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03/04/2025 | FRANCE | N°22NC00726

France | France, Cour administrative d'appel de NANCY, 1ère chambre, 03 avril 2025, 22NC00726


Vu la procédure suivante :



Procédure contentieuse antérieure :



Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'une part, d'annuler l'arrêté n° MCC-42908 du 23 août 2019 par lequel le ministre de la culture a procédé à son recrutement et à son classement au 1er septembre 2019 dans le 1er échelon du corps des maîtres de conférences de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture avec une ancienneté dans l'échelon de 11 mois et 29 jours en qualité de stagiaire, d'autre part, d'annuler l'arrêté n°

MCC-42910 du 23 août 2019 par lequel le ministre de la culture l'a classée au 2 septembre 2019...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'une part, d'annuler l'arrêté n° MCC-42908 du 23 août 2019 par lequel le ministre de la culture a procédé à son recrutement et à son classement au 1er septembre 2019 dans le 1er échelon du corps des maîtres de conférences de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture avec une ancienneté dans l'échelon de 11 mois et 29 jours en qualité de stagiaire, d'autre part, d'annuler l'arrêté n° MCC-42910 du 23 août 2019 par lequel le ministre de la culture l'a classée au 2 septembre 2019 au 2ème échelon du corps des maîtres de conférences de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture, ensemble la décision implicite par laquelle le ministre de la culture a rejeté le recours gracieux réceptionné le 24 octobre 2019 contre ces deux arrêtés, d'enjoindre à la ministre de la culture de réexaminer sa situation, de procéder à un nouveau classement et de reconstituer sa carrière à compter du 1er septembre 2019, dans un délai de trois mois et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2001386 du 20 janvier 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 21 mars 2022 et le 21 avril 2022, Mme A..., représentée par la SCP Thouvenin, Coudray, Grevy, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 20 janvier 2022 ;

2°) d'annuler l'arrêté n° MCC-42908 du 23 août 2019 par lequel le ministre de la culture a procédé à son recrutement et à son classement au 1er septembre 2019 dans le 1er échelon du corps des maîtres de conférences de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture avec une ancienneté dans l'échelon de 11 mois et 29 jours en qualité de stagiaire ;

3°) d'annuler l'arrêté n° MCC-42910 du 23 août 2019 par lequel le ministre de la culture l'a classée au 2 septembre 2019 au 2ème échelon du corps des maîtres de conférences de 2ème classe des écoles nationales supérieures d'architecture ;

4°) d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de la culture a rejeté son recours gracieux réceptionné le 24 octobre 2019 contre ces deux arrêtés ;

5°) d'enjoindre à la ministre de la culture de réexaminer sa situation, de procéder à un nouveau classement et de reconstituer sa carrière à compter du 1er septembre 2019, dans un délai de trois mois ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les décisions sont entachées de vice de procédure faute d'avoir été précédées de la consultation du conseil national des enseignants chercheurs des écoles nationales supérieures d'architecture ;

- c'est à tort que le tribunal administratif a écarté le moyen soulevé par la voie de l'exception tiré de ce que le décret du 15 février 2018 méconnaît le 4eme alinéa de l'article L. 412-1 du code de la recherche à défaut d'avoir prévu pour le classement lors de l'entrée dans le corps les modalités de prise en compte de l'expérience professionnelle de recherche sanctionnée par le doctorat ;

- c'est à tort que le tribunal a écarté les moyens tirés de ce que le classement qui a été opéré procède d'une erreur de fait et d'une erreur de droit dans l'application des dispositions des articles 16 et 18 du décret du 15 février 2018 ; aucune mention de ce décret n'interdit l'application cumulative de ses articles 16 et 18 à la situation d'un même agent entrant dans le corps après avoir exercé des fonctions dans le secteur public et le secteur privé, de même qu'après avoir préparé et obtenu un doctorat ; en l'absence d'organisation des modalités de prise en compte du temps passé à la recherche sanctionnée par un doctorat pour le classement lors de l'entrée dans le corps, la lacune résultant de l'illégalité du décret du 15 février 2018 doit être comblée par la prise en compte de l'intégralité de la durée de l'expérience professionnelle antérieure résultant de la formation à la recherche et de la recherche sanctionnée par la délivrance du diplôme de doctorat ; l'administration aurait dû prendre en compte sa période de recherche du 1er octobre 2010 au 30 septembre 2013 tout comme les fractions réglementaires correspondant à l'exercice de fonctions dans le secteur privé de niveau équivalent à celui des fonctions exercées dans le corps ; son ancienneté aurait ainsi dû être conservée et à défaut le ministre a commis une erreur de droit ;

