Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Pompes funèbres régionales et marbrerie funéraire Jean-Luc et Jean-Jacques A... (PFRM A...) a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler la convention du 10 décembre 2020 confiant à la société OGF l'exploitation du funérarium de la commune de ....
Par une ordonnance n° 2101490 du 3 mars 2021, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande comme étant manifestement irrecevable, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour avant cassation :
Par une requête et des mémoires enregistrés les 8 mars, 17 juin et 2 novembre 2021 et un mémoire récapitulatif, produit en application de l'article R. 611-8-1, enregistré le 22 février 2022, la société roannaise d'immobilier, venue aux droits de la société PFRM A..., représentée par Me Vivien, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2101490 du 3 mars 2021 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon ;
2°)°à titre principal, d'annuler la convention du 10 décembre 2020 confiant à la société OGF l'exploitation du funérarium de la commune de ... ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler les articles de cette convention portant atteinte à son droit de propriété, notamment les articles 2 et 22 et les annexes 1 et 2 ;
4°) à titre infiniment subsidiaire de résilier la convention pour l'avenir ;
5°) de mettre à la charge de la commune de ... la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le premier juge a omis de répondre aux arguments relatifs à l'existence d'un intérêt à agir en procédant à une analyse erronée de ses écritures ; il n'a pas répondu au moyen tiré de sa qualité de concurrent évincé ;
- il a statué en méconnaissance du principe d'impartialité en se prononçant, par l'ordonnance attaquée, pour la seconde fois sur la question de la qualification du contrat conclu en 1988 et sur la question de la propriété du funérarium ;
- elle est lésée de manière suffisamment directe et certaine par le contrat litigieux, à tout le moins certaines de ses clauses, et, compte tenu de l'appropriation irrégulière de ses biens par la commune de ..., a été empêchée de participer à la procédure de passation de la convention litigieuse ; sa requête est donc parfaitement recevable ;
- le contenu de la convention litigieuse est illicite car il porte atteinte à son droit de propriété.
Par des mémoires en défense enregistrés 26 avril et 1er septembre 2021 et un mémoire récapitulatif, produit en application de l'article R. 611-8-1, enregistré le 14 février 2022, la commune de ... conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 4 000 euros soit mise à la charge de la société roannaise d'immobilier au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- l'ordonnance n° 2101490 du 3 mars 2021 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon n'est entaché d'aucune irrégularité ;
- la société requérante ne justifie d'aucun intérêt pour agir et par suite sa requête est irrecevable ;
- aucun des moyens soulevés n'est de nature à remettre en cause la validité de la convention du 10 décembre 2020.
Par un arrêt n° 20LY03323 du 21 juillet 2022, la cour administrative d'appel de Lyon a rejeté la requête de la société roannaise d'immobilier.
Par une décision n° 467684 du 16 février 2024, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt précité et a renvoyé l'affaire à la cour où elle a été enregistrée sous le n° 24LY00428.
