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16/01/2025 | FRANCE | N°24LY00500

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 4ème chambre, 16 janvier 2025, 24LY00500


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure



Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er août 2023 par lesquelles la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour pendant une durée d'une année.



Par un jugement n° 2307309 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Lyon a r

ejeté sa demande.





Procédure devant la cour



Par une requête enregistrée le 22 février 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure

Mme C... B... épouse A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er août 2023 par lesquelles la préfète de l'Ain a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour pendant une durée d'une année.

Par un jugement n° 2307309 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour

Par une requête enregistrée le 22 février 2024, Mme A..., représentée par Me Sabatier, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement ;

2°) d'annuler ces décisions la concernant ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain, d'une part, de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", subsidiairement, de réexaminer sa situation, dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, d'autre part, d'effacer son signalement dans le système d'information Schengen aux fins de non-admission ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1200 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le refus de séjour méconnaît les articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les articles 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour, elle méconnaît les articles 8 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la fixation du délai de départ volontaire est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour et entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- l'interdiction de retour sur le territoire français est illégale par voie de conséquence de l'illégalité du refus de séjour ; la préfète ne pouvait se fonder sur une précédente obligation de quitter le territoire français laquelle a été effacée des fichiers en application de l'article R. 142-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; elle est entachée d'erreur d'appréciation.

La préfète de l'Ain a produit un mémoire, enregistré le 27 juin 2024, par lequel elle conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

Le président de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

A été entendu au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Evrard.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... relève appel du jugement du 1er février 2024 du tribunal administratif de Lyon rejetant sa demande d'annulation des décisions du 1er août 2023 par lesquelles la préfète de l'Ain a rejeté sa demande d'admission au séjour fondée sur les articles L. 423-23 et L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de destination et lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pendant une année.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...) 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales (...) ". Et aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine (...) ".

3. Mme A..., ressortissante albanaise née le 9 août 1983, est entrée en France le 21 avril 2015, selon ses déclarations. Sa demande d'asile a été rejetée, en dernier lieu, par la Cour nationale du droit d'asile le 7 février 2017. Elle n'a jamais été admise au séjour, à l'exception de la période durant laquelle sa demande d'asile a été examinée, et s'est maintenue en France en dépit de la mesure d'éloignement prise à son encontre le 20 mai 2016, sans qu'elle puisse se prévaloir de son droit à l'effacement des données à caractère personnel qui figurent dans le traitement automatisé AGDREF prévu à l'article R. 142-21 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lequel n'entraîne pas la disparition d'une telle mesure ni ne met fin à son caractère exécutoire. Son mari, éloigné du territoire le 2 février 2021, fait l'objet, de la part du préfet de la Haute-Savoie, d'une nouvelle obligation de quitter le territoire français adoptée le 12 juin 2023. Si elle se prévaut d'une promesse d'embauche, elle n'établit pas avoir exercé auparavant une activité professionnelle en France. Enfin, si elle fait état de la scolarisation en France de ses trois enfants, la requérante n'établit pas la réalité et l'intensité des attaches privées et familiales qu'elle aurait nouées sur le territoire, en dépit de la durée de son séjour. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment aux conditions de son séjour en France, la préfète de l'Ain, en refusant de l'admettre au séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français, n'a pas porté au droit de Mme A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ces décisions ont été prises. Il s'ensuit que les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions et stipulations citées au point 2 doivent être écartés. Il n'est pas davantage établi que la préfète de l'Ain aurait entaché ses décisions d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle de l'intéressée.

4. En deuxième lieu, aux termes du 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives (...), l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Aux termes de l'article 16 de cette convention : " 1. Nul enfant ne fera l'objet d'immixtions arbitraires ou illégales dans sa vie privée, sa famille (...) 2. L'enfant a droit à la protection de la loi contre de telles immixtions ou de telles atteintes ".

5. Le refus de titre de séjour et l'obligation de quitter le territoire français en litige n'ont ni pour objet ni pour effet de séparer Mme A... de ses enfants, qui ont vocation à suivre leurs parents en Albanie, pays dont tous les membres du foyer sont ressortissants. Ainsi, il ne ressort d'aucune des pièces du dossier que la préfète de l'Ain n'aurait pas pris en compte l'intérêt supérieur des enfants ni qu'elle se serait immiscée de façon arbitraire ou illégale dans leur vie privée et leur famille en prenant ces décisions. Il suit de là que les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations citées au point 4 doivent être écartés.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "salarié", "travailleur temporaire" ou "vie privée et familiale" (...) ".