- par voie d'exception, le décret du 15 février 2018 crée une rupture d'égalité par rapport aux maîtres de conférences relevant du ministre de l'enseignement supérieur car il institue des règles moins avantageuses pour la prise en compte des services accomplis antérieurement en vue du classement dans le corps des maitres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture ;

- par voie d'exception les règles de classement prévues par le décret du 15 février 2018 portent atteinte au droit de toute personne au respect de ses biens garanti par l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, combiné avec l'article 14 de la convention ;

- par voie d'exception le décret du 15 février 2018 méconnaît le principe d'égalité en tant que la fraction reprise des activités antérieures de niveau équivalent dans le secteur privé est inférieure à celle des services précédents en qualité d'agent public non titulaire de catégorie A ;

- par voie d'exception le décret du 15 février 2018 est entaché d'erreur manifeste d'appréciation en n'autorisant pas le cumul du bénéfice des dispositions de ses articles 16 et 18.

Par un mémoire en défense enregistré le 7 février 2024, le ministre de la culture conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et son premier protocole additionnel ;

- le code de l'éducation ;

- le code de la recherche ;

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le décret n° 2018-105 du 15 février 2018 portant statut particulier du corps des professeurs et du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Guidi, présidente,

- et les conclusions de Mme Antoniazzi, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. A la suite de sa réussite au concours externe pour l'accès au corps des maîtres de conférences des Ecoles nationales supérieures d'architecture (ENSA) organisé au titre de l'année 2019, Mme A... a été recrutée par arrêté du ministre de la culture du 23 août 2019 dans le corps des maîtres de conférences de 2ème classe des ENSA comme stagiaire à compter du 1er septembre 2019 et affectée à l'ENSA de Strasbourg dans le champ disciplinaire " Ville et territoires " et a bénéficié d'un reclassement au 1er échelon de la 2ème classe du corps d'accueil à compter du 1er septembre 2019. Par un second arrêté du 23 août 2019, elle a bénéficié d'un avancement au 2ème échelon à compter du 2 septembre 2019. Mme A... relève appel du jugement du 20 janvier 2022 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés et de la décision de rejet de son recours gracieux.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative : " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience ". Aux termes de l'article R. 751-2 du même code : " Les expéditions des décisions sont signées et délivrées par le greffier en chef ou, au Conseil d'Etat, par le secrétaire du contentieux ". Il ressort des pièces du dossier de première instance que le jugement attaqué a été signé conformément aux prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que l'ampliation du jugement qui a été notifiée à Mme A... ne comporte pas ces signatures est sans incidence sur la régularité de ce jugement.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article 30 du décret du 15 février 2018 portant statut particulier du corps des professeurs et du corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture : " Les maîtres de conférences sont recrutés par concours ouverts par établissement, en vue de pourvoir un ou plusieurs emplois d'une même discipline vacants parmi les candidats inscrits sur une liste de qualification aux fonctions de maître de conférences des écoles d'architecture établie par le conseil national des enseignants-chercheurs des écoles nationales supérieures d'architecture. ". Aux termes de l'article 11 de ce décret : " Dans chaque établissement, un comité de sélection est institué en vue du recrutement des membres des corps mentionnés à l'article 1er par voies de concours, de détachement et de mutation prévues aux articles 25, 27, 30 et 47. (...) ". Aux termes de l'article 13 : " Le comité de sélection examine les dossiers (...) des candidats à cette nomination par détachement et par recrutement au concours parmi les personnes inscrites sur la liste de qualification aux fonctions, selon le cas, de maître de conférences ou de professeur des écoles nationales supérieures d'architecture. (...) Après avoir procédé aux auditions, le comité de sélection délibère sur les candidatures et, par un avis motivé unique portant sur l'ensemble des candidats, arrête la liste, classée par ordre de préférence, de ceux qu'il retient. ".

