Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler la décision du 5 novembre 2020 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire a refusé de l'autoriser à utiliser le titre de paysagiste concepteur.
Par un jugement n° 2100078 du 16 novembre 2021, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 4 février 2022, M. B..., représenté par Me Boubal, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2100078 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 16 novembre 2021 ;
2°) d'annuler la décision du 5 novembre 2020 par laquelle la ministre de la transition écologique et solidaire a refusé de l'autoriser à utiliser le titre de paysagiste concepteur ;
3°) d'enjoindre à la ministre de la transition écologique et solidaire de l'autoriser à utiliser le titre de paysagiste concepteur ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- il détient un diplôme aujourd'hui reconnu au niveau " bac + 5 " ;
- le décret du 28 avril 2017 et l'arrêté du 28 août 2017 instaurent une rupture d'égalité entre diplômés ;
- la liste des diplômes qui sanctionnent une formation à la conception paysagère figurant à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017 ne constitue pas la " liste d'établissement de formation agréé dans les conditions fixées par voie réglementaire " prévue par le législateur ;
- la décision est entachée d'une erreur de droit dès lors que les termes de la décision montrent qu'il n'a été tenu compte que de son expérience professionnelle et non de sa formation ;
- la période de trois ans pendant laquelle les personnes qui ne remplissent pas les conditions de diplôme fixées par le pouvoir réglementaire peuvent demander à être autorisées à utiliser le titre de paysagiste concepteur n'a pas été prévue par le législateur ;
- les critères de compétence fixés à l'annexe de l'arrêté du 9 janvier 2015 relatif à la formation conduisant au diplôme d'Etat de paysagiste présentent de fortes similitudes avec ceux fixés à l'annexe de l'arrêté susvisé du 28 août 2017.
La requête a été communiquée à la ministre de la transition écologique et solidaire, qui n'a pas produit de mémoire en défense.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 ;
- le décret n° 2017-673 du 28 avril 2017 ;
- l'arrêté du 28 août 2017 fixant les conditions de demande et de délivrance de l'autorisation d'utiliser le titre de paysagiste concepteur des personnes mentionnées au décret n° 2017-673 du 28 avril 2017 relatif à l'utilisation du titre de paysagiste concepteur ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Lusset, rapporteur,
- et les conclusions de M. Denizot, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Par un courrier du 7 août 2020, M. B..., titulaire depuis 2007 du diplôme d'architecture paysagiste délivré par l'École supérieure d'architecture des jardins (ESAJ), a demandé à être autorisé à utiliser le titre de paysagiste concepteur, institué par l'article 174 de la loi du 8 août 2016. Par une décision du 5 novembre 2020, la ministre de la transition écologique et solidaire a rejeté sa demande. M. B... relève appel du jugement du 16 novembre 2021 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cette décision.
Sur le bien-fondé du jugement :
2. Aux termes de l'article 174 de la loi du 8 août 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages : " Seuls peuvent utiliser le titre paysagistes concepteurs, dans le cadre de leur exercice professionnel, les personnes titulaires d'un diplôme, délivré par un établissement de formation agréé dans des conditions fixées par voie réglementaire, sanctionnant une formation spécifique de caractère culturel, scientifique et technique à la conception paysagère. / Pour bénéficier de ce titre, les praticiens en exercice à la date de publication de la présente loi doivent satisfaire à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires du diplôme mentionné au premier alinéa ".
3. Aux termes de l'article 1er du décret du 28 avril 2017 relatif à l'utilisation du titre de paysagiste concepteur : " Peuvent être autorisés à utiliser, dans le cadre de leur exercice professionnel, le titre de paysagiste concepteur les personnes titulaires d'un diplôme qui sanctionne une formation spécifique de caractère culturel, scientifique et technique à la conception paysagère d'une durée minimale de cinq années après le baccalauréat pour laquelle un dispositif d'évaluation nationale est prévu, et qui figure sur une liste fixée par arrêté conjoint des ministres chargés de la politique du paysage, de l'enseignement supérieur, de l'agriculture et de la culture ". Cette liste est fixée à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017 susvisé. Aux termes de l'article 3 de ce décret : " Il est créé, pour une durée de trois ans, une commission consultative chargée d'émettre un avis sur l'utilisation, par les personnes mentionnées aux articles 4 et 9 du présent décret, du titre de paysagiste concepteur, compte tenu de leur formation ou de leur expérience professionnelle. (...) ". Aux termes de l'article 9 du même décret : " Les personnes qui, à la date de publication de la loi n° 2016-1087 du 8 août 2016 susvisée, exerçaient une activité de conception paysagère sans remplir les conditions prévues à l'article 1er peuvent, pendant une période de trois ans à compter de l'entrée en vigueur du présent décret, demander à être autorisées à utiliser le titre de paysagiste concepteur lorsqu'elles possèdent un diplôme sanctionnant une formation spécifique de caractère culturel, scientifique et technique à la conception paysagère autre que celui prévu à l'article 1er ou lorsqu'elles justifient d'une expérience professionnelle minimale d'un an dans le domaine de la conception paysagère. / La demande est présentée, dans les conditions prévues aux articles 2 et 3, au ministre chargé de la politique du paysage, qui statue après avis de la commission consultative pour l'utilisation du titre de paysagiste concepteur. / Les critères d'exigence relatifs au diplôme, au contenu des formations y conduisant et à l'expérience professionnelle sont fixés par arrêté conjoint des ministres chargés de la politique du paysage, de l'enseignement supérieur, de l'agriculture et de la culture ". Les critères mentionnés au dernier alinéa de l'article précité sont fixés à l'article 2 de l'arrêté du 28 août 2017 fixant les conditions de demande et de délivrance de l'autorisation d'utiliser le titre de paysagiste concepteur des personnes mentionnées au décret n° 2017-673 du 28 avril 2017 relatif à l'utilisation du titre de paysagiste concepteur.
