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04/04/2024 | FRANCE | N°24NC00087

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 04 avril 2024, 24NC00087


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme A... C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 6 juillet 2023 par laquelle le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités Grand Est a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société anonyme d'économie mixte Société ardennaise d'amélioration du cadre de vie.



Par un jugement n° 2301963 du 17 novembre 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ont demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 6 juillet 2023 par laquelle le directeur régional de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités Grand Est a homologué le document unilatéral fixant le plan de sauvegarde de l'emploi de la société anonyme d'économie mixte Société ardennaise d'amélioration du cadre de vie.

Par un jugement n° 2301963 du 17 novembre 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 6 juillet 2023.

Procédure devant la cour :

I. Par une requête, enregistrée le 12 janvier 2024, sous le n° 24NC00087, la société ardennaise d'amélioration du cadre de vie, représentée par Me Grisoni, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 novembre 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes une somme de 2 000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors que les premiers juges n'ont pas communiqué à Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes son mémoire en réplique enregistré le 23 octobre 2023 pourtant produit avant la clôture de l'instruction ;

- la requête de première instance est irrecevable faute pour Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes d'avoir produit la décision du 6 juillet 2023 ainsi que la décision unilatérale de l'employeur qui fixe ce plan de sauvegarde de l'emploi ;

- Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ont communiqué une version de la décision unilatérale de l'employeur qui fixe ce plan de sauvegarde de l'emploi qui n'est pas celle homologuée par la décision du 6 juillet 2023 ;

- la requête de première instance est irrecevable en raison du défaut de qualité à agir du secrétaire général de l'union départementale des syndicats Force ouvrière des Ardennes ;

S'agissant de la légalité de la décision du 6 juillet 2023 :

- les catégories professionnelles ont été valablement déterminées car il y a bien lieu de distinguer, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les tiers-valoristes des agents d'exploitation.

Par une ordonnance du 18 janvier 2024, la clôture de l'instruction a été fixée au 19 février 2024.

La requête a été communiquée le 18 janvier 2024 à la ministre du travail, de la santé et des solidarités, à Mme C... et à l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes qui n'ont pas produit de mémoire dans cette instance.

La société ardennaise d'amélioration du cadre de vie (ARCAVI) a produit un mémoire le 1er mars 2024, postérieurement à la clôture d'instruction, qui n'a pas été communiqué.

Vu les autres pièces du dossier.

II. Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2024, sous le n° 24NC00103, la ministre du travail, de la santé et des solidarités, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 novembre 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne.

Elle soutient que les catégories professionnelles ont été valablement déterminées car il y a bien lieu de distinguer, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, les tiers-valoristes des agents d'exploitation.

Par un mémoire, enregistré le 16 février 2024, Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes, représentées par la SCP Ledoux Ferri Riou-Jacques Touchon Mayolet, demandent à la cour :

1°) à titre principal, d'annuler la décision du 6 juillet 2023 au motif de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi ;

2°) à titre subsidiaire de confirmer le jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 novembre 2023 ;

3°) de mettre à la charge de la société ardennaise d'amélioration du cadre de vie une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

4°) de mettre à la charge du ministre du travail, de la santé et des solidarités une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête en appel n'a pas été introduite par une personne ayant qualité à agir au nom du ministre du travail, de la santé et des solidarités ;

- la société ardennaise d'amélioration du cadre de vie appartient en réalité à un groupe et à c'est à l'aune de celui-ci que le plan de sauvegarde de l'emploi aurait dû être évalué ;

- les mesures de reclassement sont insuffisantes ;

- les mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi sont inadaptées.

Par un mémoire, enregistré le 1er mars 2024, la société ardennaise d'amélioration du cadre de vie, représentée par Me Grisoni, demande à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 17 novembre 2023 ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes devant le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;

3°) de mettre à la charge de Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes une somme de 2 000 euros chacun sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir :

S'agissant de la régularité du jugement :

- le principe du contradictoire a été méconnu dès lors que les premiers juges n'ont pas communiqué à Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes son mémoire en réplique enregistré le 23 octobre 2023 pourtant produit avant la clôture de l'instruction ;

- la requête de première instance est irrecevable faute pour Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes d'avoir produit la décision du 6 juillet 2023 ainsi que la décision unilatérale de l'employeur qui fixe ce plan de sauvegarde de l'emploi ;

- Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ont communiqué une version de la décision unilatérale de l'employeur qui fixe ce plan de sauvegarde de l'emploi qui n'est pas celle homologuée par la décision du 6 juillet 2023 ;

- la requête de première instance est irrecevable en raison du défaut de qualité à agir du secrétaire général de l'union départementale des syndicats Force ouvrière des Ardennes ;

S'agissant de la légalité de la décision du 6 juillet 2023 :

- les catégories professionnelles ont été valablement déterminées car il y a bien lieu de distinguer, contrairement à ce qu'ont fait les premiers juges, les tiers-valoristes des agents d'exploitation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Sibileau, premier conseiller,

- les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique,

- et les observations de Me Laurent, pour la société ardennaise d'amélioration du cadre de vie, ainsi que celles de Mme B... représentant la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Considérant ce qui suit :

1. La société anonyme d'économie mixte Société ardennaise d'amélioration du cadre de vie (ci-après " la société ARCAVI ") exerce une activité de gestion, de traitement et de transport de déchets au sein de huit établissements situés dans le département des Ardennes. A la suite de difficultés économiques, et notamment d'un sinistre survenu en 2022 dans le centre de tri de Charleville-Mézières, qui a conduit à devoir cesser l'exploitation de celui-ci pour une longue durée et à placer les vingt-et-un salariés concernés en position d'activité partielle, elle a sollicité le 3 juillet 2023 de la direction régionale de l'économie, de l'emploi, du travail et des solidarités (ci-après " la DREETS ") Grand Est l'homologation du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi (ci-après " le document unilatéral ") et prévoyant la suppression d'un maximum de vingt emplois. Saisi par Mme C..., salariée de la société ARCAVI, et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a annulé la décision du 6 juillet 2023 par un jugement n° 2301963 du 17 novembre 2023 dont la société ARCAVI et la ministre du travail, de la santé et des solidarités interjettent appel. Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes présentent par ailleurs des conclusions d'appel incident à l'encontre du jugement en tant qu'il a annulé la décision du 6 juillet 2023 au motif de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi.

2. Les requêtes n° 24NC00087 et n° 24NC00103 sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 611-1 du code de justice administrative : " La requête et les mémoires, ainsi que les pièces produites par les parties, sont déposés ou adressés au greffe. / La requête, le mémoire complémentaire annoncé dans la requête et le premier mémoire de chaque défendeur sont communiqués aux parties avec les pièces jointes dans les conditions prévues aux articles R. 611-2 à R. 611-6. / Les répliques, autres mémoires et pièces sont communiqués s'ils contiennent des éléments nouveaux ". Aux termes de l'article R. 613-2 du même code : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne ".

4. La société ARCAVI a produit un second mémoire en défense, enregistré au greffe du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne, le 23 octobre 2023, soit avant la clôture automatique de l'instruction intervenant trois jours francs avant l'audience qui s'est tenue le 27 octobre 2023. Dès lors que le tribunal a fait droit à la demande de Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes, l'absence de communication de ce mémoire du 23 octobre 2023 à Mme C... et à l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes n'a pu préjudicier aux droits des appelants. Par suite, et alors en tout état de cause qu'il n'est pas allégué que ce mémoire comportait des éléments nouveaux, la société ARCAVI n'est pas fondée à soutenir que le jugement serait entaché d'irrégularité.

5. En second lieu, la société ARCAVI soutient que Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ont soulevé, à l'appui de leurs conclusions à fin d'annulation de la décision du 6 juillet 2023, des moyens tirés de l'irrégularité non du document unilatéral homologué par la décision contestée mais de l'irrégularité d'une version de travail de ce document. Elle se plaint également de ce que les premiers juges aient redirigés les moyens contre le document unilatéral effectivement homologué. Toutefois, la société ARCAVI n'établit pas par ses seules déclarations la matérialité de cette circonstance, qui au demeurant ne constituerait pas un exercice anormal de l'office du juge de l'excès de pouvoir saisi d'un recours contre la décision homologuant un plan de sauvegarde de l'emploi.