7. Eu égard aux éléments dont elle se prévaut, rappelés au point 3, la requérante n'établit pas que son admission au séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir qu'en refusant de l'admettre au séjour à titre exceptionnel, la préfète de l'Ain a méconnu les dispositions citées au point 6 ou entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation.

8. En quatrième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 612-8 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'étranger n'est pas dans une situation mentionnée aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative peut assortir la décision portant obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français (...) ". Aux termes de l'article L. 612-10 de ce code : " Pour fixer la durée des interdictions de retour mentionnées aux articles L. 612-6 et L. 612-7, l'autorité administrative tient compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français. / Il en est de même pour l'édiction et la durée de l'interdiction de retour mentionnée à l'article L. 612-8 (...) ".

9. D'autre part, aux termes l'article R. 142-21 du même code, relatif au traitement automatisé des données à caractère personnel dénommé " Application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France " (AGDREF) : " Tout dossier qui n'a fait l'objet d'aucune mise à jour dans un délai de cinq ans à compter de l'enregistrement des premières données qu'il contient est effacé, sauf dans les cas suivants : / (...) ". Aux termes de l'article R. 142-14 du même code : " Les autres catégories de données à caractère personnel enregistrées dans le traitement mentionné à l'article R. 142-11 sont énumérées à l'annexe 3 ". Aux termes de l'annexe 3 : " C. Données relatives à la procédure d'éloignement : 1° Données relatives à la décision d'éloignement : (...) b) Nature de la décision d'éloignement ; date et numéro ; autorité ayant édicté la décision ; disposition appliquée ".

10. Pour prononcer une interdiction de retour sur le territoire d'un an, la préfète de l'Ain a relevé qu'à la date de la décision litigieuse, Mme A... se prévalait d'une durée de séjour sur le territoire de huit ans, qu'elle avait déjà fait l'objet, le 20 mai 2016, d'une première mesure d'éloignement et qu'elle ne justifiait d'aucune réelle attache privée ou familiale en France, son époux s'y trouvant également en situation irrégulière, elle-même et ses trois enfants mineurs ayant vocation à rejoindre leur pays d'origine.

11. Contrairement à ce que soutient Mme A..., la circonstance que les données relatives à la décision d'éloignement prononcée le 20 mai 2016 ont été effacées, en application des dispositions citées au point 9, ne fait pas obstacle à ce que la préfète de l'Ain se fonde sur cette mesure, qui n'a ni disparu ni été retirée, pour prononcer à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'un an. De même, ni l'ancienneté de cette mesure, ni le fait qu'elle a été prise après le rejet par la Cour nationale du droit d'asile de la demande d'asile qu'elle avait formée ne s'opposent à ce que la préfète en tienne compte pour fixer la durée de cette interdiction. Dans les circonstances de l'espèce, eu égard notamment à l'absence d'attaches privées et familiales intenses en France, et nonobstant l'importante durée de son séjour sur le territoire et l'absence de menace alléguée pour l'ordre public constituée par sa présence, la préfète de l'Ain n'a pas méconnu les dispositions précitées en assortissant le refus de titre de séjour opposé d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée limitée à un an.

12. En dernier lieu, il résulte ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à se prévaloir de l'illégalité du refus de titre de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français à l'appui de ses conclusions dirigées contre les décisions fixant le délai de départ volontaire, le pays de destination et l'interdiction de retour sur le territoire français.

13. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

14. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de Mme A... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte doivent également être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par Mme A....

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... épouse A... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 12 décembre 2024 à laquelle siégeaient :

M. Arbaretaz, président,

Mme Evrard, présidente-assesseure,

Mme Corvellec, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.

La rapporteure,

A. Evrard

Le président,

Ph. Arbarétaz

La greffière,

F. Faure

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière.

2

N° 24LY00500


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY00500
Date de la décision : 16/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ARBARETAZ
Rapporteur ?: Mme Aline EVRARD
Rapporteur public ?: Mme PSILAKIS
Avocat(s) : SELARL BS2A - BESCOU & SABATIER

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-16;24ly00500 ?
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