Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Par quatre requêtes distinctes, Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 12 octobre 2021 par laquelle le directeur du centre d'accueil spécialisé (CAS) de Forcalquier-Mane a refusé de reconnaître sa maladie comme étant imputable au service et a décidé de considérer les arrêts maladie du 28 décembre 2020 au 15 novembre 2021 comme des congés de maladie ordinaire, la décision du 19 novembre 2021 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a décidé de la maintenir en congé de maladie ordinaire à compter du 16 novembre 2021, la décision du 17 décembre 2021 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane l'a placée en congés sans traitement à compter du 28 décembre 2021 et ce, jusqu'à l'avis de la commission de réforme, et la décision du 1er juin 2022 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane l'a maintenue à titre conservatoire à demi-traitement pour la période du 28 décembre 2021 au 31 mai 2022 inclus.
Par un jugement n°s 2110885, 2200461, 2200563, 2205490 du 16 janvier 2024, le tribunal administratif de Marseille a annulé les décisions des 12 octobre 2021, 19 novembre 2021, 17 décembre 2021 et 1er juin 2022, et enjoint au directeur du CAS de Forcalquier-Mane de placer Mme A... en congé pour invalidité temporaire imputable au service à compter du 28 décembre 2020, dans le délai de deux mois à compter de la notification du jugement.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés les 15 mars et 9 avril 2024, le CAS de Forcalquier-Mane, représenté par Me Moreau, demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n°s 2110885, 2200461, 2200563, 2205490 du 16 janvier 2024 du tribunal administratif de Marseille et de rejeter les demandes de Mme A... ;
2°) de mettre à la charge de Mme A... la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé s'agissant de l'injonction adressée par le tribunal administratif ;
- la juridiction de première instance a commis des erreurs de droit et des erreurs d'appréciation ;
- aucun lien direct et certain n'est établi entre la maladie de Mme A... et le service, la maladie ayant été déclarée trois années après qu'elle a quitté le service ;
- la maladie a pour unique cause le comportement personnel de l'agent dans l'exercice de son travail ;
- la décision du 12 octobre 2021 étant légale, les décisions des 19 novembre 2021, 17 décembre 2021 et 1er juin 2022 ne sont pas privées de base légale.
Par un mémoire en défense, enregistré le 17 août 2024, Mme A..., représentée par Me Pelgrin, conclut au rejet de la requête et demande à la Cour de mettre à la charge du requérant la somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle fait valoir que les moyens soulevés par le CAS de Forcalquier-Mane ne sont pas fondés.
Un courrier du 28 novembre 2024 adressé aux parties en application des dispositions de l'article R. 611-11-1 du code de justice administrative, les a informées de la période à laquelle il était envisagé d'appeler l'affaire à l'audience et leur a indiqué la date à partir de laquelle l'instruction pourrait être close, dans les conditions prévues par le dernier alinéa de l'article R. 613-1 et le dernier alinéa de l'article R. 613-2 du même code.
Par une ordonnance du 16 décembre 2024, la clôture de l'instruction a été prononcée avec effet immédiat, en application du dernier alinéa de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.
Par lettre du 21 mai 2025, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur des moyens relevés d'office, tirés, d'une part, de l'irrecevabilité des conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 19 novembre 2021, cette décision ne faisant pas grief, et, d'autre part, de l'irrecevabilité des conclusions de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 1er juin 2022 en l'absence d'intérêt à agir.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;
- le décret n° 87-602 du 30 juillet 1987 ;
- le décret n° 88-386 du 19 avril 1988 ;
- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;
- le code de justice administrative ;
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Martin,
- les conclusions de Mme Balaresque, rapporteure publique,
- les observations de Me Ramos, substituant Me Moreau, représentant le CAS de Forcalquier-Mane,
- et les observations de Me Pelgrin représentant Mme A....