Sur la recevabilité de la demande de première instance :

6. En premier lieu, la circonstance que l'un des auteurs d'une requête collective ne justifie pas d'un intérêt à agir ou, s'agissant d'une personne morale, de la qualité pour agir de son représentant, ne fait pas obstacle à ce que les conclusions de cette requête soient jugées recevables. La demande de première instance a été présentée notamment par Mme A... C..., employée de la société ARCAVI directement concernée par le plan de sauvegarde de l'emploi et dont l'intérêt à agir n'est nullement contesté. Dès lors, la société ARCAVI n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance est irrecevable.

7. En second lieu, aux termes de l'article R. 412-1 du code de justice administrative : " La requête doit, à peine d'irrecevabilité, être accompagnée, sauf impossibilité justifiée, de l'acte attaqué ou, dans le cas mentionné à l'article R. 421-2, de la pièce justifiant de la date de dépôt de la réclamation (...) ".

8. Il ressort des pièces du dossier soumis aux premiers juges que la demande de première instance de Mme C... et de l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes dirigée contre la décision du 6 juillet 2023 n'était accompagnée ni d'une copie de ce document ni d'une copie du document unilatéral. Toutefois, la société ARCAVI avait joint une copie de la décision attaquée à son mémoire enregistré le 5 octobre 2023 au greffe du tribunal, avant la clôture de l'instruction. De surcroît, en tout état de cause, la DREETS a également joint une copie du document unilatéral à son mémoire du 6 octobre 2023 enregistré le 5 octobre 2023 au greffe du tribunal, avant la clôture de l'instruction. Par conséquent, la société ARCAVI n'est pas fondée à soutenir que la demande de première instance était irrecevable.

Sur les appels principaux formés par la société ARCAVI et la ministre du travail, de la santé et des solidarités :

9. Aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. (...) " Aux termes de l'article L. 1233-24-2 du même code : " L'accord collectif mentionné à l'article L. 1233-24-1 porte sur le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi mentionné aux articles L. 1233-61 à L. 1233 63. / Il peut également porter sur : (...) 4° Le nombre de suppressions d'emploi et les catégories professionnelles concernées (...) ". L'article L. 1233-57-3 du même code prévoit qu'en l'absence d'accord collectif, ou en cas d'accord ne portant pas sur l'ensemble des points mentionnés aux 1° à 5° : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2 (...) ".

10. En vertu de ces dispositions, il appartient à l'administration, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document qui fixe les catégories professionnelles mentionnées au 4° de l'article L. 1233-24-2 cité ci-dessus, de s'assurer, au vu de l'ensemble des éléments qui lui sont soumis, notamment des échanges avec les représentants du personnel au cours de la procédure d'information et de consultation ainsi que des justifications qu'il appartient à l'employeur de fournir, que ces catégories regroupent, en tenant compte des acquis de l'expérience professionnelle qui excèdent l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur, l'ensemble des salariés qui exercent, au sein de l'entreprise, des fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune. Au terme de cet examen, l'administration refuse l'homologation demandée s'il apparaît que les catégories professionnelles concernées par le licenciement ont été déterminées par l'employeur en se fondant sur des considérations, telles que l'organisation de l'entreprise ou l'ancienneté des intéressés, qui sont étrangères à celles qui permettent de regrouper, compte tenu des acquis de l'expérience professionnelle, les salariés par fonctions de même nature supposant une formation professionnelle commune, ou s'il apparaît qu'une ou plusieurs catégories ont été définies dans le but de permettre le licenciement de certains salariés pour un motif inhérent à leur personne ou en raison de leur affectation sur un emploi ou dans un service dont la suppression est recherchée.

