Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B... a demandé au tribunal administratif de Châlons-en-Champagne d'annuler l'arrêté du 5 octobre 2023 par lequel la préfète de l'Aube a rejeté sa demande d'admission exceptionnelle au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 2302571 du 9 avril 2024, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 22 mai 2024, M. A..., représenté par Me Malblanc de la SELARL Mainnevret-Malblanc Avocats Asssociés, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2302571 du 9 avril 2024 du tribunal administratif de Châlons-en-Champagne ;
2°) d'annuler l'arrêté de la préfète de l'Aube du 5 octobre 2023 ;
3°) d'enjoindre à la préfète de l'Aube de réexaminer sa situation ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros, au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- la décision portant refus de séjour méconnaît les dispositions des articles L. 435-1 et L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français sera annulée en conséquence de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ;
- la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un mémoire, enregistré le 7 août 2024, qui n'a pas été communiqué, le préfet de l'Aube, représenté par le cabinet Actis Avocats, conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 9 juillet 2024, la clôture d'instruction a été fixée au 12 août 2024.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 26 septembre 2024.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. Lusset a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant congolais, déclare être entré régulièrement sur le territoire français le 29 janvier 2015 sous couvert d'un visa de court séjour. Il a bénéficié, de la part des services préfectoraux de la Seine-Saint-Denis, de la délivrance d'une carte de séjour " vie privée et familiale " valable jusqu'au 18 juin 2016 puis renouvelée jusqu'au 1er février 2018. Après le refus du renouvellement de ce titre et l'édiction, à son encontre, d'une première décision portant obligation de quitter le territoire le 23 juillet 2019, M. A... s'est maintenu irrégulièrement sur le territoire français. Le 30 mai 2023, il a sollicité de la préfecture de l'Aube son admission exceptionnelle au séjour. Par un arrêté du 5 octobre 2023, la préfète de l'Aube a rejeté sa demande d'admission au séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le requérant relève appel du jugement du 9 avril 2024 par lequel le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la décision portant refus d'admission au séjour :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1 ".
3. M. A... fait valoir qu'il est entré en France en janvier 2015 et qu'il s'est marié avec une ressortissante congolaise le 15 juillet 2023, qui est mère de plusieurs enfants et réside régulièrement en France. Toutefois, en dépit de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français, qui tient au demeurant à ce qu'il n'a pas déféré à une précédente mesure d'éloignement, le requérant ne justifie pas d'une intégration particulière et ne se prévaut d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que son épouse le suive au Congo, pays dont elle a, comme lui, la nationalité et où il a vécu jusqu'à l'âge de 39 ans. En outre, s'il se prévaut des liens avec sa sœur, qui séjourne régulièrement en France depuis 2012, il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses quatre enfants. Dans ces conditions, et nonobstant ses efforts d'intégration, notamment par la participation à des activités bénévoles, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision lui refusant la délivrance d'un titre de séjour aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir peut se voir délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié ", " travailleur temporaire " ou " vie privée et familiale ", sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Lorsqu'elle envisage de refuser la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par un étranger qui justifie par tout moyen résider habituellement en France depuis plus de dix ans, l'autorité administrative est tenue de soumettre cette demande pour avis à la commission du titre de séjour prévue à l'article L. 432-14. Les modalités d'application du présent article sont définies par décret en Conseil d'Etat. ".
5. Les éléments énoncés au point 3 dont se prévaut le requérant pour demander son admission exceptionnelle au séjour ne suffisent pas à caractériser un motif exceptionnel ou une considération humanitaire au sens des dispositions précitées. Par suite, il n'est pas fondé à soutenir que la préfète de l'Aube aurait méconnu les dispositions de l'article L. 435-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
6. En premier lieu, il résulte de ce qui précède que le moyen soulevé à l'encontre de la décision portant obligation de quitter le territoire français et tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant refus de séjour ne peut qu'être écarté.
7. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 3 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
8. En troisième et dernier lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ".
9. D'une part, ainsi qu'il a été dit au point 3, les quatre enfants de M. A... résident au Congo. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait tissé avec les enfants de sa compagne des liens d'une intensité telle que la décision en litige méconnaîtrait leur intérêt supérieur. Il s'ensuit que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".
11. Les éléments produits par M. A... dans la présente instance, tirés du fait qu'il souffre des conséquences d'une poliomyélite contractée dans son enfance, ne permettent pas d'établir la réalité des craintes dont il se prévaut de subir des traitements inhumains ou dégradants en cas de retour au Congo. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision fixant le pays de destination méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.
12. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Châlons-en-Champagne a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 octobre 2023 de la préfète de l'Aube. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées au titre des frais d'instance, doivent être également rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Aube.
Délibéré après l'audience du 11 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Barteaux, président,
- M. Lusset, premier conseiller,
- Mme Roussaux, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 1er avril 2025.
Le rapporteur,
Signé : A. LussetLe président,
Signé : S. Barteaux
La greffière,
Signé : F. Dupuy
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
F. Dupuy
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N° 24NC01300