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10/01/2025 | FRANCE | N°24MA00478

France | France, Cour administrative d'appel de MARSEILLE, 5ème chambre, 10 janvier 2025, 24MA00478


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la société La Poste à lui verser la somme totale de 184 250 euros en réparation des préjudices subis du fait du refus opposé à sa demande de bénéfice prolongé du dispositif de fin de carrière appelé " temps partiel aménagé sénior ".



Par un jugement n° 2005875 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.



Procédure

devant la cour :



Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 février et 22 août 2024, M. B..., représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner la société La Poste à lui verser la somme totale de 184 250 euros en réparation des préjudices subis du fait du refus opposé à sa demande de bénéfice prolongé du dispositif de fin de carrière appelé " temps partiel aménagé sénior ".

Par un jugement n° 2005875 du 22 décembre 2023, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 26 février et 22 août 2024, M. B..., représenté par Me Semeriva, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 décembre 2023 ;

2°) de condamner la société La Poste à lui verser la somme de 205 000 euros, avec intérêts au taux légal et capitalisation des intérêts ;

3°) de mettre à la charge de la société La Poste une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute d'être signé ;

- le moyen tiré de l'illégalité des circulaires du 25 février 2013 a été dénaturé ;

- le tribunal n'a pas répondu à son argumentation quant à l'absence de justification par son employeur de ce qu'il n'aurait pas exercé durant plus de 10 ans des fonctions pénibles ;

- il remplit cette condition d'exercice permettant le bénéfice du régime dédié ; cela résulte notamment de ce qu'il appartient à la catégorie " service actif " et de l'examen des fonctions qu'il a exercées ; la société La Poste ne justifie pas du décompte de carrière qu'elle a dû effectuer à cet égard et une mesure d'instruction aurait dû être effectuée ; il aurait dû bénéficier du dispositif à 53 ans ;

- la circulaire instaure une discrimination contraire à l'intention du législateur entre les agents sédentaires ou ayant exercé seulement 10 ans des fonctions pénibles et ceux appartenant à la catégorie " service actif " ; le départ en retraite anticipé n'est pas un avantage eu égard à la décote appliquée sur la pension de retraite ; le choix du régime appliqué aurait dû lui être ouvert ;

- la société La Poste a illégalement refusé de lui communiquer en temps utile les périodes qu'elle refusait de prendre en compte au titre de la pénibilité ;

- son préjudice résulte tant des trois années de service supplémentaires qu'il a dû effectuer que du harcèlement dont il a fait l'objet.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 mai 2024, la société La Poste, représentée par Me Andreani, conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que la requête est non fondée dans les moyens qu'elle soulève.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des pensions civiles et militaires de retraite ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- la loi n° 90-568 du 2 juillet 1990 ;

- le décret n° 54-832 du 13 août 1954 ;

- le décret n° 82-624 du 20 juillet 1982 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Poullain,

- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,

- et les observations de Me Tosi, représentant la société La Poste.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., fonctionnaire depuis 1978, a été placé par son employeur, la société La Poste, entre le 1er septembre 2013 et le 31 juillet 2016, en " temps partiel aménagé sénior ". Le bénéfice d'un prolongement de ce dispositif lui a été refusé. Il relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à être indemnisé des préjudices subis du fait de ce refus et, plus généralement, des conditions dans lesquelles il a bénéficié dudit temps partiel.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que le jugement attaqué a été dûment signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation de ce jugement qui a été notifiée au requérant ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur sa régularité.

3. Si M. B... soutient que le tribunal aurait dénaturé son moyen tiré de l'illégalité de des circulaires du 25 février 2013, cette circonstance n'est en tout état de cause pas de nature à entacher le jugement d'irrégularité.

4. Enfin, il ressort du point 5 du jugement attaqué que le tribunal, qui n'était pas tenu de répondre à tous les arguments avancés par les parties, n'a pas omis de répondre au moyen de M. B... tiré de ce qu'il aurait effectivement exercé, durant au moins dix ans, des fonctions comportant des facteurs de pénibilité.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

5. D'une part, par une circulaire référencée CORP-DRHRS-2013-0042 du 25 février 2013, la société La Poste a mis en place un dispositif de " temps partiel aménagé sénior pour les personnels n'exerçant pas des fonctions comportant des facteurs de pénibilité ". Ce dernier distingue, s'agissant des fonctionnaires, les agents appartenant à la catégorie " service actif ", pouvant en bénéficier dès 54 ans, des autres agents, pouvant y prétendre à partir de 58 ans. Parallèlement, une seconde circulaire référencée CORP-DRHRS-2013-0041 du même jour met en place un dispositif similaire pour les personnels exerçant ou ayant exercé, pendant au moins dix ans, des fonctions comportant des facteurs de pénibilité. Un tableau liste lesdites fonctions et le dispositif distingue également, s'agissant des fonctionnaires, les agents appartenant à la catégorie " service actif ", pouvant en bénéficier dès 53 ans, des autres agents, pouvant y prétendre à partir de 56 ans.