Procédure devant la cour après cassation :
Par des mémoires enregistrés les 18 mars et 17 juillet 2024, la société roannaise d'immobilier, venue aux droits de la société PFRM A..., représentée par Me Vivien, demande à la cour :
1°) d'annuler l'ordonnance n° 2101490 du 3 mars 2021 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon ;
2°)°à titre principal, d'annuler la convention du 10 décembre 2020 confiant à la société OGF l'exploitation du funérarium de la commune de ... ;
3°) à titre subsidiaire, d'annuler les articles de cette convention portant atteinte à son droit de propriété, notamment les articles 2 et 22 et les annexes 1 et 2 ;
4°) à titre infiniment subsidiaire de résilier la convention pour l'avenir ;
5°) de mettre à la charge de la commune de ... la somme de 10 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le premier juge a omis de répondre aux arguments relatifs à l'existence d'un intérêt à agir en procédant à une analyse erronée de ses écritures ; il n'a pas répondu au moyen tiré de sa qualité de concurrent évincé ;
- il a statué en méconnaissance du principe d'impartialité en se prononçant, par l'ordonnance attaquée, pour la seconde fois sur la question de la qualification du contrat conclu en 1988 et sur la question de la propriété du funérarium ;
- elle est lésée de manière suffisamment directe et certaine par le contrat litigieux, à tout le moins certaines de ses clauses et, compte tenu de l'appropriation irrégulière de ses biens par la commune de ..., a été empêchée de participer à la procédure de passation de la convention litigieuse ; sa requête est donc parfaitement recevable ;
- l'objet et le contenu de la convention litigieuse sont illicites car ils portent atteinte à son droit de propriété tel que garanti par la Constitution et par l'article 1er du premier protocole de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire en défense enregistré le 5 juin 2024 et un mémoire enregistré le 29 août 2024 qui n'a pas été communiqué, la commune de ..., représentée la SELARL BLT Droit Public agissant par Me Lalanne, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 5 000 euros soit mise à la charge de la société roannaise d'immobilier sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par une ordonnance du 10 juillet 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 2 septembre 2024 à 16h30.
Un mémoire, enregistré le 27 septembre 2024, a été enregistré pour la société roannaise d'immobilier.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vergnaud, première conseillère,
- les conclusions de Mme Cottier, rapporteure publique,
- et les observations de Me Vivien, représentant la société roannaise d'immobilier et Me Brand, représentant la commune de ....
Considérant ce qui suit :
1. La société Pompes funèbres régionales roannaises A... (PFRR A...), devenue en 1997 la société Pompes funèbres régionales et marbrerie funéraire Jean-Luc et Jean-Jacques A... (PFRM A...), a acquis, le 10 juin 1988 de la commune de ..., un terrain situé 1 route de Briennon à ... pour construire un bâtiment destiné pour partie à abriter son activité commerciale de pompes funèbres et pour partie des locaux d'habitation. Le 27 décembre 1988, elle a conclu avec la commune de ... une convention pour l'exploitation, dans ces mêmes locaux, d'une A... pour une durée de vingt-cinq ans, avec renouvellement automatique par tacite reconduction pour des périodes de trois années, sauf dénonciation par l'une ou l'autre des parties. En 2019, la commune a mis fin au contrat et, afin d'assurer la continuité du service, a engagé une procédure de passation d'un contrat de concession. Au terme de cette procédure, la société OGF, qui exploitait depuis 1997 le fonds de commerce de pompes funèbres sous l'enseigne PFRR dans les locaux situés 1 route de Briennon à ..., a été retenue et le contrat de concession a été conclu le 10 décembre 2020. La société PFRM A..., désormais dénommée société roannaise d'immobilier, relève appel de l'ordonnance du 3 mars 2021 par laquelle le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon a rejeté comme manifestement irrecevable sa demande tendant à annulation du contrat conclu le 10 décembre 2020 entre la commune de ... et la société OGF.