Une note en délibéré, présentée pour Mme A... par Me Pelgrin, a été enregistrée le 27 mai 2025.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., qui a obtenu le diplôme d'État de moniteur-éducateur le 30 juin 2014, a été recrutée par le centre d'accueil spécialisé (CAS) de Forcalquier-Mane le 5 février 2016 en contrat à durée déterminée pour occuper les fonctions de moniteur-éducateur. Par une décision du 26 janvier 2017, elle a été nommée stagiaire dans le corps des moniteurs-éducateurs, au grade de moniteur-éducateur, à compter du 1er janvier 2017. Maintenue en qualité de stagiaire dans les effectifs de l'établissement à la suite d'un jugement définitif du tribunal administratif de Marseille du 13 juillet 2020 ayant annulé la décision du 12 février 2018 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a refusé de la titulariser et prononcé un licenciement pour insuffisance professionnelle en conséquence de ce refus, Mme A... a adressé au CAS une demande de reconnaissance d'imputabilité au service de ses arrêts de travail à compter du 28 décembre 2020. A la suite de l'avis défavorable de la commission de réforme, le CAS de Forcalquier-Mane, par une décision du 12 octobre 2021, a rejeté la demande de Mme A... et l'a placée en position de congé de maladie ordinaire du 28 décembre 2020 au 15 novembre 2021. Puis, par courrier du 19 novembre 2021, le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a informé l'intéressée de ce qu'elle devrait être maintenue en congé de maladie ordinaire à compter du 16 novembre 2021, courrier suivi d'une décision du 17 décembre 2021 par laquelle cette autorité l'a placée en congé sans traitement à compter du 28 décembre 2021 et ce, jusqu'à l'avis de la commission de réforme, et d'une décision du 1er juin 2022 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane l'a maintenue à titre conservatoire à demi-traitement pour la période du 28 décembre 2021 au 31 mai 2022 inclus, cette dernière décision étant intervenue en exécution d'une ordonnance du 8 avril 2022 par laquelle la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution de la décision du 17 décembre 2021. Par la présente requête, le CAS de Forcalquier-Mane demande à la Cour d'annuler le jugement du 16 janvier 2024 par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé l'ensemble de ces décisions.
Sur le motif d'annulation retenu par le tribunal administratif de Marseille :
2. Aux termes du IV de l'article 21 bis de la loi du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, applicable au litige dans sa rédaction à la date à laquelle la maladie de Mme A... a été médicalement constatée : " (...) Peut également être reconnue imputable au service une maladie non désignée dans les tableaux de maladies professionnelles mentionnés aux articles L. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale lorsque le fonctionnaire ou ses ayants droit établissent qu'elle est essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions et qu'elle entraîne une incapacité permanente à un taux déterminé et évalué dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat. ".
3. Pour rejeter, par sa décision du 12 octobre 2021, la demande de Mme A... tendant à ce que soit reconnue l'imputabilité au service de ses arrêts de travail à compter du 28 décembre 2020, le CAS de Forcalquier-Mane a considéré qu'il ne pouvait être établi de lien direct et certain avec le service dans la mesure où l'agent n'avait jamais repris ses fonctions au sein de l'établissement depuis le 12 février 2018.
4. L'administration peut, en première instance comme en appel, faire valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée est légalement justifiée par un motif, de droit ou de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existant à la date de cette décision. Il appartient alors au juge, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif est de nature à fonder légalement la décision, puis d'apprécier s'il résulte de l'instruction que l'administration aurait pris la même décision si elle s'était fondée initialement sur ce motif. Dans l'affirmative, il peut procéder à la substitution demandée, sous réserve toutefois qu'elle ne prive pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
5. Pour établir que la décision litigieuse était légale, le CAS de Forcalquier-Mane invoque, dans ses mémoires en défense présentés en première instance et en appel, et communiqués à Mme A..., un autre motif tiré de ce que la cause déterminante de la pathologie de Mme A... trouve son origine dans des faits personnels de l'agent.
6. Il ressort des pièces du dossier que Mme A... a transmis à son employeur un avis d'arrêt de travail à compter du 28 décembre 2020. Selon ce certificat, précisé par les certificats médicaux des 19 décembre 2020, 28 décembre 2020 et 7 avril 2021 établis par le psychologue et le médecin généraliste qui assurent son suivi, elle présente des symptômes dépressifs réactionnels, des troubles du sommeil, de l'hyper vigilance, de l'anxiété sociale, des comportements d'évitement, une perte de confiance, et une perte de ses repères et aspirations professionnelles. Toujours selon ces documents médicaux, Mme A... souffre d'un profond sentiment d'injustice et de solitude et présente une fragilité amplifiée qui résulte de conflits survenus au cours de son stage au sein du CAS de Forcalquier-Mane, particulièrement en décembre 2017 et janvier 2018 en raison d'accusations portées par son entourage professionnel.
