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16/01/2025 | FRANCE | N°24LY01410

France | France, Cour administrative d'appel de LYON, 6ème chambre, 16 janvier 2025, 24LY01410


Vu la procédure suivante :





Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 31 août 2023 par lesquelles la préfète du Rhône lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.



Par un jugement n° 2308191 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.






Procédure devant la cour :



Par une requête enregistrée le 15 mai 2024, Mme B... A..., représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 31 août 2023 par lesquelles la préfète du Rhône lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2308191 du 1er février 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 15 mai 2024, Mme B... A..., représentée par Me Petit, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2308191 du 1er février 2024 du tribunal administratif de Lyon ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir les décisions du 31 août 2023 par lesquelles la préfète du Rhône lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi ;

3°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer un titre de séjour ou une autorisation provisoire de séjour et de travail, dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros, à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Mme A... soutient que :

- le refus de séjour lui a été opposé sans examen de sa situation ; elle doit être regardée comme ayant progressé dans ses études, sa lenteur s'expliquant par les difficultés qu'elle a rencontrées ; la décision aurait dû mentionner la date de sa convocation pour le dépôt d'une demande de changement de statut en qualité de salarié et est entachée de vice de procédure pour ne pas avoir été reportée en attendant cette nouvelle demande ;

- l'obligation de quitter le territoire français est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour ; elle a été édictée sans examen de sa situation et méconnait son droit d'être entendue faute d'avoir attendu qu'elle dépose une nouvelle demande de séjour en qualité de salarié ;

- la fixation du délai de départ volontaire est illégale en conséquence de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français ; elle est intervenue sans examen de sa situation et le délai aurait dû être reporté jusqu'à la fin de l'année universitaire, reportée au 31 octobre 2023 ;

- la fixation du pays de renvoi est illégale en conséquence de l'illégalité du refus de séjour et de l'obligation de quitter le territoire français.

La préfète du Rhône, régulièrement mise en cause, n'a pas produit.

Par décision du 17 avril 2024, Mme A... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu :

- l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire, relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles, complété par un protocole, deux échanges de lettres et une annexe, modifié, signé à Alger le 27 décembre 1968 ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la directive 2008/115/CE, du 16 décembre 2008, relative aux normes et procédures communes applicables dans les États membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Stillmunkes, président assesseur ;

- et les observations de Me Wiedemann, représentant Mme A....

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante algérienne née le 21 novembre 1994, a demandé au tribunal administratif de Lyon l'annulation des décisions du 31 août 2023 par lesquelles la préfète du Rhône lui a refusé la délivrance d'un certificat de résidence algérien, lui a fait obligation de quitter le territoire français, a fixé à trente jours le délai de départ volontaire et a fixé le pays de renvoi. Par le jugement attaqué du 1er février 2024, le tribunal a rejeté sa demande.

Sur la légalité du refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier et notamment de l'analyse circonstanciée de la situation de Mme A... à laquelle la préfète du Rhône a procédé dans son arrêté qu'elle n'a pas omis d'examiner cette situation.

3. En deuxième lieu, aux termes du titre 3 du protocole annexé à l'accord franco-algérien susvisé : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourse ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de préinscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention " étudiant " ou " stagiaire " (...) ". Il résulte de ces stipulations que le renouvellement des certificats de résidence algériens portant la mention " étudiant " est subordonné, notamment, à la justification par son titulaire de la réalité et du sérieux des études qu'il déclare accomplir.

4. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... est entrée régulièrement en France le 24 août 2017 sous couvert d'un visa de long séjour portant la mention " étudiant " et a bénéficié de la délivrance et du renouvellement d'un titre de séjour portant la même mention. Elle en a sollicité un nouveau renouvellement en juin 2023. A son entrée en France, elle s'est inscrite en troisième année de licence à l'université d'Orléans et a échoué à deux reprises, n'ayant pas assisté aux cours la première année 2017/2018 et ayant eu de très nombreuses absences injustifiées la seconde année 2018/2019. Elle a été admise en première année de master dans un établissement privé pour l'année 2019/2020, au vu d'un diplôme de licence antérieurement obtenu en Algérie. Elle a échoué en première année de master, mais l'établissement a accepté son passage en seconde année de master pour l'année 2020/2021. Elle a toutefois échoué à valider un diplôme pour les années 2020/2021 et 2021/2022. A la date à laquelle la préfète du Rhône s'est prononcée, le 31 août 2023, Mme A... n'avait pas validé de diplôme pour l'année 2022/2023. Si Mme A... fait valoir diverses difficultés personnelles qui ont affecté sa situation, celles-ci ne sont pas de nature à justifier une absence totale de progression durant six années, Mme A... étant entrée en France déjà titulaire d'un diplôme de niveau licence et n'ayant validé aucune année de formation à la date de la décision. C'est dès lors sans erreur d'appréciation que la préfète du Rhône a estimé que les conditions de délivrance d'un nouveau titre de séjour portant la mention " étudiant " n'étaient pas réunies.

