La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

19/11/2024 | FRANCE | N°24MA01136

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 4ème chambre, 19 novembre 2024, 24MA01136


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre du ministre de l'intérieur et des outre-mer par l'article 2 de son jugement n° 1902649 du 5 juillet 2021 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2201954 du 26 février 2024, le tribunal administratif de Toulon a décidé qu'il n'y avait pas l

ieu de liquider cette astreinte et a rejeté les conclusions présentées par Mme B... ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Toulon de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre du ministre de l'intérieur et des outre-mer par l'article 2 de son jugement n° 1902649 du 5 juillet 2021 et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2201954 du 26 février 2024, le tribunal administratif de Toulon a décidé qu'il n'y avait pas lieu de liquider cette astreinte et a rejeté les conclusions présentées par Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés les 2 mai et 29 août 2024, Mme B..., représentée par Me Macone, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 26 février 2024 et de liquider l'astreinte prononcée à l'encontre du ministre de l'intérieur et des outre-mer par

l'article 2 du jugement n° 1902649 rendu par cette même juridiction le 5 juillet 2021 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 400 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué n'est pas motivé ;

- le jugement du tribunal administratif de Toulon du 5 juillet 2021 n'a pas été exécuté :

. contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif de Toulon, elle n'a pas été juridiquement réintégrée ; en effet, le tribunal s'est fondé sur ce point sur l'arrêté du ministre de l'intérieur et des outre-mer du 18 juin 2021 alors qu'il reconnaît qu'il ne lui a pas été notifié, que cet arrêté fait l'objet d'un recours et que ledit ministre en a pris un second en remplacement de celui-ci, qui a, lui aussi, fait l'objet d'un recours ; dans ces conditions, soit le tribunal devait surseoir à statuer dans l'attente de la décision concernant la validité de cet arrêté du 18 juin 2021, soit il devait en apprécier la légalité par la voie de l'exception d'illégalité ;

. les postes qui lui ont été proposés ne sont pas en adéquation avec ses connaissances, ses aptitudes professionnelles et son état de santé.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 août 2024, le ministre de l'intérieur et des outre-mer conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- dès lors que le tribunal administratif de Toulon a été saisi en tant que juge de l'exécution, l'appréciation de la légalité de son arrêté du 18 juin 2021 constitue un litige distinct de celui qui concerne la seule exécution du jugement du 5 juillet 2021 ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Un courrier du 17 juillet 2024, adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.

Par une ordonnance du 4 octobre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Lombart,

- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,

- et les observations de Me Macone, représentant Mme B....

Une note en délibéré, présentée pour Mme B..., par Me Macone, a été enregistrée le 8 novembre 2024.

Considérant ce qui suit :

1. Après avoir annulé l'arrêté du 26 novembre 2018 par lequel le ministre de l'intérieur et des outre-mer avait placé Mme B..., capitaine de police, affectée à la direction départementale de la sécurité publique (DDSP) du Var, d'office à la retraite, pour invalidité non imputable au service, à compter du 1er septembre 2018, le tribunal administratif de Toulon a, par un jugement n° 1902649 du 5 juillet 2021 devenu définitif, enjoint audit ministre, d'une part, de réintégrer juridiquement cette dernière et, d'autre part, de lui proposer des postes de reclassement correspondant à ses aptitudes professionnelles, dans un délai de six mois à compter de la notification de ce jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard. Estimant que ce jugement n'avait pas été exécuté, Mme B... a saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à ce que l'astreinte fixée à l'article 2 de celui-ci soit liquidée. Par la présente requête, Mme B... relève appel du jugement n° 2201954 du 26 février 2024 par lequel le tribunal administratif de Toulon a décidé qu'il n'y avait pas lieu de faire droit à cette demande.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés. " Il résulte des dispositions des articles L. 911-7 et L. 911-8 du code de justice administrative que la décision par laquelle la juridiction ayant prononcé une astreinte provisoire statue sur sa liquidation présente un caractère juridictionnel et doit, par suite, être motivée.

