Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. A... E... a demandé au tribunal administratif de Dijon d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2203127 du 23 mars 2023, le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 20 avril 2023, M. D..., représenté par Me Manla Ahmad, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement du 23 mars 2023 ;
2°) d'annuler l'arrêté du 15 novembre 2022 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Saône-et-Loire de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement d'une somme de 1 500 euros au profit de son avocat au titre des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou à son profit si l'aide juridictionnelle ne lui était pas accordée.
Il soutient que :
En ce qui concerne la régularité du jugement :
- les premiers juges n'ont pas répondu au moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le tribunal ne s'est pas prononcé sur les conclusions tendant à l'annulation des décisions portant refus de délai de départ volontaire et fixation du pays de destination ;
En ce qui concerne la légalité des décisions contestées :
- les dispositions du 5° et du 6° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile s'opposent à ce qu'une décision d'obligation de quitter le territoire français soit prise à son encontre ;
- le préfet a entaché son arrêté portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur de droit en fondant sa décision d'obligation de quitter le territoire français sur le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour de plein droit, en qualité de conjoint de français sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ou en qualité de parent d'enfant français sur le fondement des dispositions de l'article L. 423-7 du même code, et que la décision de refus de séjour du 9 juin 2021 fondant la mesure d'éloignement est illégale pour ce motif ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale du fait de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision portant refus de titre de séjour ;
- le préfet a entaché son arrêté portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur de droit en fondant sa décision d'obligation de quitter le territoire français sur le 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et le refus de séjour qui lui a été opposé sur le fondement de l'article L. 432-1 de ce code est entaché d'une erreur de droit également, dans la mesure où la menace pour l'ordre public ne peut pas être caractérisée au seul motif de condamnations pénales antérieures, et n'est pas en l'espèce de nature à justifier un refus de titre de séjour et une obligation de quitter le territoire français ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, eu égard à sa qualité de père d'un enfant français et de conjoint d'une ressortissante française ;
- la décision porte atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant et méconnaît les stipulations du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- la décision d'éloignement est entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;
- l'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français entraînera par voie de conséquence l'annulation des autres décisions contestées ;
- la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire est entachée d'une insuffisance de motivation en fait ;
- cette décision est illégale du fait de l'illégalité, invoquée par voie d'exception, de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;
- la décision de refus de délai de départ volontaire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.
Le préfet de Saône-et-Loire a produit une pièce le 11 mai 2023, qui n'a pas été communiquée.
Par ordonnance du 3 juin 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 26 juin 2024.
La demande d'aide juridictionnelle de M. D... a été rejetée par une décision du 24 mai 2023, confirmée par une décision du président de la cour du 12 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Maubon, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant malgache né le 27 janvier 1983 et marié depuis le 10 août 2019 à une ressortissante de nationalité française, est entré en France le 27 novembre 2019, sous couvert d'un visa de long séjour délivré en qualité de conjoint de Français valable jusqu'au 20 novembre 2020. L'enfant du couple est né le 22 août 2020 en France. M. D... a sollicité la délivrance d'un titre de séjour en qualité de conjoint de Français, ce qui lui a été refusé par une décision du préfet de Saône-et-Loire du 9 juin 2021 adoptée sur le fondement de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile au motif que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public. Il a fait l'objet le 3 septembre 2021 d'un arrêté du préfet de Saône-et-Loire portant obligation de quitter le territoire français sans délai, à l'encontre duquel il a formé des recours contentieux qui ont été rejetés. Il a fait l'objet le 15 novembre 2022 d'un arrêté du préfet de Saône-et-Loire portant obligation de quitter le territoire français, refus de délai de départ volontaire et fixation du pays de destination. M. D... relève appel du jugement du 23 mars 2023 par lequel le tribunal administratif de Dijon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté du 15 novembre 2022.
Sur la régularité du jugement de première instance :
2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier de première instance que M. D..., qui a présenté sa requête devant le tribunal administratif de Dijon sans l'assistance d'un avocat, n'a évoqué que l'existence de son fils né en août 2020, sans invoquer la méconnaissance de l'intérêt supérieur de celui-ci par les décisions contestées, ni d'ailleurs mentionner l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le jugement serait irrégulier faute pour les premiers juges de s'être prononcés sur le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.
3. En second lieu, il ressort du jugement du 23 mars 2023 que le tribunal administratif de Dijon s'est prononcé sur l'ensemble des conclusions de la demande de première instance tendant à l'annulation de l'arrêté du 15 novembre 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ et a fixé le pays de destination. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit, dès lors, être écarté.