4. D'autre part, aux termes de l'article 18 de ce même décret : " Lorsque des personnes sont nommées dans l'un des corps mentionnés à l'article 1er après avoir exercé dans des organismes privés des fonctions d'un niveau équivalent à celui des fonctions exercées par les membres de ce corps, une fraction de la durée de ces services est prise en compte pour le calcul de l'ancienneté des intéressés dans ce corps (...). Le niveau de fonctions est apprécié par le conseil national des enseignants-chercheurs des écoles nationales supérieures d'architecture. (...) ".

5. La reprise partielle d'ancienneté contestée par Mme A... repose sur le principe de non cumul de l'ancienneté antérieurement acquise dans le secteur privé et dans le secteur public et sur l'absence de droit à une reprise intégrale des services à retenir pour son classement dans le corps des maîtres de conférences des écoles nationale supérieures d'architecture. Ces motifs sont étrangers à l'appréciation de l'équivalence des fonctions exercées antérieurement dans le secteur privé avec celles de maître de conférences des ENSA qui, aux termes de l'article 18 précité du décret du 15 février 2018 nécessite la consultation du conseil national des enseignants-chercheurs des ENSA. Par suite, le moyen tiré de l'absence de consultation de cette commission sur ce point doit être écarté comme inopérant.

6. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 412-1 du code de la recherche, dans sa rédaction résultant de sa modification par la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l'enseignement supérieur et à la recherche : " (...) Les concours et procédures de recrutement dans les corps et cadres d'emplois de catégorie A relevant du statut général de la fonction publique sont adaptés, dans les conditions fixées par les statuts particuliers des corps et cadres d'emplois concernés, afin d'assurer la reconnaissance des acquis de l'expérience professionnelle résultant de la formation à la recherche et par la recherche lorsqu'elle a été sanctionnée par la délivrance du doctorat. / Les statuts particuliers de chaque corps ou cadre d'emplois prévoient les modalités de prise en compte de cette expérience professionnelle pour le classement effectué lors de la nomination ou de la titularisation en leur sein, sans distinguer les modalités contractuelles de réalisation des recherches ayant été sanctionnées par la collation du grade de docteur. / (...) ".

7. Aux termes de l'article 16 du décret du 15 février 2018 : " Les personnes nommées dans [le corps des maîtres de conférences des ENSA] (...) qui, avant leur nomination, avaient la qualité d'agent non titulaire de l'État, des collectivités locales ou de leurs établissements publics sont classées à un échelon de la 2ème classe de ce corps déterminé en prenant en compte, sur la base des durées de service fixées pour l'avancement dans chacun des échelons de ce corps, une fraction de leur ancienneté de service, dans les conditions suivantes : 1° Les services accomplis dans un emploi du niveau de la catégorie A sont retenus à raison de la moitié de leur durée jusqu'à douze ans et à raison des trois quarts au-delà de cette durée (...) / Les dispositions du présent article sont applicables aux agents qui possédaient la qualité d'agent non titulaire pendant au moins deux mois au cours de la période de douze mois précédant la date de clôture des inscriptions aux concours (...) / Les dispositions du présent article ne peuvent avoir pour effet de placer les intéressés dans une situation plus favorable que celle résultant du classement à un échelon comportant un traitement égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui perçu dans le dernier emploi d'agent non titulaire ". Aux termes de l'article 18 du même décret : " Lorsque des personnes sont nommées dans [le corps des maîtres de conférences des ENSA] (...) après avoir exercé dans des organismes privés des fonctions d'un niveau équivalent à celui des fonctions exercées par les membres de ce corps, une fraction de la durée de ces services est prise en compte pour le calcul de l'ancienneté des intéressés dans ce corps, à raison du tiers de la durée de ces services si celle-ci est inférieure à douze ans et de la moitié de cette durée si elle excède douze ans (...) Les intéressés sont classés à un échelon de la 2ème classe du corps déterminé en fonction des durées de service fixées pour l'avancement à l'ancienneté dans chacun des échelons ".

