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19/12/2024 | FRANCE | N°24LY01673

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 5ème chambre, 19 décembre 2024, 24LY01673


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 24 novembre 2023 de la préfète du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.



Par un jugement n° 2311154 du 21 mai 2024, ce tribunal a rejeté sa demande.



Procédure devant la cour



Par une requête enregi

strée le 11 juin 2024 M. C..., représenté par Me Sabatier, demande à la cour :



1°) d'annuler ce jugement et ce...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

M. A... C... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 24 novembre 2023 de la préfète du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.

Par un jugement n° 2311154 du 21 mai 2024, ce tribunal a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 11 juin 2024 M. C..., représenté par Me Sabatier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement et ces décisions ;

2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône, sous astreinte de 100 euros par jour de retard passé le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" ou "salarié" ou, à tout le moins, de réexaminer sa situation ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 200 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué qui ne statue pas sur les conclusions avant dire droit de sa demande est irrégulier ;

- la décision portant refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée et a été prise sans examen particulier de sa situation ;

- la préfète a méconnu les articles L. 423-23 et L. 425-9 et le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant ;

- elle a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa situation ne répondait pas à des motifs exceptionnels justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ volontaire sont illégales en conséquence des illégalités successives invoquées.

La requête a été communiquée à la préfète du Rhône qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale des droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Le rapport de Mme B... ayant été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant nigérian, est entré irrégulièrement en France le 14 mai 2019. Il a bénéficié d'une carte de séjour temporaire pour raisons de santé valable du 9 août 2021 au 08 août 2022 dont il a demandé le renouvellement le 12 septembre 2022. Le 19 juillet 2023, il a complété sa demande en sollicitant, à titre subsidiaire, la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" sur le fondement des articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il relève appel du jugement du 21 mai 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 24 novembre 2023 de la préfète du Rhône portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixation du pays à destination duquel il pourra être éloigné d'office.

Sur la régularité du jugement :

2. Le juge administratif, qui dirige seul l'instruction, n'est pas tenu, à peine d'irrégularité de sa décision, de viser des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de produire dans l'instance, dans le cadre de l'instruction de l'affaire, diverses pièces, ni de motiver son choix de procéder ou non à une telle mesure d'instruction. Le tribunal qui, à juste titre, a estimé inutile compte tenu des éléments dont il disposait, de requérir la production du rapport médical adressé au collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), n'a pas entaché son jugement d'omission à statuer sur de prétendues conclusions avant-dire droit. Au demeurant, rien ne faisait obstacle à ce que M. C... demande lui-même ce rapport à l'OFII pour le produire à l'instance s'il l'estimait utile.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an. La condition prévue à l'article L. 412-1 n'est pas opposable. / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. / (...). ". Aux termes de l'article L. 611-3 du même code : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : / (...) / 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. / (...). ".

4. Le collège de médecins de l'OFII a estimé, dans son avis du 21 février 2023, que l'état de santé de M. C..., qui est atteint d'une hépatite B chronique pour laquelle lui est prescrit un traitement antiviral associé à une surveillance biologique trimestrielle et échographique semestrielle, nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé au Nigeria, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. En se bornant à se référer au certificat type d'un gastro-entérologue d'un hôpital lyonnais et au rapport médical de deux médecins du centre hospitalier universitaire de Bénin City qu'il a produits en première instance pour affirmer le caractère strict du traitement antiviral qui lui est prescrit en France, M. C... n'établit pas l'indisponibilité au Nigeria du traitement nécessaire au contrôle de son hépatite B. Les moyens tirés de ce que la préfète du Rhône a méconnu l'article L. 425-9 et le 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, doivent, dès lors, être écartés.

5. Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / (...). ".

6. Compte tenu de la durée du séjour en France de M. C..., de ce qu'il a vécu au Nigeria jusqu'à l'âge de 29 ans, de l'absence d'obstacle à ce qu'il reconstitue dans ce pays la cellule familiale qu'il forme avec une compatriote, également en situation irrégulière sur le territoire français à la date des décisions contestées, dont la légalité s'apprécie à la date à laquelle elles ont été prises, et leurs deux enfants nés en 2020 et 2023 et de ce qu'il n'a été autorisé à travailler que pendant la période de validité de la carte de séjour temporaire qui lui avait été délivrée pour raisons de santé puis pendant la période d'instruction de sa demande de renouvellement de son titre de séjour, la préfète du Rhône n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français. Elle n'a donc pas méconnu l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Elle n'a pas davantage méconnu l'intérêt supérieur de ses très jeunes enfants, protégé par le 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, en rejetant sa demande de titre de séjour.

7. Aux termes du premier alinéa de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. ".

8. M. C... s'est prévalu dans son courrier du 19 juillet 2023 de sa situation familiale et de son contrat de travail à durée déterminée d'insertion, qui avait débuté le 13 juin 2022 et avait été renouvelé le 13 juin 2023. Ces éléments, eu égard à ce qui a dit au point 6, ne caractérisent pas des circonstances particulières justifiant son admission au séjour au titre de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors au surplus qu'il ne peut utilement soutenir qu'il remplit les critères de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2022, ni que l'emploi d'agent de propreté figure dans une rubrique de la liste des métiers en tension fixée par la décision du 8 avril 2022 du directeur de Pôle emploi régissant les métiers éligibles pour le bénéfice de la rémunération de fin de formation. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète a commis une erreur manifeste d'appréciation en estimant que sa situation ne répondait pas à des motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article l. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. Pour le surplus, il y a lieu, par adoption des motifs retenus par les premiers juges aux points 3 du jugement attaqué, d'écarter les moyens tirés de ce que la décision portant refus de titre de séjour n'est pas suffisamment motivée et a été prise sans examen particulier de la situation de M. C....

8. Compte tenu de ce qui précède, les décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixation du délai de départ volontaire et du pays de renvoi ne sont pas illégales en conséquence des illégalités successives invoquées.

9. Il suit de là que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Sa requête doit être rejetée, en toutes ses conclusions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... C... et au ministre de l'Intérieur.

Copie sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

Mme Céline Michel, présidente de chambre,

Mme Camille Vinet, présidente-assesseure,

M. Philippe Moya, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 décembre 2024.

La présidente-rapporteure,

C. B... La présidente-assesseure

C. Vinet

La greffière,

F. Bossoutrot

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01673
Date de la décision : 19/12/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière - Légalité externe.


Composition du Tribunal
Président : Mme MICHEL
Rapporteur ?: Mme Céline MICHEL
Rapporteur public ?: Mme LE FRAPPER
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU & SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 29/12/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-12-19;24ly01673 ?
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