Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... ... a demandé au tribunal administratif de Grenoble l'annulation de décisions du 23 avril 2021 par lesquelles le préfet de l'Isère a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de renvoi.
Par un jugement n° 2103287 du 11 octobre 2021, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté cette demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 15 novembre 2021, Mme C... B..., représentée par Me Pallanca, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2103287 du 11 octobre 2021 du tribunal administratif de Grenoble ;
2°) d'annuler les décisions préfectorales du 23 avril 2021 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français sous trente jours et désignant son pays de renvoi ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Isère de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai de 8 jours suivant la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, subsidiairement de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer ce durant une autorisation provisoire de séjour avec droit au travail, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à venir et sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme B... soutient que :
* la décision de refus de séjour est insuffisamment motivée en fait, est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien, a été prise en méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et méconnaît le principe d'égalité devant le service public ;
* les décisions l'obligeant à quitter le territoire français, lui impartissant un délai de trente jours pour ce faire et désignant son pays de destination sont illégales en raison de l'illégalité du refus de séjour et méconnaissent l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 3 août 2022.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
* la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, modifiée, conclue à Rome le 4 novembre 1950 ;
* l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
* le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
* la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
* le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
A été entendu au cours de l'audience publique du 16 octobre 2023, le rapport de M. Gros.
Considérant ce qui suit :
1. Mme C... B..., ressortissante algérienne née le 19 janvier 2002, est entrée en France, sous couvert d'un visa de court séjour, le 20 mars 2017. Elle a sollicité la délivrance d'un titre de séjour et un récépissé lui a été délivré, en dernier lieu pour la période du 10 février au 9 mai 2021, puis, le 23 avril 2021, le préfet de l'Isère lui a opposé un refus de titre de séjour, fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, tout en désignant son pays de renvoi. Mme B... a demandé l'annulation de ces décisions au tribunal administratif de Grenoble. Elle relève appel du jugement du 11 octobre 2021 par lequel ce tribunal a rejeté sa demande et présente à la cour des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint au préfet de l'Isère de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. En premier lieu, l'arrêté préfectoral en litige du 23 avril 2021, qui vise la demande de délivrance d'un titre de séjour présentée par Mme B... sur le fondement du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, fait état, fût-ce succinctement, de sa situation personnelle et familiale. Doit, par suite, être écarté le moyen tiré d'une insuffisante motivation en fait de la décision de refus de séjour que contient cet arrêté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : (...) 5. Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) ". Il est stipulé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales que " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".
4. Si Mme B... est entrée en France, en mars 2017, concomitamment avec son frère aîné, pour y rejoindre leur mère, Mme A... ..., titulaire d'un certificat de résidence de dix ans, ainsi qu'un frère et une sœur nés en France en 2004 et 2008, avant la naissance d'une autre sœur en juin 2017, elle a vécu jusqu'à l'âge de quinze ans en Algérie, éloignée de sa mère et de son père, M. D... B..., également titulaire d'un certificat de résidence de dix ans. Scolarisée à son arrivée sur le territoire en classe de troisième de collège, puis en classe de seconde générale et technologique de lycée, parcours qu'elle a manifestement abandonné lorsqu'elle a été inscrite, en décembre 2018, à la mission locale Isère rhodanienne, elle ne peut se prévaloir que de l'obtention, en juillet 2018, du diplôme d'études en langue française, niveau A2. Dans ces circonstances, en refusant, le 23 avril 2021, un peu plus de quatre années après son entrée en France, de délivrer à Mme B... le titre de séjour qu'elle avait sollicité, le préfet de l'Isère ne peut pas être regardé comme ayant porté une atteinte disproportionnée au droit de la requérante au respect de sa vie privée et familiale. Doivent par conséquent être écartés les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations ci-dessus visées et de l'erreur manifeste d'appréciation entachant cette décision.
5. En troisième lieu, il est vrai que Mme B... et son frère aîné Taha Elamine ..., ont, en Algérie, été tous deux confiés à leur tante par acte de kafala, sont entrés en France ensemble, ont été inscrits, fin 2018, à la mission locale Isère rhodanienne. Toutefois, ces éléments ne suffisent pas à caractériser une identité de parcours de la requérante et de son frère, auquel a été délivré un certificat de résidence d'un an expirant au 7 février 2021. Dans ces conditions où les situations de la requérante et de son frère sont différentes, le refus de séjour contesté pris le 23 avril 2021 n'est pas intervenu en violation d'un principe d'égalité en procédant à une discrimination au détriment de la requérante.
6. En quatrième lieu, le refus de séjour n'étant pas, eu égard à ce qui a été précédemment exposé, démontré illégal, ne peut qu'être écarté le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, articulé à l'encontre des décisions obligeant Mme B... à quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, et désignant son pays de destination.
7. En dernier lieu, pour les mêmes motifs figurant au point 4 du présent arrêt, ces décisions subséquentes ne méconnaissent pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales.
8. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande. Doivent en conséquence être rejetées ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DECIDE :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Délibéré après l'audience du 16 octobre 2023, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
M. Gros, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 novembre 2023.
Le rapporteur,
B. GrosLe président,
F. Pourny
La greffière,
F. Abdillah
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
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N° 21LY03676