11. Il ressort des pièces du dossier que le plan de sauvegarde de l'emploi soumis à l'homologation de l'administration comporte onze catégories professionnelles. La catégorie de trieur-valoriste, qui comprend seize salariés, et dont aucun poste ne doit être maintenu, est distincte de la catégorie des agents d'exploitation, pour lesquels est envisagé le maintien de sept des onze postes. Si les appelants soutiennent que les emplois relevant de la catégorie des agents d'exploitation nécessitent une expérience de deux ans de conduite d'engins tels que chargeuse, pelle avec pince de tri ou pelle avec grapin, il ressort des pièces du dossier, et notamment des échanges entre la société et l'administration qui sont produits, que tous les postes de travail rattachés à cette catégorie ne nécessitent pas de telles compétences. Il en va ainsi par exemple du poste d'agent de maintenance nettoyage centre de tri, du poste intitulé polyvalence technique centre de tri, des deux postes d'ouvriers d'entretien sur les sites de Damouzy et de Fumay et du poste de réceptionniste sur le site de Chalandry. Par ailleurs, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'acquisition des compétences informatiques nécessaires pour renseigner les rapports journaliers d'exploitation sur l'application informatique dédiée excéderait l'obligation d'adaptation qui incombe à l'employeur. Enfin, il ressort des échanges entre la société ARCAVI et l'administration, et tout particulièrement des courriers électroniques des 27 et 28 juin 2023 que les modifications apportées entre le premier et le second projet du document unilatéral ont pour but de masquer l'objectif poursuivi par la société ARCAVI qui est essentiellement de permettre le licenciement des employés travaillant au centre de tri de Charleville-Mézières qui est le seul établissement réellement visé par la procédure de licenciement. Dans ces conditions, la définition d'une catégorie professionnelle spécifique aux trieurs-valoristes doit être regardée comme visant à permettre le licenciement des seize salariés affectés au centre de tri de Charleville-Mézières. Par conséquent, en homologuant le document unilatéral qui lui était soumis, l'administration a entaché sa décision d'illégalité.

12. Il résulte de ce qui précède que la société ARCAVI et la ministre du travail, de la santé et des solidarités ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif a annulé la décision du 6 juillet 2023.

Sur l'appel incident, formé par Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes :

En ce qui concerne le cadre juridique relatif à l'appel incident :

13. Aux termes de l'article L. 1235-10 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, le licenciement intervenu en l'absence de toute décision relative à la validation ou à l'homologation ou alors qu'une décision négative a été rendue est nul. / En cas d'annulation d'une décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-3 en raison d'une absence ou d'une insuffisance de plan de sauvegarde de l'emploi mentionné à l'article L. 1233-61, la procédure de licenciement est nulle. / (...) ". Aux termes de l'article L. 1235-11 du même code : " Lorsque le juge constate que le licenciement est intervenu alors que la procédure de licenciement est nulle, conformément aux dispositions des deux premiers alinéas de l'article L. 1235-10, il peut ordonner la poursuite du contrat de travail ou prononcer la nullité du licenciement et ordonner la réintégration du salarié à la demande de ce dernier, sauf si cette réintégration est devenue impossible, notamment du fait de la fermeture de l'établissement ou du site ou de l'absence d'emploi disponible. / Lorsque le salarié ne demande pas la poursuite de son contrat de travail ou lorsque la réintégration est impossible, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l'employeur qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. ". Aux termes de l'article L. 1235-16 du même code : " L'annulation de la décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-3 pour un motif autre que celui mentionné au dernier alinéa du présent article et au deuxième alinéa de l'article L. 1235-10 donne lieu, sous réserve de l'accord des parties, à la réintégration du salarié dans l'entreprise, avec maintien de ses avantages acquis. / A défaut, le salarié a droit à une indemnité à la charge de l'employeur, qui ne peut être inférieure aux salaires des six derniers mois. Elle est due sans préjudice de l'indemnité de licenciement prévue à l'article L. 1234-9. / En cas d'annulation d'une décision de validation mentionnée à l'article L. 1233-57-2 ou d'homologation mentionnée à l'article L. 1233-57-3 en raison d'une insuffisance de motivation, l'autorité administrative prend une nouvelle décision suffisamment motivée dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à l'administration. Cette décision est portée par l'employeur à la connaissance des salariés licenciés à la suite de la première décision de validation ou d'homologation, par tout moyen permettant de conférer une date certaine à cette information. / Dès lors que l'autorité administrative a édicté cette nouvelle décision, l'annulation pour le seul motif d'insuffisance de motivation de la première décision de l'autorité administrative est sans incidence sur la validité du licenciement et ne donne lieu ni à réintégration, ni au versement d'une indemnité à la charge de l'employeur ".