7. Il ressort toutefois des pièces du dossier que Mme A... s'est vue notifier une décision de suspension de fonctions datée du 19 décembre 2017, qu'elle n'a pas contestée, motivée par la nécessité d'agir rapidement pour assurer la bonne marche de la structure. Il ressort par ailleurs de deux rapports du chef de service établis les 8 et 21 septembre 2017, ainsi que du rapport du 12 décembre 2017 du directeur du CAS de Forcalquier-Mane, que l'intéressée a non seulement fait preuve d'un manque d'implication et de négligences graves dans l'exercice de ses fonctions, mais qu'elle a, de surcroît, adopté un comportement particulièrement inapproprié tant avec les résidents de l'établissement, avec lesquels elle a parfois entretenu des relations ambigües sans respect de la nécessaire distanciation psychologique et des barrières organisationnelles mises en place, et ce, en dépit de leur grande fragilité, qu'avec une partie importante du personnel, de nombreux agents ayant signalé au chef de service les difficultés rencontrées avec l'intéressée.
De plus, au cours d'un entretien qui s'est tenu le 14 décembre 2017 avec le directeur de l'établissement afin d'évoquer ces difficultés, Mme A... a accusé son chef de service de harcèlement à l'égard de la coordinatrice de l'établissement, faits non étayés et démentis fermement par cette dernière dès le 18 décembre suivant. L'ensemble des faits reprochés à Mme A... a justifié, à la suite de nouveaux témoignages parvenus au chef d'établissement au début du mois de janvier 2021, la saisine du conseil de discipline, lequel a rendu le 8 avril 2021 un avis favorable à l'unanimité à la sanction de l'exclusion définitive proposée par le directeur de l'établissement. La circonstance que l'administration ait décidé de ne pas poursuivre la procédure disciplinaire à son terme n'est pas de nature à remettre en cause la matérialité des faits reprochés, établis par les nombreuses pièces versées dans la présente instance par l'appelant. Et il en va de même, contrairement à ce qu'a jugé le tribunal administratif, des circonstances selon lesquelles, d'une part, le parquet a classé sans suite le signalement du directeur du CAS de Forcalquier-Mane, et, d'autre part, la décision initiale de refus de titularisation pour insuffisance professionnelle du 12 février 2018 a été annulée par un précédent jugement du 13 juillet 2020. Dans ces conditions, il résulte de ce qui vient d'être exposé que c'est son propre comportement au cours du stage au sein du CAS de Forcalquier-Mane qui est la cause déterminante de la dégradation des conditions d'exercice professionnel de Mme A..., et qui constitue un fait personnel de nature à détacher la survenance de la maladie du service, laquelle, dès lors, n'a pas été essentiellement et directement causée par l'exercice des fonctions.
8. Enfin, il résulte de l'instruction que le CAS de Forcalquier-Mane aurait pris la même décision s'il s'était fondé sur le motif exposé au point précédent. Il y a lieu, par suite, de procéder à la substitution demandée, qui ne prive pas l'intimée d'une garantie procédurale liée au motif substitué.
9. Il résulte de ce qui précède que le CAS de Forcalquier-Mane est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a accueilli le moyen tiré de l'erreur d'appréciation pour annuler la décision du 12 octobre 2021 portant rejet de la demande de Mme A... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie, et qu'il a annulé, par voie de conséquence, les décisions des 19 novembre 2021, 17 décembre 2021, et 1er juin 2022.
10. Il appartient toutefois à la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens de la demande de Mme A....
Sur les autres moyens soulevés tant en première instance qu'en appel par Mme A... :
En ce qui concerne la légalité de la décision du 12 octobre 2021 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a rejeté la demande de Mme A... tendant à la reconnaissance de l'imputabilité au service de sa maladie et l'a placée en position de congé de maladie ordinaire du 28 décembre 2020 au 15 novembre 2021 :
11. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 6° Refusent un avantage dont l'attribution constitue un droit pour les personnes qui remplissent les conditions légales pour l'obtenir ; (...) ".