Sur la légalité des décisions contestées :
En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :
4. Aux termes de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger un étranger à quitter le territoire français lorsqu'il se trouve dans les cas suivants : / (...) / 3° L'étranger s'est vu refuser la délivrance d'un titre de séjour, le renouvellement du titre de séjour, du document provisoire délivré à l'occasion d'une demande de titre de séjour ou de l'autorisation provisoire de séjour qui lui avait été délivré ou s'est vu retirer un de ces documents ; / (...) / 5° Le comportement de l'étranger qui ne réside pas régulièrement en France depuis plus de trois mois constitue une menace pour l'ordre public ; / (...). "
5. Il ressort des termes de l'arrêté contesté du 15 novembre 2022 qu'il a été pris sur le fondement des dispositions du 3° et du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, aux motifs, d'une part, que M. D... a fait l'objet d'une décision de refus de délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 432-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui permettent à l'autorité administrative de refuser la délivrance d'un titre de séjour à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public et qu'il se maintient irrégulièrement sur le territoire français, et, d'autre part, qu'il a été condamné par un jugement du tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône du 11 juin 2020 à sept mois d'emprisonnement avec sursis probatoire durant deux ans, pour des faits de violence sans incapacité commis sur sa conjointe et qu'au regard des actes de violence commis sur son épouse en présence de la fille mineure de celle-ci, M. D... représente une menace grave pour l'ordre public faisant obstacle à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".
6. En premier lieu, M. D... invoque, par voie d'exception, l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour du 9 juin 2021 qui a servi de base légale à la décision d'éloignement du 15 novembre 2022 en tant qu'elle est fondée sur le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il ressort toutefois des mentions de l'arrêté contesté que la décision de refus de titre de séjour adoptée le 9 juin 2021 à l'encontre de M. D... lui a été notifiée le 11 juin 2021, ce que le requérant ne conteste pas, et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait formé un recours à l'encontre de cette décision dans le délai de recours contentieux qui lui était imparti. Ainsi, il n'est plus recevable à invoquer l'illégalité de cette décision du 9 juin 2021 par la voie de l'exception, à l'encontre de l'arrêté du 15 novembre 2022.
7. En deuxième lieu, M. D... soutient que le préfet ne pouvait, par son arrêté du 15 novembre 2022, prendre à son encontre une décision d'éloignement, dès lors qu'il remplit les conditions pour se voir délivrer un titre de séjour de plein droit.
8. Toutefois, aux termes de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La circonstance que la présence d'un étranger en France constitue une menace pour l'ordre public fait obstacle à la délivrance et au renouvellement de la carte de séjour temporaire (...) ". Selon l'article L. 432-1 du même code : " La délivrance d'une carte de séjour temporaire ou pluriannuelle ou d'une carte de résident peut, par une décision motivée, être refusée à tout étranger dont la présence en France constitue une menace pour l'ordre public. ". Il ressort des pièces du dossier que le préfet de Saône-et-Loire a, par une décision du 9 juin 2021, refusé d'accorder un titre de séjour à M. D... au motif que sa présence en France constitue une menace pour l'ordre public. Dans ces circonstances particulières, il y a lieu d'examiner la réalité et l'actualité de la menace à l'ordre public que représente la présence en France de M. D..., susceptible de faire obstacle à la délivrance d'une carte de séjour temporaire en application des dispositions de l'article L. 412-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Il ressort des pièces du dossier que M. D... a fait l'objet, par un jugement du tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône du 11 juin 2020, d'une condamnation à sept mois d'emprisonnement avec sursis probatoire durant deux ans, pour des faits de violence sans incapacité sur sa concubine, commis en présence de la fille de celle-ci entre janvier et avril 2020. Il a été écroué le 16 février 2022 et condamné, par un jugement du tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône du 13 juin 2022, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement pour des faits d'agression sexuelle sur un mineur de plus de quinze ans par une personne ayant autorité sur la victime, et maintenu en détention. Ce même jugement a révoqué, à hauteur de quatre mois, le sursis accordé en 2020. Eu égard à la nature et à la répétition de ce comportement délictuel et alors que la dernière condamnation remonte à moins d'un an à la date de la décision attaquée, la présence sur le territoire français de M. D..., bien qu'il indique s'être remis en question et avoir suivi des formations, constitue une menace pour l'ordre public. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir qu'il devait se voir délivrer de plein droit une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L. 423-1 ou L. 423-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
10. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 5° L'étranger qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans ; / 6° L'étranger marié depuis au moins trois ans avec un conjoint de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage et que le conjoint ait conservé la nationalité française ; / (...) ".
11. D'une part, ainsi qu'il a dit été au point 9, M. D... a été écroué le 16 février 2022, puis condamné, par un jugement du tribunal correctionnel de Chalon-sur-Saône du 13 juin 2022, à une peine de dix-huit mois d'emprisonnement, et maintenu en détention. A la date de l'arrêté contesté du 15 novembre 2022, M. D... était donc séparé de son épouse depuis neuf mois. Si la séparation du fait de la détention n'emporte pas nécessairement rupture de la communauté de vie, les documents que produit M. D..., à savoir un avis d'imposition sur les revenus de 2021 comportant leur adresse commune et un courrier de sa compagne du 19 avril 2023 relatant le fait que le requérant s'est occupé de son fils durant les premiers mois de sa vie, ne sont pas suffisants pour établir que les conjoints auraient maintenu une vie commune à la date de la décision attaquée, alors, notamment, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que son épouse lui aurait rendu visite en prison. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait pas légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application du 6° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
12. D'autre part, en se bornant à produire un courrier du 19 avril 2023 par lequel sa compagne expose qu'il s'est occupé de son fils durant les premiers mois de sa vie, M. D... n'établit pas qu'à la date de la décision attaquée, il contribuait effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dont il était alors séparé, du fait de son incarcération, depuis au moins neuf mois. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pouvait pas légalement faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français en application du 5° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
13. En quatrième lieu, si M. D... soutient que les dispositions du 5° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvaient fonder la décision contestée, il ressort des termes de cette dernière qu'elle est également fondée sur le 3° du même article, M. D... ayant fait l'objet d'une décision de refus de séjour le 9 juin 2021, ainsi qu'il a été dit au point 8. Il résulte de l'instruction que le préfet de Saône-et-Loire aurait pris la même décision d'obligation de quitter le territoire français s'il s'était fondé uniquement sur le 3° de l'article L. 611-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance du 5° de cet article doit être écarté comme inopérant.
14. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. "
15. M. D... fait état de ses attaches en France, où résident son épouse et son fils né en août 2020, tous deux de nationalité française. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que M. D... a fait l'objet de deux condamnations pénales pour des faits de violences et d'agression sexuelle commis au sein de son foyer, sur sa conjointe et sur la fille de celle-ci, la dernière condamnation étant récente à la date de la décision attaquée. Il a été incarcéré à partir du 16 février 2022 et jusqu'à la date de la décision attaquée et n'a donc connu son fils que les dix-huit premiers mois de sa vie. Il a vécu jusqu'à l'âge de trente-six ans à Madagascar, et il ne ressort pas des pièces du dossier que sa compagne et leur enfant ne pourraient pas, si tel est leur souhait, l'y rejoindre. Aucun élément n'est en outre produit sur la fille de son épouse, à l'égard de laquelle les faits d'agression sexuelle ont été commis et avec laquelle il a l'interdiction d'entrer en contact. Le requérant ne produit pas davantage de document attestant de perspectives d'intégration, notamment professionnelles, en France. Dans ces circonstances, la décision d'éloignement du territoire français ne porte pas au droit au respect de la vie privée et familiale de M. D... une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit dès lors être écarté.
16. En sixième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". M. D... n'établit par aucune pièce probante qu'il contribuerait à l'entretien et à l'éducation de son enfant mineur à la date de la décision attaquée, adoptée alors qu'il était incarcéré et de ce fait séparé de son enfant depuis plusieurs mois. La seule circonstance que la mère de l'enfant et épouse du requérant atteste que sa présence est nécessaire pour le bien-être et l'équilibre de l'enfant n'est pas suffisante pour considérer que la décision d'éloignement porterait atteinte à l'intérêt supérieur de cet enfant. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
17. En dernier lieu, les circonstances dont fait état M. D..., rappelées aux points précédents et tirées de la présence en France de son épouse de nationalité française et son fils de nationalité française, ne sont pas suffisantes, étant donné les faits délictuels dont il a été reconnu coupable, pour constituer des circonstances particulières de nature à entacher la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.
En ce qui concerne la décision portant refus de délai de départ volontaire :
18. Aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / (...) ". Aux termes de l'article L. 612-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 612-1, l'autorité administrative peut refuser d'accorder un délai de départ volontaire dans les cas suivants : / 1° Le comportement de l'étranger constitue une menace pour l'ordre public ; / (...) ".
19. En premier lieu, en l'absence d'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'illégalité de cette décision, soulevé par voie d'exception à l'encontre de la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire, ne peut qu'être écarté.
20. En deuxième lieu, l'arrêté du 15 novembre 2022 par lequel le préfet de Saône-et-Loire a refusé d'accorder un délai de départ volontaire à M. D..., qui mentionne l'article L. 612-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont il est fait application et qui indique, après avoir constaté que " compte tenu de la nature, de la réitération et la gravité des risques commis et du risque de récidive, le comportement de M. D... constitue une menace pour l'ordre public ", qu'" eu égard à la nature des faits commis il y a urgence à éloigner sans délai M. D... du territoire français dès sa levée d'écrou ", comporte l'énoncé des éléments de droit et de fait qui en constituent le fondement. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit donc être écarté.
21. En troisième lieu, les circonstances dont fait état M. D... ne sont pas suffisantes pour constituer des circonstances particulières de nature à entacher la décision portant refus de délai de départ volontaire d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte :
22. Le présent jugement, qui rejette les conclusions aux fins d'annulation de la requête, n'implique aucune mesure d'exécution. Il y a donc lieu de rejeter les conclusions à fin d'injonction et d'astreinte présentées par M. D....
Sur les frais liés au litige :
23. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'État, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que M. D... demande sur le fondement de ces dispositions.
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... F... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie sera adressée pour information au préfet de Saône-et-Loire.
Délibéré après l'audience du 1er octobre 2024 à laquelle siégeaient :
Mme Monique Mehl-Schouder, présidente de chambre,
Mme Anne-Gaëlle Mauclair, présidente-assesseure,
Mme Gabrielle Maubon, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 octobre 2024.
La rapporteure,
G. MaubonLa présidente,
M. C...
La greffière,
F. Prouteau
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
N° 23LY01406 2