8. Mme A... excipe premièrement de l'illégalité des articles 16 et 18 du décret du 15 février 2018 en tant qu'il n'a pas prévu pour le classement lors de l'entrée dans le corps des maitres de conférences des ENSA les modalités de prise en compte de l'expérience professionnelle de recherche sanctionnée par le diplôme de doctorat. Les dispositions l'article 16 du décret du 15 février 2018, qui prennent notamment en compte les services accomplis dans un emploi du niveau de la catégorie A, comme celles de son article 18, qui intéressent les personnes ayant exercé dans des organismes privés des fonctions d'un niveau équivalent à celui des fonctions détenues par les membres du corps des maîtres de conférences des ENSA, couvrent nécessairement l'expérience professionnelle des doctorants qui ont conduit des travaux de recherche sous contrat doctoral de droit public ou de droit privé, le calcul des services de l'agent devant, le cas échéant, la prendre en considération. Dès lors, le moyen tiré par voie d'exception de ce la méconnaissance par les dispositions précitées du décret du 15 février 2018 de l'article L. 412-1 du code de la recherche doit être écarté.

9. Mme A... excipe deuxièmement de l'illégalité du décret du 15 février 2018 qui méconnaîtrait le principe d'égalité en tant que la fraction reprise des activités antérieures de niveau équivalent dans le secteur privé est inférieure à celle de ses services précédents en qualité d'agent public non titulaire du niveau de la catégorie A. Toutefois, il est constant que l'intéressée a été classée dans le corps des maitres de conférences des ENSA en application de l'article 16 du décret du 15 février 2018 applicable aux personnes qui ont exercé des fonctions d'agent public non titulaire. Par suite, elle ne saurait utilement exciper de l'illégalité de l'article 18 de ce même décret en tant que les conditions de classement et de reprise d'ancienneté des personnes ayant eu une activité antérieure dans le secteur privé avant leur nomination en tant que maître de conférences des ENSA serait moins favorables que celles prévues par les règles applicables aux personnes ayant exercé antérieurement des fonctions d'agent public non titulaire.

10. Troisièmement, si le décret du 15 février 2018 ne permet pas le cumul de la prise en compte des activités professionnelles antérieures privées et publiques et ne prévoit pas une fraction identique pour la pris en compte de chacun de ces deux types d'activité professionnelle antérieure pour le reclassement dans les fonctions de maître de conférences des ENSA, ce choix, contrairement à ce que soutient Mme A... par voie d'exception, n'apparaît pas comme entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

11. En troisième lieu, Mme A... soutient que le ministre de la culture a commis une erreur de fait et une erreur de droit dans la prise en compte de son expérience professionnelle en ne lui permettant pas de bénéficier d'un avancement au titre d'une ancienneté conservée prenant cumulativement en compte plus de la moitié des services public d'agent non titulaire, un tiers de la durée des activités privées et la totalité du temps qu'elle a consacré à la recherche dans le cadre de la préparation de son doctorat. D'une part, aucune disposition du décret du 15 février 2018 ne prévoit une possibilité de cumul entre les situations alternatives prévues par ses articles 16 et 18 dans lesquelles les services accomplis antérieurement par l'intéressée peuvent être pris en compte pour son classement et la détermination de son ancienneté en vue de son avancement par les arrêtés du 23 août 2019. D'autre part, l'administration fait valoir en défense que l'hypothèse de reclassement la plus favorable a été retenue au bénéfice de Mme A..., qui a accompli des services dans le secteur public et dans le secteur privé et qu'il a été tenu compte d'une ancienneté dans l'échelon de 11 mois et 29 jours pour fixer son droit à avancement au 2 septembre 2019. La requérante ne conteste pas que, comme l'a estimé l'administration, la prise en compte des services qu'elle a accomplis en qualité d'agent public non titulaire constituait l'hypothèse la plus favorable, y compris après application des dispositions du dernier alinéa précité de l'article 16, selon lesquelles les intéressés ne peuvent être placés " dans une situation plus favorable que celle résultant du classement à un échelon comportant un traitement égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui perçu dans le dernier emploi d'agent non titulaire ". S'agissant enfin de la prise en compte de la période consacrée à la recherche sanctionnée par la délivrance du doctorat, il résulte de ce qui a été dit au point 7 que le ministre n'a pas commis d'erreur de droit en ne les prenant pas spécifiquement en compte. Par suite, le moyen tiré de ce que les arrêtés du 23 août 2019 sont entachés d'erreur de droit et d'erreur de fait dans l'application des dispositions précitées des articles 16 et 18 du décret du 15 février 2018 doit être écarté.

