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04/09/2024 | FRANCE | N°23LY03990

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 1ère chambre, 04 septembre 2024, 23LY03990


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 19 juin 2020 par lequel le maire de la commune d'Annemasse a accordé un permis de construire à la société Saint Jaume.



Par une ordonnance n° 2006277 du 30 octobre 2023, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a donné acte de son désistement.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2023, M. A..., re

présenté par Me Beraudo, demande à la cour :



1°) d'annuler cette ordonnance du 30 octobre 2023 ;



...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 19 juin 2020 par lequel le maire de la commune d'Annemasse a accordé un permis de construire à la société Saint Jaume.

Par une ordonnance n° 2006277 du 30 octobre 2023, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a donné acte de son désistement.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 26 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Beraudo, demande à la cour :

1°) d'annuler cette ordonnance du 30 octobre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 19 juin 2020 par lequel le maire de la commune d'Annemasse a accordé un permis de construire à la société Saint Jaume ;

3°) de mettre à la charge de la commune d'Annemasse le versement de la somme de

4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- il justifie d'un intérêt à agir ;

- c'est à tort que le président de la 2ème chambre du tribunal a donné acte de son désistement ; son conseil n'a pas été informé de la demande de régularisation du 25 septembre 2023, faute de notification sur sa messagerie dont l'adresse avait pourtant été indiquée dans l'application Télérecours ; son conseil n'a pas davantage été informé par lettre recommandée avec accusé-réception ; lui-même n'a pas été informé régulièrement de la demande de maintien de la requête ; il ne peut être tenu pour responsable d'un dysfonctionnement de l'application informatique ;

- le président de la 2ème chambre du tribunal a fait un usage abusif des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative ; de plus, l'état du dossier ne lui permettait pas de s'interroger sur l'intérêt que sa demande conservait pour lui ;

- l'interprétation et l'application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative méconnaissent les stipulations de l'article 6§1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le dossier de demande de permis de construire est insuffisant et erroné, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 431-10 du code de l'urbanisme ;

- les mentions portées dans le CERFA du dossier de permis de construire sont erronées, s'agissant notamment du nombre de chambres et de places de stationnement ;

- l'arrêté du 19 juin 2020 méconnaît les dispositions de l'article UA10.1 du règlement du plan local d'urbanisme, ainsi que les dispositions de l'article UA 12 de ce même règlement ;

- il méconnaît les dispositions de l'article UA 3.2 de ce règlement et les dispositions de l'article R. 111-5 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire enregistré le 25 mars 2024, la société Saint Jaume, représentée par Me Jourda, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... le versement de la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 27 mars 2024, la commune d'Annemasse, représentée par Me Amblard, conclut, à titre principal, au rejet de la requête, à titre subsidiaire, au rejet des conclusions à fin d'annulation dirigées contre l'arrêté du 19 juin 2020, à titre infiniment subsidiaire, à la mise en œuvre des dispositions de l'article L. 600-5-1 du code de l'urbanisme, et à ce qu'il soit mis à la charge de M. A... le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mauclair, présidente-assesseure ;

- les conclusions de Mme Djebiri, rapporteure publique ;

- les observations de Me Meierhans, pour la commune d'Annemasse.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a demandé au tribunal administratif de Grenoble d'annuler l'arrêté du 19 juin 2020 par lequel le maire de la commune d'Annemasse a accordé un permis de construire à la société Saint Jaume. Il relève appel de l'ordonnance du 30 octobre 2023 par laquelle le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a donné acte de son désistement en application des dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative.

2. Aux termes de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative : " Lorsque l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur, le président de la formation de jugement ou le président de la chambre chargée de l'instruction, peut inviter le requérant à confirmer expressément le maintien de ses conclusions. La demande qui lui est adressée mentionne que, à défaut de réception de cette confirmation à l'expiration du délai fixé, qui ne peut être inférieur à un mois, il sera réputé s'être désisté de l'ensemble de ses conclusions ". L'article R. 611-8-6 du même code prévoit : " Les parties sont réputées avoir reçu la communication ou la notification à la date de première consultation du document qui leur a été adressé par voie électronique, certifiée par l'accusé de réception délivré par l'application informatique, ou, à défaut de consultation dans un délai de deux jours ouvrés à compter de la date de mise à disposition du document dans l'application, à l'issue de ce délai. Sauf demande contraire de leur part, les parties sont alertées de toute nouvelle communication ou notification par un message électronique envoyé à l'adresse choisie par elles. (...) ".

3. D'une part, à l'occasion de la contestation de l'ordonnance donnant acte d'un désistement par application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative en l'absence de réponse du requérant à la demande de confirmation de ses conclusions dans le délai qui lui a été imparti, il incombe au juge d'appel, saisi de moyens en ce sens, de vérifier que l'intéressé a reçu la demande de confirmation du maintien de ses conclusions, que cette demande laissait au requérant un délai d'au moins un mois pour y répondre et l'informait des conséquences d'un défaut de réponse dans ce délai et que le requérant s'est abstenu de répondre en temps utile. Si les motifs pour lesquels le signataire de l'ordonnance, auquel il incombe de veiller à une bonne administration de la justice, estime que l'état du dossier permet de s'interroger sur l'intérêt que la requête conserve pour son auteur ne peuvent en principe être utilement discutés devant le juge d'appel, il appartient néanmoins à ce dernier de censurer l'ordonnance qui lui est déférée dans le cas où il juge, au vu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, qu'il a été fait un usage abusif de la faculté ouverte par l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative.

