Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler la décision du 14 juin 2021 par laquelle la ministre des armées a refusé de lui verser la somme de 115 308 euros au titre de son indemnité compensatrice, de condamner l'Etat à lui verser la somme de 115 308 euros en liquidation du montant total de son indemnité compensatrice, assortie des intérêts au taux légal depuis le 26 avril 2021, sous astreinte de 150 euros par jour de retard dans le délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2102252 du 27 novembre 2023, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la requête de M. A....
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire complémentaire enregistrés les 28 janvier 2024 et 4 février 2025, M. B... A..., représenté par Me Macone, demande à la Cour dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon ;
2°) d'annuler la décision de la ministre des armées du 14 juin 2021 ;
3°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 73 108,82 euros au titre d'indemnités compensatrices, avec intérêts au taux légal à compter du 26 avril 2021, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient dans le dernier état de ses écritures qu'il est fondé, en application de l'article 3 du décret n° 2001-878 du 24 septembre 2001, à prétendre au versement d'une indemnité compensatrice d'un montant mensuel équivalent à celui qui lui avait été initialement octroyé, soit 1 334,60 euros, et a subi à ce titre un préjudice de février 2003 à février 2012 d'un montant de 73 108,82 euros.
Par un mémoire en défense enregistré le 6 janvier 2025, le ministre des armées et des anciens combattants demande à la Cour de rejeter la requête de M. A....
Il soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;
- le décret n° 2001-878 du 24 septembre 2001 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Vincent,
- les conclusions de M. Guillaumont, rapporteur public,
- et les observations de Me Macone pour M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., anciennement technicien supérieur d'études et de fabrications, a été nommé ingénieur d'études et de fabrications à compter du 1er juillet 1995. Il a demandé, par lettre du 14 septembre 2005 puis sur recours gracieux du 20 septembre 2006, le maintien du bénéfice de son indemnité compensatrice en application des dispositions de l'article 3 du décret du 24 septembre 2001 portant attribution d'une indemnité compensatrice à certains ingénieurs civils de la défense du ministère de la défense. Par un jugement n° 0700560 du 16 juin 2008, devenu définitif, le tribunal administratif de Versailles a annulé, pour un motif de légalité externe tenant à l'incompétence de leur auteur, les décisions des 2 août 2006 et 8 novembre 2006 par lesquelles le chef du service administratif et financier de la direction du commissariat de la Marine de Brest a rejeté cette demande et ce recours gracieux, et rejeté le surplus des conclusions de la requête de M. A... tendant à ce qu'il soit enjoint au ministre de la défense de lui verser les sommes dues au titre de l'indemnité compensatrice sollicitée. Par un jugement n° 0812472 du 7 novembre 2011, également définitif, le même tribunal a rejeté pour irrecevabilité la requête de M. A... tendant à annuler la prétendue décision implicite de rejet qui aurait été prise par le ministre de la défense à la suite du jugement du 16 juin 2008. Enfin, par un jugement n° 1902606 du 7 novembre 2019, là encore définitif, le tribunal administratif de Versailles, statuant sur la demande de M. A... tendant à l'exécution du jugement du 16 juin 2008, a enjoint à la ministre des armées de procéder, dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement, au réexamen de la demande de M. A... relative au calcul de son indemnité compensatrice. A la suite de ce jugement du 7 novembre 2019, le centre ministériel de gestion de Bordeaux a calculé le montant de l'indemnité compensatrice due à M. A..., qu'il a évaluée à la somme de 11 510,17 euros, laquelle lui a été versée à titre de régularisation sur son bulletin de paye du mois de juillet 2020. Par une lettre du 26 avril 2021, M. A... a contesté ce calcul en demandant à la ministre des armées de lui verser la somme de 115 308 euros. Par une décision du 14 juin 2021, la ministre des armées doit être regardée comme ayant rejeté cette demande. M. A... interjette appel du jugement en date du 27 novembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses conclusions aux fins d'annulation de la décision du 14 juin 2021 ainsi que ses conclusions tendant au versement d'une indemnité compensatrice complémentaire.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
