Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 16 novembre 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, une carte de résident en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français sur le fondement de l'article L. 423-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à titre subsidiaire, un titre de séjour pour soins, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme D... C..., épouse B... a demandé au tribunal administratif de Strasbourg d'annuler la décision du 16 novembre 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour, d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, une carte de résident en qualité d'ascendant à charge d'un ressortissant français sur le fondement de l'article L. 423-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, à titre subsidiaire, un titre de séjour pour soins, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2300391-2300392 du 27 septembre 2023, le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
Procédure devant la cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 23NC03452 le 27 novembre 2023, M. A... B..., représenté par Me André, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 septembre 2023 ;
2°) d'annuler la décision du 16 novembre 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour ;
3) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'exécuter l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ; elle méconnaît son droit à un niveau de vie suffisant prévu par l'article 25 de la déclaration universelle des droits de l'homme et l'article 11 du pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 janvier 2024, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 23NC03453 le 27 novembre 2023, Mme D... C... épouse B..., représentée par Me André, demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 27 septembre 2023 ;
2°) d'annuler la décision du 16 novembre 2022 par laquelle le préfet de la Moselle a refusé de l'admettre au séjour ;
3) d'enjoindre au préfet de la Moselle de lui délivrer, sous astreinte de 500 euros par jour de retard, d'exécuter l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;
- la décision porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de la vie privée et familiale et est entachée d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur sa situation personnelle ; elle méconnaît son droit à un niveau de vie suffisant prévu par l'article 25 de la déclaration universelle des droits de l'homme et l'article 11 du pacte international relatif aux droits économiques sociaux et culturels.
Par un mémoire en défense enregistré le 3 janvier 2024, le préfet de la Moselle conclut au rejet de la requête.
Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la déclaration universelle des droits de l'homme ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n°91-647 du 10 juillet 1991 ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Guidi, présidente, a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. et Mme B..., ressortissants turcs nés respectivement en 1953 et 1957, sont entrés en France le 10 septembre 2021 en possession de leur passeport revêtu d'un visa de courte durée. Le 21 mars 2022, ils ont sollicité une carte de résident en qualité d'ascendants à charge d'un ressortissant français sur le fondement de l'article L. 423-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. et Mme B... relèvent appel du jugement du 27 septembre 2023 par lequel le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation des décisions du préfet de la Moselle refusant de leur délivrer un titre de séjour.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. À cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ".
3. Les décisions de refus de titre de séjour opposées à M. et Mme B... mentionnent l'article L. 423-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, retracent les conditions d'entrée en France des requérants et indiquent qu'ils ne justifient pas du visa requis ni d'une situation de dépendance économique réelle à l'égard de leur fille. Elles comportent ainsi l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et sont dès lors suffisamment motivées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation, laquelle ne se confond pas avec le bien-fondé des motifs, doit être écarté.
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 423-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger, parent à charge d'un français et de son conjoint, se voit délivrer une carte de résident d'une durée de dix ans sous réserve de la production du visa de long séjour prévu au 1° de l'article L. 411-1 et de la régularité du séjour ". Il en résulte que le préfet de la Moselle a pu légalement opposer aux époux B... l'absence de visa de long séjour pour refuser de leur délivrer la carte de résident prévue par les dispositions précitées, la détention d'un tel visa constituant une condition de fond à la délivrance de ce titre de séjour. Par suite, alors même qu'ils bénéficieraient d'un soutien économique de la part de leur fille et de son conjoint, ressortissants français, les époux B... ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de la Moselle, en leur opposant ce motif qui suffit à lui seul à justifier le rejet de leur demande, aurait commis une erreur de droit.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Aux termes de l'article L. 423-23 du code de l'entré et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui n'entre pas dans les catégories prévues aux articles L. 423-1, L. 423-7, L. 423-14, L. 423-15, L. 423-21 et L. 423-22 ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, et qui dispose de liens personnels et familiaux en France tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, se voit délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 412-1. Les liens mentionnés au premier alinéa sont appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'étranger, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec sa famille restée dans son pays d'origine. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".
6. Si les époux B... soutiennent s'être régulièrement rendus en France depuis 2012 et s'être établis depuis le mois de septembre 2021 chez leur fille et leur gendre, tous deux ressortissants français, il est néanmoins constant qu'ils ne sont présents sur le territoire français que depuis quatorze mois à la date des décisions de refus de titre de séjour, alors qu'ils ont vécu dans leur pays d'origine jusqu'à l'âge de 68 ans et 64 ans. S'ils se prévalent en outre de liens familiaux intenses avec leur fille et leurs petits-enfants, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'ils seraient dépourvus d'attaches personnelles et familiales en Turquie, où résident deux de leurs enfants ainsi que six frères et sœurs de M. B.... Ils ne justifient pas davantage être significativement insérés dans la société française. Enfin, les stipulations précitées ne garantissent pas aux requérants le droit de choisir le lieu le plus approprié pour développer une vie privée et familiale. Ainsi, les décisions attaquées n'ont pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale des époux B... une atteinte disproportionnée au regard des buts qu'elles poursuivent. Par suite, elles ne méconnaissent pas l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni l'article L. 423-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et ne sont pas davantage entachées d'une erreur manifeste d'appréciation des conséquences sur leur situation personnelle.
7. En quatrième lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Par ailleurs, aux termes de l'article 3 de la déclaration universelle des droits de l'homme et du citoyen : " Tout individu a droit à la vie, à la liberté et à la sureté de sa personne ".
8. Si les requérants soutiennent qu'un retour dans leur pays les expose à des traitements inhumains eu égard à leur vulnérabilité tant économique que médicale, en tout état de cause il n'est aucunement établi que les conséquences des décisions litigieuses les exposeraient à des traitement inhumains ou dégradants. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations précitées ne peuvent qu'être écartés.
9. En cinquième lieu, la méconnaissance des stipulations de l'article 11 du pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, qui ne produisent pas d'effet direct à l'égard des particuliers, ne peut être utilement invoquée.
10. En sixième lieu, la Déclaration universelle des droits de l'homme du 10 décembre 1948 ne faisant pas partie des textes diplomatiques ratifiés par la France dans les conditions fixées à l'article 55 de la Constitution, les requérants ne sauraient utilement invoquer que les décisions refus de titre de séjour qui leur ont été opposées méconnaitraient les stipulations de son article 25.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Strasbourg a rejeté leurs demandes.
12. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, doivent également être rejetées.
D É C I D E :
Article 1er : Les requêtes de M. et Mme B... sont rejetées.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., Mme D... C... épouse B... et au ministre de l'intérieur et des outre-mer.
Copie en sera adressée au préfet de la Moselle.
Délibéré après l'audience du 13 mars 2025, à laquelle siégeaient :
- M. Wallerich, président de chambre,
- Mme Guidi, présidente-assesseure,
-Mme Barrois, première conseillère.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 avril 2025.
La rapporteure,
Signé : L. GuidiLe président,
Signé : M. Wallerich
La greffière,
Signé : I. Legrand
La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous commissaires de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
Pour expédition conforme,
La greffière,
I. Legrand
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N°23NC03452-23NC03453