14. D'une part, il résulte des dispositions qui viennent d'être citées que, pour les entreprises qui ne sont pas en redressement ou en liquidation judiciaire, le législateur a attaché à l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi des effets qui diffèrent selon le motif pour lequel cette annulation est prononcée. Par suite, lorsque le juge administratif est saisi d'une requête dirigée contre une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi d'une entreprise qui n'est pas en redressement ou en liquidation judiciaire, il doit, si cette requête soulève plusieurs moyens, toujours commencer par se prononcer, s'il est soulevé devant lui, sur le moyen tiré de l'absence ou de l'insuffisance du plan, même lorsqu'un autre moyen est de nature à fonder l'annulation de la décision administrative, compte tenu des conséquences particulières qui, en application de l'article L. 1235-11 du code du travail, sont susceptibles d'en découler pour les salariés. En outre, compte tenu de ce que l'article L. 1235-16 de ce code, dans sa rédaction issue de la loi du 6 août 2015, prévoit désormais que l'annulation d'une telle décision administrative, pour un autre motif que celui tiré de l'absence ou de l'insuffisance du plan, est susceptible d'avoir des conséquences différentes selon que cette annulation est fondée sur un moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision en cause ou sur un autre moyen, il appartient au juge administratif de se prononcer ensuite sur les autres moyens éventuellement présentés à l'appui des conclusions aux fins d'annulation pour excès de pouvoir de cette décision, en réservant, à ce stade, celui tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision administrative. Enfin, lorsqu'aucun de ces moyens n'est fondé, le juge administratif doit se prononcer sur le moyen tiré de l'insuffisance de la motivation de la décision administrative lorsqu'il est soulevé.

15. D'autre part, l'annulation pour excès de pouvoir d'une décision d'homologation ou de validation d'un plan de sauvegarde de l'emploi ayant des effets qui diffèrent, comme il a été dit ci-dessus, selon le motif pour lequel cette annulation est prononcée, des conclusions à fin d'appel incident dirigées contre le dispositif du jugement ayant annulé pour excès de pouvoir une telle décision, présentées par les parties de première instance qui avaient conclu à cette annulation, sont recevables dès lors que celles-ci soutiennent que le motif d'annulation retenu par le jugement n'était pas celui sur lequel les premiers juges auraient dû se prononcer en premier lieu et qui était susceptible d'avoir des conséquences plus favorables pour les salariés concernés.

En ce qui concerne les moyens tirés de l'insuffisance du plan de sauvegarde de l'emploi :

16. D'une part, s'agissant du plan de sauvegarde de l'emploi devant précéder les licenciements pour motif économique de plus de dix salariés, aux termes de l'article L. 1233-61 du code du travail : " Dans les entreprises d'au moins cinquante salariés, lorsque le projet de licenciement concerne au moins dix salariés dans une même période de trente jours, l'employeur établit et met en œuvre un plan de sauvegarde de l'emploi pour éviter les licenciements ou en limiter le nombre. / Ce plan intègre un plan de reclassement visant à faciliter le reclassement sur le territoire national des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, notamment celui des salariés âgés ou présentant des caractéristiques sociales ou de qualification rendant leur réinsertion professionnelle particulièrement difficile. " Aux termes de l'article L. 1233-62 du même code : " Le plan de sauvegarde de l'emploi prévoit des mesures telles que : / 1° Des actions en vue du reclassement interne sur le territoire national, des salariés sur des emplois relevant de la même catégorie d'emplois ou équivalents à ceux qu'ils occupent ou, sous réserve de l'accord exprès des salariés concernés, sur des emplois de catégorie inférieure ; (...) ". Aux termes de l'article L. 1233-24-4 du même code : " A défaut d'accord (...), un document élaboré par l'employeur après la dernière réunion du comité social et économique fixe le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi et précise les éléments prévus aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, dans le cadre des dispositions légales et conventionnelles en vigueur. ". Aux termes de l'article L. 1233-57-3 du même code : " (...) l'autorité administrative homologue le document élaboré par l'employeur mentionné à l'article L. 1233-24-4, après avoir vérifié la conformité de son contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles relatives aux éléments mentionnés aux 1° à 5° de l'article L. 1233-24-2, la régularité de la procédure d'information et de consultation du comité social et économique, le respect, le cas échéant, des obligations prévues aux articles L. 1233-57-9 à L. 1233-57-16, L. 1233-57-19 et L. 1233-57-20 et le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe ; / 2° Les mesures d'accompagnement prévues au regard de l'importance du projet de licenciement ; / 3° Les efforts de formation et d'adaptation tels que mentionnés aux articles L. 1233-4 et L. 6321-1 ".