2. Aux termes de l'article 1er du décret du 24 septembre 2001 portant attribution d'une indemnité compensatrice à certains ingénieurs civils de la défense du ministère de la défense : " Les techniciens supérieurs d'études et de fabrications, les agents sur contrat régis par le décret du 3 octobre 1949 susvisé et les ouvriers de l'Etat du ministère de la défense nommés ingénieurs d'études et de fabrications qui recevaient dans leur ancienne situation une rémunération globale supérieure à celle qui résulte de leur classement dans le corps des ingénieurs d'études et de fabrications perçoivent une indemnité compensatrice dans les conditions fixées par le présent décret ". Aux termes de l'article 3 de ce décret : " Les ingénieurs d'études et de fabrications qui, à la date de publication du présent décret, perçoivent une indemnité compensatrice en application des dispositions du décret du 7 avril 1976 modifié portant attribution d'une indemnité compensatrice à certains ingénieurs d'études et de fabrications du ministère de la défense en conservent le bénéfice pour le montant qui leur est alloué. / A compter de cette date, cette indemnité évolue dans les conditions fixées à l'article 2 ci-dessus ". Et aux termes de l'article 2 dudit décret : " Cette indemnité est égale à la différence existant entre les deux rémunérations, à l'exclusion des indemnités représentatives de frais et des éléments de rémunération liés à l'affectation en dehors du territoire européen de la France, en prenant en considération les éléments suivants : Rémunération d'ingénieur d'études et de fabrications : - traitement indiciaire ; - indemnité de résidence ; - allocation spéciale ; - prime de rendement au taux moyen ; Rémunération de technicien supérieur d'études et de fabrications : - traitement indiciaire ; - indemnité de résidence ; - indemnité de fonctions techniques ; - prime de rendement au taux moyen ; - indemnité différentielle prévue par le décret du 23 novembre 1962 susvisé ;- indemnité compensatrice prévue par le décret du 18 octobre 1989 susvisé (...). / Ces éléments sont déterminés, dans l'ancienne et la nouvelle situations, à la date où la nomination en qualité d'ingénieur d'études et de fabrications prend effet. / En aucun cas, l'attribution de l'indemnité compensatrice ne peut avoir pour effet de porter le total de cette allocation et de la rémunération globale perçue dans le nouveau grade à un montant supérieur à celui des émoluments déterminés suivant les conditions précisées ci-dessus et afférents à l'échelon le plus élevé du grade, catégorie ou groupe détenus à la date de nomination dans le corps des ingénieurs d'études et de fabrications./ L'indemnité compensatrice ainsi fixée est servie jusqu'au jour où ce dernier montant est atteint. A partir de ce moment, elle est réduite de plein droit du montant des augmentations de traitement et de la majoration des éléments de la rémunération dont les intéressés bénéficient dans leur nouveau corps ".
3. Il résulte de ces dispositions que le montant total de la rémunération que perçoit un ingénieur d'études et de fabrications bénéficiant d'une indemnité compensatrice ne peut excéder un plafond qui correspond au montant des émoluments afférents à l'échelon le plus élevé du grade, catégorie ou groupe détenus à la date de nomination dans le corps des ingénieurs d'études et de fabrications. Pour le calcul de ce plafond, au-delà duquel l'indemnité compensatrice doit être diminuée, les émoluments afférents à cet échelon sont ceux qui sont applicables à la date où la nomination en qualité d'ingénieur d'études et de fabrications a pris effet.
4. Il résulte de l'instruction qu'à la date à laquelle M. A... a été nommé en qualité d'ingénieur d'études et de fabrications, soit le 1er juillet 1995, la rémunération maximale dans le corps des techniciens supérieurs d'études et de fabrications (3) était, en prenant en compte l'ensemble des éléments cités à l'article 2 du décret précité, de 3 225,58 euros. La rémunération dont il bénéficiait en qualité d'ingénieur à cette date étant de 2 223,23 euros, le montant maximum de l'indemnité compensatrice, laquelle ne devait pas comprendre d'éléments de rémunération liés à l'affectation en dehors du territoire européen de la France, parmi lesquels ceux relatifs à une affectation à la Réunion de 1997 à 2002, était d'un montant maximal de 1 002,35 euros.
