Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 1er mars 2023 par lesquelles la préfète de l'Ain a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être reconduit d'office.
Par un jugement n° 2305193 du 7 novembre 2023, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour
Par une requête enregistrée le 7 décembre 2023, M. A..., représenté par Me Paquet, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler ces décisions ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Ain, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, de lui délivrer, sous astreinte de cent cinquante euros par jour de retard, un titre de séjour après délivrance sous quinzaine d'un récépissé l'autorisant à travailler, ou à titre subsidiaire, de réexaminer, dans le même délai, sa situation, après délivrance sous quinzaine d'une autorisation provisoire de séjour et sous astreinte de cinquante euros par jour de retard ;
4°) s'il n'est pas admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1500 euros HT en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, et, s'il est admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle, de mettre cette même somme à la charge de l'Etat et au bénéfice de son conseil en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.
Il soutient que :
- la préfète n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation ;
- le refus de séjour méconnaît l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;
- la préfète aurait dû mettre en œuvre son pouvoir de régularisation.
Par un mémoire, enregistré le 5 avril 2024, la préfète de l'Ain conclut au rejet de la requête.
Elle soutient que les moyens invoqués par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 31 janvier 2024.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative ;
La présidente de la formation de jugement ayant dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;
Après avoir entendu, au cours de l'audience publique, le rapport de Mme Evrard.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... relève appel du jugement du 7 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions de la préfète de l'Ain du 1er mars 2023 rejetant sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination de cette mesure d'éloignement.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, il ressort des termes mêmes de l'arrêté en litige, qui mentionne l'ensemble des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde, que la préfète de l'Ain a, contrairement à ce que prétend M. A..., préalablement procédé à un examen de sa situation particulière, notamment de l'atteinte portée à sa situation privée et familiale en cas de refus de séjour. Le moyen tiré du défaut d'un tel examen doit, par suite, être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas (...) dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / (...) ". Aux termes de l'article L. 434-2 du même code : " L'étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévu par le présent code ou par les conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial : / 1° Par son conjoint (...) ".
4. M. A..., marié à une compatriote titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle délivrée le 22 novembre 2021, entre dans les catégories ouvrant droit au regroupement familial et ne peut, dès lors, bénéficier d'un titre de séjour de plein droit sur le fondement de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il s'ensuit que le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de l'Ain a méconnu ces dispositions en refusant de l'admettre au séjour.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ".
6. M. A..., ressortissant kosovar né le 12 septembre 1996, ne résidait, à la date de l'arrêté en litige, que depuis seize mois en France, où il a rejoint une compatriote qu'il a épousée au Kosovo le 26 juin 2019. Celle-ci, entrée sur le territoire français en 2016, est titulaire d'une carte de séjour pluriannuelle valable jusqu'au 21 novembre 2023, et le couple a donné naissance à un enfant le 15 novembre 2022. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que la communauté de vie entre M. A... et son épouse présentait un caractère récent à la date des décisions en litige, aucune vie commune n'ayant débuté avant l'entrée en France du requérant, le 14 décembre 2021. M. A... ne fait état d'aucune circonstance faisant obstacle à ce que sa vie privée et familiale se poursuive au Kosovo, alors notamment que son épouse n'exerçait aucune activité professionnelle à la date de la décision en litige et que tous les membres de la famille sont ressortissants de ce pays, ou en France sous réserve que M. A... y entre par le biais du regroupement familial ou sous couvert d'un visa de long séjour. Dans les circonstances de l'espèce, compte tenu de la brève durée de son séjour en France et de la communauté de vie avec son épouse, les décisions en litige ne portent pas au droit de M. A... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Dès lors, elles n'ont pas méconnu les stipulations citées au point 5 et ne sont pas davantage entachées d'erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
8. Si l'obligation de quitter le territoire français implique pour l'appelant un éloignement du territoire français, il ne ressort pas des pièces du dossier que la cellule familiale ne pourrait pas être reconstituée hors de France, les époux ayant la même nationalité et leur enfant n'étant pas scolarisé compte tenu de son très jeune âge. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.
9. En dernier lieu, et pour les motifs énoncés précédemment, M. A... n'est pas fondé à soutenir qu'en ne mettant pas en œuvre son pouvoir de régularisation, la préfète de l'Ain aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
10. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
11. Le présent arrêt rejetant les conclusions à fin d'annulation de M. A... et n'appelant, dès lors, aucune mesure d'exécution, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées.
Sur les frais liés à l'instance :
12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme au titre des frais exposés par M. A....
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 9 janvier 2025 à laquelle siégeaient :
Mme Evrard, présidente,
M. Savouré, premier conseiller,
Mme Corvellec, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 janvier 2025.
La rapporteure,
A. Evrard
L'assesseur le plus ancien,
B. Savouré
La greffière,
F. Faure
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
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N° 23LY03765