Aux termes de ceux de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ". Il résulte de ces dispositions que le refus de reconnaître l'imputabilité au service d'un accident ou d'une maladie est au nombre des décisions qui doivent être motivées.
12. La décision attaquée, après avoir visé les dispositions législatives et règlementaires applicables ainsi que l'avis défavorable de la commission de réforme du 16 septembre 2021,
se fonde sur l'absence d'élément permettant d'établir un lien entre le service et la pathologie dont souffre Mme A.... Elle satisfait ainsi à l'exigence de motivation en fait prescrite par les dispositions des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.
13. En deuxième lieu, aux termes de l'article 9 du décret 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux : " Le médecin du service de médecine préventive prévu à l'article 108-2 de la loi du 26 janvier 1984 susvisée compétent à l'égard du fonctionnaire dont le cas est soumis au comité médical est informé de la réunion et de son objet. Il peut obtenir s'il le demande communication du dossier de l'intéressé. Il peut présenter des observations écrites ou assister à titre consultatif à la réunion. Il remet obligatoirement un rapport écrit dans les cas prévus aux articles 24, 33 et 37-7 ci-dessous. / L'intéressé et l'administration peuvent faire entendre le médecin de leur choix par le comité médical. "
14. Dès lors que Mme A... relevait de la fonction publique hospitalière et non de la fonction publique territoriale, elle ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article 9 du décret du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux, seul fondement juridique dont la méconnaissance a été soulevée en première instance sans être modifié en appel.
15. En troisième lieu, aux termes de l'article 3 de l'arrêté du 4 août 2004 susvisé : " (...) la commission de réforme (...) comprend (...) deux représentant du personnel (...) ". Aux termes de son article 17 : " La commission ne peut délibérer valablement que si au moins quatre de ses membres ayant voix délibérative assistent à la séance (...). ".
16. Si aucun représentant du personnel n'était présent lors de la séance de la commission de réforme du 16 septembre 2021, cette circonstance est sans incidence sur la régularité de la procédure, dès lors que le quorum prévu à l'article 17 de l'arrêté du 4 août 2004 était atteint. Ainsi, la procédure ne peut être regardée comme viciée.
17. Enfin, en quatrième lieu, il résulte de ce qui a été exposé aux points 5 à 8 du présent arrêt que c'est sans commettre d'erreur d'appréciation ni d'erreur de fait ou d'erreur de droit que, par sa décision du 12 octobre 2021, le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a refusé de reconnaître l'imputabilité au service des arrêts maladie de Mme A... à compter du 28 décembre 2020. Dès lors, cette décision, qui n'est pas constitutive d'une sanction déguisée, n'est pas intervenue, en tout état de cause, en méconnaissance du principe " non bis in idem ".
En ce qui concerne les conclusions à fin d'annulation de la décision du 19 novembre 2021 :
18. Mme A... demande l'annulation de la décision du 19 novembre 2021 par laquelle le CAS de Forcalquier-Mane a décidé, selon ses affirmations, de la maintenir en congé de maladie ordinaire à compter du 16 novembre 2021. Toutefois, par le courrier qui lui a été adressé le 19 novembre 2021, le CAS de Forcalquier-Mane s'est borné à informer l'intéressée de ce que sa demande de reprise de fonctions à compter du 16 novembre 2021 ne pouvait être accueillie au regard de l'avis émis par le médecin du travail, et que dans la mesure où elle n'avait pas épuisé ses droits à congé de maladie ordinaire, elle devait faire parvenir une prolongation d'arrêt maladie dans les meilleurs délais. Par ce courrier, le CAS de Forcalquier-Mane informe l'intéressée de la saisine du comité médical pour statuer sur la prolongation de l'arrêt maladie au-delà du délai de six mois. Par conséquent, ledit courrier n'a eu ni pour objet, ni pour effet de placer Mme A... en position de congé de maladie ordinaire contrairement à ce qu'elle soutient. Ce faisant, il ne fait pas grief et n'est, dès lors, pas susceptible d'être contesté par la voie du recours pour excès de pouvoir. Par suite, la demande d'annulation de la décision du 19 novembre 2021, en tant qu'elle emporterait le maintien de l'intéressée en position de congé de maladie ordinaire à compter du 16 novembre 2021, est irrecevable et doit être rejetée.