Sur la régularité de l'ordonnance :
2. Par l'ordonnance attaquée, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon a, sur le fondement du 4° de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, rejeté comme manifestement irrecevable l'action de la société PFRM A... en contestation de la validité du contrat de concession conclu le 10 décembre 2020 par la commune de ... avec la société OGF au motif qu'en se prévalant de l'existence d'un litige l'opposant à la commune relatif aux biens de retour du contrat qu'elle avait elle-même conclu en 1988 avec la commune, que le contrat de concession du 10 décembre 2020 n'avait ni pour objet ni pour effet de régler par lui-même, elle ne justifiait pas avoir été lésée de façon directe et certaine par la conclusion du nouveau contrat de concession. Or, il résulte de l'instruction que par une ordonnance du 6 octobre 2020, devenue définitive, le même magistrat a, en qualité de juge des référés du tribunal administratif de Lyon et à la demande de la commune de ..., enjoint à la société PFRM A... de mettre la A... et les accessoires nécessaires à son fonctionnement à la disposition de la commune après avoir qualifié la convention du 27 décembre 1988 de concession de service public de A... et, en conséquence, qualifié de biens de retour les biens nécessaires à l'exploitation de ce service public. Dans la mesure où, dans le cadre de son recours en contestation de la validité du nouveau contrat de concession conclu le 10 décembre 2020, la société requérante se prévalait, pour justifier de son intérêt à agir, de sa qualité de propriétaire des biens faisant partie de la concession, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon, pour apprécier la recevabilité de ce recours, s'est nécessairement prononcé sur la même question que celle sur laquelle il avait déjà pris position en qualité de juge du référé par ordonnance du 6 octobre 2020. Ainsi, en statuant successivement sur le référé de la commune de ... puis sur le recours de la société PFRM A... en contestation de la validité du nouveau contrat de concession, le président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon a méconnu le principe d'impartialité. L'ordonnance du 3 mars 2021 doit donc être annulée pour ce motif.
3. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande de la société roannaise d'immobilier.
Sur les conclusions relatives au contrat du 10 décembre 2020 :
4. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l'excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d'un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif, susceptible d'être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses, est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles.
5. Saisi ainsi par un tiers dans les conditions définies ci-dessus, de conclusions contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses, il appartient au juge du contrat, après avoir vérifié que l'auteur du recours autre que le représentant de l'Etat dans le département ou qu'un membre de l'organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné se prévaut d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine et que les irrégularités qu'il critique sont de celles qu'il peut utilement invoquer, lorsqu'il constate l'existence de vices entachant la validité du contrat, d'en apprécier l'importance et les conséquences. Ainsi, il lui revient, après avoir pris en considération la nature de ces vices, soit de décider que la poursuite de l'exécution du contrat est possible, soit d'inviter les parties à prendre des mesures de régularisation dans un délai qu'il fixe, sauf à résilier ou résoudre le contrat. En présence d'irrégularités qui ne peuvent être couvertes par une mesure de régularisation et qui ne permettent pas la poursuite de l'exécution du contrat, il lui revient de prononcer, le cas échéant avec un effet différé, après avoir vérifié que sa décision ne portera pas une atteinte excessive à l'intérêt général, soit la résiliation du contrat, soit, si le contrat a un contenu illicite ou s'il se trouve affecté d'un vice de consentement ou de tout autre vice d'une particulière gravité que le juge doit ainsi relever d'office, l'annulation totale ou partielle de celui-ci. Il peut enfin, s'il en est saisi, faire droit, y compris lorsqu'il invite les parties à prendre des mesures de régularisation, à des conclusions tendant à l'indemnisation du préjudice découlant de l'atteinte à des droits lésés.
6. La société Pompes funèbres régionales roannaises A..., devenue la société Pompes funèbres régionales et marbrerie funéraire Jean-Luc et Jean-Jacques A... (PFRM A...) désormais dénommée société roannaise d'immobilier, a conclu avec la commune de ..., le 27 décembre 1988, une convention pour l'exploitation d'une A... sur le territoire de cette commune. Cette convention a pris fin et la commune, pour assurer la continuité du service, a engagé une procédure de passation d'un nouveau contrat de concession. Au terme de cette procédure, à laquelle la société PFRM A... n'a pas candidaté, la société OGF a été retenue et le contrat de concession a été conclu avec cette dernière le 10 décembre 2020. Pour contester le contrat conclu entre la commune de ... et la société OGF, la société requérante soutient que le contrat de concession de service public portant sur la A... conclu le 10 décembre 2020 porte atteinte à son droit de propriété et qu'elle a, dès lors, un objet et un contenu illicite.