12. En quatrième lieu, eu égard à la portée des dispositions du décret du 15 février 2018, qui ont pour objet de définir les modalités de classement dans le corps des maîtres de conférences des écoles nationales supérieures d'architecture, sans édicter de normes applicables de manière générale à plusieurs corps de fonctionnaires, la requérante ne saurait soutenir qu'elles créent une rupture d'égalité entre les agent relevant de ce corps et ceux relevant du corps des maîtres de conférences relevant du ministre chargé de l'enseignement supérieur, régi par le décret n° 84-431 du 6 juin 1984 et le décret n° 2009-462 du 23 avril 2009.

13. En cinquième lieu, aux termes de l'article 1er du premier protocole additionnel à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens. Nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ". Aux termes de l'article 14 de cette convention : " La jouissance des droits et libertés reconnus dans la présente Convention doit être assurée, sans distinction aucune, fondée notamment sur le sexe, la race, la couleur, la langue, la religion, les opinions politiques ou toutes autres opinions, l'origine nationale ou sociale, l'appartenance à une minorité nationale, la fortune, la naissance ou toute autre situation ".

14. Il n'existe aucun principe ou règle imposant, lors de la titularisation dans un corps, de reprendre tout ou partie de l'ancienneté antérieure pour déterminer l'ancienneté dans le nouveau corps. Par suite, le fait que les dispositions du décret du 15 février 2018 ne permettent pas une prise en compte cumulée des services précédemment accomplis et interdisent d'être placé dans une situation plus favorable que celle résultant du classement à un échelon comportant un traitement égal ou, à défaut, immédiatement supérieur à celui perçu dans le dernier emploi d'agent non titulaire, ne saurait permettre de reconnaître l'existence d'une espérance légitime d'obtenir une somme d'argent et, dès lors, d'un bien au sens de l'article 1er du premier protocole additionnel. Par ailleurs, ne pouvant se prévaloir d'un bien dont le respect serait garanti par ces stipulations, Mme A... ne peut utilement invoquer celles de l'article 14 de la même convention, qui prohibent les discriminations dans la jouissance des seuls droits et libertés que cette convention reconnaît.

15. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du 20 janvier 2022, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté sa demande.

Sur les frais d'instance :

16. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que les conclusions en annulation de la requête doivent être rejetées. Par voie de conséquence, les conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à la ministre de la culture.

Délibéré après l'audience du 13 mars 2025, à laquelle siégeaient :

- M. Wallerich, président de chambre,

- Mme Guidi, présidente-assesseure,

- Mme Barrois, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 avril 2025.

La rapporteure,

Signé : L. GuidiLe président,

Signé : M. Wallerich

La greffière,

Signé : I. Legrand

La République mande et ordonne à la ministre de la culture en ce qui la concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

I. Legrand

2

N°22NC00726


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de NANCY
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 22NC00726
Date de la décision : 03/04/2025
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. WALLERICH
Rapporteur ?: Mme Laurie GUIDI
Rapporteur public ?: Mme ANTONIAZZI
Avocat(s) : SARL THOUVENIN - COUDRAY - GREVY

Origine de la décision
Date de l'import : 13/04/2025
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel;arret;2025-04-03;22nc00726 ?
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