Vu la procédure suivante :
Procédures contentieuses antérieures :
Par une demande enregistrée sous le n° 2305240, M. C... D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 14 juin 2023 par lequel la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office et d'enjoindre à la préfète du Rhône, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée de dix ans dans un délai de trente jours ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation.
Par un jugement n° 2305240 du 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Par une demande enregistrée sous le n° 2305241, Mme A... B... épouse D... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler l'arrêté du 14 juin 2023 par lequel la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourra être éloignée d'office et d'enjoindre à la préfète du Rhône, sous astreinte de 500 euros par jour de retard de lui délivrer un certificat de résidence d'une durée de dix ans dans un délai de trente jours ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation.
Par un jugement n° 2305241 du 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
I. - Par une requête enregistrée sous le n° 23LY03574 le 21 novembre 2023, M. C... D... et Mme A... B... épouse D..., représentés par Me Lantheaume, demandent à la cour :
1°) d'annuler les jugements n° 2305241 et n° 2305240 du 7 novembre 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du 14 juin 2023 par lesquelles la préfète du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils pourront être éloignés d'office ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de leur délivrer, à titre principal, un certificat de résidence algérien d'une durée de dix ans dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de leur situation dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
Sur le refus de titre de séjour :
- ces décisions sont entachées d'une erreur de fait et d'un défaut d'examen sérieux de leur situation ;
- elles sont entachées d'un vice de procédure faute pour la préfète d'avoir saisi la commission du titre de séjour ;
- elles méconnaissent les stipulations du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien dont ils remplissent les conditions ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- ces décisions sont illégales à raison de l'illégalité des décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- elles méconnaissent les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et sont entachées d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur les décisions fixant un délai de départ volontaire et le pays de destination :
- ces décisions sont illégales à raison de l'illégalité des décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire.
La préfète du Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit.
II. - Par une requête enregistrée sous le n° 23LY03658 le 28 novembre 2023, M. C... D..., représenté par Me Lantheaume, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2305240 du 7 novembre 2023 du tribunal administratif de Lyon ;
2°) d'annuler les décisions du 14 juin 2023 par lesquelles la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office ;
3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer, à titre principal, un certificat de résidence algérien d'une durée de dix ans dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation dans les mêmes conditions de délais et d'astreinte ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
Sur le refus de titre de séjour :
- cette décision est entachée d'une erreur de fait et d'un défaut d'examen sérieux de sa situation
- elle est entachée d'un vice de procédure faute pour la préfète d'avoir saisi la commission du titre de séjour ;
- elle méconnait les stipulations du b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien dont il remplit les conditions ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur l'obligation de quitter le territoire :
- cette décision est illégale à raison de l'illégalité de la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour ;
- elle méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;
Sur les décisions fixant un délai de départ volontaire et le pays de destination :
- ces décisions sont illégales à raison de l'illégalité des décisions de refus de délivrance d'un titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire.
La préfète du Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M.et Mme D..., ressortissants algériens respectivement nés les 16 octobre 1952 et 26 décembre 1958, sont entrés en France le 11 mai 2022 sous couvert d'un visa court séjour multi-entrées valable du 10 avril 2022 au 6 juillet 2022 portant la mention " ascendant non à charge ". Le 20 septembre 2022, ils ont chacun sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de l'article 7 bis b) de l'accord franco-algérien. Par deux arrêtés en date du 14 juin 2023, la préfète du Rhône a refusé de leur délivrer un titre de séjour, leur a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel ils sont susceptibles d'être reconduits d'office. Par les jugements attaqués du 7 novembre 2023, dont les intéressés interjettent appel, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de ces décisions.
Sur la jonction :
2. Les requêtes susvisées de M. et Mme D... présentent à juger des questions semblables. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.
Sur la légalité des refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien : " Les ressortissants algériens visés à l'article 7 peuvent obtenir un certificat de résidence de dix ans s'ils justifient d'une résidence ininterrompue en France de trois années. Il est statué sur leur demande en tenant compte des moyens d'existence dont ils peuvent faire état, parmi lesquels les conditions de leur activité professionnelle et, le cas échéant, des justifications qu'ils peuvent invoquer à l'appui de leur demande. / Le certificat de résidence valable dix ans, renouvelé automatiquement, confère à son titulaire le droit d'exercer en France la profession de son choix, dans le respect des dispositions régissant l'exercice des professions réglementées. / Le certificat de résidence valable dix ans est délivré de plein droit sous réserve de la régularité du séjour pour ce qui concerne les catégories visées au a), au b), au c) et au g) : / (...) / b) À l'enfant algérien d'un ressortissant français si cet enfant a moins de vingt et un ans ou s'il est à la charge de ses parents, ainsi qu'aux ascendants d'un ressortissant français et de son conjoint qui sont à sa charge (...). "
4. L'autorité administrative, lorsqu'elle est saisie d'une demande tendant à la délivrance d'un certificat de résidence au bénéfice d'un ressortissant algérien qui fait état de sa qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français, peut légalement fonder sa décision de refus sur la circonstance que l'intéressé ne saurait être regardé comme étant à la charge de son descendant, dès lors qu'il dispose de ressources propres, que son descendant de nationalité française ne pourvoit pas régulièrement à ses besoins, ou qu'il ne justifie pas des ressources nécessaires pour le faire.
