " Bois de la queue, Bois des longues tailles et Bois l'allemand " et qu'aucun impact direct ou indirect n'est attendu sur ces zones. Il n'est ainsi pas établi que le projet entraînera une modification dans les interactions entre la biodiversité et ces milieux naturels. Dans ces conditions, le préfet de l'Aisne, qui, comme le ministre de la transition écologique, n'a pas présenté d'écritures en défense, n'était pas fondé à rejeter pour ce motif, dès la phase d'examen, la demande de la SAS Eoliennes des Azalées.
Quant à l'impact sur la production électrique :
28. Pour justifier le refus de délivrer une autorisation environnementale, le préfet a relevé que le cumul des mesures de bridage acoustique et d'arrêt des éoliennes ne permettait pas de considérer que l'engagement d'un niveau de production d'électricité soit atteint par l'exploitant.
29. D'une part, le préfet n'établit aucun lien entre le niveau de production électrique et un intérêt protégé par l'article L. 511-1 du code de l'environnement. D'autre part, les mesures de bridage sont rationnellement prévues pour assurer la protection des chiroptères prévue par cet article. Enfin, à supposer que l'absence de réalisation du niveau de production électrique annoncé dans la demande puisse être qualifiée d'atteinte à un intérêt visé à l'article L. 511-1 du code de l'environnement, notamment celui tenant à l'utilisation rationnelle de l'énergie, le préfet n'en justifie pas la réalité et n'établit donc pas que le projet litigieux serait susceptible de provoquer des dangers ou inconvénients à cet égard, de nature à affecter les conditions de son exploitation. Le préfet de l'Aisne, qui, comme le ministre de la transition écologique, n'a pas présenté d'observations en défense, n'était donc pas fondé à rejeter pour ce motif, dès la phase d'examen, la demande de la SAS Eoliennes des Azalées.
30. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante est fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet de l'Aisne a refusé d'autoriser le parc éolien projeté. Par suite, l'arrêté du 13 février 2023 et la décision implicite du ministre de la transition écologique rejetant le recours hiérarchique de la SAS Eoliennes des Azalées doivent être annulés.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
31. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'enjoindre au préfet de l'Aisne de réexaminer la demande présentée par la SAS Eoliennes des Azalées dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt.
Sur les frais liés à l'instance :
32. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 2 000 euros à la SAS Eoliennes des Azalées au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : L'arrêté du préfet de l'Aisne du 13 février 2023 et la décision implicite rejetant le recours hiérarchique de la SAS Eoliennes des Azalées sont annulés.
Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Aisne de réexaminer la demande présentée par la SAS Eoliennes des Azalées dans un délai de six mois à compter de la notification du présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à la SAS Eoliennes des Azalées une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Eoliennes des Azalées et à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche.
Copie en sera transmise pour information au préfet de l'Aisne.
Délibéré après l'audience publique du 27 mars 2025 à laquelle siégeaient :
- Mme Ghislaine Borot, présidente de chambre,
- Mme Isabelle Legrand, présidente-assesseure,
- M. Vincent Thulard, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 avril 2025.
La présidente-rapporteure,
Signé : I. LegrandLa présidente de la 1ère chambre,
Signé : G. Borot
La greffière,
Signé : N. Roméro
La République mande et ordonne à la ministre de la transition écologique, de la biodiversité, de la forêt, de la mer et de la pêche en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent arrêt.
Pour expédition conforme,
La greffière en chef,
Par délégation,
La greffière,
Nathalie Roméro
N°23DA00905 2