3. Alors que les premiers juges n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments avancés par Mme B..., leur jugement attaqué du 26 février 2024, qui indique de manière suffisante les motifs de droit et de fait sur lesquels ils se sont fondés pour décider de ne pas liquider l'astreinte fixée à l'article 2 du jugement du 5 juillet 2021, est suffisamment motivé. Le moyen tiré de ce qu'il serait entaché d'irrégularité à cet égard doit, dès lors, être écarté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. Aux termes de l'article L. 911-6 du code de justice administrative : " L'astreinte est provisoire ou définitive. Elle doit être considérée comme provisoire à moins que la juridiction n'ait précisé son caractère définitif. Elle est indépendante des dommages et intérêts. " Selon l'article L. 911-7 du même code : " En cas d'inexécution totale ou partielle ou d'exécution tardive, la juridiction procède à la liquidation de l'astreinte qu'elle avait prononcée. / Sauf s'il est établi que l'inexécution de la décision provient d'un cas fortuit ou de force majeure, la juridiction ne peut modifier le taux de l'astreinte définitive lors de sa liquidation. / Elle peut modérer ou supprimer l'astreinte provisoire, même en cas d'inexécution constatée. "

5. En premier lieu, les premiers juges ont à juste titre relevé, au point 3 de leur jugement attaqué du 26 février 2024, que, par un arrêté du 18 juin 2021, le ministre de l'intérieur et des outre-mer avait non seulement retiré son arrêté du 26 novembre 2018 portant placement d'office de Mme B... à la retraite pour invalidité non imputable au service, à compter du 1er septembre 2018, qui avait été annulé par le jugement du 5 juillet 2021, mais qu'il avait également placé cette dernière en disponibilité d'office pour maladie à compter du 1er septembre 2018. Lesdits juges en ont, à bon droit, conclu, qu'en plaçant ainsi rétroactivement Mme B... dans la position qu'il estimait que celle-ci devait occuper depuis la date d'effet de la décision d'éviction annulée, le ministre de l'intérieur et des outre-mer avait nécessairement procédé à la réintégration juridique de l'intéressée. A cet égard, sont sans incidence la circonstance que cet arrêté du 18 juin 2021 n'a pas été notifié à Mme B... tout comme celle tenant à ce que cet acte aurait lui-même été retiré par un arrêté ultérieur qui fait l'objet d'un recours contentieux pendant devant le tribunal administratif de Toulon. Par ailleurs, si Mme B... reproche aux premiers juges de ne pas avoir apprécié la légalité de cet arrêté du ministre de l'intérieur et des outre-mer du 18 juin 2021, c'est encore à bon droit que ces derniers ont estimé qu'une telle appréciation soulevait un litige distinct de celui afférent à l'exécution du jugement du tribunal administratif de Toulon du 5 juillet 2021.

6. En second lieu, s'il est constant que le ministre de l'intérieur et des outre-mer a proposé plusieurs postes à Mme B..., cette dernière soutient que ces postes, tous situés en dehors du département du Var, ne tiennent pas compte des difficultés de déplacement auxquelles elle risque d'être confrontée alors qu'elle réside dans ce département, à La-Seyne-sur-Mer, et des conséquences d'une telle affectation sur son état de santé. Elle ajoute qu'ils ne correspondent pas à ses aptitudes professionnelles. Toutefois, et alors même qu'elle verse aux débats une attestation de son psychiatre faisant état de sa vulnérabilité psychique lui valant la reconnaissance de travailleuse handicapée et nécessitant un temps de repos suffisant, l'appelante ne démontre pas davantage devant la Cour que devant le tribunal administratif de Toulon que ces postes seraient incompatibles avec son état de santé d'autant que, ainsi que l'ont relevé à juste titre les premiers juges, certains d'entre eux prévoyaient une possibilité de télétravailler et qu'en tout état de cause, elle n'établit pas l'impossibilité de déménager pour se rapprocher de son lieu de résidence administrative. Par ailleurs, en se bornant à rappeler qu'elle a exercé toute sa carrière professionnelle antérieure au sein de la police nationale sur des postes opérationnels où elle a appris la procédure pénale, l'appelante, qui a désormais vocation à occuper un poste administratif relevant de la catégorie A pour lequel elle a la possibilité de suivre des formations avant toute prise de fonctions comme après, ne démontre pas plus que les postes qui lui ont été proposés seraient en inadéquation avec les aptitudes professionnelles, les compétences ou des connaissances dont elle pourrait faire montre.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à la liquidation de l'astreinte prononcée par le jugement du 5 juillet 2021. Par suite, sa requête doit être rejetée en son entier, y compris, et par voie de conséquence, ses conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 5 novembre 2024, où siégeaient :

- M. Marcovici, président,

- M. Revert, président assesseur,

- M. Lombart, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 19 novembre 2024.

2

No 24MA01136


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA01136
Date de la décision : 19/11/2024
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

54-06-07-01-04 Procédure. - Jugements. - Exécution des jugements. - Astreinte. - Liquidation de l'astreinte.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent LOMBART
Rapporteur public ?: Mme BALARESQUE
Avocat(s) : MACONE

Origine de la décision
Date de l'import : 23/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-19;24ma01136 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award