17. Il résulte de l'ensemble des dispositions citées ci-dessus que, lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il appartient à l'administration, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, de vérifier la conformité de ce document et du plan de sauvegarde de l'emploi dont il fixe le contenu aux dispositions législatives et aux stipulations conventionnelles applicables, en s'assurant notamment du respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des dispositions des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du même code. A ce titre, elle doit, au regard de l'importance du projet de licenciement, apprécier si les mesures contenues dans le plan sont précises et concrètes et si, à raison, pour chacune, de sa contribution aux objectifs de maintien dans l'emploi et de reclassement des salariés, elles sont, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire à ces objectifs compte tenu, d'une part, des efforts de formation et d'adaptation déjà réalisés par l'employeur et, d'autre part, des moyens dont disposent l'entreprise et, le cas échéant, l'unité économique et sociale et le groupe.

18. D'autre part, concernant le licenciement pour motif économique d'un salarié, qu'il soit ou non précédé d'un plan de sauvegarde de l'emploi, aux termes de l'article L. 1233-4 du code du travail : " Le licenciement pour motif économique d'un salarié ne peut intervenir que lorsque tous les efforts de formation et d'adaptation ont été réalisés et que le reclassement de l'intéressé ne peut être opéré sur les emplois disponibles, situés sur le territoire national dans l'entreprise ou les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie et dont l'organisation, les activités ou le lieu d'exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel. / (...) L'employeur adresse de manière personnalisée les offres de reclassement à chaque salarié ou diffuse par tout moyen une liste des postes disponibles à l'ensemble des salariés, dans des conditions précisées par décret. / Les offres de reclassement proposées au salarié sont écrites et précises ".

19. Il résulte de l'ensemble de ces dispositions qu'au stade du document unilatéral portant plan de sauvegarde de l'emploi d'une entreprise, il revient notamment à l'autorité administrative de s'assurer qu'en application des articles L. 1233-61 et suivants du code du travail, le plan de reclassement intégré au plan de sauvegarde de l'emploi est de nature à faciliter le reclassement des salariés dont le licenciement ne pourrait être évité, que l'employeur a identifié dans le plan l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise et, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, que l'employeur, seul débiteur de l'obligation de reclassement, a procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement sur le territoire national dans les autres entreprises du groupe, quelle que soit la durée des contrats susceptibles d'être proposés pour pourvoir à ces postes, en indiquant dans le plan, pour l'ensemble des postes de reclassement ainsi identifiés, leur nombre, leur nature et leur localisation. En revanche, à ce stade de la procédure, il ne lui appartient pas de contrôler le respect de l'obligation qui, en application de l'article L. 1233-4 du code du travail, incombe à l'employeur qui projette de licencier un salarié pour motif économique, consistant à procéder, préalablement à son licenciement, à une recherche sérieuse des postes disponibles pour le reclassement de ce salarié, qu'ils soient ou non prévus au plan de sauvegarde de l'emploi, en vue d'éviter autant que de possible ce licenciement. Il en va ainsi même lorsque le document unilatéral arrêtant le plan de sauvegarde d'emploi comporte des garanties relatives à la mise en œuvre de l'obligation, prévue à l'article L. 1233-4 du code du travail, de recherche sérieuse de reclassement individuel. Au demeurant, de telles garanties, dont les salariés pourront, le cas échéant, se prévaloir, pour contester leur licenciement, ne sont pas de nature à dispenser l'employeur de respecter, dans toute son étendue, l'obligation qui lui incombe en vertu de l'article L. 1233-4 du code du travail.

20. En premier lieu, au titre du contrôle qui incombe à l'administration lorsqu'elle est saisie d'une demande d'homologation d'un document élaboré en application de l'article L. 1233-24-4 du code du travail, il lui appartient notamment d'apprécier, en vertu des dispositions de l'article L. 1233-57-3 du même code, " (...) le respect par le plan de sauvegarde de l'emploi des articles L. 1233-61 à L. 1233-63 en fonction des critères suivants : / 1° Les moyens dont disposent l'entreprise, l'unité économique et sociale et le groupe (...) ". Pour l'application de ces dispositions et à la différence du groupe au sein duquel doivent s'effectuer les recherches de postes de reclassement, les moyens du groupe s'entendent des moyens, notamment financiers, dont dispose l'ensemble des entreprises placées, ainsi qu'il est dit au I de l'article L. 2331-1 du code du travail, sous le contrôle d'une même entreprise dominante dans les conditions définies à l'article L. 233-1, aux I et II de l'article L. 233-3 et à l'article L. 233-16 du code de commerce, ainsi que de ceux dont dispose cette entreprise dominante, quel que soit le lieu d'implantation du siège de ces entreprises.

