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05/11/2024 | FRANCE | N°23NC03223

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 4ème chambre, 05 novembre 2024, 23NC03223


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 28 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné en cas d'exécution contrainte.



Par un jugement n° 2301114 du 22 septembre 2023, le tribunal administr

atif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.





Procédure devant la cour :



Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 28 mars 2023 par lequel la préfète de l'Aube a refusé de lui délivrer une carte de séjour temporaire, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il serait susceptible d'être éloigné en cas d'exécution contrainte.

Par un jugement n° 2301114 du 22 septembre 2023, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 27 octobre 2023, M. A..., représenté par Me Mainnevret, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2301114 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne du 22 septembre 2023 ;

2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Aube du 28 mars 2023 ;

3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou,

à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour durant le temps nécessaire à ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au bénéfice de son conseil en application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

en ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

en ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale du fait de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 9° de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

en ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 décembre 2023, la préfète de l'Aube conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 1er février 2024.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Lusset, premier conseiller, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant nigérian né le 2 août 1994, est entré régulièrement en France le 11 novembre 2016 sous couvert d'un visa de court séjour afin de solliciter la reconnaissance de la qualité de réfugié. Sa demande a été rejetée tant par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) que par la Cour nationale du droit d'asile (CNDA) les 7 mars 2018 et 26 août 2019. L'intéressé a alors fait l'objet d'une mesure d'éloignement prise à son encontre par le préfet de l'Aube le 4 septembre 2019. Sa demande de réexamen a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA les 26 octobre 2020 et 6 janvier 2021. Le préfet de l'Aube a adopté à son encontre une deuxième mesure d'éloignement le 9 mars 2021. Dans le dernier état de ses démarches administratives, il a sollicité de la préfète de l'Aube la délivrance d'une carte de séjour temporaire en raison de son état de santé. Par un arrêté du 28 mars 2023, la préfète a refusé de l'admettre au séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours. M. A... relève appel du jugement du 22 septembre 2023 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision portant refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qui, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an (...) / La décision de délivrer cette carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ".

3. Pour refuser à M. A... la délivrance du titre de séjour sollicité, la préfète de l'Aube s'est notamment fondée sur l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 17 janvier 2022 indiquant que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut ne devrait pas entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine.

4. En se bornant à soutenir que les soins nécessités par son état de santé ne sont ni disponibles ni accessibles dans son pays d'origine, M. A... ne conteste pas utilement le motif de la décision attaquée. Au demeurant, le seul certificat médical qu'il produit, qui indique qu'il souffre d'une pathologie cardiaque nécessitant notamment un suivi annuel, n'est pas de nature à établir que l'absence de prise en charge de son état de santé pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de ce que la préfète de l'Aube a méconnu les dispositions de l'article L. 425-9 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. / Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. / L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

6. M. A... fait valoir qu'il est en couple avec une compatriote nigériane avec laquelle il a eu deux enfants, le second étant né en France, qu'il contribue à leur entretien et à leur éducation, que leur scolarisation sera difficile au Nigéria et qu'il garantit la sécurité financière de la famille. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, en particulier de l'attestation du 23 février 2023 du service intégré d'accueil et d'orientation, que la relation entre le requérant et sa compagne se caractériserait par son intensité et sa stabilité, les intéressés ne vivant notamment pas ensemble. En outre, sa compagne, dont la demande d'asile a été rejetée, est en situation irrégulière sur le territoire français et a vocation, comme lui, à retourner au Nigéria afin d'y reconstituer leur cellule familiale en compagnie de leurs jeunes enfants où il n'est pas établi qu'ils ne pourraient pas y être scolarisés. Dans ces conditions, et compte tenu notamment de ses conditions de séjour en France, la décision contestée n'a pas porté au droit du requérant au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, compte tenu de ce qui vient d'être dit, M. A... n'établit pas que la décision par laquelle la préfète de l'Aube lui a refusé un titre de séjour est illégale. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

8. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 611-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa version alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une décision portant obligation de quitter le territoire français : (...) 9° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". Eu égard à ce qui a été dit au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré

de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

9. En troisième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

10. Aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

11. D'une part, M. A... ne produit aucun élément de nature à établir qu'il ne pourrait pas bénéficier au Nigéria de traitements appropriés à son état de santé. D'autre part, s'il soutient qu'il encourt des risques de traitements inhumains ou dégradants, il n'établit pas la réalité des risques personnels auxquels il serait exposé en cas de retour dans son pays d'origine. D'ailleurs, sa demande d'asile a été rejetée par l'OFPRA et la CNDA. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté de la préfète de l'Aube du 28 mars 2023. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des frais d'instance, doivent être également rejetées.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au ministre de l'intérieur et à Me Mainnevret.

Copie en sera adressée à la préfète de l'Aube.

Délibéré après l'audience du 8 octobre 2024, à laquelle siégeaient :

- Mme Ghisu-Deparis, présidente,

- M. Barteaux, président assesseur,

- M. Lusset, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 novembre 2024.

Le rapporteur,

Signé : A. LussetLa présidente,

Signé : V. Ghisu-Deparis

La greffière,

Signé : F. Dupuy

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

F. Dupuy

2

N° 23NC03223


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 23NC03223
Date de la décision : 05/11/2024
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme GHISU-DEPARIS
Rapporteur ?: M. Arnaud LUSSET
Rapporteur public ?: M. DENIZOT
Avocat(s) : MAINNEVRET - MALBLANC

Origine de la décision
Date de l'import : 10/11/2024
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2024-11-05;23nc03223 ?
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