4. Par un courrier du 25 septembre 2023, mis à disposition de l'avocat de M. A... le même jour par la voie de l'application informatique Télérecours, le tribunal l'a invité, sur le fondement de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative, à confirmer le maintien de sa demande en produisant, dans le délai de trente jours, soit un mémoire, soit une lettre indiquant qu'il estimait inutile de répliquer, mais qu'il maintenait les conclusions de sa requête, soit une lettre de désistement pur et simple, en l'informant que, à défaut d'avoir produit ce mémoire dans le délai imparti, il serait réputé s'être désisté de sa requête. Ce courrier, qui est réputé avoir été lu deux jours après sa mise à disposition, en application des dispositions de l'article R. 611-8-6 du code de justice administrative, précisait également que " l'examen de l'affaire [...] permet de s'interroger sur l'intérêt que [la] requête conserve " pour M. A....

5. Il résulte des dispositions de l'article R. 431-1 du code de justice administrative que lorsqu'une partie est représentée devant le tribunal administratif ou la cour administrative d'appel par un des mandataires mentionnés à l'article R. 431-2 du même code, c'est-à-dire par un avocat ou par un avocat au Conseil d'Etat et à la Cour de cassation, les actes de procédure, à l'exception de la notification de la décision prévue aux articles R. 751-3 et suivants, ne sont accomplis qu'à l'égard de ce mandataire. Il s'ensuit que l'invitation à confirmer expressément le maintien des conclusions d'une requête en application de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative doit être adressée à ce mandataire. Par suite, la circonstance selon laquelle M. A... n'aurait pas été lui-même informé du courrier du 25 septembre 2023 est sans incidence sur l'ordonnance contestée.

6. Par ailleurs, le tribunal était tenu, en application des dispositions de l'article R. 414-1 du code de justice administrative, d'adresser, par la voie de l'application Télérecours, le courrier du 25 septembre 2023, la circonstance que l'avocat du requérant n'aurait pas été informé par lettre recommandée avec accusé réception et que l'adresse de son cabinet figurant sur ce courrier serait erronée étant également sans incidence sur l'ordonnance contestée.

7. Si M. A... soutient que son avocat n'a pas été informé de la mise à disposition de ce courrier alors qu'il avait renseigné, dans l'application, la messagerie électronique sur laquelle il souhaitait recevoir les notifications, il n'apporte aucun élément de nature à établir un dysfonctionnement de cette application informatique. Par ailleurs, en l'absence de réponse de l'avocat à l'invitation qui lui a été adressée en application de l'article R. 612-5-1, le requérant est réputé s'être désisté de sa demande, et il n'appartenait pas à la juridiction de mettre en demeure l'avocat de répondre à l'invitation qui lui a été adressée, ni d'informer le requérant de ce que l'avocat n'avait pas répondu à cette invitation.

8. Enfin, dans les circonstances de l'espèce rappelées au point 4, et alors que le requérant n'a adressé aucun courrier ou mémoire à la juridiction postérieurement à sa requête et au dépôt de pièces complémentaires reçues les 26 octobre 2020 et 8 novembre 2020, et que seule la société Saint Jaume a présenté des demandes d'audiencement par des courriers des 3 octobre 2022 et 21 mars 2023, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble n'a pas fait un usage abusif de la faculté ouverte par l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative. Au terme du délai imparti, aucune confirmation expresse des conclusions n'étant parvenue au greffe du tribunal administratif, M. A... doit être réputé s'être désisté de sa requête. Par suite, c'est à bon droit que le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a pu donner acte à M. A... du désistement de sa requête par une ordonnance fondée sur l'article R. 222-1 du code de justice administrative.

9. D'autre part, prises dans l'objectif de bonne administration de la justice, les dispositions de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative prévoient, à peine d'irrégularité de la décision constatant le désistement, que la partie concernée doit être expressément invitée à maintenir ses conclusions, doit disposer d'un délai d'au moins un mois pour y procéder et doit être préalablement et régulièrement informée du délai dont elle dispose et des conséquences d'une abstention de sa part. Dans ces conditions, M. A... n'est pas fondé à soutenir que ces dispositions sont incompatibles avec les stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le président de la 2ème chambre du tribunal administratif de Grenoble a donné acte de son désistement, sur le fondement de l'article R. 612-5-1 du code de justice administrative. Sa requête doit, dès lors, être rejetée.

Sur les frais d'instance :

11. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. A... une somme de 1 000 euros à verser, d'une part à la commune d'Annemasse et, d'autre part, à la société Saint Jaume sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de la commune d'Annemasse, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, au titre des frais exposés par M. A... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : M. A... versera à la commune d'Annemasse la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : M. A... versera à la société Saint Jaume la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à la commune d'Annemasse et à la société Saint Jaume.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,

Mme Anne-Gaëlle Mauclair, présidente-assesseure,

Mme Claire Burnichon, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 septembre 2024.

La rapporteure,

A.-G. Mauclair La présidente,

M. C...

La greffière,

F. Prouteau

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur et des outre-mer et au ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires en ce qui les concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition,

La greffière,

N° 23LY03990 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 23LY03990
Date de la décision : 04/09/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

54-05-04-03 Procédure. - Incidents. - Désistement. - Désistement d'office.


Composition du Tribunal
Président : Mme MEHL-SCHOUDER
Rapporteur ?: Mme Anne-Gaëlle MAUCLAIR
Rapporteur public ?: Mme DJEBIRI
Avocat(s) : JOURDA

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-09-04;23ly03990 ?
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