21. D'une part, si Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes soutiennent que le département des Ardennes, actionnaire à 63 % de la société ARCAVI constitue un " groupe " au sens des dispositions précitées, ils n'assortissent leurs allégations d'aucune précision suffisante permettant d'apprécier le bien-fondé du moyen qu'ils entendent ainsi articuler à l'appui de leurs conclusions à fin d'annulation de la décision du 6 juillet 2023. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que la société ARCAVI possède une filiale dénommée Métha Garoterie. Si Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes soutiennent que la décision n'aurait pas pris en compte l'existence de cette société pour apprécier les moyens du plan de sauvegarde de l'emploi et le périmètre de l'obligation de reclassement, il ressort des pièces du dossier que Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes n'apportent aucune information sur la situation de cette filiale, dont la société ARCAVI n'est pas l'actionnaire majoritaire, et l'impact que cette omission aurait pu avoir sur l'appréciation par l'administration de la situation de droit et de fait propre à l'espèce. Il en résulte que ce moyen ne peut qu'être écarté.

22. En deuxième lieu, pour s'acquitter de son obligation de reclassement, l'employeur doit procéder à une recherche sérieuse des possibilités de reclassement du salarié, tant au sein de l'entreprise que dans les entreprises du groupe auquel elle appartient. Le juge peut, pour s'assurer du respect de cette obligation, tenir compte de l'ensemble des circonstances de fait, notamment de ce que les recherches de reclassement conduites au sein de la société avaient débouché sur des propositions précises de reclassement, de la nature et du nombre de ces propositions, ainsi que des motifs de refus avancés par le salarié. En revanche, il ne peut sans erreur de droit, quelles que soient ces circonstances de fait, estimer que l'absence de recherche au sein des autres entreprises du groupe auquel appartient l'employeur est sans incidence sur cette appréciation.

23. Tout d'abord, aux termes du III de l'article D. 1233-2-1 du code du travail : " En cas de diffusion d'une liste des offres de reclassement interne, celle-ci comprend les postes disponibles situés sur le territoire national dans l'entreprise et les autres entreprises du groupe dont l'entreprise fait partie. / La liste précise les critères de départage entre salariés en cas de candidatures multiples sur un même poste, ainsi que le délai dont dispose le salarié pour présenter sa candidature écrite. Ce délai ne peut être inférieur à quinze jours francs à compter de la publication de la liste, sauf lorsque l'entreprise fait l'objet d'un redressement ou d'une liquidation judiciaire (...) ". Or, au stade de l'examen d'une demande d'homologation d'un document unilatéral fixant le contenu du plan de sauvegarde de l'emploi, il revient seulement à l'autorité administrative, ainsi qu'il est dit ci-dessus, de vérifier que l'employeur a identifié dans le plan l'ensemble des possibilités de reclassement des salariés dans l'entreprise, et, lorsque l'entreprise appartient à un groupe, que l'employeur a procédé à une recherche sérieuse des postes disponibles pour un reclassement sur le territoire national, dans les autres entreprises du groupe de reclassement, en indiquant pour tous ces postes dans le plan leur nombre, leur nature et leur localisation. Par conséquent, Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ne peuvent utilement se prévaloir de la circonstance que le délai prévu par le plan de sauvegarde de l'emploi homologué par la décision du 6 juillet 2023 soit de dix jours.

24. Ensuite, si Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes font valoir que le délai de rembauche effectivement mis en œuvre est supérieur à celui prévu par le plan de sauvegarde de l'emploi, cette circonstance est postérieure à l'édiction de la décision attaquée et est, par conséquent, inopérante.

25. De surcroît, si Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes soutiennent que le délai d'application des mesures prévues par le plan de sauvegarde de l'emploi, en l'espèce de douze mois, est insuffisant, ils n'assortissent pas ce moyen des précisions, que ce soit en droit ou en fait, permettant à la cour d'en apprécier le bien-fondé.

