Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 29 mars 2023 par lequel le préfet de la Marne l'a obligée à quitter le territoire national dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être éloignée d'office.
Par un jugement n° 2300968 du 12 juillet 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté la demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 18 août 2023, Mme B..., représentée par Me Boia, demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté attaqué ;
3°) d'enjoindre au préfet de la Marne de réexaminer sa situation, dans un délai de deux mois à compter de l'arrêt et sous couvert d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- l'arrêté attaqué : méconnaît les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant et repose sur une appréciation manifestement erronée de sa situation et de ses conséquences sur sa situation en ce que sa fille sera exposée à l'excision en cas de retour au Nigeria y compris dans les trois Etats de Cross River, Bayelsa et Rivers contrairement à ce qu'a estimé l'administration.
Mme B... a été admise à l'aide juridictionnelle par décision du 14 septembre 2023.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le traité sur le fonctionnement de l'Union Européenne ;
- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement convoquées à l'audience publique.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer ses conclusions à l'audience publique.
Le rapport de M. Agnel a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., de nationalité nigériane, déclare être entrée en France le 30 novembre 2018. Elle a sollicité des autorités françaises son admission au séjour au titre de l'asile en raison de craintes en cas de retour dans son pays d'origine. Sa demande d'asile a été rejetée par une décision du 16 avril 2019 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par une décision du 12 novembre 2020 de la Cour nationale du droit d'asile. Elle a aussi sollicité l'admission au séjour au titre de l'asile pour le compte de sa fille née le 10 mars 2021. Cette demande d'asile a été rejetée par décision du 15 novembre 2021 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, confirmée par décision du 3 janvier 2023 de la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 29 mars 2023, le préfet de la Marne l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme B... relève appel du jugement du 12 juillet 2023 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.
3. Mme B... soutient que sa fille encourt des risques d'excision en cas de retour dans l'Etat d'Edo, Etat du Nigéria dont elle est originaire. Ces risques émaneraient de membres de sa famille maternelle et de la communauté dont elle est issue. Toutefois, la Cour nationale du droit d'asile a considéré, dans sa décision du 3 janvier 2023 rejetant la demande d'asile de la fille de Mme B..., qu'il existait des Etats du Nigéria proches du sien où elle peut se rendre sans risquer de voir sa fille se faire exciser, à savoir les Etats de Cross River, de Bayelsa et de River. Selon la cour, le départ de la requérante vers l'un de ces Etats permettrait ainsi à sa fille d'échapper à de tels risques. Si Mme B... se dit empêchée de rejoindre ces Etats, faute de disposer de ressources suffisantes et si elle soutient que les risques d'excision persistent dans ces territoires, ces circonstances ne permettent pas, à elles seules, d'affirmer que sa fille serait exposée directement à une mutilation génitale en cas de retour au Nigeria. Dans ces conditions, les décisions attaquées n'ont pas méconnu les normes ci-dessus reproduites et ne paraissent pas reposer sur une appréciation manifestement erronée de la situation de la requérante et de leurs conséquences sur sa situation.
4. L'arrêté attaqué n'a pas pour objet de se prononcer sur la demande de protection internationale de Mme B... ou de sa fille mineure. L'intéressée ne saurait ainsi utilement se prévaloir ni des dispositions de l'article L. 711-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ni de celles de l'article 9 de la directive 2011/95/UE du Parlement européen et du conseil du 13 décembre 2011, relatives aux conditions d'octroi du statut de réfugié.
5. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement, attaqué le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par suite, sa requête doit être rejetée en toutes ses conclusions y compris celles tendant à l'application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B..., à Me Boia et au ministre de l'intérieur.
Copie du présent arrêt sera transmise au préfet de la Marne.
Délibéré après l'audience du 26 septembre 2024, à laquelle siégeaient :
M. Martinez, président de chambre,
M. Agnel, président assesseur,
Mme Brodier, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 octobre 2024.
Le rapporteur,
Signé : M. AgnelLe président,
Signé : J. Martinez
La greffière,
Signé : C. Schramm
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
C. Schramm
N° 23NC02735
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