Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Lyon d'annuler les décisions du 22 mars 2023 par lesquelles la préfète du Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a désigné son pays de renvoi.
Par un jugement n° 2309381 du 15 mars 2024, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 19 juin 2024, M. C... A..., représenté par Me B..., demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2309381 du 15 mars 2024 du tribunal administratif de Lyon et les décisions préfectorales du 22 mars 2023 ;
2°) d'enjoindre à la préfète du Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à venir et de supprimer son signalement pour non-admission dans le système d'information Schengen ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code justice administrative.
M. A... soutient que :
- la décision portant refus de séjour n'a pas été précédée d'un examen complet et suffisant de sa situation, a été prise en méconnaissance des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien, car deux médicaments parmi ceux qui lui sont prescrits ne sont pas disponibles en Algérie, et se trouve entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la mesure d'éloignement est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- la décision lui impartissant un délai de départ volontaire de trente jours est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement ;
- la décision désignant son pays de destination est illégale en raison de l'illégalité de la mesure d'éloignement et a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
La demande d'aide juridictionnelle de M. A... a été rejetée par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du 22 mai 2024, confirmée par le président de la cour par une ordonnance du 28 mars 2025.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique du 31 mars 2025 :
- le rapport de M. Gros, premier conseiller,
- et les observations de Me Tronquet, substituant Mme B..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. C... A..., ressortissant algérien né en 1990, a bénéficié d'un certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale ", qui lui avait été délivré le 14 mai 2019 en raison de son état de santé. Par des décisions du 28 avril 2021, le préfet du Rhône a opposé un refus à sa demande de renouvellement de ce titre de séjour et a prononcé à son encontre une mesure d'éloignement. Le tribunal administratif de Lyon a annulé ces décisions, par un jugement du 17 décembre 2021 et a enjoint au préfet de réexaminer sous trois mois la situation de M. A.... Ce dernier a lui-même, le 25 février 2022, réitéré sa demande de titre de séjour. Par un arrêt n° 22LY00119 du 16 janvier 2023, la cour a annulé le jugement du tribunal et rejeté les conclusions de M. A.... Par des décisions du 22 mars 2023, prises après un nouveau recueil de l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), la préfète du Rhône a opposé un nouveau refus à la demande de titre de séjour de M. A..., lui a fait obligation de quitter le territoire français, cette fois-ci sous trente jours, et a désigné son pays de renvoi. M. A... relève appel du jugement du 15 mars 2024 par lequel le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces décisions préfectorales du 22 mars 2023.
Sur le refus de séjour :
2. En premier lieu, il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté en litige du 22 mars 2023 ni des pièces du dossier que la préfète du Rhône aurait manqué de procéder à un examen complet de la situation du requérant, au vu des éléments dont elle disposait, regardant en particulier, d'une part, son état de santé, la préfète s'étant approprié l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), d'autre part, sonactivité professionnelle, M. A... n'établissant pas avoir communiqué à la préfecture d'éléments à ce sujet. Par ailleurs, la préfète a mentionné la présence en France de la mère de M. A... et a estimé que la situation de ce dernier ne relevait pas d'une mesure dérogatoire d'admission au séjour. Le moyen tiré d'un défaut d'examen de la situation du requérant ne peut ainsi qu'être écarté.
3. En deuxième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien : " (...) / Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : / (...) / 7. Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) ".
4. La partie qui justifie d'un avis du collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) qui lui est favorable doit être regardée comme apportant des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence ou l'absence d'un état de santé de nature à justifier la délivrance ou le refus d'un titre de séjour. Dans ce cas, il appartient à l'autre partie, dans le respect des règles relatives au secret médical, de produire tous éléments permettant d'apprécier l'état de santé de l'étranger et, le cas échéant, si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si l'état de santé d'un étranger justifie la délivrance d'un titre de séjour dans les conditions ci-dessus rappelées, se détermine au vu de ces échanges contradictoires.