26. Enfin, il ressort des pièces du dossier que la société ARCAVI a réservé une somme totale de 100 000 euros, soit en moyenne 5 000 euros par emploi dont la suppression est envisagée, pour le financement de mesures de reclassement telles que des aides à la formation, des aides à la création d'entreprise et des aides à la mobilité géographique. Il est ainsi prévu, dans le cadre des reclassements internes, le financement de voyages de reconnaissance et de formations d'adaptation, une somme maximale de 2 500 euros d'aide au déménagement, et un dispositif de maintien de la rémunération, dont les requérantes n'établissent pas qu'il serait sans objet au vu de l'ancienneté moyenne des salariés sur les postes dont la suppression est envisagée. Au titre du reclassement externe, l'engagement de l'employeur porte sur une somme maximale de 4 500 euros au titre de l'aide à la formation, une somme d'un même montant pour l'aide à la création et à la reprise d'entreprises et différentes aides à la mobilité comprenant une prime d'installation de 1 000 euros, une aide au déménagement pouvant atteindre 2 000 euros et le financement de déplacements en vue d'une recherche d'emploi dans la limite de 500 euros. Au vu de l'ensemble de ces mesures, dont le financement peut être mutualisé, compte tenu des moyens financiers dont dispose la société ARCAVI, dont le résultat de l'année 2022 était positif de 1 015 907 euros pour un chiffre d'affaires de 14 179 608 euros, le résultat prévisionnel de l'année 2023 étant déficitaire de 382 531 euros, et alors même que, compte tenu de la relative proximité géographique des postes pouvant être proposés au titre du reclassement interne, le financement de frais de séjour pour les voyages de reconnaissance et de frais de déménagement au-delà d'une distance de 50 kilomètres apparaissent dépourvus d'utilité, les mesures figurant dans le plan pouvaient être légalement regardées par l'administration comme étant, prises dans leur ensemble, propres à satisfaire aux objectifs mentionnés par les articles L. 1233-61 à L. 1233-63 du code du travail.

27. En troisième et dernier lieu, Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes reprochent à la société ARCAVI d'avoir prévu des mesures dont elle savait qu'elles ne seraient pas mobilisées et qu'elles n'engendreraient aucune dépense. De surcroît, Mme C... et l'Union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes estiment que d'autres mesures auraient été plus efficaces.

28. Tout d'abord, la circonstance, à la supposer établie, que le plan de sauvegarde de l'emploi ne soit pas exécuté conformément à la décision du 6 juillet 2023 est une circonstance postérieure à l'édiction de cette décision et, par suite, sans emport sur sa légalité. Ensuite, les circonstances, à les supposer établies, que l'exécution du plan de sauvegarde de l'emploi ne génère aucune dépense supplémentaire pour la société et que d'autres mesures auraient été plus opportunes ne sont pas au nombre de celles à l'aune desquelles le juge doit apprécier la légalité d'une décision homologuant le document unilatéral fixant un plan de sauvegarde de l'emploi.

29. Il résulte de ce qui a été exposé des points 13 à 28 Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes ne sont pas fondées à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a écarté les autres moyens soulevés à l'encontre de la décision du 6 juillet 2023. Par voie de conséquence leurs conclusions présentées à titre d'appel incident ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais d'instance :

30. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a lieu de faire droit ni aux conclusions de la société ARCAVI présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative d'une part ni à celles de Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes présentées sur le même fondement d'autre part.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la société ARCAVI est rejetée.

Article 2 : La requête de la ministre du travail, de la santé et des solidarités est rejetée.

Article 3 : Les conclusions d'appel incident présentées par Mme C... et l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes sont rejetées.

Article 4 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la Société ardennaise d'amélioration du cadre de vie, à Mme A... C..., à l'union départementale des syndicats Force Ouvrière des Ardennes, au syndicat CGT-FO et au ministre du travail, de la santé et des solidarités.

Délibéré après l'audience du 21 mars 2024, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- M. Sibileau, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 4 avril 2024.

Le rapporteur,

Signé : J.-B. SibileauLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : S. Robinet

La République mande et ordonne à la ministre du travail, de la santé et des solidarités en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

S. Robinet

2

N° 24NC00087-24NC00103


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 24NC00087
Date de la décision : 04/04/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: M. Jean-Baptiste SIBILEAU
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : LEDOUX FERRI YAHIAOUI RIOU-JACQUES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/04/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-04-04;24nc00087 ?
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