5. En troisième lieu, si Mme A... fait valoir qu'elle avait l'intention de déposer une nouvelle demande de titre de séjour en qualité de salarié, cette circonstance ne faisait pas obstacle à ce que la préfète du Rhône statue sur la demande que Mme A... a effectivement déposée en qualité d'étudiant. La préfète du Rhône n'était pour le reste tenue, ni de se prononcer sur une nouvelle demande potentielle qui n'avait pas encore été formalisée, ni d'attendre le dépôt éventuel de cette nouvelle demande. Elle n'était pas davantage tenue de faire état, dans sa décision portant sur la demande présentée en qualité d'étudiant, de la simple éventualité que puisse être déposée une nouvelle demande en qualité de salarié, ce qui était sans portée utile.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

6. En premier lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit sur la légalité de la décision portant refus de séjour que Mme A... n'est pas fondée à exciper de son illégalité.

7. En second lieu, la seule éventualité du dépôt d'une nouvelle demande de délivrance d'un titre de séjour sur un autre fondement ne saurait faire obstacle à ce que l'autorité préfectorale se fonde sur le refus de délivrance d'un titre de séjour opposé à un étranger pour lui faire obligation de quitter le territoire français, dès lors que celui-ci ne se trouve pas dans une situation où la loi ou une convention bilatérale prescrit qu'il se voit délivrer un titre de séjour.

8. Ainsi qu'il a été exposé, Mme A... s'est vu refuser la délivrance du titre de séjour qu'elle avait sollicitée en qualité d'étudiant. Si elle avait indiqué envisager le dépôt d'une nouvelle demande de titre de séjour en qualité de salarié, elle n'y avait pas procédé et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle en aurait rempli les conditions, en l'absence d'autorisation de travail. Par ailleurs, rien ne faisait obstacle à ce qu'elle fournisse à l'autorité préfectorale, dans le cadre de l'examen de son dossier, tout élément qu'elle estimait utile pour compléter le dossier qu'elle avait constitué. Dès lors, la préfète du Rhône, qui n'a pas omis d'examiner la situation de Mme A..., n'a pas davantage méconnu en l'espèce le droit de celle-ci d'être entendue en lui faisant obligation de quitter le territoire français après lui avoir refusé la délivrance d'un titre de séjour, sans attendre le dépôt d'une éventuelle nouvelle demande de séjour.

Sur la légalité de la fixation du délai de départ volontaire :

9. En premier lieu, il résulte de ce qui vient d'être dit sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français que Mme A... n'est pas fondée à exciper de son illégalité.

10. En second lieu, aux termes de l'article L. 612-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger faisant l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de cette décision. / L'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas. / Elle peut prolonger le délai accordé pour une durée appropriée s'il apparaît nécessaire de tenir compte de circonstances propres à chaque cas (...) ".

11. L'arrêté préfectoral en litige, édicté le 31 août 2023, accorde à Mme A... un délai de départ volontaire de trente jours, qui n'est pas incohérent avec le calendrier normal d'une année universitaire, alors en outre, ainsi qu'il a été dit, que le sérieux de ses études n'est en réalité pas établi. Si Mme A... se prévaut d'attestations datées des 23 juin et 11 septembre 2023, cette dernière postérieure à la décision, qui évoquent la possibilité que l'année soit prolongée à titre exceptionnel jusqu'en octobre ou en décembre, dans le cadre d'une procédure de rattrapage ad hoc et en fonction de projets qui seraient définis en octobre, cette prolongation restait éventuelle à la date de la décision et il restait par ailleurs loisible à Mme A... de faire valoir le moment venu de nouveaux éléments, s'ils étaient établis, pour solliciter une prolongation exceptionnelle du délai de départ volontaire qui lui avait été accordé. Ainsi, en n'accordant pas, à la date de sa décision, de délai exceptionnel de départ volontaire au-delà du délai de droit commun de trente jours, la préfète du Rhône n'a entaché sa décision d'aucune erreur manifeste d'appréciation. Elle n'a pas davantage omis d'examiner la situation de Mme A....

Sur la légalité de la fixation du pays de renvoi :

12. Il résulte de ce qui a été dit sur la légalité des décisions portant refus de séjour et obligation de quitter le territoire français que Mme A... n'est pas fondée à exciper de leur illégalité.

13. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

M. Pourny, président de chambre,

M. Stillmunkes, président assesseur,

M. Gros, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 janvier 2025.

Le rapporteur,

H. Stillmunkes

Le président,

F. Pourny

La greffière,

N. Lecouey

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 24LY01410


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de LYON
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 24LY01410
Date de la décision : 16/01/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. - Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. POURNY
Rapporteur ?: M. Henri STILLMUNKES
Rapporteur public ?: Mme COTTIER
Avocat(s) : PETIT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-16;24ly01410 ?
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