7. La société roannaise d'immobilier, venue aux droits de la société PFRM A... faisant valoir de façon suffisamment argumentée sa qualité de propriétaire des biens dont l'exploitation est l'objet du contrat de concession contesté, elle doit être regardée comme justifiant d'un intérêt susceptible d'être lésé de façon suffisamment directe et certaine par ce contrat. Par suite, elle est recevable à former un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles.
8. Dans le cadre d'une concession de service public mettant à la charge du cocontractant les investissements correspondant à la création ou à l'acquisition des biens nécessaires au fonctionnement du service public, l'ensemble de ces biens, meubles ou immeubles, appartient, dans le silence de la convention, dès leur réalisation ou leur acquisition à la personne publique. Le contrat peut attribuer au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des ouvrages qui, bien que nécessaires au fonctionnement du service public, ne sont pas établis sur la propriété d'une personne publique, ou des droits réels sur ces biens, sous réserve de comporter les garanties propres à assurer la continuité du service public, notamment la faculté pour la personne publique de s'opposer à la cession, en cours de concession, de ces ouvrages ou des droits détenus par la personne privée. A l'expiration de la convention, les biens qui sont entrés, en application de ces principes, dans la propriété de la personne publique et ont été amortis au cours de l'exécution du contrat font nécessairement retour à celle-ci gratuitement, sous réserve des clauses contractuelles permettant à la personne publique, dans les conditions qu'elles déterminent, de faire reprendre par son cocontractant les biens qui ne seraient plus nécessaires au fonctionnement du service public. Le contrat qui accorde au concessionnaire, pour la durée de la convention, la propriété des biens nécessaires au service public autres que les ouvrages établis sur la propriété d'une personne publique, ou certains droits réels sur ces biens, ne peut, sous les mêmes réserves, faire obstacle au retour gratuit de ces biens à la personne publique en fin de concession. Lorsque la convention arrive à son terme normal ou que la personne publique la résilie avant ce terme, le concessionnaire est fondé à demander l'indemnisation du préjudice qu'il subit à raison du retour des biens à titre gratuit dans le patrimoine de la collectivité publique, en application des principes énoncés ci-dessus, lorsqu'ils n'ont pu être totalement amortis, soit en raison d'une durée du contrat inférieure à la durée de l'amortissement de ces biens, soit en raison d'une résiliation à une date antérieure à leur complet amortissement. Les règles énoncées ci-dessus trouvent également à s'appliquer lorsque le cocontractant de l'administration était, antérieurement à la passation de la concession de service public, propriétaire de biens qu'il a, en acceptant de conclure la convention, affectés au fonctionnement du service public et qui sont nécessaires à celui-ci. Une telle mise à disposition emporte le transfert des biens dans le patrimoine de la personne publique dans les conditions qui ont été indiquées. Elle a également pour effet, quels que soient les termes du contrat sur ce point, le retour gratuit de ces biens à la personne publique à l'expiration de la convention, dans les conditions qui ont été indiquées.