En ce qui concerne la légalité de la décision du 17 décembre 2021 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a placé Mme A... en congés sans traitement à compter du 28 décembre 2021 et ce jusqu'à l'avis de la commission de réforme :
19. En premier lieu, la décision attaquée, qui vise tant l'avis du médecin du travail du 16 novembre 2021 que l'avis d'inaptitude du comité médical du 2 décembre 2021, expose les raisons pour lesquelles le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a placé Mme A... en position de congés sans traitement, à savoir l'expiration de ses droits à congé de maladie ordinaire d'une durée de douze mois. Par suite, elle est suffisamment motivée contrairement à ce que soutient l'intimée.
20. En deuxième lieu, aux termes de l'article 7 du décret n° 88-386 du 19 avril 1988 relatif aux conditions d'aptitude physique et aux congés de maladie des agents de la fonction publique hospitalière : " Les comités médicaux (...) sont consultés obligatoirement en ce qui concerne : / 1. La prolongation des congés de maladie au-delà de six mois consécutifs ; (...) /
4. La réintégration après douze mois consécutifs de congés de maladie ou à l'issue d'un congé de longue maladie ou de longue durée ; (...) / Le secrétariat du comité médical informe le fonctionnaire : / - de la date à laquelle le comité médical examinera son dossier ; / - de ses droits relatifs à la communication de son dossier et à la possibilité de faire entendre le médecin de son choix ; / - des voies de recours possibles devant le comité médical supérieur. ". Le droit pour un agent de faire entendre le médecin de son choix par le comité médical devant se prononcer sur sa situation implique, en raison du caractère contradictoire de la procédure instituée par les dispositions précitées, l'obligation pour l'administration d'informer l'intéressé de cette possibilité avant la réunion du comité médical.
21. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.
22. Pour le même motif que celui exposé au point 14, Mme A... ne peut utilement invoquer la méconnaissance des dispositions de l'article 4 du décret du 30 juillet 1987 relatif à l'organisation des conseils médicaux, aux conditions d'aptitude physique et au régime des congés de maladie des fonctionnaires territoriaux. En admettant qu'elle ait entendu se prévaloir d'une méconnaissance des dispositions citées au point 20 de l'article 7 du décret n° 88-386 du 19 avril 1988, il ressort des pièces du dossier que, par courrier du 23 novembre 2021, le secrétariat du comité médical départemental l'a informée de ce que son dossier devait être examiné par cette instance le 2 décembre 2021 et qu'elle avait la possibilité de faire entendre le médecin de son choix. Si Mme A... soutient qu'elle n'a reçu ce courrier que le 29 novembre 2021, ce qui ne lui aurait pas permis de faire valoir ses droits, elle n'établit pas ni même n'allègue qu'elle aurait sollicité un report de la séance afin de permettre à son médecin de se faire entendre par les membres du comité. De plus, par courriel du 1er décembre 2021, Mme A... a transmis au secrétariat du comité médical une attestation de son psychologue et de sa psychiatre qui a été présentée aux membres du comité. Par conséquent, dès lors que l'intéressée n'établit pas ni même n'allègue que ces praticiens auraient disposé d'éléments supplémentaires qui, s'ils avaient été portés à la connaissance des membres de cette instance, auraient été de nature à influencer la décision prise, le moyen tiré du vice de procédure doit être écarté.
23. En troisième lieu, en vertu d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés que les règles statutaires applicables aux fonctionnaires, en cas d'inaptitude physique définitive, médicalement constatée, à occuper un emploi, il appartient à l'employeur de reclasser l'intéressé dans un autre emploi et, en cas d'impossibilité, de prononcer son licenciement dans les conditions qui lui sont applicables. Toutefois, ni ce principe général ni les dispositions de la loi du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière, et pas davantage celle du décret du 12 mai 1997 fixant les dispositions communes applicables aux agents stagiaires de la fonction publique hospitalière, ne confèrent aux fonctionnaires stagiaires, qui se trouvent dans une situation d'accès à l'emploi probatoire et provisoire, un droit à être reclassés dans l'attente d'une titularisation pour toute inaptitude physique définitive.
