Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Grenoble de condamner la commune de Glières-Val-de-Borne à lui verser la somme de 11 400 euros en réparation du préjudice subi du fait de l'abattage d'arbres situés sur un terrain lui appartenant.
Par jugement n° 2000735 du 26 décembre 2022, le tribunal a rejeté cette demande et mis à sa charge la somme de 1 500 euros à verser à la commune au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour
Par requête enregistrée le 23 février 2023 et mémoire enregistré le 30 août 2024, Mme B..., représenté par la SELARL Legi Rhône-Alpes, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) de condamner la commune de Glières-Val-de-Borne à lui verser la somme de 16 150 euros ;
3°) de mettre à la charge de cette dernière la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Elle soutient que :
- la commune ne justifie pas l'existence d'un danger grave et imminent lui permettant de faire usage de l'article L. 2212-4 du code général des collectivités territoriales ;
- cette faute lui a causé un préjudice de 11 400 euros correspondant au devis d'enlèvement des douze arbres abattus et leur replantation ;
- sa propriété s'est dévalorisée à hauteur de 4 500 euros et la valeur du bois perdu s'élève à 250 euros.
Par mémoire enregistré le 20 novembre 2023, la commune de Glières-Val-de-Borne, représentée par la SELARL Philippe Petit et associés, conclut au rejet de la requête et demande que soit mise à la charge de Mme B... la somme de 3 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle expose :
- qu'elle n'a pas commis de faute ;
- que les préjudices invoqués ne sont pas justifiés ;
- que toute indemnisation doit être exprimée hors taxe.
En application des articles R. 613-1 et R. 613-3 du code de justice administrative la clôture de l'instruction a été fixée au 6 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Bertrand Savouré ;
- les conclusions de Mme Christine Psilakis ;
- et les observations de Me Villard représentant la commune de Glières-Val-de-Borne ;
Vu la note en délibéré enregistrée pour la commune de Glières-Val-de-Borne, le 13 décembre 2024 ;
Considérant ce qui suit :
1. Mme B... est propriétaire indivise d'une bande de terrain arboré le long d'un chemin desservant sa propriété côté ouest et bordant la rive du Borne côté est. Ayant estimé que certains arbres non entretenus étaient soumis à un risque de chute, le maire de Glières-Val-de-Borne a fait procéder par les services communaux à l'abattage de douze arbres. Mme B... relève appel du jugement du 26 décembre 2022 par lequel le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande tendant à ce que la commune de Glières-Val-de-Borne soit condamnée à lui verser la somme de 11 400 euros.
2. Aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : (...) 5° Le soin de prévenir, par des précautions convenables (...) les accidents (...) tels que (...) les éboulements de terre ou de rochers, les avalanches ou autres accidents naturels (...) ". Aux termes de l'article L. 2212-4 du même code : " En cas de danger grave ou imminent, tel que les accidents naturels prévus au 5° de l'article L. 2212-2, le maire prescrit l'exécution des mesures de sûreté exigées par les circonstances (...) ". Les dispositions précitées autorisent le maire, en cas de danger grave ou imminent, à ordonner l'exécution de travaux sur une propriété privée en les faisant réaliser par la commune.
3. Aux termes de l'article L. 2212-2 du même code : " Dans l'hypothèse où, après mise en demeure sans résultat, le maire procéderait à l'exécution forcée des travaux d'élagage destinés à mettre fin à l'avance des plantations privées sur l'emprise des voies sur lesquelles il exerce la police de la circulation en application de l'article L. 2213-1 afin de garantir la sûreté et la commodité du passage, les frais afférents aux opérations sont mis à la charge des propriétaires négligents ".
4. Si la commune fait valoir que la parcelle sur laquelle se situaient les arbres se trouve en zone d'aléa fort à modéré de débordement torrentiel et d'instabilité de la berge et est bordée d'un chemin de randonnée utilisé fréquemment, elle ne produit aucune pièce au soutien de ses allégations, contestées pour la première fois en appel, suivant lesquelles les arbres en litige, non entretenus ni élagués, auraient été exposés à un sérieux risque de chute. Si elle évoque la sécurité des riverains et des passants, il ne résulte pas de l'instruction que ces derniers aient été exposés à un danger grave ou imminent ni que Mme B... ait été mise en demeure de procéder à l'élagage, conformément à l'article L. 2212-2 précité. Dans ces conditions, Mme B... est fondée à soutenir que le maire de Glières-Val-de-Borne a commis une faute.
5. Il résulte du devis établi par un exploitant forestier, produit par Mme B..., que l'enlèvement des douze arbres et leur replantation ainsi que le nettoyage complet des lieux lui fera exposer des frais de 11 400 euros. La commune de Glières-Val-de-Borne ne conteste pas sérieusement ce devis en se bornant à invoquer le fait que son auteur est un conseiller municipal d'opposition, à critiquer son caractère sommaire et à opposer des tarifs moyens de transport de grumes de bois collectés sur des sites internet. Dès lors qu'il ne résulte pas de l'instruction que Mme B... soit assujettie à la taxe sur la valeur ajoutée, elle est fondée à demander l'indemnisation de cette somme pour son montant toute taxe comprise.
6. En revanche, la requérante n'établit pas que ces travaux auraient entrainé une perte de valeur vénale de sa parcelle ni qu'il existe un quelconque obstacle à ce que le bois, estimé à 250 euros, puisse être valorisé.
7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Grenoble a rejeté sa demande et à demander que la commune de Glières-Val-de-Borne soit condamnée à lui verser la somme de 11 400 euros.
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par la commune de Glières-Val-de-Borne. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette dernière le versement d'une somme de 2 000 euros à Mme B..., en application de ces mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 2000735 du tribunal administratif de Grenoble du 26 décembre 2022 est annulé.
Article 2 : La commune de Glières-Val-de-Borne est condamnée à verser à Mme B... la somme de 11 400 euros.
Article 3 : La commune de Glières-Val-de-Borne versera à Mme B... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejetée.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... et à la commune de Glières-Val-de-Borne.
Délibéré après l'audience du 12 décembre 2024 où siégeaient :
M. Philippe Arbarétaz, président de chambre,
Mme Aline Evrard, présidente-assesseure,
M. Bertrand Savouré, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.
Le rapporteur,
B. SavouréLe président,
Ph. Arbarétaz
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
2
N° 23LY00728