5. Il résulte de l'instruction qu'au titre des années 2005 au 10 mai 2009, le ministre des armées, en prenant en compte le traitement brut annuel versé à M. A..., lequel tient compte d'une accession à l'échelon supérieur le 1er juin 2005, l'indemnité de résidence, l'allocation spéciale et la prime de rendement, et en déduisant le montant de l'indemnité qui lui avait d'ores et déjà été octroyé au cours de cette période, a correctement calculé le montant dû et lui a, à juste titre, versé, en juillet 2020 la somme de 11 510,17 euros.
6. M. A... sollicite toutefois une indemnisation complémentaire au titre des années 2003 et 2004 ainsi que de mai 2009 à février 2012.
7. S'agissant de l'année 2003, il résulte de l'instruction, et notamment des feuilles de paye produites, que le traitement brut annuel de M. A..., avec prise en compte du rappel de mai 2003, s'élevait à 25 984,08 euros, que celui de l'indemnité de résidence s'est élevé à 779,52 euros, que celui de l'allocation spéciale s'est élevé à 3 866,76 euros et enfin que celui relatif à la prime de rendement s'est élevé à 1 504,40 euros, soit une rémunération totale de 32 134,76 euros. Le plafond annuel de la rémunération en qualité de technicien supérieur d'études et de fabrication étant de 38 706,96 euros, le solde qui devait être versé au titre de l'indemnité compensatrice est de 6 572,20 euros. Or, M. A... n'a perçu à ce titre, au cours de l'année 2003, que la somme de 4 935,60 euros (411,30 X 12). Il est ainsi fondé à prétendre au versement d'une indemnité complémentaire de 1 636,60 euros.
8. S'agissant de l'année 2004, il résulte de l'instruction, et notamment des feuilles de paye produites, que le traitement brut annuel de M. A... s'élevait à 26 114, 04 euros, que celui de l'indemnité de résidence s'est élevé à 783,36 euros, que celui de l'allocation spéciale s'est élevé à 4 200,92 euros et enfin que celui relatif à la prime de rendement s'est élevé à 1 598,59 euros, soit une rémunération totale de 32 696,91 euros. Le plafond annuel de la rémunération en qualité de technicien supérieur d'études et de fabrication étant de 38 706,96 euros, le solde qui devait être versé au titre de l'indemnité compensatrice est de 6 010,05 euros. Or, M. A... n'a perçu à ce titre, au cours de l'année 2004, que la somme de 4 935,60 euros (411,30 X 12). Il est ainsi fondé à prétendre au versement d'une indemnité complémentaire de 1 074, 45 euros.
9. Il résulte, en revanche, de l'instruction qu'à compter du 11 mai 2009, date à laquelle le requérant a bénéficié d'un avancement d'échelon, il n'a, sans qu'il faille tenir compte d'une revalorisation liée au coût de l'inflation, plus subi de perte de rémunération et n'était, dès lors, plus fondé à prétendre, en application de l'article 2 du décret précité du 24 septembre 2001, au bénéfice d'une indemnité compensatrice.
10. Il résulte de tout ce qui précède que l'Etat doit être condamné à verser à M. A... une somme complémentaire de 2 711,05 euros au titre des années 2003 et 2004, laquelle sera assortie des intérêts au taux légal à compter, comme demandé par M. A..., de la réception de la demande indemnitaire du 26 avril 2021 et que le jugement attaqué doit, dans cette mesure, être réformé. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette condamnation d'une astreinte.
Sur les frais d'instance :
11. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le paiement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : L'Etat est condamné à verser à M. A... la somme de 2 711,05 euros à titre d'indemnité compensatrice complémentaire pour les années 2003 et 2004. Cette somme sera assortie des intérêts au taux légal à compter de la réception de la demande indemnitaire du 26 avril 2021.
Article 2 : Le jugement n° 2102252 du 27 novembre 2023 du tribunal administratif de Toulon est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.
Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.
Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et au ministre des armées.
Délibéré après l'audience du 28 mars 2025, où siégeaient :
- Mme Chenal-Peter, présidente de chambre,
- Mme Vincent, présidente assesseure,
- Mme Poullain, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 avril 2025.
N° 24MA00190 2
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