9. Il résulte de l'instruction que, par une délibération du 18 décembre 1987, le conseil municipal de la commune de ... a décidé, compte tenu des besoins locaux, de la création d'un service communal de A... et a posé le principe de sa délégation à la SARL Pompes funèbres régionales roannaises A..., devenue ultérieurement, par changement de dénomination sociale, la SARL Pompes funèbres et Marbrerie funéraire Jean-Luc et Jean-Jacques A..., désormais dénommée société roannaise d'immobilier. Le terrain d'assiette envisagé, qui appartenait à la commune, a été vendu à la société préalablement à l'opération par acte de vente signé le 10 juin 1988. Cet acte de vente comporte une clause au terme de laquelle l'acquéreur déclare qu'il s'est notamment engagé à construire une A... et qu'il justifiera, dans un délai de quatre ans, de la réalisation des travaux et de leur affectation. La commune de ... et la société ont ensuite conclu, le 27 décembre 1988, une " convention pour l'exploitation d'une A... ". Son préambule rappelle que la commune a décidé la création d'une telle installation, " en application des décrets du 27 avril 1889 et 31 décembre 1941, modifiés par les décrets 68/28 du 2 janvier 68, 76/435 du 18 mai 1976 et du 29 décembre 1986 " et précise que l'entreprise " est autorisée à réaliser cet ensemble dit A... dans des locaux lui appartenant et comprenant : / * une A... répondant à la définition de l'article 5 du décret du 27 avril 1889 / * un dépôt mortuaire et une salle pouvant recevoir sans obligation d'usage pour les familles, les corps avant ou après la mise en bière ". L'article 1er prévoit que " la commune de ... concède aux Pompes Funèbres Régionales Roannaises, qui l'acceptent, le droit d'assurer sur son territoire la gestion d'une A... répondant aux définitions de l'article 5 du décret du 27 avril 1889 et du 29 décembre 1986 pour une durée de 25 années ". L'article 2 prévoit que " Le concessionnaire s'engage à aménager cette A... sur la commune, à l'adresse ci-après : 1 route de Briennon - ... ". L'article 4 rappelle que : " L'aménagement de la A... sera réalisé conformément au projet proposé et accepté par le conseil municipal de ..., aux frais, risques et périls des Pompes Funèbres Régionales Roannaises (...) ". L'article 5 indique que : " Les Pompes Funèbres Régionales Roannaises assureront la gestion de la A... pendant une durée de 25 ans, à compter de sa mise en service ", l'article 6 prévoyant la possibilité d'une reconduction par périodes de trois ans. Les articles 9 et 10 prévoient la gratuité du service pour les indigents et pour la commune s'agissant des admissions ordonnées par une autorité publique. L'article 11 prévoit que le service est ouvert à la demande des familles et des autorités publiques et que " le concessionnaire (...) poursuivra le recouvrement auprès des tiers intéressés ". Enfin, l'article 7 stipule qu'" A l'expiration de la concession et en cas de non renouvellement, les terrains et bâtiments aménagés par les Pompes Funèbres Régionales Roannaises demeureront propriété exclusive de l'entreprise ; la Commune pourra : / * soit demander le transfert des équipements nécessaires au fonctionnement de la A... dans les locaux agréés lui appartenant / * soit prendre disposition des bâtiments et équipements, par priorité de rachat ou de location vis-à-vis du concessionnaire ou de tout nouveau propriétaire en cas de décès du concessionnaire ou de cession de l'entreprise. / Les conditions seront déterminées en accord avec le concessionnaire, ou ses ayants-droits, ou son successeur. A défaut d'accord, les conditions seront déterminées par des experts désignés à raison d'un expert par chacune des 2 parties et si ces 2 experts ne peuvent se mettre d'accord, d'un troisième expert désigné par le Président du Tribunal administratif pour les départager ". Un avenant n° 1 du 24 juin 1989 a défini un mécanisme similaire en cas de résiliation.
10. En premier lieu, il résulte sans équivoque des éléments qui précèdent, et notamment des stipulations susmentionnées comme de l'économie générale du contrat, que la commune de ... a entendu instituer sur son territoire un service public de A..., au sens des dispositions citées dans le contrat et des dispositions actuelles de l'article L. 2223-19 et des articles R. 2223-67 et suivants du code général des collectivités territoriales, qu'elle a confié la réalisation des équipements nécessaires à ce service public ainsi que leur exploitation à la SARL Pompes funèbres régionales roannaises A..., devenue ultérieurement, par changement de dénomination sociale, la SARL Pompes funèbres et Marbrerie funéraire Jean-Luc et Jean-Jacques A... puis société roannaise d'immobilier. Ainsi, le contrat du 27 décembre 1988 a la nature d'un contrat de concession de service public de A... et, en conséquence des principes énoncés au point 8, les stipulations de son article 7 doivent être interprétées comme impliquant, que les locaux et équipements réalisés dans ce cadre par le concessionnaire pour l'exploitation de ce service public, dans la mesure ils sont nécessaires à sa continuité et alors même qu'ils se situent sur un terrain dont il est propriétaire, doivent faire retour à la commune au terme du contrat, quel qu'en soit le motif ou la date, y compris en cas de désaccord sur les conditions de ce retour.