5. M. et Mme D... soutiennent qu'ils sont à la charge de leur fils, ressortissant français résidant en France. Toutefois, il est constant que la pension de retraite perçue par M. D..., d'un montant mensuel de 19 462,68 dinars n'est que légèrement inférieure au montant du salaire national minimum garanti algérien fixé, depuis le 1er juin 2020, à 20 000 dinars par mois. Il n'est par ailleurs pas démontré que les époux D... ne disposent pas ainsi de ressources propres d'un montant suffisant pour leur assurer une indépendance financière et assurer leurs besoins en Algérie, dès lors notamment que les charges dont ils ont justifié s'établissent à un montant mensuel moyen de 16 154 dinars. Par ailleurs, en se bornant à produire la copie du relevé d'opérations bancaires de leur fils faisant apparaître des retraits bancaires effectués au cours de l'année 2021 sur le compte de ce dernier, sans que le bénéficiaire de ces retraits ne soit identifiable, ainsi que cinq ordres de virement d'un montant total de 4 500 euros au titre de l'année 2020 et de 4 500 euros au titre de l'année 2021 au bénéfice de Mme D..., ils n'établissent pas que leur fils pourvoyait régulièrement à leurs besoins avant leur entrée en France. Dans ces conditions, quand bien même le fils de nationalité française de M. et Mme D... disposerait des ressources et d'un logement lui permettant de prendre en charge ses parents, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées de l'article 7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié doit être écarté.
6. En deuxième lieu, les requérants font valoir que la préfète du Rhône aurait commis une erreur de fait en considérant qu'ils n'avaient pas sollicité la délivrance de visas " ascendant à charge " et que les justificatifs produits à l'appui de leurs demandes n'étaient pas suffisamment probants pour attester de la réalité des virements bancaires réalisés au titre de l'année 2021. Cependant, ces erreurs de fait, à les supposer établies, sont sans incidence sur la légalité des décisions contestées dès lors qu'il résulte de ce qui précède qu'ils ne remplissent pas les conditions prévues au b) de l'article 7 bis de l'accord franco-algérien pour la délivrance d'un certificat de résidence en qualité d'ascendant à charge.
7. En troisième lieu, il résulte de ce qui précède que la préfète du Rhône n'était pas tenue de soumettre le cas de M. et Mme D... à la commission du titre de séjour préalablement à l'édiction des décisions leur refusant la délivrance d'un titre de séjour, dès lors qu'ils ne remplissent pas les conditions prévues par les stipulations de l'article 7 bis b) précitées de l'accord franco-algérien.
8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".
9. M. et Mme D..., qui résidaient en France depuis un peu plus d'un an à la date des arrêtés attaqués, font valoir qu'ils sont hébergés chez leur fils de nationalité française qui subvient à leurs besoins et qu'ils ont désormais fixés le centre de leurs intérêts matériels et moraux en France. Cependant, ils ne justifient pas être dépourvus de toutes attaches personnelles et familiales en Algérie où ils ont vécu jusqu'à l'âge de 69 et 63 ans et où résident trois autres de leurs enfants. Dans ces conditions, ils ne sont pas fondés à soutenir que le centre de leurs intérêts privés et familiaux se situerait en France. En conséquence, la préfète du Rhône n'a pas porté à leur droit au respect de leur vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en leur refusant la délivrance d'un titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
10. En cinquième lieu, il résulte de ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que la préfète du Rhône n'aurait pas procédé à un examen particulier de leur situation personnelle ou qu'elle aurait entaché les décisions litigieuses d'une erreur manifeste d'appréciation.
Sur la légalité des décisions portant obligation de quitter le territoire français :
11. En premier lieu, compte-tenu de ce qui a été dit précédemment, M. et Mme D... ne sont pas fondés à exciper de l'illégalité des décisions portant refus de séjour les concernant au soutien de leurs conclusions à fin d'annulation dirigées contre les décisions portant obligation de quitter le territoire français.
12. En second lieu et en l'absence de tout autre argument, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 9 du présent arrêt.
Sur la légalité des décisions fixant le délai de départ volontaire et le pays de renvoi :
13. Compte-tenu de ce qui a été précédemment exposé, les requérants ne sont pas fondés à se prévaloir de ce que les décisions fixant le délai de départ et le pays de destination seraient dépourvues de base légale à raison de l'illégalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français.
14. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par les jugements attaqués, le tribunal administratif de Lyon a rejeté leurs demandes Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme D... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à Mme A... B... épouse D... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 23LY03574-23LY03658