24. Par suite, et alors, au demeurant, que la décision attaquée n'a eu ni pour objet, ni pour effet, de prononcer l'inaptitude définitive et absolue de Mme A... à l'exercice de ses fonctions, le moyen tiré de ce qu'elle serait intervenue sans que le CAS de Forcalquier-Mane ait cherché à reclasser Mme A... doit être écarté.
25. En quatrième lieu, il résulte de ce qui a été précédemment exposé que la décision du 12 octobre 2021 par laquelle le CAS de Forcalquier-Mane a rejeté la demande de congé pour invalidité temporaire imputable au service de Mme A... à compter du 28 décembre 2020 n'est pas entachée d'illégalité. Par suite, l'intéressée, qui n'avait pas droit au maintien d'un plein traitement, n'est pas fondée à soutenir que la décision du 17 décembre 2021 la plaçant en congés sans traitement serait entachée d'une erreur de droit ou d'une erreur manifeste d'appréciation.
26. Enfin, en cinquième et dernier lieu, la décision du 17 décembre 2021, qui n'est pas constitutive d'une sanction déguisée, n'est pas intervenue, en tout état de cause, en méconnaissance du principe " non bis in idem " ni n'est entachée d'un détournement de pouvoir.
27. Par suite, sans qu'il soit besoin de statuer sur l'exception de non-lieu à statuer soulevée en première instance par le CAS de Forcalquier-Mane, la demande de Mme A... tendant à l'annulation de la décision du 17 décembre 2021 doit être rejetée.
En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la décision du 1er juin 2022 par laquelle le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a maintenu à titre conservatoire un demi-traitement à Mme A... pour la période du 28 décembre 2021 au 31 mai 2022 :
28. Il ressort des pièces du dossier que, par ordonnance du 8 avril 2022, la juge des référés du tribunal administratif de Marseille a suspendu l'exécution de la décision du 17 décembre 2021 par laquelle le directeur du centre d'accueil spécialisé de Forcalquier-Mane a placé Mme A... en congé sans traitement à compter du 28 décembre 2021, et a enjoint à cette autorité de procéder à un nouvel examen de la situation de Mme A.... En exécution de cette ordonnance, le directeur du CAS de Forcalquier-Mane a, par sa décision du 1er juin 2022, maintenu à titre conservatoire un demi-traitement au bénéfice de Mme A... pour la période du 28 décembre 2021 au 31 mai 2022. Au regard des effets d'une éventuelle annulation de cette décision, qui ferait perdre à l'intéressée le bénéfice d'un demi-traitement et la placerait, ce faisant, dans une situation plus défavorable que celle résultant de son exécution, Mme A... ne justifie pas d'un intérêt à agir contre celle-ci. Par suite, la demande tendant à ce que soit prononcée son annulation est irrecevable et doit être rejetée.
29. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur la régularité du jugement attaqué, que le CAS de Forcalquier-Mane est fondé à soutenir que c'est à tort que, par ce jugement, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 12 octobre 2021 par laquelle la demande de Mme A... de congé pour invalidité temporaire imputable au service a été rejetée, ainsi que les décisions des 19 novembre 2021, 17 décembre 2021 et 1er juin 2022. Par suite, ce jugement doit être annulé, et les demandes présentées par Mme A... devant le tribunal administratif de Marseille, en ce compris ses conclusions à fin d'injonction, doivent être rejetées.
30. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de laisser à chaque partie la charge des frais liés au litige en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement n° 2110885, 2200461, 2200563, 2205490 du 16 janvier 2024 du tribunal administratif de Marseille est annulé.
Article 2 : Les demandes de première instance et d'appel de Mme A... sont rejetées.
Article 3 : Les conclusions présentées par les parties en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié au centre d'accueil spécialisé de Forcalquier-Mane et à Mme B... A....
Délibéré après l'audience du 27 mai 2025, où siégeaient :
- M. Marcovici, président,
- M. Revert, président assesseur,
- M. Martin, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition du greffe, le 11 juin 2025.
N° 24MA00646 2