6. D'autre part, le I de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de retraite précise, en son 1°, que " sont classés dans la catégorie active les emplois présentant un risque particulier ou des fatigues exceptionnelles. La nomenclature en est établie par décret en Conseil d'Etat ". La liste des emplois figure en annexe au décret n° 54-832 du 13 août 1954 portant règlement d'administration publique pour la codification de 'lois et de règlements d'administration publique relatifs aux pensions civiles et militaires de retraite.

7. En premier lieu, contrairement à ce que soutient M. B..., il résulte des dispositions des circulaires du 25 février 2013 qu'il n'a pas été entendu assimiler le " service actif " à l'exercice de fonctions comportant des facteurs de pénibilité, la circulaire n° CORP-DRHRS-2013-0041 prévoyant d'ailleurs deux régimes différents pour les agents ayant exercé, pendant au moins dix ans, de telles fonctions selon qu'ils relèvent ou non de la catégorie " service actif ". Il ne saurait dès lors être prétendu qu'un agent relevant de cette catégorie aurait nécessairement exercé, pendant au moins dix ans, des fonctions comportant des facteurs de pénibilité au sens de ladite circulaire.

8. En deuxième lieu, M. B..., qui ne produit ni bulletin de paie, ni fiche de poste ou attestation de ses collègues, ne conteste pas utilement que les fonctions qu'il a occupées durant près de cinq ans à Aix-en-Provence - Jas-de-Bouffan - en qualité de cadre (grade CDTRC) ne relevaient pas des métiers du " colis " ainsi qu'il le prétend, mais relevaient de ceux du " courrier ". Or, la circulaire référencée CORP-DRHRS-2013-0041 considère que les seuls postes de cadres des métiers du " courrier " comportant des facteurs de pénibilité sont ceux impliquant un travail de nuit. M. B... n'allègue pas qu'il aurait effectué un tel travail de nuit ni ne critique la pertinence de ce critère. Les autres fonctions exercées par M. B... avant ce poste, susceptibles de comporter des facteurs de pénibilité, n'ont pas été exercées durant dix ans, ce que ne conteste pas l'intéressé. Dès lors, sans qu'il y ait lieu de faire une mesure d'instruction complémentaire, le moyen de M. B... tiré de ce qu'il aurait, durant au moins dix ans, exercé des fonctions comportant des facteurs de pénibilité au sens de cette circulaire doit être écarté. C'est ainsi sans méconnaître le dispositif qu'elle a mis en place que l'administration y a admis M. B... à partir de l'âge de 54 ans seulement, ainsi que prévu par la circulaire CORP-DRHRS-2013-0042.

9. En troisième lieu, si M. B... soutient que son employeur ne lui aurait pas indiqué en temps utile la nature de ses activités qui ne pouvaient être considérées comme comportant des facteurs de pénibilité pour l'application de ce dispositif, il lui appartenait d'examiner lui-même sa carrière au regard des fonctions listées au tableau attaché à la circulaire référencée CORP-DRHRS-2013-0041. Au demeurant, il ne résulte pas de l'instruction qu'une méprise à cet égard ait pu avoir une quelconque incidence sur le régime dont a bénéficié M. B....

10. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été exposé au point 5 ci-dessus que, contrairement à ce que soutient M. B..., les agents relevant de la catégorie " service actif " bénéficient d'un régime de " temps partiel aménagé sénior " plus favorable que ceux relevant de la catégorie sédentaire, même quand ces derniers ont occupé, durant au moins dix ans, des fonctions comportant des facteurs de pénibilité. Il ne résulte par ailleurs pas des circulaires que le bénéfice dudit temps partiel aurait un impact différent sur les droits à retraite des intéressés selon qu'ils relèvent de la catégorie " service actif " ou non. Le moyen tiré de ce que les circulaires en cause instaureraient une inégalité de traitement illégale et qu'un choix aurait dû de ce fait être ouvert à l'agent doit dès lors être écarté.

11. En cinquième et dernier lieu, si M. B... évoque, dans ses écritures d'appel, des faits de harcèlement moral, il n'apporte aucune précision à l'appui de ce moyen qui doit dès lors être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société La Poste qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'en faire application au bénéfice de cette société.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la société La Poste au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et à la société La Poste.

Délibéré après l'audience du 20 décembre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,

- Mme Vincent, présidente assesseure,

- Mme Poullain, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 10 janvier 2025.

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N° 24MA00478

bb


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de MARSEILLE
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 24MA00478
Date de la décision : 10/01/2025
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Fonctionnaires et agents publics - Cadres et emplois - Egalité de traitement entre agents d'un même corps - Absence de discrimination illégale.

Fonctionnaires et agents publics - Statuts - droits - obligations et garanties.


Composition du Tribunal
Président : Mme CHENAL-PETER
Rapporteur ?: Mme Caroline POULLAIN
Rapporteur public ?: M. GUILLAUMONT
Avocat(s) : SEMERIVA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/01/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-01-10;24ma00478 ?
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