5. Pour refuser de renouveler le certificat de résidence détenu par M. A... en qualité d'étranger malade, la préfète du Rhône s'est appuyée sur l'avis rendu le 18 juillet 2022 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel a estimé que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité mais que, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Algérie, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il ressort des pièces du dossier que M. A... souffre, notamment, d'une spondylarthrite ankylosante diagnostiquée en France en mars 2018, qui a conduit, dans un contexte de coxarthrose s'inscrivant dans des douleurs de hanche affectant ce ressortissant algérien depuis l'âge de 25 ans, à l'implantation d'une prothèse totale de hanche droite. Cette affection nécessite la prise hebdomadaire de deux médicaments immunosuppresseurs, Benepali 50 mg, sous forme d'une injection, et Imeth 15 mg, lesquels seraient indisponibles en Algérie selon le requérant. M. A... produit à cet effet diverses pièces médicales, de contenu très succinct, émanant de médecins et pharmaciens exerçant pour l'essentiel à Maghnia, commune algérienne, datés pour la plupart de mars 2024. Il produit également un certificat rédigé le 23 mai 2024 par un médecin du service " fédération d'endocrinologie diabétologie-nutrition et maladies rares du métabolisme " de l'hôpital Louis Pradel des Hospices civils de Lyon (HCL), selon lequel le traitement pour la spondylarthrite ankylosante " n'est pas disponible dans son pays d'origine " et un certificat du 20 mars 2024 émanant d'un médecin du service de rhumatologie et de pathologie osseuse de l'hôpital Edouard Herriot des HCL selon lequel " le traitement par Benapali n'est malheureusement pas disponible dans son pays d'origine et les thérapeutiques disponibles dans ce pays ont déjà été essayées à savoir un autre anti-TNF type Infliximab ". Il produit enfin un courrier du 8 avril 2024 du laboratoire Biogen énonçant que le Benepali n'est pas commercialisé en Algérie et un courriel du 8 avril 2024 de la société Nordic Pharma SAS énonçant que l'Imeth comprimé ne l'est pas non plus. Toutefois, l'Etanercept et le Méthotrexate disodique, qui sont les substances actives, respectivement, du médicament Benapali et du médicament Imeth, figurent au sein de la nomenclature nationale algérienne des produits pharmaceutiques à usage de la médecine humaine datée du 28 février 2023. Dans ces conditions où le requérant peut bénéficier en Algérie d'un traitement adapté à sa pathologie, le moyen tiré de ce que la préfète du Rhône aurait, en opposant le refus de séjour du 22 mars 2023, méconnu les stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté.
6. En troisième et dernier lieu, ainsi qu'il vient d'être exposé, M. A... peut bénéficier en Algérie de soins adaptés à son état de santé. A la date de l'arrêté en litige, il ne travaillait que depuis un mois comme ouvrier agricole saisonnier. En refusant de lui délivrer un titre de séjour, la préfète du Rhône n'a par conséquent pas commis d'erreur manifeste dans la mise en œuvre de son pouvoir de régularisation ni apprécié de manière manifestement erronée les conséquences de sa décision sur la situation du requérant.
Sur les autres décisions :
7. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité du refus de séjour à l'encontre de la mesure d'éloignement prise à son encontre.
8. Pour les motifs exposés aux points 5 et 6 et M. A..., dont la mère ne séjourne pas régulièrement en France, n'apparaissant pas isolé en Algérie, la mesure d'éloignement n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation du requérant.
9. Il résulte de ce qui précède que le requérant n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la mesure d'éloignement à l'encontre de la décision lui impartissant un délai de départ volontaire de trente jours et de la décision désignant son pays de renvoi.
10. Comme M. A... peut bénéficier en Algérie de soins adaptés à son état de santé, la décision désignant son pays de renvoi ne méconnaît pas l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales qui stipule que " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines et traitements inhumains et dégradants ".
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Lyon a rejeté sa demande. Ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant au versement de frais de procès doivent en conséquence être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée à la préfète du Rhône.
Délibéré après l'audience du 31 mars 2025, à laquelle siégeaient :
M. Pourny, président de chambre,
M. Stillmunkes, président assesseur,
M. Gros, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 avril 2025.
Le rapporteur,
B. Gros
Le président,
F. Pourny
La greffière
N. Lecouey
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
N° 24LY01754 2