11. Il résulte de l'instruction que l'objet et le contenu du contrat de concession du 10 décembre 2020 contesté, vise à déléguer le service de gestion et d'exploitation de la A... de la commune à la société OGF dans le strict périmètre des biens et équipements décrits en annexe 1 et 2 de ce contrat, dont il n'est pas contesté qu'ils correspondent aux biens et équipements nécessaires à cette exploitation, et qui, au terme du précédent contrat, ont été intégrés dans le patrimoine de la commune. Dans ces conditions, la société requérante n'est pas fondée à invoquer son droit de propriété à l'appui de ses conclusions aux fins d'annulation du contrat.
12. Il résulte de ce qui vient d'être dit que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que l'article 2 du contrat du 10 décembre 2020, portant sur le périmètre du service, ou ses annexes 1 et 2, qui pour la première décrit les bâtiments objet de la concession, à savoir un ensemble immobilier de 200 m2 comportant une salle technique, 5 salons et un espace d'accueil, et la seconde les éléments mobiliers nécessaires à l'exploitation et au fonctionnement du service public de A... dans sa partie technique comme dans sa partie accueil du public, porterait atteinte à son droit de propriété.
13. L'article 22 de la convention a uniquement pour objet de déterminer les travaux d'entretien et de maintenance à la charge du délégataire et ceux restant à la charge du déléguant. L'article 22.4 du contrat contesté prévoit que les travaux touchant au clos et au couvert, incombant au propriétaire au sens des dispositions de l'article 606 du Code civil, à savoir les travaux de renouvellement et de grosse réparation portant sur les structures porteuses du bâtiment, fondation, set, cuvelages, couvertures, charpentes, façades, menuiseries extérieures, poteaux, dalles, espaces extérieurs, demeurent à la charge de l'Autorité délégante. Ces dispositions, contrairement à ce que soutient la requérante, se bornent ainsi à prévoir que ces travaux resteront à la charge financière de la commune et n'impliquent pas qu'ils soient réalisés, sur les parties des bâtiments dont la requérante est propriétaire, sans l'accord de cette dernière. Par suite, ces dispositions ne portent pas atteinte au droit de propriété de la requérante et elle n'est pas fondée à en demander l'annulation.
14. Il résulte de tout ce qui précède que l'ensemble des conclusions de la société roannaise d'immobilier présentée à l'encontre du contrat de concession du service public de chambre funéraires de la commune de ... du 10 décembre 2020 doivent être rejetées.
Sur les frais d'instance :
15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de ..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la société roannaise d'immobilier demande au titre des frais liés à l'instance. Dans les circonstances de l'espèce, les conclusions présentées par la commune sur le même fondement doivent également être rejetées.
DECIDE :
Article 1er : L'ordonnance n° 2101490 du 3 mars 2021 du président de la 3ème chambre du tribunal administratif de Lyon est annulée.
Article2 : Le surplus des conclusions de première instance et d'appel de la société roannaise d'immobilier, venue aux droits de la société Pompes funèbres régionales et marbrerie funéraire Jean-Luc et Jean-Jacques A..., est rejeté.
Article 3 : Les conclusions de la commune de ... présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société roannaise d'immobilier, à la commune de ... et à la société OGF.
Délibéré après l'audience du 18 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Gros, premier conseiller,
Mme Vergnaud, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 novembre 2024.
La rapporteure,
E. Vergnaud
Le président,
F. Pourny
La greffière,
N. Lecouey
La République mande et ordonne au préfet de la Loire, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition,
La greffière,
2
N° 24LY00428