4. Il résulte de l'ensemble des dispositions précitées que, pour l'application de
l'article 174 de la loi du 8 août 2016 qui institue le titre de paysagiste concepteur, le pouvoir réglementaire a prévu que, dans le cadre de l'article 1er du décret du 28 avril 2017, l'autorisation d'utiliser ce titre était délivrée à toute personne justifiant détenir l'un des diplômes mentionnés à
l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017 et que, avant le 20 septembre 2020, les personnes exerçant à la date du 9 août 2016 une activité de conception paysagère sans toutefois détenir l'un de ces diplômes pouvaient, dans le cadre de l'article 9 du même décret, demander au ministre chargé de la politique du paysage à être autorisées à utiliser ce titre. Lorsque la situation du demandeur relève des dispositions de l'article 9 précité, le ministre se prononce sur la demande après avis d'une commission consultative ad hoc prévue à l'article 3 du décret du 28 avril 2017, compte tenu de la formation et de l'expérience professionnelle dont justifie l'intéressé.
5. En premier lieu, les diplômes listés par l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017 sanctionnent une formation à la conception paysagère qui confère le grade de master après cinq ans d'études après le baccalauréat et qui fait l'objet d'un dispositif d'évaluation nationale. Il ressort des pièces du dossier que le diplôme de l'ESAJ obtenu par M. B... en 2007 sanctionne une formation de quatre années après le baccalauréat, ainsi que le requérant le reconnaît lui-même dans sa requête. La circonstance que l'ESAJ délivre désormais un diplôme de niveau " bac +5 " est sans incidence sur le fait que le requérant détient un diplôme qui ne lui confère pas le grade de master. Il s'ensuit que M. B... n'est pas placé dans la même situation que les titulaires des diplômes de master délivrés par les établissements d'enseignement supérieur français, et qu'il était ainsi loisible au pouvoir réglementaire d'organiser des modalités d'autorisation de l'utilisation du titre de paysagiste concepteur différentes entre les titulaires de diplômes de master et les professionnels en exercice ne détenant pas un tel diplôme. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que le décret du 28 avril 2017 et l'arrêté du 28 août 2017 méconnaissent le principe d'égalité de traitement entre les candidats doit être écarté.
6. En deuxième lieu, le moyen selon lequel la liste des diplômes visés à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017 ne saurait constituer la liste des établissements de formation agréés dans des conditions fixées par voie réglementaire tel que cela est prévu à l'article 174 de la loi du 8 août 2016 n'est pas assorti des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé.
7. En troisième lieu, il ressort des termes de la décision contestée que la ministre de la transition écologique, éclairée par l'avis du 16 septembre 2020 de la commission consultative pour la délivrance du titre de paysagiste concepteur, et au vu du contenu du dossier déposé par M. B..., au sein duquel il est constant que figurait notamment les diplômes détenus par ce dernier, a estimé que le requérant ne démontrait pas posséder toutes les capacités nécessaires et attendues d'un paysagiste concepteur telles que mentionnées par l'arrêté du 28 août 2017. Il ne ressort ainsi pas des pièces du dossier que, contrairement à ce que soutient le requérant, la ministre n'aurait pris en compte, pour rejeter sa demande, que son expérience professionnelle et non sa formation. Le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise la ministre à cet égard doit, par suite, être écarté.
8. En quatrième lieu, l'article 174 de la loi du 8 août 2016 prévoit que pour pouvoir bénéficier du titre de concepteur paysagiste, les personnes en exercice " à la date de publication de la présente loi " doivent satisfaire à des conditions de formation ou d'expérience professionnelle analogues à celles des titulaires des diplômes dont la liste a été fixée par l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017. A supposer que le requérant ait entendu exciper de l'illégalité de cet arrêté en tant que celui-ci n'inclut pas l'ESAJ dans la liste des établissements agrées et reconnus par le pouvoir réglementaire, il n'assortit toutefois pas son moyen des précisions suffisantes pour permettre d'en apprécier le bien-fondé.
9. En cinquième lieu, la circonstance invoquée selon laquelle les critères de compétence fixés à l'annexe de l'arrêté du 9 janvier 2015 relatif à la formation conduisant au diplôme d'Etat de paysagiste présentent de fortes similitudes avec ceux fixés à l'annexe de l'arrêté susvisé du 28 août 2017 est, par elle-même, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
10. En sixième et dernier lieu, la circonstance que la commission consultative prévue à l'article 3 du décret du 28 avril 2017 soit composée majoritairement de directeurs d'établissements d'enseignement supérieur du paysage et que les " personnalités qualifiées " qui composent également cette commission entretiendraient des liens avec les établissements publics désignés à l'article 1er de l'arrêté du 28 août 2017 est, en l'absence de toute précision, et alors qu'aucun élément du dossier ne permet de faire présumer que les membres de cette commission se seraient départis de leur obligation d'impartialité et de neutralité, sans incidence sur la légalité de la décision attaquée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques.
Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :
- Mme Ghisu-Deparis, présidente,
- M. Barteaux, président assesseur,
- M. Lusset, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.
Le rapporteur,
Signé : A. Lusset
La présidente,
Signé : V. Ghisu-Deparis
La greffière,
Signé : F. DupuyLa République mande et ordonne au ministre de la transition écologique, de l'énergie, du climat et de la prévention des risques, en ce qui le concerne, ou à tous commissaires de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
N° 22NC00286 2